Je l’avoue je bosse dans l’univers du X. Depuis quelques mois, plus pour longtemps. Et pour tout vous avouer ça me colle la nausée. Un boulot trouvé par hasard, parce qu’il fallait que je bosse, impérativement. L’illusion comique et coquine des premiers jours, les airs entendus des potes, les regards mi choqués, mi intéressés des copines.
Ouais je bosse dans le X, c’est très tendance, d’autant que je suis mandaté pour créer une boutique de sextoys en ligne. Je me cultive sur le sujet et deviens un “expert” en la matière. Les vibro, gods, dildos, rabbits, anchor, stimulateurs, anneaux… n’ont plus de secrets pour moi. Je connais les efficaces, les mauvais, ceux qu’il vaut mieux éviter pour raisons médicales et ceux qui sont d’une totale innocuité.
Le milieu n’a pas de limite, mais je commence à pressentir les miennes. Voici le god moulé sur l’organe d’un porc (un vrai cochon), celui moulé sur un danois (le chien) et celui à la mesure d’un cheval. Mais l’esprit maison veut qu’on ne juge pas les goûts et les couleurs. Ça aussi d’ailleurs c’est tendance. Ne pas juger. Après tout, l’une des meilleures ventes est bien ce god en forme de point, taille réelle.
Je me rassure en me disant que les gens se mettent bien ce qu’ils veulent dans le derrière. Le site est en ligne, les ventes sont là, les gods animaliers sont au top des ventes. Il va falloir que je m’intéresse à la VOD. Comprenez “video on demand”, video à la demande. Des films de cul qu’on achète en ligne. Ces films de cul qu’on voit sur Canal ou autres chaînes satellites. Des femmes épanouies par une sexualité libérée, sans tabou ni limite. Ok. Ce ne sont jamais que des films de cul.
De par ma fonction, j’ai accès à ces films, mais aussi aux photos des tournages, aux making of. Les acteurs, hommes et femmes épanouies, se transforment sur ces images en fantômes, le regard fixe, vide. Des hommes et des femmes aux visages creux, abrutis de fatigue, qui font leur boulot. Des femmes qui pleurent, épuisées, humiliées, blessées dans leur âme et dans leur chair.
Car on a beau dire, même si le cul nous est vendu comme une libération, un épanouissement, une manière d’être détachée de tout jugement social, une révolte, ces êtres que je vois sur mon écran, sont des êtres brisés. Je me dis que le maquillage outrancier des hardeuses, est le masque du désespoir. Mais ne nous arrêtons pas là. Et allons flairer un peu le top des ventes en matière de vidéo.
Les films qui remportent la palme des ventes sont les films zoophiles et scato. On se pisse et on se défèque dessus. On semble y prendre du plaisir. Au hasard d’un rendez-vous je croise celui qu’on nomme Monsieur Caca. Un homme costard cravate, 70 ans, principal acteur de ses films. Il nous offre des crottes en chocolat pour Noël.
Quant à la zoo, c’est dans ces films que j’ai croisé les plus jolies filles. J’imaginais de vieilles actrices en mal de tournages et qui en désespoir de cause se tournent vers les fosses les plus sordides du porno. J’y découvre de très jeunes femmes qui se tapent chiens, chevaux ou porcs. De très jeunes femmes d’Europe de l’est. Elles font leur boulot avec un entrain visiblement simulé. Je me doute sans en avoir la preuve formelle qu’un barbouze est sur le plateau, à les surveiller voire à les “recadrer” si la fille ne fait pas son boulot avec la passion qu’il faut.
Je donne ma dem en fin de semaine. Et pour ne rien vous cacher, je crois que je vais éviter pendant un bon bout de temps de regarder des pornos. Car je ne peux plus m’empêcher de distinguer ce qui se passe derrière les lumières et les maquillages.
Photo : ©*.●::♥ Mili Miu ♥::●.*via Flickr