copyright Jean-François Jonvelle
Par derrière la fenêtre, j’observe les arbres qui dansent au gré du vent. Des nuages gris bousculent les blancs dans un ciel encore bleu. La couleur en serait différente si j’étais dans un endroit moins pollué.
Les heures fondent au soleil.
J’écris comme d’autres, rares, éjaculent. Des mots qui s’enchaînent et se déchaînent tels de multiples orgasmes.
Je prends mon temps. Comme lorsque nous faisons l’amour.
Parfois, j’invente des histoires, en rouge et noir, qui pourraient plaire à un éditeur allemand, moins frileux qu’un éditeur français.
DECHIRURES est l’une d’entre elles.
Quand je pense qu’un type aux idées aussi courtes qu’il a les cheveux longs prétend que j’ai besoin de lui pour corriger mes textes… C’est à mourir de rire.
J’ai pas envie de mourir.
DECHIRURES
« Aimer jusqu’à la déchirure »
Jacques Brel, La Quête
Lentement, il promène la lame sur son ventre nu.
Elle ne prononce pas un mot. Attendant la première morsure comme une délivrance.
Depuis qu’ils sont arrivés, elle sait ce qui l’attend. Avoir à ce point foi en l’avenir, ce n’est même plus de l’espérance, c’est juste de l’évidence.
Ils se tiennent tous les deux dans cette pièce. En totale communion.
Lui avec son fantasme inassouvi jusqu’alors et elle avec son envie d’aller toujours plus loin qui lui colle autant au cœur qu’au cul. Ce dépassement de soi auquel elle aspire depuis tant d’années, elle va enfin le vivre. Ils s’étaient bien trouvé finalement tous les deux. Comme quoi, le hasard n’existe pas mais le Destin, si. Le Destin que d’autres nomment la Fatalité. Les cons !
Leur liaison n’aura été qu’une suite de rapprochements et de ruptures.
Il était parti plusieurs fois pour mieux revenir. Ou mal. Oui, plutôt mal revenir au début. Jusqu’à ce que ses hésitations disparaissent. Il avait fallu qu’il accepte d’être un salaud. C’était son expression à lui.
Elle le voyait différemment. Comme son double mais reflété dans un miroir, l’inverse d’elle-même en quelque sorte, mais pas vraiment non plus. Si quelqu’un lui avait posé la question, elle aurait répondu qu’il était son complément d’âme. Pas son supplément.
La tension sexuelle qui avait toujours régné entre eux avait augmenté jour après jour.
Nuit après nuit. Inexorablement.
Oui, entre eux deux, il avait toujours existé plus que des orgies de baises intenses. C’était animal et cérébral. Voire beaucoup plus mystique pour elle. Même si elle avait fait tout son possible pour l’amener sur la Voie, elle savait que son amant devrait encore parcourir un long chemin avant de l’atteindre un jour. Peut-être.
Malgré tout, aucune autre fin que celle qu’ils vont écrire ensemble dans les minutes à venir n’aurait été possible. Ni l’un ni l’autre ne l’ont même jamais envisagée.
Depuis leur première rencontre, à un concert de Sopor Aeternus & The Ensemble of Shadow, elle avait jeté et les calendriers et les montres. Elle avait simplement vécu dans l’attente de ses retours. Ses amis, sa famille, son boulot, tout avait disparu.
La jeune femme connaissait tous les albums de Sopor Aeternus.
Anna-Varney Cantodea, la chanteuse asexuée de ce projet musical, avait puisé dans sa profonde dépression pour créer une musique karmique aux influences dark-folk, gothiques et néoclassiques. Ecouter son œuvre en boucle, c’était s’offrir un avant-goût d’une catharsis sacrée. Ce transsexuel non opéré était un véritable génie.
Lui, il n’appréciait vraiment que Gainsbourg mais goûtait quand même Bashung. Il était là par erreur, lui racontera-t-il plus tard. La fille brune avec qui il couchait à l’époque l’avait traîné à ce show.
A l’entracte, ils avaient découvert qu’ils fumaient les mêmes cigarettes. Elle était sortie sur le trottoir, devant la salle, la tête en transe. Lui commençait à kiffer cette musique étrange.
Elle lui avait pris la main.
Il avait abandonné sa brune sur le champ.
S’ils avaient mis du temps à l’accorder, leur symphonie sado-spirituelle allait maintenant connaître son point d’orgue.
Bien sûr, ce serait un chef-d’œuvre.
Il est photographe.
Minutieux.
Obsessionnel.
Elle est son modèle.
De très rares fois, il l’a présentée à des inconnus comme sa Muse.
La plupart du temps, il l’a tue.
Il ne lui a jamais dit un seul mot d’amour.
*
* *
De l’extérieur, la maison ne payait pas de mine.
L’endroit était aussi isolé que la bicoque avait l’air inhabitée depuis des lustres. Les persiennes, qui s’accrochaient encore aux murs, pendaient de guingois. La peinture qui les recouvrait était écaillée et délavée. Certaines fenêtres avaient des carreaux cassés. Sur le toit, la cheminée avait quasiment rendu l’âme. Un seul des quatre pans originaux tenait encore debout. Des tuiles jonchaient le sol couvert d’herbes folles et jaunes.
Elle l’avait regardé, d’abord étonnée.
Etait-ce une nouvelle de ses lubies ?
Il avait garé sa voiture à l’ombre d’un bouquet d’arbres sauvages et lui avait souri en lui ouvrant la portière. A cet instant, elle avait compris.
L’Eternité, c’était aujourd’hui.
Elle lui avait rendu son sourire, heureuse et sereine, comme elle ne l’avait jamais été.
Il l’avait guidée jusque devant l’entrée.
La porte ouverte, la jeune femme avait découvert l’intérieur de la maison.
Enfin, ce qu’il en restait.
Les cloisons avaient été abattues à la hâte, laissant apparaître des pierres cassées ici ou là. La masse qui avait servi à ce carnage gisait sur le vieux plancher. Aucun meuble n’arrêtait le regard. A part une chaise.
Ce qui rendait le dénuement des lieux encore plus total.
Leurs pas avaient soulevé une fine poussière qui voletait dans les rayons du soleil. Une sorte de rideau noir habillait le mur d’en face. D’authentiques vieilles poutres de chêne couraient sur le plafond. De son œil exercé, elle y avait repéré des crochets, plantés à divers endroits. Elle avait ressenti un très léger pincement au cœur lorsque la porte s’était refermée sur ce jour. Sur ce qui avait été jusque là son semblant de vie. Sa curiosité avait été bien plus forte.
Oserait-il ?
Après avoir posé son sac de voyages qu’il portait à l’épaule, le photographe avait allumé des bougies disséminées de-ci, de-là, sur le rebord des fenêtres. Leurs flammes vacillaient au gré des courants d’air.
Sans qu’il ait eu besoin de le lui demander, elle avait ôté ses vêtements, un à un, sans empressement. Elle avait même pris soin de les poser délicatement sur la chaise. Elle avait terminé son strip-tease volontaire en enlevant son string et s’était retournée vers son amant pour lui tendre ses deux poignets réunis.
Il lui avait passé des menottes qui avaient cliqueté lorsqu’il l’avait rapprochée tout contre lui pour baiser ses lèvres, façon cannibale. Elle avait frémi quand ses dents s’étaient plantées dans la pulpe fragile et l’avaient déchirée sans vergogne.
Ce qui avait augmenté son excitation d’un cran.
Ce goût métallique du sang sur sa langue… Elle aimait ça.
Il l’avait tirée alors un peu brusquement, pressé peut-être ou angoissé à l’idée de ne pas être à la hauteur. Les mains de la modèle avaient été élevées au-dessus sa tête, les menottes maintenues par une chaîne glissée dans un des fameux crochets, bien sûr.
*
* *
- Ainsi offerte, tu es très belle.
- Je ne sais pas. Je ne peux pas me voir.
- Je te montrerai les photos…
Elle remarque seulement l’appareil, posé sur son trépied.
Est-ce parce qu’habituellement il le porte en bandoulière ou à la main qu’elle ne lui a pas prêté attention jusqu’à présent ?
Le photographe dépend les tentures noires et un grand miroir apparaît qui la reflète entièrement. Elle découvre une jeune femme mince aux cheveux courts ébouriffés, suspendue telle une étrange ballerine. Sans tutu.
Ses pieds touchant à peine le sol.
Son regard empli d’une curiosité rieuse.
Son souffle s’accélère un peu.
L’attente, tout particulièrement cette attente-là, qui commence à peine, lui paraît déjà interminable.
Clic clac.
L’écho de la première prise renvoyé par la glace la surprend. Le deuxième beaucoup moins. Elle ne réagit plus aux suivants.
Son compagnon vient lui montrer les photographies.
Une inconnue aux lèvres tuméfiées.
Images en noir et blanc.
La lumière est parfaite.
- Tu es vraiment doué.
- Le modèle y est peut-être pour quelque chose?
Elle ne répond pas.
Ne sourit pas non plus.
Elle n’a pas envie d’entamer une conversation qui s’éterniserait, un débat stérile qui virerait au monologue de l’artiste : « Tu es ma nouvelle Muse. Ensemble, nous allons révolutionner le genre. »
Et d’une, elle ne supportait plus ses logorrhées emplies de contre-vérités - à une époque, elle s’était demandé s’il n’était pas bipolaire - et de deux, l’heure n’était plus aux promesses. Surtout qu’elle le connaissait suffisamment pour savoir qu’à peine disparue, elle serait remplacée.
Il n’était pas homme à rester sans femme.
Et dans sa vie. Et, particulièrement, dans son lit.
Modèle ou pas.
Muse ou prétendue muse.
Il repose son appareil photo sur le trépied, va fouiller dans son sac, revient vers elle, muni d’une tige en bambou. A sa vue, elle ne ressent aucune peur. Juste cette sourde envie qui grandit.
La baguette fend l’air avec un bruit qui la ravit.
Plusieurs fois, elle tente d’esquiver les coups.
Par jeu. Pour faire durer le plaisir.
Clic clac.
Nouvelles photos.
Cette fois, la jeune femme en noir et blanc a les yeux plus brillants.
Il avance vers elle, caresse du bout des doigts les boursouflures qui redessinent son corps. Sa peau n’a pas encore craqué.
Elle gémit.
Leurs langues s’emmêlent.
Des pinces viennent agrémenter la pointe de ses seins. Il serre lentement les vis. L’acier broie ses tétons. Brûlures exquises.
Habilement, il ajoute deux balles noires aussi grosses que des balles de ping-pong, mais bien plus lourdes. Elles pendent au bout d’une chaînette.
D’une chiquenaude, il les fait se balancer.
S’en amuse quelques minutes.
Leurs bouches se mangent à nouveau pendant que sa main fouille son entrecuisse.
- Tu es trempée.
- Grâce à toi.
Il titille son clitoris qu’elle a plus grand que la plupart des femmes. Cette différence lui a immédiatement plu. Il l’appelait parfois sa petite bite. Il l’avait rarement sucée. Ceci expliquant peut-être cela. S’il les avait parfois imaginés avec un autre partenaire, c’était toujours avec une femme. Il n’aurait pas supporté de toucher un autre homme.
De son autre main, son amant photographe saisit la bougie la plus proche et lentement déverse la cire chaude sur ses seins déjà meurtris.
Le plaisir augmente. Encore.
- Je vais te faire jouir.
- Oui. Oh oui…
Les photos suivantes la montrent comme habitée d’une forte fièvre.
Il utilisera d’autres sextoys sur elle qu’il aura sortis de son fameux meuble chinois, situé dans l’unique chambre de son appartement, dans un immeuble classé d’un vieux quartier parisien. Des vibromasseurs.
Des godemichés.
Des grands.
Des petits.
Des simples.
Des ultra-perfectionnés.
Il lui confectionnera aussi un harnais de corde aux motifs Karada, prenant bien soin de laisser sa croupe entièrement dégagée. Pour le fouet.
Les lanières de cuir strieront puis fendront la peau de ses fesses. Le manche entrera et sortira de son con jusqu’à ce qu’elle jouisse dans de longues éclaboussures, tout à la fois crémeuses et liquides.
Il la débarrassera de sa résille en utilisant un couteau. Il n’avait jamais apprécié les ciseaux à bondage. Mais il était vraiment un maître en Kinbaku-bi et savait utiliser les points de shiatsu qui décuplaient le plaisir.
Ces photos-ci la montreront femme fontaine, exaltée.
Pendant tout le temps que durera cette séance sadomasochiste, jamais il ne la pénétrera. Non pas qu’il ait des problèmes d’érection.
Bien au contraire.
Il est capable de bander beaucoup plus longtemps que la plupart des hommes. Tout du moins, il bande ferme des heures durant, comme tous les meilleurs amants qu’elle a pu avoir. Même s’ils n’ont pas été très nombreux.
Mais à l’inverse d’eux, il est avare de son sperme et n’aime pas gaspiller sa semence.
C’est ce qu’il lui a répété. En boucle.
Depuis le début.
Tout au long de leur relation, il n’aura éjaculé qu’une seule fois dans sa bouche, de longs jets dont elle est capable, aujourd’hui encore, de se remémorer le goût.
C’est sa madeleine à elle.
Cette unique fellation éjaculatoire avait duré des heures et des heures. Elle le suçait toujours jusqu’à en avoir des crampes aux mâchoires et aux doigts. Il adorait qu’elle l’encule pendant que sa langue et ses lèvres montaient et descendaient sur sa queue, jusqu’à la garde, et sans qu’elle oublie de lécher et de gober ses couilles.
Quelques rares autres fois, il avait giclé dans son vagin.
Il avait juté un peu plus souvent dans son cul.
Comme quoi, ce n’était pas une question de prodigalité.
Elle le soupçonne de souffrir d’anéjaculation.
Il était capable de jouir et d’éjaculer quand il se masturbait. Seulement il stimulait sa verge de pressions manuelles très fortes qu’aucun vagin ne pourrait jamais reproduire. Il lui reprochait de ne pas serrer assez quand elle le branlait.
Ou il se retenait à cause de ce mauvais apprentissage de la sexualité.
Ou il avait peur de perdre tout contrôle. Cette inhibition collait d’ailleurs avec sa personnalité rigide et compulsive.
Douleurs et jouissances.
Jouissances et douleurs.
A chaque nouvel orgasme, elle grimpe un nouveau palier.
Elle commence à fatiguer aussi.
Cela se remarque sur les derniers clichés.
Le photographe abaisse un peu la chaîne du plafond, afin qu’elle puisse reprendre son souffle, les pieds posés au sol.
A cet instant précis, la jeune femme perçoit que la suite des évènements va prendre une nouvelle tournure.
Son esprit va quitter son corps.
Elle est prête pour cet ultime voyage.
Depuis bien plus longtemps que lui.
*
* *
Lentement, il promène la lame sur son ventre nu.
Elle ne prononce pas un mot, attendant la première morsure comme une délivrance.
Il est derrière elle à nouveau suspendue, la pointe des pieds touchant à peine le sol.
L’appareil photo est posé sur son trépied, le déclencheur programmé.
- Tu prendras des photos, après?
Elle s’en veut d’avoir posé une question aussi conne. Bien sûr qu’il continuera à la shooter ! Jusqu’aux premiers signes de la rigor mortis. Le fait qu’elle soit pendue et qu’il utilise un couteau ralentirait sa venue.
Cette conclusion avait abouti lors d’une des rares discussions qu’ils avaient eues.
Ces nuits-là, il avait vraiment été à l’écoute de son envie.
C’est même à cause de sa trop grande motivation qu’il était parti de nombreuses fois. Cependant, il était toujours revenu. Parce qu’en fait, ils voulaient la même chose tous les deux : atteindre le nirvāṇa.
Elle serait enfin délivrée de son ego qui n’en faisait qu’à sa tête et dont elle n’avait jamais réussi à se débarrasser.
Il connaîtrait la gloire après laquelle il courrait depuis des lustres et deviendrait sans doute LE photographe à la mode.
Celui que les stars réclament en se roulant par terre.
Celui que les amateurs idolâtrent.
Celui que les autres artistes exècrent.
Ce qui, mais elle ne lui avait jamais dit, était beaucoup plus vulgaire et n’avait aucun rapport avec sa recherche à elle, purement spirituelle.
La légende urbaine voulait qu’il existât des snuff movies.
Des journalistes, Interpol ou le FBI mettaient en doute ces films pornographiques où un ou des acteurs étaient torturés et tués sous l’œil de la caméra. Sans aucun trucage.
Tous les deux avaient décidé qu’ils allaient créer un snuff pictures.
Les meilleurs tirages seraient exposés dans les galeries les plus cotées.
Une sorte d’hymne à l’amour absolu.
Après tout, il était sadique.
Et elle était résolument maso.
Elle pouvait entièrement se donner à un homme. Corps et âme.
Il était né pour être dominant. Elle l’avait su avant lui.
« Tu prendras des photos, après ? »
Juste un relent de son putain d’ego ! C’est vrai, elle ne verrait jamais les dernières photos. Et alors ? D’autres les contempleraient. Rien n’est immuable. Surtout pas une existence humaine.
Leurs yeux se croisent dans le miroir.
Il lit dans les siens l’attente gorgée de plaisirs.
Elle voit dans les siens l’excitation suprême, celle qu’un être humain ressent lorsqu’il tient une vie entre ses mains. Celle qui a dû faire bander Dieu.
Là, il jubile de détenir son droit de vivre ou de mourir. Son érection mentale est pareille à celles d’un Dionysos et de satyres sortis d’un thiase interdit : PRIAPIQUE.
Ose, bordel !
Une première estafilade survient.
Il amène la lame à ses lèvres.
Elle lèche.
De la pointe de son couteau, il joue avec sa langue.
Clic clac.
Une deuxième coupure, tout aussi légère.
Clic clac.
Une troisième, plus profonde.
Puis, une quatrième.
Après, elle ne comptera plus. Elle sentira seulement les brûlures de cette dentelle écarlate dont il lui revêt entièrement le corps.
Sur les derniers clichés qu’elle est encore capable de voir, elle distingue les coulures de son sang qui se mélangent à celles de la cire. Seule la lumière indique à son œil averti que le relief est différent.
Ensuite ?
Elle n’aura pas vraiment conscience de ses derniers instants.
Les coups de lame se feront plus profonds, les plaies plus larges.
Le sang coulera jusque sur ses longues jambes, puis sur ses chevilles et s’étalera sous la pointe de ses pieds.
Il l’embrassera lorsque le couteau pénétrera juste entre la cinquième et la sixième côte, et qu’il donnera un quart de tour à l’arme pour les écarter.
Ensuite, il fera aller et venir sa main à l’intérieur de sa cage thoracique, comme s’il s’agissait de son sexe : il caressera son cœur comme il branlerait sa queue. A l’écraser.
Elle expirera dans un « je t’aime » qu’il n’entendra jamais.
Car, râlant et jouissant au même instant, il maculera son cul de grandes giclées de sperme.
Clic clac.
*
* *
Une jeune femme aux cheveux auburn entre dans la salle d’exposition.
Beaucoup de monde pour ce vernissage annoncé comme LE vernissage de l’année. A ne surtout pas manquer !
Les plus grands médias sont là.
Les plus grands critiques aussi.
Pas mal de curieux. Et de jaloux.
Ça roucoule. Ça jacte.
Ça s’horrifie. Ça s’extasie.
Avant de revenir se poser à Paris, la ville lumière, et après avoir voyagé jusqu’au Japon et aux Etats-Unis, l’exposition s’est baladée dans les plus grandes villes d’Europe.
DECHIRURES, snuff pictures
L’AMOUR A MORT
Partout dans le monde, des spécialistes de la photographie cherchent à comprendre le mystère de ces compositions. Des étudiants écrivent des thèses. Des enquêteurs spécialisés tentent de découvrir le moindre indice qui pourrait les aider à faire tomber ce salopard, cet immonde salaud. Cet Artiste hors du commun plusieurs fois récompensé par les prix les plus prestigieux.
Elle contemple les photos une à une, avec soin. Pendant de longues minutes.
De très près ou avec beaucoup de recul.
Elle sourit toute seule. Puis sort fumer.
- Vous avez déjà songé à poser ? lui demande-t-il en allumant sa cigarette.
Elle pose sa main sur la sienne, pour abriter la flamme, aspire la première bouffée et l’expire en le regardant droit dans les yeux.
Il frissonne de gourmandise.
Elle n’a pas retiré la main de sur la sienne.
Alors, il l’emmène.
FIN
Le soleil commence à baisser les rideaux.
Je vous imagine, là-bas, sur une plage de sable chaud. Rires et papouilles au programme. Veinards !
Ne me fais pas trop attendre, hombre ! L’ironie du sort, on peut toujours tenter de lui niquer la gueule.
- Tu savais que les langues de putes pouvaient être masculines ?