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Sur un tournage de film X, la raideur est de rigueur, et pour répondre à cette exigence, rien de plus naturel que de fantasmer, regarder, toucher. Si la plupart des actrices donnent plus ou moins volontiers un « coup de main » à leur partenaire, un vrai pro doit malgré tout faire face à toutes les situations. Autrement dit il faut pouvoir bander malgré la dispute du matin, bander malgré votre mal de tête passager, bander malgré les autres, bander, presque malgré vous.
Vous avez beau incarner le personnage de l’homme sûr de lui, vous n’êtes pas pour autant un sur-homme. Aujourd’hui votre bulle fantasmatique ne s’élève pas, votre libido est molle, ou vous êtes tout simplement de ceux qui mettent leur instinct en sommeil et lui préfèrent une rassurante mécanique, celle de votre sexe-outil dont vous connaissez tous les rouages. Vous êtes un « technicien ». Vous connaissez votre corps, c’est pourquoi vous ne prenez ni calmant ni anti-douleur quelques soient vos petits maux de santé. Et tant pis pour la rage de dent. Les médicaments sont votre ennemi, ils faussent vos sensations . Si votre corps perçoit le plaisir et la douleur, c’est votre cerveau qui sélectionne . Un acteur très connu s’entaillait récemment l’orteil alors qu’il avait accidentellement marché sur des morceaux de verre. Son pied est en sang, l’actrice manque de tourner de l’œil, le réalisateur panique. Notre acteur tout-terrain ne se déconcentre pas; il demande calmement à pouvoir recouvrir la plaie et insiste pour reprendre immédiatement le tournage. Son cerveau a anesthésié l’orteil et ne garde qu’une seule information: bander. Vous êtes hardeur professionnel et un technicien du désir, votre partenaire pourrait avoir plus de ventre que vous et porter un pyjama de laine (d’ailleurs vous l’avez sans doute fait à vos débuts dans le X amateur), peu importe. Votre technique du « yoyo » vous préserve de la panne : vous vous masturbez consciencieusement jusqu’à ce que le plaisir soit à son comble, vous retenez de jouir et stop! Vous vous arrêtez là et tâcher d’y rester. Cette technique est tellement ancrée en vous que vous pouvez tout aussi bien parler poker avec le photographe de plateau que saluer de votre main libre le journaliste venu vous interviewer. Vous êtes un vrai pro.
« Mais alors, un acteur ne connaît jamais la panne? » Un acteur X est un homme comme les autres. Il n’est pas infaillible. Et la panne est sa bête noire. Peu importe si les conditions de travail peuvent la justifier, cette dernière ne suscite jamais de compassion. Nous avons le droit d’être humains mais il n’est pas toujours bon de le montrer. Le métier de hardeur en anglais se dit » male performer »; on attend de vous une performance et de celle-ci dépend en grande partie le succès de la scène. Ne pas bander c’est échouer. Il n’est pas facile d’être un homme; je veux bien croire qu’il l’est encore moins d’être acteur porno. Un ami hardeur me confiait une fois qu’il s’était retrouvé face à l’actrice de ses rêves. Une blonde magnifique à la beauté terrifiante. Le rêve est trop parfait, il ne peut que le froisser. Son esprit se brouille et son corps bredouille, il est excité comme un fan devant son idole. Tétanisé. Un technicien lance avec tact: » Si c’était moi tu verrais comme je m’occuperais d’elle! ». L’acteur contient sa rage, part s’isoler dans les toilettes et se met à feuilleter un magazine de charme. Son actrice est sous ses doigts, couchée sur papier glacé, offerte en double-page. Situation absurde par excellence, c’est finalement sur la photo et non sur la femme qu’il parvient à retrouver la maîtrise de ses sensations. Voilà jusqu’où vous pouvez vous retrancher. Et voilà pourquoi entre l’angoisse de la panne et une certaine pilule bleue, votre choix a vite fait de choisir la facilité.
Le Viagra fait partie de la nouvelle génération porno. Il peut permettre à certains d’accéder plus facilement au métier de hardeur, il permet de se poser moins de questions. Bref, pourquoi s’en priver? Sans doute parce qu’user et abuser d’un médicament alors que vous n’en avez à priori pas besoin a de fortes chances d’entraîner des conséquences fâcheuses. Votre désir n’est plus lié à votre partenaire mais à votre pilule; l’habitude peut vous mener jusqu’à en consommer dans votre vie privée jusqu’au jour où les effets se dissipent et qu’il vous faut plus (Il existe des produits que l’on peut directement injecter dans le corps caverneux). Le quotidien d’un hardeur peut aussi être cet enfer là. Fort heureusement on ne vous embauchera pas en fonction des pilules que vous absorbez mais en fonction des scènes que vous faites. Un extrême en appelle un autre. Si certains font juste leur boulot, à savoir enchaîner leurs positions devant une caméra, vous appartenez à cette dernière catégorie, celle de ceux qui « sont faits pour ça », cette élite d’acteurs dont on retient le nom pour regarder leurs prochaines scènes, ceux dont on ne s’offusque pas de voir le visage en gros plan sur son écran mais dont on se dit : »J’aimerais être lui ». Vous êtes le chouchou des actrices, les sociétés de production vous réclament, vous raflez toutes les récompenses. Vous avez compris que la question essentielle n’est pas : »Est-ce que je suis assez membré? est-ce que je suis à la hauteur? », et surtout vous ne vous posez pas de questions . Vous aimez indéniablement le sexe mais vous aimez surtout les femmes. Vous savez que la réponse à toutes les questions sont en elles, dans leur regard, leur souffle, leur manière de se cambrer.Vos deux sexes, vos corps, vos esprits fondent l’un en l’autre. Elle n’est ni la femme de votre vie, ni même votre prochaine petite-amie, et pourtant. A ce moment-là, entre un « action » et « coupez », vous l’aimez. Votre sexe est votre langage, le X votre vocation, l’amour… votre Viagra.
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