Ce n’est pas parce que la collection « L’âge d’or du X américain » de Wild Side vient de s’arrêter brutalement – merci la Fnac ! -, après la parution des ultimes Plato’s : The Movie (Joe Sherman, 1980) & Little Girls Blue (Joanna Williams, 1978), qu’il est interdit de revenir sur les pépites de leur catalogue (pas encore chroniquées sur le site).
The Ecstasy Girls en fait indéniablement partie. Réalisé par Robert McCallum sous le nom de Gary Graver (décédé en 2006), fidèle chef-opérateur d’Orson Welles (le documentaire Filming Othello, le talk-show The Orson Welles Show, …) et directeur photo de Dracula contre Frankenstein (Al Adamson, 1971), Evil Toons (Fred Olen Ray, 1992), ou encore des classiques X US Ultra Flesh & 800 Fantasy Lane (Svetlana, tous deux de 1980), ce film ne manque pas d’atouts à même de séduire les aficionados et éventuels néophytes.
Suite au succès du film, McCallum engendrera d’ailleurs une suite (8 ans après), Ecstasy Girls II, toujours avec ce doux dingue de Jamie Gillis (The Story of Joanna du génie Gerard Damiano, The Opening of Misty Beethoven de Radley Metzger, le sulfureux Water Power de Shaun Costello ).
Hormis notre ami Jamie, les connaisseurs reconnaîtront aussi la sublime Serena (Sweet Cakes, Hot Honey de Bill Maniac Lustig, Insatiable, Coed Fever du même Robert McCallum), Georgina Spelvin – impérissable héroïne du Devil in Miss Jones de Damiano , Paul Thomas (V : The Hot One, Little Girls Blue) – réalisateur du magnifique « porn drama » Masseuse II (avec Ashlyn Gere), John Leslie (Femmes de Sade & Summer Heat d’Alex de Renzy, Desires Within Young Girls) et l’insatiable Desiree Cousteau (Inside Desiree Cousteau, Randy, Deep Rub, Journal intime d’une nymphomane de Gérard Kikoïne). Un plateau de choix donc, pour une œuvre qui tient toutes ses promesses…
The Sex Riviera
Démarrant par un plan de l’affiche du Killer’s Kiss de Stanley Kubrick, The Ecstasy Girls nous dévoile d’emblée ce roublard de Jamie Gillis, partageant ses ardeurs entre deux lolitas (au physique de cheerleaders du campus) et se voyant dérangé par la sonnerie du téléphone (bleu ciel, so 70’s) en plein orgasme. C’est son agent (Jerry, le personnage campé par Gillis, est acteur), qui l’enjoue de se rendre à une première, en compagnie d’une starlette. On comprend rapidement qu’il est « instrumentalisé » par son agent (qui l’emploie plus pour de l’escorting que de l’acting) et, vu sa situation financière, nullement en position de refuser. Jerry sert de « catalyseur », emmenant le spectateur dans la jet set angeleno, ses soirée privées, ses individus pétris de prétention, sa « bourgeoisie hollywoodienne » et autres futilités. A l’issue d’une sauterie mondaine, nous assistons à une étreinte (démarrant par un cunnilingus « acrobatique ») entre Gillis et Desiree Cousteau, sous les yeux de Georgina Spelvin et John Alderman, portée par la BO « swingante » de Richard Hieronymus (Coed Fever, le plutôt burné Lethal Pursuit).
Gillis incarne cet acteur, aux problèmes pécuniers le rendant dépendant de personnalités haut placées, de toute sa présence charismatique, investissant le rôle d’une sincérité (vérité ?) que d’aucuns jugent impossible venant d’un acteur porno. Ils ont bien tort ! Ce cher Jamie est – n’ayons pas peur des mots – un grand acteur de composition, aussi à l’aise dans les séquences dialoguées qu’habile « performer » au lit.
Et son personnage enclenche la mécanique narrative, en bon pourfendeur de la moralité sexuelle et chantre d’un « complot financier », qui devrait se révéler plutôt lucratif… En dévoiler plus serait criminel… Je vous en laisse la découverte…
Formellement, on reconnaît le savoir-faire de Bob McCallum, qui adopte une esthétique « léchée », jouant souvent avec les amorces dans le plan, reflets (transparences ; miroirs, …), contre-plongées et cadrages « insolites », cédant par instants à la caméra subjective (directement induite par les rebondissements du scénario).
Une stylisation qui accompagne divers ruptures de ton, dans un univers de femmes fortes, peu dupes des manigances masculines.
A cet égard, un des sommets du film restera cette fabuleuse scène de sexe entre Gillis et Georgina Spelvin, dans un décor « world » (souvenirs du monde, rapportés de voyages) et sur fond de musique percussive (tribale). Spelvin, au fil de sa carrière (démarrée sur le tard, la trentaine passée), a toujours joué chaque scène sexuelle avec une conviction forcenée, comme si sa vie en dépendait… Quelque chose de précieux et d’indescriptible… Une aura qui résonne au-delà de chaque film, de chaque photogramme… Inoubliable…