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Vu sur Drôle de jeu, Jon Blackfox
Jon Blackfox était passé sur le groupe facebook « auteurs érotiques » pour annoncer la publication de sa deuxième nouvelle chez Orgazmatrix. Comme je ne connaissais ni l’auteur, ni cet organisme, je suis allée voir… Le site tout d’abord : Orgazmatrix se définit comme un « label littéraire indépendant. Romans, textes et nouvelles érotiques et pornos, au format numérique […]
Cet article provient de Littérature érotique
Jeudi 18 septembre, 7h32
Le réveil est difficile. Le manque de sommeil se fait sentir et je ne parviens pas à trouver la force de me lever. En prenant mon téléphone, je me souviens du texto que m’a envoyé Ethan hier soir. L’idée de passer une nouvelle soirée torride en sa compagnie me ravit. Mais ma joie est de courte durée car un élément auquel je n’avais pas pensé me revient tout à coup en mémoire. J’avais promis à ma tante qui habite un peu plus loin dans la banlieue et que je n’ai pas vue depuis plus de deux ans de passer la soirée chez elle et d’y dormir. Une parole est une parole, pas question de me défiler. Alors que j’avais à peine réussi à fermer l’œil tellement ce sms m’avait excitée, voilà que l’idée de cette nuit folle s’envole. Déception. Bon, après tout, ce ne sera sûrement que partie remise. J’en informe aussitôt Ethan par sms.
« Bonjour Ethan. Je ne suis pas disponible ce soir. A une prochaine fois. » Je décide de ne pas lui donner de motif, un peu de mystère ne fait pas de mal ! Il me répond dans l’après-midi : « C’est vraiment dommage. Je ne te l’ai pas dit hier, mais je pars à l’étranger pour trois mois. Et je pars demain. Je voulais passer cette dernière nuit avec toi. On se reverra à mon retour, j’espère… ».
Quoi ?! A l’étranger ? Où ? Pourquoi ne pas me l’avoir dit plus tôt? Ce sms provoque en moi un sentiment de de désarroi, mêlé à de la colère. Mais je me reprends. Après tout, c’est peut être mieux comme ça. Je viens d’arriver à Paris, de belles rencontres m’attendent, une nouvelle vie se dessine devant moi. Ethan appartient au passé. Pas question de m’apitoyer sur mon sort, je tente de rester positive. Reste que trouver un aussi bon amant me parait compliqué, tant faire l’amour avec lui me faisait vibrer.
Mercredi 24 septembre, 20h30
Les cours reprennent demain. Je suis à la fois excitée et angoissée. Je me glisse sous ma couette et me décide à commencer le livre que m’a prêté Eva, ma cousine. « Ne lâche pas ma main », de Michel Bussi. A peine eu le temps de lire trois phrases que la sonnerie de mon téléphone me fait sursauter. C’est Axel, mon meilleur pote :
– Salut Mademoiselle, afterwork au QG ce soir, je passe te chercher dans une demi-heure.
– Hein ? Une demi-heure ? Au QG ? Quoi, mais non, demain c’est ma rentrée !
– Allez à tout à l’heure !
Il raccroche. J’hésite un instant. J’avais décidé, pour une fois, d’être raisonnable. Mais bon, la fin des vacances, ça s’arrose, non ? Allez hop, j’allume la musique et je file sous la douche. En me savonnant, je réfléchis à la tenue que je vais porter. J’opte pour une robe vert émeraude et des escarpins camel.
21h37, Axel frappe à la porte. Je sais qu’il m’avait dit qu’il passerait à 21 heures pour être sûre que je sois prête. C’est sa technique depuis que je suis arrivée avec plus d’une heure et demie de retard à un rendez-vous.
– C’est quoi le QG ? je demande.
– C’est un bar qu’on a surnommé comme ça, parce qu’on y va tous les mercredis soirs, avec mes collègues. Tu verras, c’est sympa.
Je suis aussitôt séduite par l’endroit. Une partie est en extérieur, avec un bar qui forme un cercle au milieu de la terrasse. Les serveurs sont au centre et ont l’air débordés. Il faut dire qu’il y a énormément de monde. Il y a de la musique, mais le volume est relativement faible, ce qui permet de discuter sans avoir à crier. Plus au fond, une grande salle fait office de boîte de nuit, mais reste pour l’instant déserte, excepté deux personnes qui dansent, visiblement fortement alcoolisées. On s’approche du bar et Axel me désigne quelqu’un de l’autre côté. « Ah, tiens, il y a Enzo, je croyais qu’il ne devait pas venir ». Je fronce les yeux pour mieux l’apercevoir. Il est grand, brun, métis, plutôt baraqué. Tout à fait mon genre. « OK. Présente-moi… ». Axel rit car il me connait et sait très bien ce que cela veut dire. On se faufile tant bien que mal pour rejoindre l’autre côté. Comme prévu, il me présente :
« Zoé, ma meilleure pote. Enzo, un collègue de boulot ».
Enzo plante son regard dans le mien : « Enchanté, Zoé ! J’ai entendu parler de toi, ravi de te rencontrer enfin.» Il nous désigne une table et nous propose de nous installer. Il explique à Axel qu’un certain Monsieur B. sera là, ce qui n’a pas l’air de le réjouir. Il s’absente un instant pour revenir avec une sorte de vase rempli à ras bord, une dizaine de pailles de toutes les couleurs à l’intérieur. Après l’avoir déposé au centre de la table, il prend place à côté de moi.
– C’est la tradition ! m’explique-t-il, enjoué. C’est un Mojito géant. Comme ça, on partage tous nos microbes. Ça renforce les liens ! Goûte.
Trois personnes nous rejoignent, deux jeunes filles et un homme d’une quarantaine d’années, un verre de bière à la main. Enzo commence à me poser un tout un tas de question. Ce que je fais dans la vie, d’où je viens, ce que je faisais avant. Je note qu’il ne me demande pas si je suis célibataire. Peut-être ne l’est-il pas ?! Je réponds à ses questions et les lui retourne. Il m’explique qu’il est dans la même boîte qu’Axel, que les deux filles sont des collègues, et l’homme à la bière, son supérieur. On se met ensuite à parler de Paris. Comme il connait bien la ville, y habitant depuis une dizaine d’années maintenant, il me propose de me faire découvrir tout un tas d’endroits. Je l’écoute parler avec attention, tout en sirotant de temps en temps du mojito, qui d’ailleurs me semble bien corsé. Au fil de la conversation, sûrement sous l’effet du rhum qui commence à monter, je me sens d’humeur de plus en plus charmeuse. Je devine bien que je lui plais, ce qu’il ne tarde pas à me confirmer :
– Tu vas me faire craquer avec ton regard…
– Et ben craque… Qu’est-ce que tu attends !
– Je t’aurais bien embrassée, mais avec le boss à côté, ça me bloque un peu.
Il pose une main sur ma cuisse. Je ne l’enlève pas. Au contraire, tout en me félicitant intérieurement de porter une robe, je la remonte un peu plus haut. J’ai toujours prêté attention aux mains des hommes et les siennes sont comme je les aime, larges et grandes. J’admire le contraste de sa peau foncée sur ma cuisse blanche. Il m’excite.
– On s’en fiche de ton boss. T’es plus au boulot là.
– Mmm, oui mais c’est compliqué… Mais crois-moi, s’il n’avait pas était là, ça fait longtemps que je t’aurais embrassée.
Ses doigts s’aventurent un peu plus loin, jusqu’à effleurer mon tanga en dentelle. Je décroise mes jambes pour lui faire comprendre que j’ai envie qu’il me caresse. Pas besoin de lui faire un dessin, ses doigts se faufilent aussitôt entre mes cuisses et me frôlent par-dessus la dentelle. Il prend ma main et, en s’assurant que personne ne puisse voir ce qu’il fait, la pose entre ses jambes pour me faire sentir son érection. Il murmure dans mon oreille : « Tu as vu l’effet que tu me fais. Tu es trop excitante… ». Sa phrase accentue mon désir. Discrètement, j’écarte ma culotte pour sentir ses doigts glisser sur mon clitoris. Mon cœur bat vite et fort. Je n’ai qu’une envie, c’est qu’il me prenne, là, tout de suite.
Soudain, Axel, qui était assis de l’autre côté de la table, en face d’une des filles, se lève, contourne la table et s’approche de moi. Il a le don d’arriver aux mauvais moments ! Il me dit qu’il est l’heure d’y aller, sinon on va rater le dernier métro. Je fais la bise à Enzo en lui lançant un rapide « A la prochaine ! » Il me retient : « Rentre avec moi ». Faisant preuve d’une sagesse que je ne me connaissais pas, je décline sa proposition en lui expliquant que j’ai cours le lendemain. Il faut que je dorme si je ne veux pas commencer l’année comme un zombie.
Mais voilà, arrivée chez moi, impossible de dormir. J’ai même hésité à me caresser sous la douche tant ses caresses m’avaient émoustillée. Tout à coup, idée lumineuse. J’envoie un texto à Axel pour lui demander le numéro d’Enzo, priant pour qu’il ne dorme pas déjà ou qu’il n’ait pas laissé son téléphone en silencieux. Ouf, il me répond dans la minute, en finissant son message par un « Je te souhaite une excellent nuit. J’imagine que tu seras bien reposée pour ta rentrée ! ». J’envoie un sms à Enzo avec mon adresse. Rien de plus.
2h23, mon téléphone sonne.
– C’est Enzo. C’est bien Zoé ? Je suis en bas de chez toi.
– Enzo, quelle bonne surprise ! Je descends t’ouvrir !
Je suis en robe. Une robe de plage qui me sert aussi accessoirement de nuisette. J’enfile à toute vitesse une paire de tongs et je descends. J’ai froid mais je m’en moque. Je lui ouvre le portail et le prends par la main pour qu’il me suive. Il me tire pour que je m’arrête, m’attrape par le menton et m’embrasse. Divinement bon. Je lui fais signe de me suivre dans l’escalier. J’habite au troisième étage mais l’ascenseur est en panne depuis plus de trois mois maintenant. Alors que je marche devant lui, il m’attrape par les hanches et se colle contre moi. D’une main, il écarte les cheveux de ma nuque et commence à l’embrasser. Son souffle, chaud et humide, me fait frissonner. Il se presse un peu plus contre moi et je sens son érection contre mes fesses.
– J’ai trop envie de toi… T’es trop sexy.
– J’ai trop envie aussi. J’ai pas arrêté de penser à toi dans mon lit.
Ses mains glissent sous ma robe pour parcourir mon corps. Je ne porte ni de culotte, ni de soutien-gorge, ce qui n’a pas l’air de lui déplaire. Il s’arrête sur mes seins, puis descend le long de ma taille et dessine le contour de mes hanches, tout en continuant de parcourir ma nuque de ses lèvres. Mon souffle s’accélère, ses caresses me rendent folle, je brûle de désir. Je me retourne pour déboutonner son pantalon et j’attrape sa queue. Tellement dure… Je commence à faire de lents va-et-vient. Il fouille dans sa poche et en sort un préservatif en me lançant un regard interrogateur. J’acquiesce de la tête en souriant et m’en empare pour le lui enfiler. Je me retourne à nouveau pour qu’il me prenne par derrière. Il est très grand et la marche d’avance que j’ai sur lui me permet d’être à la hauteur parfaite. On se trouve où l’escalier tourne, ce qui me permet de prendre la rambarde dans chaque main pour me stabiliser. Il commence à me pénétrer doucement. Un gémissement s’échappe de ma bouche. Je me cambre bien, pour qu’il puisse aller un peu plus profond. Ses mains tiennent fermement mes hanches. Je tourne ma tête pour le regarder. « T’es trop belle… ». Il accélère un peu les mouvements, mais le bruit du portail qui se ferme nous fait tressaillir. On s’interrompt et on monte les trois étages rapidement en riant.
On arrive chez moi. J’avance vers le lit en enlevant ma robe. Je m’allonge, écarte les jambes et commence à me caresser devant lui. Il enlève ses vêtements à toute vitesse sans me quitter des yeux. Il me rejoint sur le lit et m’embrasse langoureusement. Il fait glisser lentement ses lèvres jusqu’à mes seins, et commence à titiller mes tétons qui durcissent sous sa langue. Il descend encore et arrive entre mes jambes, où se trouve encore ma main. Il commence par lécher mes doigts, puis les écarte afin de jouer avec mon clitoris. Je suis trempée, mon excitation est tellement forte que je pourrais jouir tout de suite. Je le repousse doucement et me redresse. Je l’embrasse à nouveau, en parcourant son corps du bout des doigts. Je descends jusqu’à sa queue, que je prends à pleine main pour faire de grands va-et-vient, en plantant mon regard dans le sien pour pouvoir lire sur son visage l’effet que je lui fais. Ses yeux brillent, son désir semble être aussi fort que le mien.
Il attrape un préservatif dans la poche de son jean laissé par terre, l’enfile et me pénètre doucement. Pour qu’il puisse me prendre plus profondément, pour le sentir encore mieux, je relève mes jambes et les pose sur ses épaules. Il est brulant. Ses va-et-vient sont lents et profonds. A chaque fois qu’il s’enfonce en moi, un gémissement s’échappe de ma bouche sous l’effet qu’il me procure. Trop bon. Il continue en accélérant peu à peu la cadence, puis ralentit avant de se retirer pour s’allonger sur le dos : « Viens sur moi ». Je l’enjambe. L’équilibre du lit est précaire. Il s’agit d’un sommier posé sur quatre pieds usés. Sous mes coups de reins, un des pieds se décale et le lit bascule. J’éclate de rire. Je prends la couverture et la pose par terre pour m’y installer à quatre pattes, le dos bien cambré. Ne le sentant pas se coller à moi je tourne la tête. Il est un peu plus loin, derrière moi, à genoux, et me regarde, en se caressant. « Putain, t’es vraiment trop belle ». Son compliment me fait sourire.
Il finit par me rejoindre, se colle à moi et me prend à nouveau. Il attrape fermement mes fesses et fait des mouvements de plus en plus rapides. Il passe sa main pour caresser mon clitoris en même temps. J’écarte un peu plus les jambes et relève un peu le buste. Je sens l’orgasme s’approcher. Je tente de lui enlever la main pour ne pas jouir tout de suite. Il comprend et continue à me caresser. « Vas-y, jouis… Jouis pour moi… Allez, jouis… » souffle-t-il dans mon oreille. Je sens l’orgasme monter, monter, puis exploser en moi. La sensation est exquise. Le plaisir, si fort qu’il en est presque violent, se répand dans tout mon corps. Mon cœur s’accélère, je ne peux pas retenir mes cris… Il m’attrape un peu plus fermement, va un peu plus vite, plus fort, et me dit dans un murmure à peine compréhensible qu’il arrive lui aussi. Un râle grave s’échappe de sa bouche, il s’abandonne.
Une demi-heure plus tard il est parti. Je tire le matelas du sommier pour le poser par terre et m’endors presque aussi sec. En oubliant de mettre mon réveil…
Photo : alecska © (flickr)
Mi-juillet, l’initiative du parlementaire valaisan Mathias Reynard pour étendre la pénalisation du racisme à l’homophobie a été retoquée. Rebelotte ce 23 septembre avec l’initiative genevoise. Le Conseil des Etats a dit niet. Quand ça veut pas, ça veut pas.
Le cas Bortoluzzi
La proposition genevoise a pour but de donner la possibilité aux personnes homosexuelles de s’attaquer pénalement aux propos homophobes. Mais pour le PDC Stefan Engler, le droit actuel suffit, rapporte Le Matin. Sauf que pour Robert Cramer, Vert genevois, la communauté homosexuelle «mérite une plus grande protection.»
Surtout, l’absence d’une base légale claire ne permet pas de punir les propos homophobes. Est punissable la discrimination basée sur la notion floue de «mode de vie», mais rien sur les injures faites aux personnes homosexuelles. La Fédération Genevoise des Associations LGBT a invoqué les propos homophobes de Toni Bortoluzzi, le fameux «cerveau à l’envers»: «La législation actuelle ne permet pas de punir ses paroles.»
La Fédération rajoute que «le code pénal actuel ne permet pas de prendre en considération le caractère homophobe ou transphobe d’une infraction commise, en cas d’agression physique par exemple.» Alors que d’autres pays ont déjà une loi protégeant spécifiquement la communauté homosexuelle, Robert Cramer rappelle que «le taux de suicide est bien plus élevé chez les adolescents homosexuels.» Et qu’il est donc temps d’étendre la protection et de punir spécifiquement les attaques homophobes.
Le débat continue
Pourquoi ce refus? Le Conseil des Etats n’a pas voulu privilégier l’orientation sexuelle dans cette extension de la punition, et mettre de côté les discriminations basées sur l’âge ou le handicap. Surtout, un rapport doit être rendu, promis juré par le Conseil Fédéral, sur la protection contre la discrimination. Et tout le monde l’attend avant de bouger un cil.
Heureusement, l’initiative doit encore passer par le Conseil National. Quant au projet valaisan, qui avait été recalé, il a finalement eu le feu vert de la commission des affaires juridiques de la Chambre du peuple, mais en ciblant uniquement le point qui traite l’extension de la norme antiraciste, sans modifier la constitution. Et on patiente, encore.
Dans l’équipe The Holy Culotte, on compte quelques globe trotteuses – outre les voyages fréquents, nous avons vécu au Canada, en Allemagne, au UK… Où nous avons encore des ami.e.s avec qui nous échangeons régulièrement. Lors d’une de mes récentes discussions avec une amie exilée à Montréal, nous avons abordé le sujet du fameux « harcèlement de rue ». Et là, cette amie m’explique qu’à Montréal (en tous cas dans les quartiers qu’elle fréquente), elle ne se fait pratiquement jamais arrêter dans la rue, rarement draguer (même en boite), et surtout que depuis qu’elle vit là bas (ie quelques années), elle a oublié le concept de peur quand elle rentre chez elle le soir. À n’importe quelle heure, dans n’importe quel état et habillée comme elle veut, elle n’a jamais ressenti ce sentiment d’insécurité ou le besoin de « faire attention » tel qu’elle l’a vécu par exemple à Paris. Elle ajoute que pour ses ami.e.s Québécois.es, ce qui se passe en France sur ce point est juste inconcevable et hallucinant.
J’ai repensé à mes expériences à l’étranger, discuté avec mes ami.e.s expatrié.e.s, observé un peu ce qui se dit sur les réseaux sociaux (on suit beaucoup les sites Québécois par exemple), et il m’a semblé qu’en effet, il n’ y a qu’en France où je me sois sentie « victime » du harcèlement de rue, contrainte de faire attention à comment je m’habille pour sortir, vigilante quand je rentre tard.
Étudiante, j’ai vécu quelques mois en Allemagne. Ambiance Erasmus oblige, on sortait en boite 3 à 4 fois par semaine, et l’alcool coulait à flots. J’adore danser, et je sortais souvent habillée « très » sexy : mini jupe et talons, avec un haut léger pour ne pas crever de chaud. Je me souviens de cette sensation étrange d’être invisible aux yeux des mecs – les Allemands ne draguent pas, ou du moins ils le font d’une manière bien différente de mes compatriotes Français. Là bas, j’étais bien loin de la culture méditerranéenne dans laquelle j’ai passé une bonne partie de mon adolescence (j’ai grandi dans le Sud de la France) et où c’est normal de regarder l’autre, les garçons se permettent facilement des remarques, et si on sort en boite en jupe, on se fait systématiquement draguer (hors présence d’un mec à nos côtés, et encore…). Ça avait été à l’époque une sorte de choc culturel, mais je n’avais jamais réalisé à quel point ce sentiment est spécifique à la France avant d’en parler avec mes ami.e.s expats et étrangers.
Bien sûr je n’ai pas fait le tour du monde et il me semble qu’on se fait aussi aborder dans la rue en Italie ou en Espagne, ce sont des cultures beaucoup plus « tactiles » que celles du Nord de l’Europe, mais je ne crois pas que cette notion de « harcèlement de rue » y existe comme chez nous ni que les hommes se permettent ce qu’ils se permettent en France.
Au delà de l’attitude des hommes envers les femmes dans les lieux publics, on peut prendre l’exemple du regard porté sur une femme en jupe et talons. Je pense que tout le monde a déjà halluciné sur la façon dont les Anglaises s’habillent pour sortir – toutes cuisses dehors, quel que soit leur poids et leur allure #noshame. Je les envie, ces Anglaises, de ne pas se poser la question de ce qu’on va penser d’elles parce qu’elles exhibent leurs fesses et leurs seins dans des looks qu’on considèrerait à Paris comme vulgaires. Le fait est qu’à Berlin, Londres, Barcelone ou Montréal, la culture de l’apparence n’a pas lieu d’être – dans la rue, on croise des gens aux looks divers, les gens sont tatoués, colorés, et personne ne semble se préoccuper plus que ça de l’apparence de son voisin de table au resto. À Montréal, une journaliste a même tenté de passer un après-midi seins nus dans un quartier central de la ville, sans se faire aborder ni déranger par quiconque (son but était de démontrer l’égalité avec les hommes qui ont le droit de se promener torse nu sans provoquer d’attentat à la pudeur).
Il me semble normal de s’habiller de manière « décente » quand on est dans un lieu public – loin de moi l’idée de défendre le torse nu pour aller faire son shopping, que ce soit les femmes ou les hommes -; mais ce qui me choque c’est qu’en France on justifie une drague un peu reloue dans la rue, une main au cul dans le métro, ou même un viol par ce genre de remarque « elle l’a cherché, tu as vu comment elle était habillée ? ». De la drague de merde à la justification d’une agression par la tenue soi-disant ostentatoire, il n’y a qu’un pas (coucou la culture du viol).
Alors quoi ? Cette attitude qui considère que draguer lourdement une fille dans la rue ou lui toucher les fesses dans le métro est « normale » et autorisée serait-elle typiquement Française ? Si c’est le cas, d’où vient cette « liberté » qu’ont pris les hommes ? Est-ce lié au regard que nous portons les uns sur l’apparence des autres (j’inclus tous les sexes, que celle qui ne s’est jamais retournée sur une fille en pensant très fort que sa jupe était bien trop courte me jette la première pierre) ? Ou une question de culture, dans un pays pourtant réputé pour sa « galanterie » et son « romantisme » ?
Tout ceci pose des questions sociologiques profondes, et une réponse que je n’ai pas. Je suis curieuse cependant, pour les personnes ayant voyagé en Amérique Latine ou en Asie, qu’en est-il ? Je ne parle bien sûr pas de l’insécurité envers le vol mais bien de cette attitude sans gêne et de la drague parfois agressive de certains hommes dans les lieux publics. Quid des tenues des filles ? Avez-vous ressenti une contrainte lorsque vous sortiez, un jugement ? Il est aussi clair que chaque culture a sa pudeur (pour des raisons religieuse ou sociologiques), c’est pourquoi j’ai fait le parallèle avec des pays ayant globalement une culture et une considération des femmes comparable à celle de la France.
Avez-vous entendu parler d’un équivalent du « harcèlement de rue » ailleurs qu’en France ?
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À lire :
Drague : la complainte des Français exilés en Allemagne (je pense que cet article mériterait discussion ^^)
La drague improbable, ou comment faudrait pas devenir pire que les Allemands, une Française à Berlin raconte
Vieille France, la drague et le harcèlement de rue vus par une Française à Montréal
Stop au harcèlement de rue, l’excellent post de Diglee qui vaut le coup d’être relu – dont est extraite l’image sur le slut shaming
Apparemment on se pose aussi la question à Montréal
Photo du haut : Naked Bike Ride à Toronto
(le texte n'est pas de moi mais de xenomorf,un habitué de site )
Le Guatemala – berceau de la civilisation maya - a été un des premiers pays colonisés par les espagnols, dès le début du XVIème siècle. Les Mayas étaient organisés en cités-Etats dont certaines étaient rivales, ce que les Espagnols ont su mettre à profit pour contrôler le pays, même si le dernier royaume maya a été soumis plus de 170 ans plus tard. Indépendant en 1821, le Guatemala appartient un temps à l’Empire du Mexique, puis aux Provinces Unies d’Amérique Centrale (démantelées en 1840). A la fin du XIXème siècle le pays finit par tomber sous la coupe de l’United Fruit Company, une compagnie américaine qui va faire la pluie et le beau temps autant en termes politiques qu’économiques pendant plus d’un siècle. Aujourd’hui, la domination n’est plus si directe (au XIX, la UFC était propriétaires des chemins de fer, de ports, et de milliers d’hectares) mais le pays reste soumis aux intérêts privés et étrangers : concessions minières ou pétrolières, plantations de palme ou de bananes… jusqu’à devenir une base arrière des narcos mexicains. Ce modèle prédateur a entraîné une succession de coups d’État, de révolutions, de contre-révolutions… qui a abouti à créer les conditions d’une guerre civile sanguinaire, une des plus longues de l’histoire de l’humanité, qui a duré de 1960 (voire 1954) à 1996. En pleine guerre froide, l’oligarchie guatémaltèque a reçu l’appui des USA ; de l’autre côté, les rebelles se sont structurés en mouvements et organisations diverses. Certaines étaient plutôt marxistes (Forces armées rebelles - FAR, puis Armée de guérilla du peuple – EGP), d’autres plus liées à l’identité indigène (Organisation du peuple en arme – ORPA).
On ne saurait comprendre les divers conflits internes qui ont ravagé l’Amérique Latine (Colombie, Guatemala, Nicaragua) sans prendre en compte les très profondes inégalités notamment en terme d’accès et de propriété de la terre. Au Guatemala, très rural, qui reste un des pays les plus inégalitaires du monde, 2.6 % des propriétaires concentrent les 2/3 de la superficie du pays, pendant que 54 % des agriculteurs doivent se contenter de 14 % des terres. Ces inégalités se basent sur un profond racisme, qui a toujours structuré un système de pouvoir 1 dont la majorité indigène était absente, et entraîné le mépris à l’égard de leurs formes de vie et d’organisation. Le pays est pourtant d’une très grande diversité : 22 « nations » indigènes, plus les Xincas (peuple venu du nord avant la colonie, considéré comme indigène mais non maya), et les Garifunas (descendants d’esclaves africains).
Ce racisme et une idéologie anticommuniste soutenue par les USA a permis la mise en œuvre de stratégies de terreur : massacres de villages entiers, terre brûlée, tortures, disparitions, crimes et violences sexuelles systématiques, de la part de l’armée guatémaltèque, de groupes paramilitaires contre des villages « soupçonnés » d’être des bases arrières des guérillas. "Habituellement, la mécanique des tueries est la même : on commence par terroriser la population avec l’arrivée massive de troupes, accompagnées d’hélicoptères et d’avions qui procèdent en larguant des bombes jour et nuit. Ensuite, les soldats établissent un cordon autour des villages ciblés, tirent sur les gens qui essayent d’entrer ou de sortir ; ils maintiennent ce bouclier pendant une ou deux semaines afin d’affamer la population et de créer un état de panique. Les comités locaux d’autodéfense essaient d’installer les pièges, de creuser des tranchées au bord des chemins et d’user des feux d’artifice pour se défendre. L’armée, de son côté, essaie de brûler les entrepôts de grains et de maïs. Finalement, les soldats sélectionnent des villages et y entrent systématiquement, tirant des mitraillettes et lançant des grenades sur la population, brûlant les maisons et les champs. S’ensuit alors la fuite des villageoises, des femmes, des mères enceintes, des enfants de quatre, cinq et six ans affamés, trempés par la pluie et souvent blessés par les balles des soldats. Des témoins ont raconté des histoires de femmes violées, de mères enceintes tuées et de corps des bébés arrachés des ventres maternels et fracassés sur des roches." (Hickey, Les Mayas, victimes de l’histoire dans la guerre civile du Guatemala, 1954-1996). 83 % des plus de 200.000 morts et disparus étaient indigènes… ce qui a conduit à pouvoir mettre en avant la dimension de génocide du conflit. 626 villages détruits, plus d’1.5 millions de réfugiés ou déplacés. Dans 85 % des massacres, les femmes assassinées avaient été victimes de violences sexuelles. 35 % de ces victimes étaient des enfants et des adolescentes.
Après 20 ans d’impunité, où les victimes ont dû cohabiter avec leurs tortionnaires, les procès ont débuté autour de 2010/2011. L’ancien dictateur Rios Montt a été condamné le 10 mai 2013 pour génocide et crime contre l’humanité, faisant ainsi du Guatemala le premier pays au monde à avoir jugé un tortionnaire par un tribunal national. Quelques jours plus tard, le jugement était annulé, le procès doit encore reprendre depuis le début, et Rios Montt, très vieux et malade, ne fera vraisemblablement pas de prison. Reste quand même l’image de cette dizaine de femmes indigènes violées et torturées pendant la guerre civile qui ont attendu 17 années avant de pouvoir témoigner, sans aide psychologique, stigmatisées autant par le système que leurs communautés et qui ont pu parler et faire reconnaître les crimes dont elles ont été victimes. Ce procès, la dimension génocidaire, l’utilisation de la violence sexuelle dans les actes jugés ont aussi été rendu possible grâce à la détermination de 2 femmes : la juge Yasmin Barrios – qui a malheureusement été suspendue depuis, en raison de son rôle moteur contre les tortionnaires - et l’ancienne Ministre de la Justice Claudia Paz y Paz. Première femme à ce poste, nommée en 2010, Claudia Paz y Paz a permis en quelques années de faire chuter la criminalité de 9 %, dans un pays où structurellement l’impunité règne (moins de 2 % des cas d’homicides résolus). Son mandat n’a pas été renouvelé en mai dernier. Ses très bons résultats n’ont pas réussi à compenser ses actions qui mettaient en cause le système dominant.
Les pratiques de violence institutionnelles ont changé mais pas cessé. En 2011, 800 familles mayas ont été expulsées de leur communauté pour permettre l’installation d’un grand projet de biocarburants. Il y a actuellement plus de 3.200 conflits recensés autour de questions de ressources (terres, eau, concessions minières ou pétrolières), dont la majorité donne lieu à des pratiques de répression quasi quotidiennes extrêmement violentes et de criminalisation de la protestation sociale. Le 15 août 2014, 3 membres d’une communauté qui manifestait contre son expulsion ont été exécutés par la police. Non seulement l’État guatémaltèque ne respecte pas les droits territoriaux des communautés, ni les pratiques de négociation, mais il ne respecte pas non plus les lois qu’il a lui-même voté, les droits humains les plus élémentaires ni la Convention 169 de l’OIT – Organisation Internationale du Travail (Nations Unies) qui oblige les Etats à réaliser des consultations préalables des communautés, et quand ils le font, à respecter la décision. Cette question de l’accès aux ressources de production agricole pour les indigènes, en grande majorité paysans, prend d’autant plus d’importance quand on sait que le Guatemala est le pays où les taux de malnutrition infantile sont les plus forts d’Amérique Latine & Caraïbes – autour de 50 %, devant Haïti, et le 4ème au monde.
Cette violence et cette impunité institutionnalisées, l’exclusion économique, le manque de perspectives d’emploi, la pénétration des narcos, les inégalités, la pauvreté ont fait exploser les niveaux de violence dans les années 2000, aidé en cela par le développement des « pandillas », ces gangs de rue d’adolescent(e)s ultraviolents. Le taux d’homicides a quasiment doublé dans la dernière décennie, comme tous les pays d’Amérique Centrale. C’est une des seules régions du monde où tous les indicateurs se dégradent, avec les pays les plus dangereux du monde, où on meurt plus qu’en Irak ou en Afghanistan, poussant des milliers de jeunes honduriens, salvadoriens, guatémaltèques et mexicains à migrer en masse vers les USA.
Dans le même temps, un autre type de violence a augmenté. Le Guatemala occupe le 2ème rang des pays les plus violents à l’égard des femmes, après la Russie, non seulement en terme de fémicides, mais également les autres formes de violence malheureusement les plus courantes : violence domestique/intrafamiliale (les définitions de ces dernières changent selon les pays), violence sexuelle. Le Guatemala identifie également la violence économique ou patrimoniale. Chaque jour, 2 femmes sont assassinées au Guatemala. Depuis la signature des Accords de Paix en 1996, le pays s’est pourtant doté de lois adaptées aux conventions internationales réprimant la violence envers les femmes et notamment créé la figure juridique du fémicide2, à l’instar d’autres pays d’Amérique Latine, dès 2008. Pour autant, au Guatemala, on n’en a pas fait une circonstance aggravante, et la plupart des cas de meurtres de femmes ne sont pas classés comme fémicides (moins de 1%).
Le contexte d’impunité généralisée et de violence institutionnalisée a bien évidemment renforcé une violence de genre installée sur un machisme structurel particulièrement fort : l’adultère des femmes était seul puni jusqu’en 1995. Traditionnellement, les fêtes de naissance – et le paiement de la matrone – sont plus importantes si naît un homme. La violence est également acceptée socialement comme méthode éducative.
On a constaté une très forte augmentation des cas de violence intrafamiliale (d’environ 5.000 cas en 2003 à presque 35.000 en 2011), sans qu’on puisse précisément l’attribuer à une hausse réelle des cas, au rôle des organisations féministes qui poussent à la dénonciation où à un meilleur suivi statistique établi par les lois votées les années précédentes. 3 cas sur 5 concernent des familles sans emploi ou à revenus très bas. En ce qui concerne les violences sexuelles, on enregistre entre 3.500 et 4.000 cas par an, soit 54 pour 100.000, ce qui constitue un des taux les plus forts au monde, alors que les statistiques ne concernent pourtant que les zones urbaines principales. Une des principales causes de l’explosion de cette violence est l’impunité quasi généralisée qui règne au Guatemala. Le taux d’élucidation des homicides est déjà ridiculement bas, à l’image des crimes sexuels : presque 4.000 cas de crimes sexuels en 2011, dont 289 font l’objet de procès… et 68 condamnations. Le viol conjugal est sensé être puni mais comme dans d’autres pays il est peu dénoncé et surtout il reste « acceptable » socialement.
En matière de violences sexuelles, une organisation fait un travail absolument indispensable et remarquable : Colectiva Actoras de Cambio (la « Collective Actrices de changement »), née en 2003 à partir d’une équipe de projet travaillant sur l’accompagnement psychosocial des victimes du conflit armé, projet mené par l’UNAMG (Union nationale des femmes guatémaltèques). Cette « collective » s’est structurée juridiquement en 2009. Leur action contribue aussi bien au soin des femmes victimes, qu’à construire la mémoire des crimes qu’elles ont subis, la recherche de la justice mais aussi créer les conditions pour que cette violence ne se reproduise pas.
Ces victimes ne sont pas prise en compte par la médecine formelle. Celle-ci, d’origine occidentale, est totalement inadaptée à leur conception culturelle, d’autant qu’on ne devient pas médecin au Guatemala (comme dans beaucoup de pays d’Amérique latine) pour le serment d’Hippocrate mais pour bien gagner sa vie. En outre, d’un point de vue politique, Actoras de cambio ayant été créée sur des fondamentaux féministes, la médecine moderne ne permet pas de réflexion « politique » à partir du soin, par exemple une douleur physique augmentée par la stigmatisation ou la négation de la cause de cette douleur. Il a fallu créer des méthodes pour « Théoriser depuis le sensible », depuis le ressenti, les émotions, acceptées mais décortiquées et expliquées, comme point de départ de processus de soin mais aussi de débats politiques… tout en explorant d’autres voies : thérapie de libération émotionnelle - AFT, Advanced Integrated Therapy, de spiritualité libératrice, de bioénergie, de dialogue avec le corps… L’idée bien adaptée aux latinos et en particulier aux peuples indigènes est de ne pas séparer corps/esprit/cerveau, la grande erreur des peuples occidentaux. On retrouve aussi l’approche d’éducation populaire qui considère chaque personne comme source de savoir et vise à faire de chaque personne un acteur ou une actrice de sa propre vie (au contraire de l’approche verticale occidentale, où il y a des « sachants » et des « apprenants »).
Ce type de démarche est aussi né du contexte. Les survivantes et les victimes de violences sexuelles sont sorties du silence imposé autour de 2008. Depuis la fin du conflit armé, on évoquait certes les disparitions, les tortures, les exécutions mais très très peu les violences sexuelles, ce qui été vécu comme une forme de négation de la souffrance, d’élimination, notamment de la mémoire… ou une « memoria silenciada », une mémoire tue. Cette mémoire des violences sexuelles était invisibilisée aussi dans les communautés, et les victimes stigmatisées… d’autant que le conflit est très mal évoqué dans les programmes scolaires, car le discours officiel est celui de l’oubli. A partir de 2008, le silence est rompu, les femmes – qui avaient commencé à l’évoquer entre elles, en parlent, ainsi qu’à l’intérieur de leurs communautés, à défendre leur démarche, et à travailler avec d’autres groupes de survivantes, à créer des réseaux et des espaces de rencontre. Un 1er « festival » est organisé en 2008, non pas pour fêter mais pour rendre visible la douleur, le fait de se soigner et de retrouver sa dignité, à travers la danse, le théâtre, la poésie. Son slogan était « J’ai survécu, je suis là et je suis vivante ». Un gros travail est également réalisé avec les jeunes, avec les enseignantes pour introduire la question de la mémoire (actions de sensibilisation, guides pédagogiques). Certaines femmes acquièrent le courage de faire de leur témoignage de vie une publication, où elles se racontent, autant leur traumatisme que la façon dont elles s’en sont sorti. Les pratiques de travail au quotidien d’Actoras de Cambio ne sont pas éloignées de leurs positionnements politiques : communication non-violente, souci d’éviter les coupages de parole, les jugements de valeur, les réactions violentes ou exagérées analysées immédiatement… et elles ne sortent jamais d’une rencontre, d’une réunion avec un malaise ou des non-dits.
Cette violence est aussi présente dans les communautés. Certaines victimes ont continué à subir des violences sexuelles après le conflit, car elles étaient stigmatisées comme « putes », qui auraient elles-mêmes provoqué la violence sexuelle (!), mais le travail de récupération a aussi permis de lutter contre la violence installée dans les familles, les communautés, et que les autorités traditionnelles ne reconnaissent pas vraiment. Un travail d’autant plus délicat qu’en questionnant le machisme, elles questionnent les rôles, notamment traditionnels, et comment la cosmovision maya est interprétée comme un système de pouvoir à leur détriment. Le conflit a en outre installé et normalisé la violence sexuelle, qui a augmenté après. Les religions ne jouent pas leur rôle car elles ont un discours ambigu, qui légitime la violence contre les femmes qui sortent de leur rôle. D’autre part la vision traditionnelle a installé l’idée que les femmes ne savent pas faire en général, s’y prennent mal, parlent mal espagnol, à tel point qu’elles s’autocensuraient au début. Les festivals ont permis d’installer l’idée que les femmes sont victimes mais pas seulement, et elles sont aujourd’hui bien plus prises au sérieux, ce qui permet d’aborder d’autres thèmes : ni violence, ni maltraitance mais non plus de moqueries et de harcèlement. Elles sont de plus en plus reconnues comme actrices, prennent des responsabilités, sont de plus en plus invitées aux réunions, même si leur présence au sein des autorités traditionnelles reste limitée. Les festivaux de la mémoire (le 2ème a eu lieu en 2011) sont aussi important pour la visibilité de la problématique, la crédibilité de leur travail mais aussi comme moment de solidarité entre elles, dont elles sortent pleine d’énergie, comme étape « d’epoderamiento » (empouvoirement/empowerment). Les festivaux permettent également d’attirer d’autres personnes, des jeunes filles en particulier.
Ces initiatives sont structurantes. Après la violence, certains groupes souhaitent lancer des activités économiques. En tout état de cause, elles deviennent aussi référentes contre la violence, sont interpellées par d’autres victimes, les accompagnent à la police, au tribunal, et montre également un autre modèle au reste de la communauté, notamment aux enfants. Aujourd’hui, il y a quelques résultats, et des changements sont visibles. Si il y a des cas de violence, plusieurs femmes accompagnent la ou les victimes. Il peut y avoir des dénonciations publiques en cas d’inaction – dans la plupart des cas - des autorités. Il semble que le nombre de viols ai diminué dans certaines communautés. Il reste aussi des cas où les autorités communautaires n’ont pas voulu bouger après des dénonciations, même publiques, et au final ont rejeté les accusatrices ! L’impact est mitigé car même avec du rejet, on constate la fin d’une certaine impunité. Dans un autre cas, un violeur a fini par partir de lui-même car il était stigmatisé par les femmes de la communauté. Dans une autre communauté, 250 femmes ont lu publiquement les noms de violeurs connus. Qu’un groupe de femme soit mobilisé dans une communauté permet déjà de générer un climat de fin d’impunité voire de respect. Le rôle du collectif est d’autant plus important que les femmes ne sont pas indépendantes, elles n’ont souvent ni maison à leur nom ni travail. Ce type de démarche commence à se développer dans certains pays d’Amérique Centrale, sous le nom de « défense sociale des droits ». Cette approche s’est développé face à l’échec dans certains pays de l’approche traditionnelle par les droits, quant les institutions de la justice (police, justice, institutions démocratiques) ne fonctionnent pas ou sont corrompues. La défense sociale des droits apporte une protection, non pas via le droit et les institutions, mais via la communauté, le groupe, la mobilisation, la solidarité.
Quelques paroles :
« Logramos brillar » (Nous avons réussi à briller)
« Elles ne sont plus silencieuses mais maitresses de la parole » (Je traduit Senoras, au sens de SeigneuREs, puisque le mot n’existe pas en français, par maitresse. « Dame » traduit l’épouse du seigneur et n’est donc pas adapté)
« Yo soy voz de la memoria y cuerpo de la libertad » « je suis la voix de la mémoire et le corps de la liberté »
« Ni oubli, ni silence »
« Quand il y en a une, ce sont 10, 100, 1000 femmes sur le chemin de la liberté »
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(1)Le pouvoir est détenu par les « ladinos », blancs ou non-indiens, une oligarchie essentiellement terrienne. Les régimes militaires a aussi permis de créer une caste politique de généraux à la retraite. Depuis quelques années, une oligarchie commerçante commence à se structurer. Mais à la base, ces 3 secteurs ont les mêmes intérêts. Certaines familles ont des monopoles absolus sur certains produits et organisent des filières entières à leur seul profit (comme les médicaments, ou les œufs, qui valent plus cher que dans les pays voisins).(retour au texte1)
(2) Le fémicide est une figure juridique servant à mettre en avant la spécificité des crimes contre les femmes. Selon Diana Russell, « le fémicide est le meurtre d’une femme parce qu’elle est une femme ». En Argentine, c’est une circonstance aggravante. Un crime d’honneur est par exemple un fémicide. Un crime décrit comme « passionnel » est un fémicide. Selon l’OMS « Le fémicide est généralement commis par des hommes, mais il arrive parfois que des membres féminins de la famille soient impliqués. Le fémicide se distingue des homicides masculins par des particularités propres. Par exemple, la plupart des cas de fémicide sont commis par des partenaires ou des ex-partenaires, et sous-entendent des violences continuelles à la maison, des menaces ou des actes d’intimidation, des violences sexuelles ou des situations où les femmes ont moins de pouvoir ou moins de ressources que leur partenaire ». En Argentine, en 2009 a notamment été mis en avant le fait que le machisme des policiers avaient empêché une femme de porter plainte 5 fois… avant que son ex compagnon ne la tue. (retour au texte2)
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Vu sur Tintamarre des sens, Collectif
On peut n’être qu’une toute petite maison d’édition, sans grande expérience encore, et éditer un livre qui sera sans nul doute apprécié pour ses qualités littéraires, tout autant que sa pagination propre et claire. Tintamarre des sens, recueil de textes érotiques auquel j’ai participé en tant qu’auteure (avec le texte Un Festin sous les draps), vient […]
Cet article provient de Littérature érotique
Passer des vacances de rêve dans une île maudite, ça vous dit? Aljosa Babic, un politicien de Rijeka, y croit comme dur comme fer. Il vient de répondre à un appel à idées lancé par le gouvernement croate, qui souhaite vendre Goli Otok, un morceau de terre aride de quelques kilomètres carrés, dans le nord de la mer Adriatique. Selon lui, il s’agit d’un «endroit parfait» pour y créer «European Gay Resort Croatia», un complexe touristique 100% gay. «A cause de son passé, l’île pourrait être une destination attrayante», a ajouté Babic.
Des centaines de morts
Son passé? Goli Otok a servi de camp pour les opposants politiques yougoslaves, de 1949 à 1955, avant de devenir un bagne pour les prisonniers de droit commun. Les conditions de détention effroyables ont entraîné la mort de centaines d’internés jusqu’en 1988, date de sa fermeture. Les bâtiments de la colonie pénitentiaires sont toujours debout, et une association de victimes de la répression politique sous Tito veut en faire un musée.
L’affaire a tout d’un canular aux relents homophobes. Il a d’ailleurs été balayé par des associations LGBT croates. Sauf que Aljosa Babic, à la tête du Forum éco-social de Croatie, défend son idée avec fougue. D’après lui, le tourisme homosexuel en Croatie jouit d’un fort potentiel inexploité. Goli Otok permettrait à cette clientèle de profiter de leurs vacances sans être dérangés et sans déranger quiconque. «Je ne pense pas que les critiques qui parlent de ghettoïsation soient justifiées, explique-t-il à Vecernji List. Le projet offre la possibilité de développer une branche dont la croissance est la plus forte du secteur. Rien qu’au niveau européen, le tourisme gay rapporte plus de 50 millions d’euros.»
En 2012, Le Fond Mondial pour la population publiait dans son rapport les chiffres sur les enjeux de l'accès à la planification familial et à un avortement sûr et légal
Ces avortements à risque
Mardi 23 Septembre 2014Le 18 septembre, le Nouvel Obs publiait ce manifeste signé par 420 médecins pour l'accès à l'avortement pour toutes les femmes,partout dans le monde.
A l'initiative partenariale de Médecins du Monde, Equilibres & Populations et Le Planning Familial, il était également remis, ce même jour, à Mesdames Touraine et Boistard.
Extrait
« Le 22 septembre prochain, à New York, lors de l’assemblée générale des Nations Unies, une session extraordinaire est organisée sur le suivi du programme d’action décidé il y a 20 ans au Caire, tournant décisif dans la reconnaissance des droits sexuels et reproductifs.
Mardi 23 Septembre 2014