Cet article Torus archive la mélancolie des temps modernes provient de Manifesto XXI.
Imaginée en 2016 par Station Gare des Mines, le rendez-vous annuel
Station Électronique souhaite cartographier les innombrables pans des musiques électroniques. Aux aguets des moindres vagues artistiques, les organisateur·ices du festival font appel aux talents locaux et mondiaux pour faire un état des lieux. Cette année, l’édition s’organise autour de la musique club et se tiendra du 2 au 3 septembre ; iels invitent Zulu, Loto Retina, Imer6ia, Hajj et bien plus. Au programme du vendredi, on retrouve également Torus, DJ néerlandais que nous avons voulu rencontrer avant la grande inauguration. Interview en grandes lignes de l’artiste qui séduit les line-ups depuis quelques mois.
Produisant depuis La Haye, sa ville natale, Torus choisit de miser sur le label londonien Sonic Router Records pour sortir ses trois premiers EP. Depuis 2012, il vole au-delà des frontières dans une stratosphère numérique où tout est possible. Sa curiosité musicale et son talent indéniable lui valent une résidence Redbull à Tokyo en 2014. Depuis, il intrigue les plumes de grands médias musique tels que XLR8R, Noisey, DJ Mag, ou encore The Guardian. C’est désormais au tour de Manifesto XXI, de tenter de déceler quelques-uns de ses secrets.
©adélaïde de cerjat, photo prise au
Horst.
Le travail de Torus est représentatif d’un sentiment générationnel, une ère en quête de sens. Il convoque un sentiment qui se ressent aussi bien à l’échelle individuelle que sociétale. C’est un sentiment perplexe dans lequel nous stagnons mélancoliquement dans un archivage du passé, faisant face à un flux extensible futuriste. Entre les deux, notre capacité à se souvenir devient plus complexe. Nous consommons maintes informations par jour qui nous confortent dans notre individualité. C’est la raison pour laquelle Torus aime faire référence à la culture populaire. Il collectionne presque tous les sons qu’il rencontre : il shazam régulièrement ce qui passe à la radio, en marchant dans la rue, la pop qu’il entend surgir des magasins. Armé de son téléphone portable, il fait des fields recordings pour leur qualité de compression. Il explique : « la façon dont le vent passe dans le micro peut être reconnue par tous·tes; mais chacun·e connecte à ce son à travers des souvenirs différents. En combinant les qualités de nostalgie contemporaine de ces enregistrements aux échos de pop que nous entendons partout, j’espère évoquer une réponse mélancolique du subconscient ». Ces collages pop, il les confectionne à partir de titres collectionnés sur TikTok.
De cette manière, Torus veut puiser dans notre imaginaire collectif et créer une sorte d’archive moderne en diffusant des sons qui ont tendance à déclencher un processus de souvenir. Ayant pu participer à deux de ses lives, une chose en ressort : l’audience s’esclaffe souvent en tentant de mettre le doigt sur ce que lui évoque une certaine onde, réverbération, vocalisation. En tant que magicien des temps modernes, Torus a une ruse peu connue pour nous sortir de notre zone de confort : le sampling inversé. Sa technique consiste à jouer un titre à rebours, y ajouter des réverbérations pour ensuite enregistrer la fin de ce résultat. Il confie que « la technique crée un écho estompé d’une référence perdue à l’échantillon original ; juste assez de référence pour que les gens déclenchent une réponse, mais pas assez pour reconnaître ce qu’ils reconnaissent ». Torus a bien conscience que son processus crée une potentielle frustration auditive qui peut survenir à la suite d’une telle écoute. Selon lui, cette impression d’insaisissable est la clé de sa réflexion, car elle est propre à notre génération. Nous subissons une perte de mémoire à court terme et la musique permet de restituer les choses. Selon lui, c’est un des pouvoirs les plus puissants du son.
333 Mirrors by Torus
Souvent associé à l’ambient, Torus préfère désigner son travail avec le terme post-rave. Si ses productions se basent sur des enregistrements sonores et collages expérimentaux, ses lives se fabriquent autour de l’envie de faire réagir nos cerveaux. Il parsème ses mix d’instants de contemplation et de détente ainsi que de moments de nostalgie émotionnelle. Torus nous livre qu’il préfère d’ailleurs jouer en club : « cela me permet d’expérimenter avec des titres ambiants et les mêler avec toutes les influences de musique d’où ils sont tirés ; de les rejouer dans leur contexte original afin de d’achever la boucle ». La puissance de ses sélections a d’ailleurs séduit le mythique label Trésor à Berlin, qui cherche constamment à dénicher les nouveaux talents qui feront danser les clubs de demain. On ne s’étonne donc pas de voir le nom de Torus se multiplier à travers les programmations de cet été et on se réjouit de le voir ce vendredi à La Station Électronique.
Les préventes pour Station Electronique se trouvent ici.
Vous pouvez suivre Torus sur Insta, Facebook, Soundcloud et Bandcamp.
Cet article Torus archive la mélancolie des temps modernes provient de Manifesto XXI.