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Nous vivons dans un système qui banalise et protège les violences masculines. Les hommes, quelle que soit leur particularité, ont appris à les exercer, à s'en servir et à bénéficier du rapport qu'elles génèrent. Allons-nous continuer à agir ainsi ?
- Violences et harcèlementSamedi 25 novembre, lors de son discours à l’occasion de la journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes (grande cause de son quinquennat), Emmanuel Macron a pris tout le monde de court en désignant comme responsable des violences faites aux femmes, le porno, « genre qui fait de la femme un objet d’humiliation ». Un genre – unique d’après lui – devenu un pratique bouc émissaire pour l’Etat qui préfère appeler à la rescousse le CSA pour réguler les contenus en ligne, plutôt que d’aller sur le terrain de l’éducation, de la prévention et du dialogue. Une prise de position sans en avoir non plus averti le Secrétariat d’Etat au numérique, le Conseil national du numérique et le CSA lui-même.
Que va-t-il se passer pour le porno sur Internet en France en 2018 ? Personne ne peut vraiment le dire pour le moment. Mais si on jette un œil du côté du Royaume-Uni, en pointe dans la « régulation » (censure) du contenu pour adulte en ligne, voilà ce qu’il pourrait rapidement arriver… avec le soutien inespéré du plus gros producteur/distributeur de porno en France.
Les dessous de la loiLe journaliste anglais Matt Blake décrit dans un long article pour Vice UK les moyens mis en place au Royaume-Uni pour contrôler l’accessibilité du porno en ligne. Marotte de David Cameron, mis en place par le gouvernement de Theresa May, le nouveau projet de loi, intégré au Digital Economy Act pourra sanctionner sévèrement les sites porno accessibles depuis le Royaume Uni qui ne mettent pas en place un contrôle strict de l’âge des internautes. Cette mise en place pour avril 2018, et appuyée par le Département de la Culture, des Médias et des Sports, fait déjà grincer des dents.
Manifestation en 2014 contre l’interdiction de certaines pratiques sexuelles dans le porno anglais. © Jacob Rawlings
Imaginons que vous soyez au Royaume-Uni et que vous souhaitiez visionner du contenu porno, qu’il soit sur un site payant, freemium ou gratuit. Arrivé en page d’accueil, il faudra vous identifier de diverses manières. Les voici :
– Détailler l’indicatif de votre carte de paiement.
– Présenter votre carte d’identité ou votre passeport.
– S’identifier par le biais de votre opérateur téléphonique (via quelques SMS).
– S’identifier par le biais de votre compte Facebook ou Twitter.
– S’identifier par reconnaissance faciale, selfie à l’appui (on n’arrête pas le progrès).
Le même processus se répétera sur la page d’accueil de chaque plateforme de vidéos pornos. Si vous refusez cette étape de vérification, ou si l’affirmation de votre majorité est invalide, le site vous interdit son accès. L’idée, approuvée par le British Board of Film Classification, est de protéger les enfants de la pornographie. Les sites pour adultes qui ne respecteront pas cette mesure feront l’objet d’une forte amende allant jusqu’à 250 000 £. Un plan qui n’est pas sans failles, ni… sans excès. Interrogée par Sky News, la pornographe féministe Pandora/Blake pointe du doigt le gros hic de l’affaire : les risques de violation de la vie privée, évidents dès qu’il s’agit de dévoiler ses données personnelles sur le web. A en lire le discours du juge britannique Myles Jackman, figure de proue du Open Rights Group, les historiques des visiteurs pourraient ainsi « entrer dans le domaine public » sous couvert d’une apparente bienveillante loi de renforcement de la protection des mineurs. Jackman évoque les risques de hacking et autres intrusions abusives.
MindGeek, déjà un coup d’avanceFutur Big Brother du porn
C’est là que MindGeek intervient. Le mastodonte du X en ligne [anciennement nommé Manwin, ndlr] qui possède les tubes porno Pornhub, RedTube ou YouPorn, et qui a sous sa tutelle des studios comme Brazzers, Digital Playground ou Reality Kings compte bien voler au secours de l’internaute anglais pour lui proposer une solution moins contraignante et gratuite à la longue liste des propositions énumérées ci-dessus. Distribuant gratuitement des contenus hardcore originellement payants (voire des contenus piratés), la compagnie est accusée de causer un tort considérable à l’industrie. Mais le magnat est malin, pour protéger son business au Royaume-Uni, il décide de prendre un train d’avance en proposant son propre système de vérification nommé AgeID – soit la version simplifiée du processus détaillé plus tôt. Au lieu de présenter votre carte bleue à l’entrée de chacun des tubes cités antérieurement, MindGeek vous permet de ne la présenter qu’à l’un d’entre eux. Une fois cette vérification d’âge validée via AgeID, il vous suffira à l’avenir de simplement vous identifier pour avoir accès à tous ses nombreux tubes et sites payants.
Non content d’agir sur les nombreux sites qui lui appartiennent, le groupe hégémonique proposera ce service à des plateformes moins conséquentes économiquement parlant. Le milliardaire du secteur empoigne la loi à son avantage et en fait donc une perspective commerciale florissante. On s’en doute, MindGeek n’a pas pour unique ambition de protéger les chérubins : on peut supposer qu’il s’agit avant tout d’imposer son autorité sur le marché. Preuve en est que la loi de vérification d’âge privilégie finalement les multinationales qui ont déjà le monopole du porn, au détriment du business indépendant.
Comme l’indique Pandora/Blake à Vice, les incidences de cette restriction sur la pornographie alternative, ou « pornographie de niche », seraient donc bien réelles, privilégiant la vision homogène d’un groupe particulièrement assassin envers la production artisanale. Beau hasard, Vice nous précise que les porte-paroles de MindGeek ont eu l’occasion d’échanger en compagnie du gouvernement UK pas moins de cinq fois entre septembre 2016 et janvier 2017…
Un exemple pour la France ?Le cas anglais peut sans doute vous paraitre lointain et ne pas concerner la France. Méfiez-vous. Suite aux annonces de Macron, une voix importante s’est fait entendre. Gregory Dorcel, président du groupe Marc Dorcel, leader sur le marché de la VOD a précisé dans un communiqué de presse qu’il approuvait la décision du chef de l’Etat et va plus loin en appelant à prendre exemple sur le Royaume-Uni. Extrait du communiqué de presse :
Pourtant une solution simple et efficace existe :
Convaincre les Fournisseurs d’accès internet de bloquer, sur simple injonction du CSA (dont l’une des missions est la protection du jeune public), les sites qui violent volontairement le code pénal français avec des volumes d’audiences énormes. Les dispositifs légaux comme LOPPSI 2 et les solutions techniques sont déjà en place.
A l’image de la Grande Bretagne qui vient de promulguer une loi au travers son Digital Economy Act 2017, seule une décision politique forte pourra obliger l’ensemble des acteurs, malgré leur réticence idéologique (web sans contrôle…) et leurs intérêts, à mettre ces solutions simples réalistes et applicable immédiatement.
Visiblement plus préoccupé par les répercussions sur son entreprise que sur les libertés individuelles, sur les fondements d’internet et sur ce qu’est être un consommateur majeur de porno, il n’hésite donc pas à approuver ces décisions en désignant au passage de nouveaux responsables : ses concurrents « sauvages » et l’ensemble des sites porno qui donnent accès à du porno sans contrôle strict de la majorité à son entrée, soit la quasi majorité des sites adultes (nous compris). Il en appelle également aux fournisseurs d’accès à jouer un rôle de censure sur ces sites (sous injonction du CSA) et à l’État à agir comme il peut le faire sur des sites pédophiles (sic).
Vers une restriction sévère des libertés sur InternetDessin de Chappatte en 2005, toujours d’actualité
En mars dernier, l’ancienne ministre de la famille Laurence Rossignol déclarait qu’il était amusant que pour contrer le porno sur internet elle se heurtait à « La liberté de création, à la liberté d’expression sur le net » et que la liberté d’expression servait à tout et « aussi à défendre la pornographie et l’accès à la pornographie sur le net ». Elle appelait déjà à censurer le web et ces sites. Son rêve n’avait pas recueilli de soutien public de l’industrie pornographique française. Le nouveau gouvernement semble poursuivre les travaux engagés pour mettre fin à l’accessibilité du porno en France, toujours vu comme une entité unique et une « violence faite aux femmes ». Il reçoit dorénavant un soutien de poids avec celui du groupe Marc Dorcel.
Le président Emmanuel Macron en insistant sur le fait que « la pornographie a franchi la porte des établissements scolaires comme naguère l’alcool ou la drogue » [à travers le smartphone] a ouvert un débat essentiel sur l’accessibilité des contenus pour adulte aux mineurs sur Internet. Sujet qui nécessite un renforcement du contrôle parental, une prise de conscience des parents, un rôle renforcé de l’éducation nationale et un dialogue plus ouvert dans la société mais certainement pas, selon nous, à des mesures à l’encontre de la liberté sur Internet. Le cas anglais pourrait donner la pire voie à prendre : restriction de la liberté sur internet, restriction de la liberté sexuelle, restriction de la liberté d’expression, recul de la diversité dans la pornographie, risque de violation de la vie privée, fin de l’anonymat et en bout de chaîne, mettre entre les mains d’un groupe (MindGeek) déjà en position hégémonique nos données personnelles.
Peut-on pratiquer la sexualité dite «cuir» sans qu’aucun animal n’ait été maltraité au cours de la séance ? Depuis environ 2015, Demonia –premier sex-shop en France spécialisé fetish-SM– propose aux clients vegan des alternatives aux vêtements et accessoires en peau tannée.
«Vous avez des accessoires sans cuir ?» Ils viennent de plus en plus souvent avec cette question. «Être Végan BDSM c’est la frustration totale, le vrai masochisme. Quand on a envie d’un coup de martinet, comment faire !? C’est une libération totale d’avoir des alternatives pour eux. Ils sont même parfois étonnés d’en trouver.» Miguel, gérant de la boutique Demonia à Paris, a créé un rayon dédié pour ces clients qui, depuis 2015, ont enfin obtenu gain de cause : «Les fournisseurs et les fabricants commencent à proposer des produits non-organiques.» Harnais en faux cuir de la marque Maze ; menottes, colliers de chien et laisses en silicone ; bâillons et cockring en nylon ; lanières en latex… Plus besoin qu’une vache ou un veau soient morts pour assouvir ses fantasmes. Pour Miguel, l’absence de cuir ne change rien à la pratique. Ce n’est pas du «SM édulcoré», dit-il, au contraire : «Les lanières PVC sont plus plus cinglantes que celles en cuir.» Une cliente vegan confirme : «Je préfère de loin le latex ou le métal qui sont bien plus «puissants» à mes yeux. Par ailleurs, la simple attitude suffit pour marquer sa position.» Dominer ce n’est pas une question de matière, dit-elle : «Un bon dominateur doit pouvoir être crédible en pyjama.» Qu’il soit mâle ou femelle, un bon dominateur n’a pas besoin de manger carné ? Ni de brandir des nerfs tressés dans des testicules de taureau ?
Entretien avec Fanny K., une pratiquante SM vegan
Quelle est la différence entre vegan et végétarien ?
Par définition, un végétarien exclut de son alimentation uniquement la chair animale sous toutes ses formes (viande rouge, blanche, abats, poissons, fruits de mer, insectes...). En revanche, une personne végétalienne ne consommera ni chair animale, ni aucun produit d’origine animale (abrégés POA). Cela exclut les produits laitiers, les oeufs, le miel, le colorant alimentaire E120 (cochenilles écrasées), les confiseries contenant de la gélatine de porc ou de crustacé... (liste non exhaustive). Enfin, une personne végane étendra ce boycott des POA à l’entièreté des aspects de la vie : en plus d’avoir un régime végétalien, elle ne consommera ni cuir, ni fourrure, ni laine, ni soie, ni cosmétique contenant des POA (comme la cire d’abeille, ou les sécrétions de castor), ni cosmétiques ou produits d’entretien testés sur les animaux. Elle n’ira pas non plus au cirque, au zoo, dans les parcs aquatiques, dolphinariums ou divers aquariums et parcs animaliers en général : autant de lieu ou l’animal est vu uniquement comme une ressource, au détriment de son épanouissement. Alors que le végétarisme et le végétalisme sont seulement des choix alimentaires ou des “choix de vie”, le véganisme s’inscrit davantage comme un choix politique, abolitionniste et anti-spéciste.
A quel moment de votre vie avez-vous pris conscience qu’il fallait étendre la non-consommation de la chair animale à la non-consommation de sa peau ? Qu’avez-vous fait de toutes les affaires en cuir que vous possédiez jusque là ?
Je suis devenue végane du jour au lendemain (sans aucune transition par la végétarisme ou le végétalisme) l’année de mes 23 ans. J’ai jeté ou vendu toutes mes pièces en cuir. C’est-à-dire très peu, car j’ai toujours éprouvé un dégoût pour cette matière. Si ma mémoire est bonne, cela se limitait aux chaussures.
Je suppose que vous étiez intéressés par le fétichisme ou le SM avant de devenir vegan… Pouvez-vous raconter l’avant et l’après ?
A mon échelle, je n’ai ressenti aucune différence dans mon approche du SM avant et après être devenue végane car je n’ai jamais été attirée par le cuir. L’odeur et ce qu’il représente m’ont toujours donné la nausée. Avec mon compagnon, nous n’aimons pas particulièrement utiliser des accessoires, préférant le contact direct entre nos corps pour nous procurer des sensations extrêmes. Nous y trouvons des rapports beaucoup plus charnels et intenses que lorsqu’un objet vient faire barrage entre nous deux. Plutôt qu’utiliser un fouet, mon compagnon a toujours préféré user de la force de sa main, pour me sentir autant que je le sens, et ne pas utiliser d’intermédiaire. Nous ne sommes pas des fétichistes dans l’âme, mais plutôt des “primal” extrêmes. Les seuls objets que j’utilise personnellement sont les cordes et les accessoires de kinbaku (bondage traditionnel Japonais), agrémenté de quelques accessoires : uniquement en métal et en verre (une préférence de ma part). Je n’ai donc rencontré aucun problème lors de ma transition vers le véganisme, mes cordes étant en fibres naturelles, et les seules matières me faisant éprouver de l’excitation étant l’acier et le verre.
Comment expliquez-vous votre refus d’utiliser du cuir ?
De nos jours, la plupart des gens sont choqués par la fourrure, qu’ils boycottent volontiers, mais pas par le cuir. Or, il s’agit fondamentalement de la même chose : comme pour la production de la fourrure, les animaux sont élevés dans le but d’être écorchés. Les conditions de vie de ces animaux sont abominables, et il est important de souligner que les conditions de travail pour les humains employés dans les tanneries le sont également. La plupart des peaux proviennent de pays très pauvres comme l’Inde. Les travailleurs sont exposés à des composés toxiques sans aucune protection. Ils marchent parfois pieds nus sur un sol recouvert des produits chimiques. Cette industrie est une honte, que ce soit pour l’animal ou pour l’homme qui y sont tous les deux réduits en esclaves au service du plaisir des oppresseurs.
Pour certains, le SM va avec l’image puissante d’une dépouille prélevée sur un animal mis à mort… Les autres matières leur semblent édulcorées, et leur impact moins puissant sur la libido… Et pour vous ?
Je n’ai jamais entendu parler de cela et ne connais absolument personne dans le milieu SM qui partage cet avis (même si j’admets que cela puisse être totalement inconscient). De plus, je trouve cela assez malsain de penser que la souffrance et la mort insufflent une énergie sexuelle forte dans un fétiche. Depuis que je suis dans ce milieu, j’essaye de faire comprendre aux gens de l’extérieur que les pratiquants SM ne sont pas des fous. Je comprends tout à fait que la souffrance puisse être une source d’énergie sexuelle, et je serais même très mal placée pour dire le contraire. En revanche, la base de toutes relations D/s réside avant tout dans le consentement dans la souffrance et c’est là que ce ressenti sur le cuir, qui prend une composante excitante de par la souffrance et la mort d’un être autre que soi, me pose problème.
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Demonia : 22 av. Jean Aicard, 75011 Paris. Ouvert du lundi au samedi de 11h30 à 19h30.
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Jeudi 30 Novembre 2017 CP - 1er décembre - Femmes, VIH et sexualités : au Planning on en parle !