34739 éléments (3198 non lus) dans 75 canaux
J’ai un péché mignon, je suis accro aux danses privées. Vous vous attendez au témoignage d’un habitué des clubs de strip-tease ? Non, je vous parle de moi ; moi qui ai un plaisir gourmand à emmener des hommes, des femmes, des couples dans la pénombre d’un petit salon pour un petit strip-tease particulier. Cela peut paraître surprenant mais j’ai longtemps refusé d’effectuer des “danses privées », pensant que c’était là une activité dévalorisante. Avoir la sensation d’être louée sur une ou deux chansons ne me réjouissait guère. Et même si l’on peut clairement dire qu’il s’agit ici d’argent facile (du moins pour une “Star du X” reçue en “guest”) je ne trouvais aucun intérêt à me trouver face à un homme plus ou moins alcoolisé, affalé dans un fauteuil et me regardant me déhancher lascivement alors qu’il venait de me voir nue sur scène lors de mon show érotique. Qu’il soit fan ou simple client avide de nouveauté, la situation n’était à mon sens pas vraiment excitante. Comme quoi, même en étant « actrice porno » on a ses limites et ses jugements de valeurs. Une erreur? Nous y reviendrons plus tard..
Il est certain que l’aspect privé de la prestation me posait problème. Partager votre vision de la sensualité et de l’érotisme le temps d’un strip-tease effectué sur une scène peut être un véritable plaisir. Vous flirtez avec les lumières, embrassez l’espace, jouez avec le public. Les sourires , les regards, le désir se propagent, vous devenez le vecteur d’une énergie mêlant à la fois la joie de séduire et de surprendre, de désirer et être désirée. Vous êtes maîtresse du jeu, vous êtes là, ici et maintenant et ce que vous vivez, ce que vous révélez de vous, de votre corps, vous le donnez immédiatement. Pas de mensonge, pas de coupure au montage, pas de retouche photoshop. Cette image est vivante, cet échange est réel et ce moment de partage, lorsqu’il est réalisé avec sincérité, est littéralement jouissif.
Avoir pensé qu’on ne pouvait tirer aucun plaisir à ce petit jeu des danses privées prouvait bien à quel point j’étais encore étrangère aux joies de l’intimité avec un inconnu. Vous devriez commencer à me connaître, je suis de nature joueuse, et j’aime encore plus gagner. J’ai donc fini par me laisser tenter. J’avoue, j’ai commencé avec quelques mauvaises surprises en travaillant dans des clubs italiens. Les comportements y sont particulièrement tactiles et disons-le, machistes. Trait culturel propre au pays ou traditions propres aux clubs locaux, peu importe. Ce type de contact (à savoir plutôt rude et surtout imposé) ne me convenait pas. J’ai beau aimer les rapports sexuels passionnés cela ne fait pas de moi un corps dont on dispose à volonté. JE dispose à volonté de mon corps, et JE choisis qui pourra en jouir et le faire jouir. Une “danse privée” reste une danse, pas une séance de pelotage intempestif, ni un spectacle de peep-show, ni une prestation comportant un rapport sexuel. Du moins, pas pour moi.
Je dois en revanche reconnaître que le professionnalisme des clubs américains est assez bluffant. La clientèle masculine, éduquée aux règles strictes, accepte volontiers de rester sage puisque c’est ainsi qu’on l’a habituée. Tout est question d’éducation. Par conséquent : pas de contact tactile que la danseuse n’ait pas souhaité, rapports sexuels prohibés, service de sécurité impeccable. Tout est surveillé et règlementé (du moins dans les clubs où j’ai été engagée. Je rappelle que je parle ici de mon expérience personnelle). Je ne pense pas avoir vécu une seule mauvaise expérience sur le territoire de l’Oncle Sam. Les termes de règles et de surveillance doivent en refroidir plus d’un, mais croyez-moi , une strip-teaseuse , une femme tout simplement, qui se sent en sécurité, se lâchera beaucoup plus que celle pour qui son travail est un risque d’agression et une source de stress.
Nous en arrivons enfin au point essentiel, à la partie qui croustille. Qu’est-ce qui a bien pu me convaincre d’aimer quelque chose que j’avais pendant des années rejeté catégoriquement ? En quoi consiste exactement une danse privée ? Quel intérêt pour les clients qui se doivent de rester passifs ? Quel plaisir pour la femme qui se déshabille pour la énième fois et qui ne fait que son travail ? Vous vouliez savoir ce qui se passe derrière les rideaux ? Laissez-moi vous prendre par la main. Et si je vous emmenais dans le secret d’une danse privée…avec moi ?
Ce soir je porte une robe courte de soie bleue, il me suffit de passer les doigts derrière ma nuque pour en défaire la fine attache, la faire glisser à mes pieds. Nous sommes aujourd’hui en Australie, dans un club situé à Perth à plus de vingt heures d’avion de chez vous. Peu importe. Je vous emmène avec moi. Et vous semblez arriver au bon moment. Un couple vient tout juste de me solliciter. Leur nervosité est palpable et je jubile devant ce doute attendrissant. Sera-t-elle jalouse? Sera-t-il frustré? Cette expérience va-t-elle les rapprocher ou au contraire les séparer? Lui, baisse les yeux. Elle, me sourit, confuse, les joues empourprées. La prochaine chanson commence dans quelques secondes. Ces minutes leur appartiennent et vous appartiennent si vous le décidez. Le rideau de velours se referme doucement. Il ne tient qu’à vous de le laisser ouvert…
A suivre, la suite de cet article si, bien sûr, vous acceptez cette danse…
Katsuni
IRÈNE’s interview in the last issue of the magazine nico - interviews & fashion!
Picture: Sebastien Agnetti