Etre homosexuelle. Voilà bien une question que je ne me suis jamais vraiment posée. Il y a bien eu ce patin au goût de rhum-orange roulé à une des mes meilleures amies du lycée, mais au final cela n’est jamais allé plus loin. Alors quand Ladies Room a lancé sa journée “Coming Out”, je me suis dit qu’il était enfin l’occasion pour moi de tester une nouvelle sexualité.
Caroline, ma copine lesbienne militante active dans le “milieu”, me prévient “Attention où tu mets les pieds Brit, être gay ce n’est pas une profession”. Merci j’avais compris. Il ne manquerait plus qu’elle me traite d’homophobe. N’empêche que moi en lesbienne, l’expérience me tente. Il m’apparaît comme une évidence que je ne pourrais jamais me sentir lesbienne sans dévoiler ma sexualité à tous. Je procède par palier, histoire de n’oublier personne au passage.
Première étape, je fais mon coming out face à toute ma famille.
Et comme il n’y a jamais de vrais bons moments pour l’annoncer à ceux qui vous ont donné la vie, je choisis dimanche midi, juste entre le jambon de Bayonne et le gigot. Finalement, j’aurais dû mieux y réfléchir. Ma mère pleure sur la vinaigrette, mon père se lève de table au prétexte qu’il n’a pas fini de passer la tondeuse et mon frère rigole comme un nul me rappelant qu’à 4 ans j’avais tenté de faire pipi debout signant la mort de mes Kickers neuves.
Bilan : La vinaigrette a un drôle de goût, la pelouse mesure 1 mm à la règle. Mon frère s’inquiète de mon bien-être sexuel : “Ça te manque pas un bon pénis ?”. Je prends trois verres d’Armagnac, histoire de réchauffer mon âme, mon coeur et l’ambiance étrange qui s’est soudainement installée.
Deuxième étape : mon coming out aux copains.
Ils sautent tous de joie ravis d’avoir enfin une lesbienne dans le groupe, “C’est vrai, on n’en avait pas”. Seuls deux, anciens petits amis de leur état, font la tête. Franck me dit que c’était bien la peine de lui avoir fait une scène digne de la grande colère de l’Etna quand il m’a annoncé après 3 mois de liaison passionnée qu’il était homo. Quant à Laurent, il adopte l’attitude du chien avec la queue entre les pattes. “Tas changé de bord parce que j’étais un mauvais coup ?” Non gros naze, mais c’est vrai que j’aurais dû me poser des questions à cette époque. J’ai cependant droit à un cadeau collectif pour fêter ça : une sur-chemise de bûcheron. Je fais la gueule et ne manque pas de leur faire remarquer que les Manolo vont aussi à des pieds de lesbienne. Eh oh les gars, c’est fini le temps du cliché “Gazon maudit”. Allez, filez-moi une bière.
Troisième étape : mon coming out au boulot.
J’ai de la chance, je travaille dans le milieu ô combien hype et ô combien ouvert qu’est celui de la publicité. C’est donc décontractée qu’entre la clope et le café, j’annonce d’un ton assuré : “Ma nouvelle compagne m’a épuisée. Pas dormi de la nuit, suis crevée…”. Moment de solitude… Le blanc commence à se faire long… Conclusion, la pub, ce n’est pas un milieu si open minded que ça. Mes collègues masculins m’envoient des mails avec des vaches machouillant du gazon, le tout conclu d’un “lol”. Les filles évitent bizarrement de prononcer le mot “minou” en ma présence et ce même s’il s’agit d’un chat. Mon patron, pour finir, me donne virilement des tapes dans le dos en me faisant remarquer que la nouvelle standardiste est plutôt bandante.
Je m’enfile une bouteille de whisky salvatrice. J’en profite pour poster un CV à la Trésorerie Générale. Si ça se trouve les inspecteurs des impôts sont de vrais gais (gays ?) lurons.
Quatrième étape : mon coming out en boîte de nuit.
Il est beau, il sent bon l’Hypnôse de Lancôme, il danse comme… heu… comme il peut, et surtout il me lance des regards langoureux. Il s’approche, me parle de tout de rien. Je me sens bien. Sauf que forte de ma mission d’investigation je m’entends lui dire “Aujourd’hui, j’peux pas, je suis lesb’. Mais demain par contre je redeviens hétéro”. Son visage se métamorphose, comprendre il prend un air super réjoui : “ah ouais ? Et t’amènes ta copine qu’on rigole à trois”. Je souris, la Grâce est avec moi ; je viens d’échapper à une sauterie avec un débile à QI de charentaise. Merci mon Dieu !
- Alors, me demande Caroline, c’est quoi ton bilan de “Je suis homosexuelle” ?
- Je me demande juste si ce n’est pas la solution pour détecter les atrophiés du cerveaux…
- Ma pauvre BritBrit, t’as vraiment rien compris.
Rien compris moi… Faut que je recommence l’expérience, c’est ça ? Oh non, c’est pas comme ça que je vais enfin trouver un mec !
(cc) Alex Dram