Vu sur L’amour sur le tard, roman de Michel Desbastilles
L’amour et la sexualité, alors qu’elle comme lui ont bien plus de soixante ans. L’amour…
Cet article provient de Littérature érotique
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Vu sur L’amour sur le tard, roman de Michel Desbastilles
L’amour et la sexualité, alors qu’elle comme lui ont bien plus de soixante ans. L’amour…
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Puisqu’on aime la fesse quand elle est festive, on se lèche déjà les babines en attendant la sixième édition de la Fête du Slip, le fameux festival des sexualités de Lausanne.
« Plus de corps pour encore plus d’esprit ! » nous souffle-t-on à l’oreille. C’est ce que promet déjà la future Fête du Slip, dont la programmation vient tout juste de tomber. Amuse bouche de l’édition, la soirée des Préliminaires du 05 mai (aux Docks) fera au fil de performances la part belle à deux cultures excitantes à souhait : le catch queer et la musique rétrofuturiste. Tout cela en compagnie de Gaff-E, DJ et styliste queer aux sonorités sacrément transgressives. Le festival, lui, promet ce qu’il faut de kiff pornophonique. On s’y dandinera sur fond de Peaches et de Charli XCX, les ambiances psychés de Gaff-E en première partie de show.
Gaff E, culture queer et bons sons.
Cette édition nous donnera aussi l’occasion aussi de savourer le bon son underground des jumelles de My Bad Sister. Mais le corps ne fait pas sens que sur la piste de danse. Il sera également l’objet de conférences effeuillant les notions trop souvent vulgarisées de féminité, de masculinité, de bestialité et d’humanité. De quoi envoyer paître tout un paquet d’idées préconçues. A travers ce genre de choix, la Fête du Slip persiste et signe et s’affirme comme une vaste partouze de disciplines – mixant musique, performances, arts visuels. Rendez-vous du 10 au 13 mai prochains dans pas moins de cinq coins lausannois pour vous laisser envoûter par ses malignes perversions. De quoi vivre un week-end de l’Ascension tout en sensations.
Retrouvez nos reportages lors de la 3e edition avec Gonzo en membre du jury et la 5e édition avec Carmina en spectatrice.
L’impératrice se la joue Mata Hari dans un dernier clip sensuel et sulfureux comme du S.A.S – en plus majestueux et chic. Des sonorités qui étourdissent comme une fièvre hivernale.
Au Tag, on cajole les coquineries classy de L’impératrice. L’instigatrice d’un Sultan des îles déjà savoureusement désuet poursuit dans la veine « pastiche de séries B » avec une nouvelle friandise kitsch : Matahari. Mais si, vous savez, Mata Hari, « la Danseuse rouge », cette espionne amoureuse et danseuse exotique qui chavirait les coeurs et fut finalement exécutée pour avoir servi les services de renseignements allemands. La professionnelle aux deux visages ne cessât depuis d’obséder l’inconscient populaire, et avant tout l’imaginaire érotique. Greta Garbo, Jeanne Moreau et Sylvia Kristel (excusez du peu) l’ont incarné à l’écran. C’est aujourd’hui L’impératrice qui la fantasme, avec ce récit d’espionnage à l’écrin très seventies qui caresse l’indécence du doigt à coups de métaphores sexy…jusqu’à son climax ébouriffant.
On apprécie cette élégance diffuse qui façonne tout le style (rosâtre) de la chanteuse. Ces airs lancinants et groovy à souhait, ces effets flashy et flous, qui nous font frissonner à coups d’icône vamp et d’atmosphère vaporeuse. Pornophonique as fuck.
S’il faut en croire Brancusi, la sculpture “Princesse X” est le portrait en buste de la princesse Marie Bonaparte, petite nièce de Napoléon. L’ironie veut que cette princesse se soit rendue célèbre pour avoir introduit en France les idées de Freud, notamment celles touchant à la sexualité.
En 1916, le sculpteur Brancusi réalise une sculpture en bronze poli, nommée Princesse X : elle prend la forme d’un phallus galbé, miroitant, à l’éclat solaire. L’oeuvre est refusée au Salon d’Antin en 1916, puis au Salon des indépendants en 1920 (qui finit par l’accepter grâce à une pétition signée par une flopée d’amis artistes). Constantin Brancusi (1876-1957) la conserve toute sa vie en sa possession avant de la léguer à l’Etat en 1957. On peut maintenant la voir dans l’atelier reconstitué de Brancusi, au Centre Beaubourg. En 2016, le réalisateur portugais Gabriel Abrantes fait de cette oeuvre l’héroïne d’un court-métrage intitulé “A brief history of princess X” qui gagne plusieurs prix internationaux et que les éditions du Film du Bélier projettent vendredi 23 février à 20h au Grand Action (Paris, 5e) lors d’une séance spéciale. Comme le film ne dure que 7 minutes, mieux vaut ne pas trop en dire. Pour résumer : c’est l’histoire d’une sculpture qui peut être aussi bien interprétée comme une verge que comme une vierge.
Verge ou vierge ?
De fait, le modèle s’appelle «Marie». Brancusi prétend en effet avoir épuré à l’extrême une figure féminine –inspirée de Marie Bonaparte–, dont ne subsiste que l’ovale d’un visage penché sur une paire de seins, ornée d’une marque suggestive évoquant la crinière de cheveux (qui pourrait tout aussi bien être la trace stylisée du frein sur une verge). Certains n’ont vu dans cette oeuvre qu’une simple provocation, voire pire : une mystification visant à faire passer un gode au rang des oeuvres d’art. Mais réduire l’art de Brancusi au seul désir de faire scandale serait une erreur. Il s’inscrit dans la logique contestataire du mouvement dada qui s’insurge contre les conventions, surtout quand elles sont binaires. Quoi de plus conventionnel que la différence homme-femme ? Lorsqu’il créé Princesse X, Brancusi joue sciemment sur le double-sens qu’on peut donner à sa sculpture, avec la volonté ironique de montrer que cette différence relève de la subjectivité. S’agit-il d’une femme en buste ou d’un appareil génital masculin ? Aussi bien l’un que l’autre. Rien n’est plus proche dans la forme qu’une femme d’un sexe en érection. Ce qui revient à dire, finalement, qu’il n’y a de différence que dans la perception qu’on en a.
Un accroc à la sacro-sainte différence homme-femme
La raison pour laquelle cette oeuvre fait scandale se trouve d’ailleurs peut-être là : son ambiguïté dérange. Elle créé une forme de confusion entre masculin et féminin, perturbe l’ordre symbolique de la division des sexes. Quoi de plus agaçant pour le spectateur occidental moderne, à qui on a inculqué –dès l’enfance– que tout oppose l’homme (dur et actif) à la femme (douce et passive), à commencer par son corps ? Ce que Brancusi réfute, par le seul moyen d’une sculpture, c’est que le corps biologique soit la condition déterminante de cette différence homme-femme : pour lui, clairement, cette différence n’est pas naturelle mais culturelle. Cette différence n’est pas objective mais subjective. Ce qui différencie l’homme de la femme, demande-t-il, à quoi est-ce que cela tient ? Les genres sont réversibles. Il suffit de mettre une robe et porter des cheveux longs pour avoir l’air d’une femme. Le passage de l’un à l’autre est aussi simple à effectuer qu’un changement de vêtements, d’attitudes et d’élocution. Certaines personnes sont si androgynes qu’on se prend à douter de ce que l’on voit. C’est ce doute que Brancusi veut susciter, comme une forme d’exercice spirituel, car le doute rime avec le trouble, l’incertitude et le vacillement. Il est d’ailleurs probable que la pensée de Brancusi ait influencé son meilleur ami, Marcel Duchamp, qui était connu pour se travestir en femme sous le nom de Rrose Selavy.
Brancusi et Duchamp : l’amitié d’une vie
On sait que «Brancusi et Duchamp avaient fait connaissance aux alentours de 1912, date à laquelle ils visitèrent avec Fernand Léger le salon de l’aéronautique qui leur fit forte impression. Cette amitié donna lieu à de multiples collaborations.» Comme l’explique Pierre Baumann qui a consacré un livre aux théories artistiques comparées de Brancusi et de Duchamp, les deux hommes étaient si proches que leur travail s’éclaire réciproquement. Pour comprendre la sculpture Princesse X, il faut la mettre en parallèle avec celles de Duchamp, notamment ses moules génitaux qui en constituent les répliques : en 1962, notamment, Duchamp réalise une oeuvre phallique appelée Objet Dard, jeu de mot sur «objet d’art» et sur la métaphore du pénis comme dard. Le nom de l’oeuvre suggère un phallus triomphant, associé à l’image de l’homme prédateur-agresseur. Mais, surprise, l’oeuvre n’offre à voir qu’un pénis impotent qui pique du nez lamentablement. De quoi s’agit-il en réalité ? D’une empreinte de conduit vaginal. C’est le «moule intime et profond de l’organe féminin», explique Herman Parret, qui insiste sur «la réversibilité des organes femelle et mâle. Objet-Dard a effectivement une apparence phallique mais en fait il s’agit plutôt d’une structure en doigt de gant retourné. […] L’hermaphrodisme a toujours tenté Duchamp, il suffit de penser à son jeu sur le travesti : Marcel Duchamp est Rrose Sélavy, la verge est le moule du vagin, topologie duchampienne abolissant la différence sexuelle.»
La différence sexuelle est mince, archi-mince
Brancusi et Duchamp –deux âmes-soeurs– fabriquent toute leur vie des objets qui peuvent se retourner et se transformer en leur inverse contraire. Leurs oeuvres jouent sur l’idée du passage de l’un à l’autre genre et des différences infra-minces qui séparent ou plutôt relient hommes et femmes. Le mot infra-mince (également écrit inframince ou infra mince) est un néologisme créé par Duchamp. Ce mot apparaît pour la première fois en 1945. Dans une lettre à Denis de Rougemont, Duchamp raconte qu’il réfléchit à l’infra-mince depuis au moins dix ans (1). Les Notes qu’il laisse à la postérité comportent un chapitre entier sur Infra-mince, qu’il essaye de définir à l’aide d’images étranges : infra-mince est la toile d’araignée, autant que les caresses, la buée sur les surfaces polies, le son que fait un pantalon de velours quand on marche, le papier buvard poreux, les choses moirées ou irisées, les surfaces perméables et les membranes servant de filtre et à travers lesquelles il est possible de passer comme de l’autre côté du miroir. «La chaleur d’un siège (qui vient d’être quitté) est infra-mince.» «Planer à fleur d’une autre surface : on passe par des moments infra-minces.»
Dans ces Notes, Duchamp ne cesse d’explorer la notion de «différence séparative», ainsi qu’il la nomme, se demandant «quel est le rapport de l’infra-mince avec le principe d’identité.» Le reflet dans un miroir aussi est infra-mince. Il parle de la «Séparation infra mince entre le bruit de détonation d’un fusil [...] et l’apparition de la marque de la balle» puis évoque cette idée centrale : «Le possible est un inframince. […] Le possible impliquant le devenir – le passage de l’un à l’autre a lieu dans l’infra mince.»
«Le possible est un infra-mince»
Le possible serait-ce d’être à la fois homme et femme ? La théorie de l’infra-mince, bien sûr, n’est pas une théorie visant à abolir la différence des sexes, mais à la rendre plus ténue, de l’ordre de l’impalpable, afin que les hommes et les femmes ne se reconnaissent plus suivant des principes aussi visuellement grossiers (conventionnels) que leurs tenues ou leurs organes génitaux, mais suivant les principes délicats de la caresse entre âmes. L’infra-mince, c’est un appel à détecter du masculin dans une femme et réciproquement. Un appel à caresser, de façon presse subliminale, l’identité de l’autre comme un reflet de soi. Voilà ce à quoi nous invitent ces sculptures jumelles : à affiner notre vision du monde, à la rendre plus subtile ou plus tactile au choix… Car ces sculptures qui trompent l’oeil appellent la main pour les connaître. Epurées, voire appauvries au point de ne plus ressembler qu’à des formes quasi-abstraites, elles en appellent à notre sensibilité : il s’agit, à travers elles, d’entrer en contact avec tout ce qui en nous hésite et vacille.
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PROJECTION “A brief history of princess X”, réalisé par Gabriel Abrantes, produit par Film du Bélier : vendredi 23 février à 20h au Grand Action : 5 rue des Écoles 75005 Paris. Réservation : projection@lesfilmsdubelier.fr.
La projection permettra également de découvrir deux autres films : Mescaline, de Clarisse Hahn + A Joking relationship, de Gabriel Abrantes.
A LIRE : Brancusi & Duchamp. Les hommes-plans sur les Colonnes sans fin et l’inframince, de Pierre baumann, éditions PUP, 2008.
«Le corps selon Duchamp», de Herman Parret, in Protée, 28(3), 88–100.
POUR EN SAVOIR PLUS : «La princesse Bonaparte était-elle frigide?»
NOTE (1) Propos tenus par Duchamp à Denis de Rougemont en 1945 :« [C’est quelque chose] qui échappe à nos définitions scientifiques. J’ai pris à dessein le mot mince qui est un mot humain, affectif, et non pas une mesure précise de laboratoire. Le bruit ou la musique que fait un pantalon de velours côtelé comme celui-ci, quand on bouge, relève de l’infra-mince. Le creux dans le papier, entre le recto et le verso d’une feuille mince... A étudier! ...C’est une catégorie qui m’a beaucoup occupé depuis dix ans. Je crois que par l’infra-mince on peut passer de la deuxième à la troisième dimension.» (Source : Marcel Duchamp par lui-même (ou presque), d’Alain Boton, Editions Fage, 2013)