Le Conseil fédéral n’a rien trouvé à redire à l’initiative du Parti démocrate-chrétien (PDC) baptisée «Non à la pénalisation du mariage». Mercredi, le Gouvernement s’est exprimé en faveur du texte, déposé en décembre dernier, et qui sera donc soumis au peuple. Cette proposition vise à modifier la Constitution de manière à placer les couples mariés sur un pied d’égalité avec les célibataires en matière d’impôts et d’assurances sociales. Depuis son lancement, elle avait pourtant fait l’objet de mises en garde répétées de la part des organisations LGBT helvétiques. En cause, une petite phrase aux conséquences lourdes: Le mariage, dit l’initiative, est «l’union durable réglementée par la loi d’un homme et d’une femme».
Préoccupant
Une modification de la loi fondamentale dans ce sens serait «une gifle pour toutes les personnes aimant une personne du même sexe, souligne un communiqué commun de six formations politiques helvétiques allant des Gays dans l’UDC aux Jeunes socialistes. Le fait que le Conseil fédéral n’a pas mis un seul mot sur cette définition du mariage dans son communiqué de presse est particulièrement préoccupant.»
Dans la foulée, LOS, Familles Arc-en-Ciel, Transgender Network et Pink Cross met en évidence le grand bond en arrière que constituerait une telle disposition pour la Suisse alors que l’Espagne, par exemple, vient de confirmer le droit constitutionnel au mariage égalitaire. Ce pays, note le communiqué, «a réussi le pari de représenter et d’intégrer au sein de la société la diversité des modèles familiaux, ceci sans grand conflit. [..] La constellation que nous présente le PDC comme étant la famille idéale, papa/ maman/enfant cache l’évidence: la grande majorité des familles ne ressemble en rien à ce modèle, mais plutôt à une famille monoparentale, à un patchwork familial, ou à une famille homoparentale.»
Cas unique en Europe
Le PDC a jusqu’ici choisi de rester silencieux sur la définition du mariage contenue dans son texte, manifestement inspirée par le fort courant catholique conservateur au sein du parti. Il faut dire que ni les médias ni les grands partis ni le Gouvernement, focalisés sur l’aspect fiscal de la proposition, ne l’ont titillé sur ce sujet.
Aucun pays d’Europe de l’Ouest – même ceux qui n’ouvrent pas le mariage aux couples de même sexe –, ne disposent dans leur Constitution d’une définition strictement hétérosexuelle du mariage. Seule la Croatie votera, le 1er décembre prochain, sur un référendum lancé par les milieux catholiques allant dans ce sens. Aux Etats-Unis, la loi fédérale qui autorisait certains Etats à «défendre le mariage» dit traditionnel a été en grande partie annulée, cet été. Si l’initiative «Non à la pénalisation du mariage» est adoptée par le peuple, la Suisse serait le premier pays occidental à bloquer – possiblement sans débat spécifique – toute évolution future du mariage.