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La plus vieille actrice X du Japon, Maori Tetzuka – dont l’orthographe du nom fait débat –, prend sa retraite à 80 ans, au grand dam de ses fans. Sa popularité à l’échelle nationale s’explique par une réalité sociodémographique : un quart des hommes japonais a au moins 65 ans, beaucoup consomment du porn, peu s’identifient aux teens. Aucun intérêt, selon eux, à mater des jeunes en train de baiser, rapporte Diamond Online. Ces papys fappeurs préfèrent les femmes matures, 50 ans minimum. D’ailleurs, sans elles, l’industrie adulte nipponne – l’une des plus productives au monde –, cinq fois moins importante aujourd’hui que pendant l’âge d’or de la VHS, se serait effondrée.
Au royaume de la granny, Maori Tetzuka était reine. Elle s’est lancée dans le biz à 71 ans après une carrière de chanteuse d’opéra. Plus que l’argent, c’est la quête du plaisir qui la guidait. D’ailleurs, ce n’est pas par lassitude ou manque de libido que Tetzuka raccroche. D’une part, il serait devenu très difficile de trouver des acteurs à sa hauteur. De l’autre, son travail aurait commencé à impacter sa vie privée : son amant de 50 ans se serait montré très critique… Amateurs de grannies nipponnes, il ne vous reste plus qu’à vous promener dans le panthéon de Tetzuka disponible sur R18.
Pendant ce temps, la matriarche du porn américain Nina Hartley accorde une interview au Huffington Post. Cette actu repose la question tabou de la sexualité des seniors. Dans bon nombre d’esprits, associer sexe et troisième âge est absurde, dégueu, choquant. Et pourtant, masturbation et partie de cul n’ont pas de date de péremption ; au-delà du succès des tags #mature et #granny sur les tubes, la recherche le démontre. En 2015, une étude réalisée en Angleterre par l’université de Manchester révélait que 54% des hommes et 31% des femmes de plus de 70 ans avaient encore une activité sexuelle. Le désir, quel que soit son âge, n’est pas sale. Alors, mamie, papy, faites de la résistance !
Créée à partir de cadavres d’humains, le monstre inventé par Mary Shelley incarne ce qu’elle est : une tueuse. Mary a tué sa mère en naissant. Puis elle a tué son père, moralement, en tombant amoureuse d’un poète fou, adepte de l’amour libre.
Difficile de comprendre le roman Frankenstein sans savoir qui était son auteur, ni d’où elle venait. Mary Wollstonecraft-Godwin (1797-1851) n’a pas grandi dans n’importe quelle famille. Elle porte le nom des deux philosophes radicaux anglais le plus importants et le plus controversé de l’époque. Son père – William Godwin – est un penseur politique radical, anarchiste avant l’heure. Sa mère – Mary Wollstonecraft – est une pionnière du féminisme et une sympathisante révolutionnaire dont la vie amoureuse défraye la chronique : elle a d’abord une liaison avec le célèbre peintre Fussli, qui est marié. Après leur rupture, elle part pour la France en septembre 1792 et s’installe à Paris… un mois avant que le roi Louis XVI soit guillotiné (janvier 1793) ! C’est là, dans l’atmosphère de danger et d’hystérie sanglante des années 1792-1794, qu’elle tombe amoureuse de Gilbert Imlay, un aventurier américain dont elle tombe enceinte et qui l’abandonne juste avant la naissance de leur enfant (Fanny). Elle le poursuit à Londres, mais en vain. Elle part ensuite en Scandinavie et tire de ce voyage aux confins de l’Europe un récit contemplatif, publié en 1796, dont les poètes Wordsworth et Coleridge font leur source d’inspiration. William Godwin tombe amoureux d’elle en lisant ce récit et se met à lui faire la cour. Mary trouve en lui l’âme sœur. Ils emménagent dans une résidence appelée Polygone, composée de deux maisons contiguës afin que leur vie de couple n’empiète pas sur leur indépendance respective.
William, apôtre des unions libres, épouse la mère de Mary Shelley
Bien qu’il ait écrit des textes pour l’abolition du mariage, William épouse Mary (mars 1797) quand celle-ci tombe enceinte, pour que l’enfant naisse dans la légitimité. L’enfant s’appelle Mary mais ne connaîtra jamais sa mère : celle-ci meurt 11 jours plus tard (le 10 septembre 1797), des suites de l’accouchement. William Godwin écrit à sa mort : «Je n’ai pas le moindre espoir, désormais, que je puisse jamais connaître à nouveau le bonheur.» Il se remarie néanmoins 4 ans plus tard avec une femme qui a déjà deux enfants parce que ses affaires vont si mal qu’il craint de ne pouvoir élever seul ses deux filles. Au sein d’une famille recomposée de bric et de broc, Mary Wollstonecraft-Godwin grandit donc avec sa demi-sœur, Fanny Godwin et les deux enfants rapportés : Charles et Jane Claire Clairmont. Les époux Godwin ouvrent une maison d’édition, mais elle fait faillite. Godwin doit sa survie à de généreux donateurs qui le sauvent de la prison. Bien que les créanciers le poursuivent, il se débrouille pour donner à ses filles, une éducation soignée : Mary a une gouvernante et un professeur particulier. Elle grandit en lisant les pamphlets de son père et se nourrit d’esprit dissident. C’est donc fidèle aux utopies de ses parents, sous la double influence de ces deux philosophes qui prônent l’égalité entre les sexes, qu’elle essaye de devenir une femme adulte, adulte et libre.
Quand Mary rencontre Percy
Elle a 17 ans lorsqu’elle rencontre Percy Shelley, un poète inconnu, qui admire son père et s’est même proposé de rembourser ses dettes. On l’appelle Mad Shelley, Shelley «le fou». Il a 21 ans et contrairement aux garçons aristocrates de son âge il ne suit pas d’études à l’Université : il a été expulsé d’Oxford pour une composition qui fait horreur aux directeurs : De la nécessité de l’athéisme (1811). Il a refusé de se rétracter. Sa famille le voue aux gémonies. Enfant, Percy était martyrisé par les écoliers : trop frêle, trop doux, trop rêveur. En réaction aux persécutions, il joue au sorcier, torture ses soeurs à l’électricité, joue avec des acides et, sous prétexte d’alchimie, fait exploser des combustibles au risque de se tuer. Le docteur Cabanes, dans un ouvrage consacré aux Grands névropathes, raconte qu’à la vue d’un incendie qui se propage d’une barque à une grange, Percy rayonne : «Il avait voulu «jouer à l’enfer», et il éprouvait comme une joie satanique à contempler cet incendie dont il était l’auteur. Peut-être y avait-il dans cet amour précoce du feu […] l’un des présages de sa carrière poétique.»
Parfum de scandale
Percy est donc «fou», ainsi qu’il se plaît à le dire, c’est-à-dire athée, révolté, libertaire, végétarien et adepte d’amour libre. Quand son père lui coupe les vivres, Percy tombe amoureux d’une fillette de seize ans (il en a alors 19), Harriet Westbrook, fille d’un riche hôtelier, et l’épouse après un romanesque enlèvement. Peu après, il se lie avec Godwin, se jette tête baissée dans la politique, écrit des textes intitulés La marche du diable (1812) ou Réfutation du déisme (1814) qui attirent l’attention du gouvernement. Ça sent le fagot ! Le docteur Cabanes raconte que «pour se soustraire à des poursuites imminentes, il erre d’un bout de l’Angleterre à l’autre». Son ménage s’en ressent. Il se brouille avec Harriet (alors mère d’une petite fille) et tombe amoureux de Mary Shelley. William Godwin abjure Percy de renoncer à cette passion illicite et d’épargner la réputation sans tâche de sa fille… Percy menace de se suicider, brandit un revolver et une bouteille de laudanum puis s’enfuit avec Mary, qu’il emmène dans un tour frénétique de l’Europe à travers la France, la Suisse, l’Allemagne et les Pays-Bas. A son retour en Angleterre, il apprend qu’Harriet est de nouveau enceinte de lui. Mary aussi est tombée enceinte. Impossible d’abandonner son épouse… pas plus que sa maîtresse : le voilà bigame. Il s’installe (entre l’été 1815 et l’été 1816) près de la forêt de Windsor, entouré de ses deux femmes, bientôt rejointes par la sœur de Mary – Jane Claire Clairmont – qui, elle aussi, joue les filles insoumises : Claire a eu une liaison avec le poète Byron, qui est marié.
L’été 1816 et le projet Frankenstein
Harriet accouche d’un fils (Charles) en novembre 1814, mais elle a conscience que Percy ne l’aime plus. Mary à son tour accouche d’une fille, qui décède presque immédiatement, puis retombe enceinte, et accouche d’un garçon (William). La situation devient intenable. Ne supportant plus son épouse, ni la réprobation universelle dont il fait l’objet, Percy s’enfuit encore une fois avec Mary… Claire se joint volontiers au duo. En Suisse, Claire retrouve celui qu’elle aime – Byron – et dont elle est alors enceinte sans le savoir encore. Byron lui-même est en exil, suite à une sombre histoire d’inceste : il a eu une liaison avec sa demi-sœur et doit fuir l’Angleterre, le temps de se faire oublier. C’est dans ce contexte pour le moins trouble et tendu que ces adeptes d’amour libre décident de passer l’été ensemble, un été qui – cette année-là – prend les allures d’une fin du monde. Il pleut. Il pleut même si violemment que Percy et Byron manquent périr sur le lac Léman, un jour d’orage au cours duquel les arbres sont déracinés par le vent.
Comme une sinistre malédiction
Les éléments s’acharnent sur eux. C’est comme si leur conduite impie et leurs liaisons fatales les poursuivaient jusque dans les villas où ils ont trouvé refuge. Hélas, la ville natale de Jean-Jacques Rousseau (leur idole), n’est pas la cité riante dont ils rêvaient. Elle est frappée par une série de désastres funestes : ténèbres en plein jour, tempêtes dévastatrices, crue, inondations… Il pleut sans cesse et il fait froid. Il n’y pas de lumière : pour Mary, c’est le signe d’une damnation. Sa vie est celle d’une femme qui a tué sa mère en naissant et qui, bientôt, va provoquer d’autres morts : lorsqu’ils rentrent à Londres, Fanny se suicide au laudanum et Harriet (enceinte d’un autre homme que Percy) se jette dans la Tamise. Deux mois après la mort de sa femme, Percy épouse Mary. Mary achève l’écriture de Frankenstein, un roman traversé par le sentiment de l’absolue solitude : celle d’une femme réprouvée, coupable malgré elle-même. La créature de Frankenstein, c’est elle, qui doit à la fois assumer sa liberté et la souffrance qu’elle inflige aux autres du seul fait d’avoir voulu librement aimer.
Frankenstein : un roman familial ?
Dans Frankenstein créé des ténèbres, le chercheur Simon Swift (Université de Genève) écrit : «Pour Mary, la famille représentait un lieu où les individus se blessent involontairement les uns les autres. […] Frankenstein est un livre consacré à l’investigation des forces étranges et ambiguës qui hantent les familles. De même que ce roman lugubre raconte […] l’incapacité d’une famille aimante à se protéger de l’horreur, le cercle familial de Mary était voué à se restreindre. Sa sœur Fanny se suicida et Mary qui avait déjà donné naissance à deux enfants (dont une petite prématurée), perdra encore deux de ses quatre enfants, ainsi que son mari qui se noya en 1822.» Quand il se noya, Percy avait à peine 29 ans. Son corps ne fut retrouvé que 10 jours après sa disparition, sur le rivage de Viareggio. Le docteur Cabanes raconte : «la figure, les mains, toutes les parties qui n’étaient pas protégées par les vêtements, n’avaient plus de chair.» Lorsque Byron vit la masse informe des os, il voulut récupérer le crâne, «mais comme on se souvint qu’il avait transformé en verre à boire un crâne qui lui avait été confié on ne voulut pas exposer celui de Shelley à cette profanation sacrilège.» La loi toscane imposait de brûler les corps. Les restes de Shelley furent donc posés «sur un bûcher, élevé le long du rivage, comme celui de Patrocle, et, tandis que la flamme faisait son office, Byron pontifiait en récitant des vers de l’Iliade.» Ainsi mourut celui pour qui Mary avait tout sacrifié.
L’enfer, c’est là qu’il voulait aller
Quand il est mort, Percy, depuis quelques semaines, souffrait de cauchemars affreux. Il avait demandé un poison pour mettre fin à ses jours, «au cas où». A peine six ans auparavant, lorsqu’il était en Suisse, Percy avait noté sur le registre de l’hôtel son nom en toutes lettres accompagné – dans la case «Commentaires» – des mots, en grec ancien : «humaniste, démocrate et athée». Pour les protéger, il n’écrit qu’en initiales les noms des deux jeunes femmes qui l’accompagnaient : MWG (Mary Wollstonecraft-Godwin) et J.-C. (Jane Clairmont). Dans la case «Destination», il avait marqué : «L’Enfer». La page du registre est reproduite dans l’ouvrage Frankenstein, créé des ténèbres. Curieusement, le nom de Jane Clairmont a été biffé peu de temps après leur passage à l’hôtel. Se peut-il que Byron soit allé à Chamonix barrer le nom de celle dont il venait d’apprendre qu’elle était enceinte ? Voulait-il ainsi la soustraire au scandale ou l’éliminer de sa vie ? Impossible de savoir. La vie de Claire est de toute manière définitivement gâchée, comme celle de Mary. Elle a commis un acte impardonnable au regard de l’époque. Byron ne veut pas d’elle. Elle attérit avec son enfant à la charge de Percy et quand celui-ci meurt en 1822, sans le sou, elle s’exile en Russie où elle devient préceptrice puis revient, devenue vieille, s’établir en Italie. Henry James s’inspire d’elle pour écrire son roman Les papiers d’Aspern. Quant à Mary, elle survit pauvrement d’une rente chichement allouée par son beau-père puis meurt à 57 ans d’une tumeur cérébrale.
Reste la question : vaut-il mieux se conformer aux normes, pour épargner ceux qu’on aime ? ou prendre le risque d’attirer sur soi et sur les siens la réprobation générale, au nom d’un idéal ?
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A LIRE : Frankenstein, créé des ténèbres, dirigé par Nicolas Ducimetière et David Spurr, Coédition Gallimard / Fondation Martin Bodmer.
A VOIR : Le Retour des ténèbres – Musée Rath, Genève – Jusqu’au 19 mars 2017.
NOTE : Merci à mes lecteurs pour les corrections concernant les dates.
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