Brian Sloan est un entrepreneur comme on les aime, le genre qui met les mains dans le cambouis pour le bien des fappeurs. L’année dernière, il a chamboulé le timide marché des sex toys pour homme en créant l’Autoblow 2. Grâce à son concept ingénieux et à une campagne de communication rondement menée, ce masturbateur automatique a pulvérisé les objectifs de sa campagne de crowdfunding et s’est invité dans les médias grand public aux côtés de son triomphant géniteur. Nous sommes allés trouver Brian Sloan pour l’interroger sur ce glorieux passé, mais aussi sur ce futur du fap qu’il contribue à créer.
Est-ce que tu peux nous expliquer comment tu es passé d’avocat à entrepreneur du sextoy ?
En fait, je n’ai jamais bossé en tant qu’avocat. Quand j’étais en fac de droit, j’ai appris que je pouvais me faire pas mal de blé en achetant des antiquités dans des ventes aux enchères locales pour les revendre sur eBay. Un été, j’ai commencé à chiner dans des brocantes. J’arrivais à me faire autant de fric en un week-end qu’en trimant 40-50 heures par semaine dans un cabinet d’avocat. Quand j’ai fini l’école de droit, j’ai commencé à acheter et revendre tout ce que je pouvais, surtout des objets mis aux enchères après des faillites.
Le problème de ce petit marché, c’est qu’il n’avait pas d’avenir. Pour le faire évoluer, j’ai été obligé d’importer et de revendre des produits chinois. Je me suis lancé avec des habits en latex pour fétichistes. J’ai commencé à faire des aller-retours en Chine pour y acheter des antiquités. C’est à ce moment-là que j’ai compris que mon avenir était là-bas, même si je ne savais pas encore de quoi il serait fait. Je m’y suis installé en 2007 et j’ai ouvert mon premier site d’e-commerce. Grâce à lui, j’ai arrêté de dépendre d’eBay pour vendre mes combinaisons de latex et j’ai appris le métier sur le tas.
Mais pourquoi le business des produits pour adulte ?
En vendant mes habits en latex, j’ai compris que le marché des sextoys était immense et très peu exploité sur Internet par ses principaux acteurs. C’est toujours valable aujourd’hui, vous pouvez vérifier : les grandes marques sont rarement aptes à distribuer leurs produits elles-mêmes. Pour ceux qui sont prêts à prendre ces problèmes à bras-le-corps, de la production au service client, c’est un secteur très intéressant et gratifiant.
Je pense que le marché des sextoys est l’un des plus fascinants de notre époque. Il n’en finit pas de grandir, et je suis bien positionné pour en profiter. Mon boulot a des côtés difficiles, je dois contrôler en permanence les produits des usines avec lesquelles nous travaillons et gérer les subtilités du commerce chinois. Tous ceux qui veulent réussir dans ce secteur doivent apprendre à connaître la Chine, ses pratiques commerciales et la manière d’éviter les problèmes qu’elles sont susceptibles d’amener. Quoi qu’on en dise, 95% des sextoys sont faits là-bas, et ce n’est pas facile d’y faire du business sur le long terme.
Comment l’idée de l’Autoblow 2 t’est-elle venue ?
J’ai toujours su que les hommes voulaient un produit qui leur donne la sensation d’être entre les mains de quelqu’un. Au fil des années, beaucoup de jouets leur ont permis de reproduire précisément les sensations du sexe à deux. Le problème, c’est que ces produits devaient être bougés de haut en bas pour fonctionner, comme lors d’une masturbation classique. Je savais que si je leur proposais un moyen de se donner du plaisir sans bouger leurs mains, les hommes achèteraient mon produit.
Comment expliques-tu le succès de la campagne de crowdfunding de l’Autoblow 2 ?
Je pense qu’elle a bien fonctionné pour plusieurs raisons. Premièrement, plutôt qu’essayer de la confier à un mannequin aux seins refaits, j’ai assuré la promotion moi-même. A vrai dire, depuis que je suis petit, je rêve de faire des infomerciaux. On a fait ça comme des amateurs, sur un fond vert, dans mon appartement. Mais je l’ai fait, et j’ai réussi à capter l’attention du monde pendant un instant en donnant de bonnes raisons d’acheter le produit.
Deuxièmement, c’était la première fois qu’un sextoy automatique pour homme était aussi visible. Beaucoup de sites Internet, dont le votre, ont écrit dessus en pariant que ça ramènerait du monde, parce que les gens cliquent sur les trucs sexy. L’histoire de l’Autoblow 2 cadrait avec cette manière de réfléchir. Je suis devenu populaire parce que ces sites l’ont considérée comme intéressante pour leurs lecteurs. De par le monde, il y a beaucoup d’histoires qui sont sans doute plus intéressantes que la mienne, mais qui sont moins à même de faire du clic. Celles-là ne sont jamais racontées.
La manière dont tu as communiqué autour de ton produit a été décisive, et notamment le packaging bien lisse de l’Autoblow 2.
Quand j’ai fait appel à un designer pour l’emballage de l’Autoblow 2, je suis d’abord allé dans un Apple Store pour photographier tous les accessoires qu’ils proposent, en particulier les enceintes type Bose. Et j’ai dit au designer de faire un packaging qui aurait l’air à sa place là-bas. La raison à cela est simple : ce produit n’est pas quelque chose dont les hommes devraient avoir honte. Il mérite mieux que d’être vendu dans un sex shop paumé. C’est un produit mainstream pour le marché mainstream.
Presque tout le monde se masturbe, c’est certain. Du coup, il est insensé qu’autant de produits pour adulte soient distribués dans l’ombre. Mes méthodes de marketing ont donné la permission aux consommateurs de sentir qu’ils avaient besoin d’acheter ce genre d’objet pour la première fois. Beaucoup de gens m’ont envoyé des e-mails disant que ma campagne leur avait donné envie d’essayer. Ça m’a rendu très heureux, car ils se sont rendus compte qu’ils n’étaient pas bizarres ou détraqués parce qu’ils avaient envie de se toucher dans des meilleures conditions.
L’Autoblow n’est pas ta seule création. Est-ce tu peux nous en dire plus sur tes autres produits et leurs histoires ? Comment expliques-tu qu’ils n’aient pas connu le même succès que l’Autoblow 2 ?
Je fabrique près de 70 produits différents. La plupart d’entre eux sont vendus sans attirer l’attention. Chaque année, par exemple, nous gagnons des millions de dollars grâce à Amazon, mais nous ne communiquons pas à propos de ça : nous avons juste passé plusieurs années à comprendre comment tirer le meilleur profit du site. Mettons que vous habitez aux États-Unis et que vous partez à la recherche d’un masturbateur pour homme sur Amazon. Sur la première page de résultats, plusieurs de nos produits vous seront proposés.
Nous vendons aussi ces produits sur nos sites Internet, mais aucun d’entre eux n’a de quoi attirer l’attention des médias internationaux. Et à vrai dire, certains d’entre eux se vendent en quantité considérable d’année en année, même s’ils n’en ont pas l’air. Le succès de l’Autoblow 2 n’est que la partie émergée de l’iceberg, il est visible parce que nous en avons fait la promotion. Le crowdfunding a aidé, aussi. D’autres produits de notre catalogue ont attiré l’attention des médias grâce au crowdfunding, notamment un vibromasseur, le Slaphappy, et le 3Fap.
Est-ce que tu peux nous dire comment tu as eu l’idée du 3Fap ?
Je me suis dit que les hommes aiment avoir plusieurs options. Malheureusement, la plupart des sextoys ne leur en donnent qu’une au moment où de nombreux facteurs entrent en jeu : choix de l’orifice, texture, niveau de succion. Beaucoup de produits mainstream sont devenus populaires en offrant plusieurs possibilités à leurs utilisateurs. Appliquer cette formule gagnante à un sextoy n’avait rien de bien sorcier.
Il semble que la campagne de crowdfunding pour le 3Fap ne soit pas aussi suivie que celle de l’Autoblow 2. Comment l’expliques-tu ?
Je savais que faire une campagne de crowdfunding pour le 3Fap présentait un risque. Les gens qui sont prêts à acheter sur Indiegogo sont à la recherche des produits les plus innovants. En tant que masturbateur automatique, puissant et adaptable, l’Autoblow 2 était un objet très innovant, et même high-tech.
Le 3Fap, au contraire, passe pour un produit low-tech alors que la production de ses manchons est très compliquée. A cause de ça, les gens qui d’ordinaire achètent sur Indiegogo n’ont pas été aussi réceptifs qu’auparavant. Le prototype que nous avons utilisé pour la campagne avait aussi l’air assez basique. Avec du recul, je me dis que aussi j’aurais peut-être dû attendre que nous ayons fini notre deuxième prototype pour lancer la campagne.
Je ne pense pas que ce sera le produit le plus vendu de tous les temps. Par contre, je pense qu’à partir du moment où il existe et qu’on peut le commander sur 3fap.com pour le recevoir en un à deux jours, les hommes l’achèteront. Gardez à l’esprit que les gens qui achètent sur Indiegogo sont prêts à attendre quatre à cinq mois pour recevoir leur produit. Le crowdfunding est réservé aux acheteurs les plus déterminés.
Quels sont tes projets ? De nouveaux sextoys ?
Je viens de créer le premier gode arc-en-ciel du monde, nous allons commencer à le vendre le mois prochain. J’ai aussi mis sur pied une marque de lubrifiant il y a quelques semaines, Fap Lube. Et je suis en train de travailler sur quelques produits cool, pour les hommes comme pour les femmes.
Mais pour moi, le truc le plus excitant de l’année à venir sera de créer une série de cours qui expliqueront aux gens du monde entier comment j’ai fait grandir mon business et comment ils peuvent utiliser mes méthodes pour lancer leur propre affaire.
Va-t-il y avoir un Autoblow 3 ?
Oui, nous avons prévu de le dévoiler à l’hiver 2016. Il va fonctionner d’une toute nouvelle manière et sera sûrement connecté à Internet.