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Vu sur Nathalie et ses bonnes œuvres en précommande
Je parle beaucoup des publications de la collection e-ros de manière générale. Mais avec cette prochaine publication, celle de Nathalie et ses bonnes œuvres, il est naturel que je m’exprime davantage encore : à la promotion globale de la collection s’ajoutent mes mots d’auteur. Alors Nathalie, bien sûr, je vous en ai déjà un peu […]
Cet article provient de Littérature érotique
Vous avez lue la «version améliorée» du Devoir? Voici la version originale, pour fins de comparaison.
* * *
Chaque année je me promets que ce sera la dernière. Je jure devant dieu et les hommes que je ne serai plus jamais le dindon de la farce grotesque de Hallmark, qu’on ne m’y prendra plus à participer à cette arnaque rose fluo qu’est la Saint-Valentin. Et portant, encore une fois, j’ai succombé. Prise de sueurs froides en regardant le calendrier, je me suis arrangée pour avoir un rendez-vous le soir du 14 février. Vous viendrez ensuite me raconter que le libre-arbitre est autre chose qu’une chimère.
J’ai donc réactivé en soupirant mon compte sur Okcupid dans l’espoir un peu fou de me trouver une date pas trop pitoyable, qui s’est présentée en la personne d’un certain Mathieu de Masson-Angers. Ses messages étaient exempts de fautes d’orthographe, alors je me suis dit qu’il méritait une chance. Je l’ai donc laissé choisir le restaurant où il m’attendait, à la date et à l’heure dite, une rose à la main. Sa photo de profil ne mentait pas : il avait la trentaine dégarnie du toupet et bien garnie du bide, le complet d’un correspondant parlementaire et le sourire 3D White. Quant à sa conversation, elle était aussi intéressante qu’une soirée passée à zapper entre des info-pubs et des reprises du Jour du Seigneur. De l’entrée au dessert, il a été pédant, satisfait de lui-même – et à la fin, carrément insupportable.
Alors qu’il finissait de gober sa crème caramel en parlant la bouche pleine, je me suis dit qu’il fallait que je saute de ce navire en perdition. J’ai donc ramassé ce qui me restait de dignité et je me suis levée. Me voyant faire, il a bredouillé :
— Euh… Anne ? Tu…
— Je pars, mais je dois d’abord faire un arrêt au petit coin. Ça te dirait de m’accompagner ?
Il est devenu soudainement pâle comme un drap.
— C’est que… je ne fais jamais l’amour au premier rendez-vous.
— D’accord, mais baiser au dernier, pas d’objections ?
Il était trop tétanisé pour répondre. J’ai donc fait quelque pas en direction des toilettes ; quand je me suis retournée, j’ai vu qu’il laissait des billets sur la table en tentant de camoufler la bosse dans son pantalon. Lorsqu’il a poussé la porte, je retouchais mon rouge à lèvres, penchée au-dessus du lavabo. Il s’est approché, hésitant. Je l’ai attrapé par la cravate et l’ai entraîné dans une cabine. Nous nous sommes embrassés avec empressement et j’ai défait sa ceinture pendant qu’il s’escrimait avec les boutons de mon chemisier. Dès que sa bite s’est pointée de son caleçon, ce fut trop pour lui : il a éjaculé à grands traits en éclaboussant ma jupe.
— Anne je m’excuse, c’était juste trop… euh… tu sais… a-t-il bredouillé, d’un air franchement contrit.
— Ça va, ne t’inquiète pas, c’était une mauvaise idée.
Il s’est rebraguetté à la hâte et a fui sans demander son reste (ou mon numéro de téléphone). Encore une Saint-Valentin qui tournait en poisson d’avril.
* * *
Je suis donc retournée dans mon demi-sous-sol en soupirant, car je savais exactement ce qui m’y attendait.
En ouvrant ma porte, j’ai d’abord aperçu, alanguie sur mon fauteuil préféré, une rousse filiforme à la peau laiteuse constellée de taches de rousseur. Elle avait les cuisses largement écartées et se taquinc8ait le clito avec ma brosse à dents vibrante. Il faudra d’ailleurs que je pense à la remplacer. Juste à côté, un homme incroyablement poilu et obèse portant une cagoule rose en latex se faisait fister jusqu’au milieu de l’avant-bras par un minet au au regard angélique. Sur le divan, une beauté sombre au bord de l’apoplexie allaitait deux barbus rondouillards et bandants qui semblaient enfin avoir trouvé leur bonheur. Le tout dans une pénombre fleurant le fauve et remplie par les cris de ménade des partouzeurs.
Dans la cuisine, il y avait la dame de la bibliothèque qui léchait la fente recouverte de crème fouettée de ma conseillère municipale. C’est bon de constater de visu à quoi servent nos taxes foncières. À côté d’elles, un échalas se branlait en sacrant comme un humoriste de la relève. Préférant ne pas rester au premier rang (pour ne pas me faire arroser), j’ai enjambé tant bien que mal les corps enlacés qui encombraient le couloir pour me rendre jusqu’à la porte entrouverte de ma chambre.
Au son des craquements du lit et des halètements, j’ai su que j’allais surprendre Jessica, mon amoureuse, en pleine séance de pince-mi pince-moi. Je n’ai pas été déçue : elle était couchée sur le dos au sommet d’un monticule d’oreillers et se faisait fourgonner la voie sodomique par le camelot du Devoir. De chaque côté d’elle, le voisin d’en haut et celui d’en face relevaient ses genoux pour faciliter la pénétration. Le visage de Jess était écarlate et luisant se sueur; de sa bouche crispée sortait une série de cris en staccato, entrecoupés de hoquets étouffés. Autour du lit, une demi-douzaine de quidams à poil zieutaient la scène et attendaient sagement leur tour. Ils se polissaient nonchalamment la trique en échangeant propos grivois et épithètes fleuries.
Jess a joui lorsque je me suis arrivée près du lit. Retenue fermement par mes deux voisins, elle s’est tordue de plaisir, le dos voûté, dans une longue plainte hululante. Elle s’est ensuite effondrée, entraînant avec elle ses camarades de jeu pour former un tas informe de chair collante et repue. Je me suis approchée d’elle et, dégageant de mon index les cheveux humides de son front, je lui ai susurré à l’oreille :
— Allô ma chérie, je suis de retour.
Elle a ouvert les yeux et m’a souri faiblement, puis, après avoir repris son souffle, a annoncé à la ronde :
— Ok tout le monde. Pause pipi !
Les mâles ont un peu ronchonné, mais l’ont quand même aidé à se relever. Elle s’est rendue en claudiquant à la salle de bain où elle m’a fait une bise aussi tendre que parfumée de foutre avant de me demander :
— Alors, mon amour, le grand rendez-vous romantique ? Ça s’est bien passé ?
— Pas trop. Il était ennuyeux comme la pluie et éjaculateur précoce par-dessus le marché.
Elle a fait cette moue boudeuse qui me fait toujours craquer et, toute de miel, m’a dit :
— Ne t’en fais pas, trésor, tu vas finir par le rencontrer, le prince charmant qui t’amènera sur son blanc destrier souper chez ta mère.
Le cœur qui chavire et une larme au coin de l’œil, je l’ai embrassée de nouveau, avant de lui dire :
— Ma chérie, c’est vraiment toi la dernière des romantiques.
Qui se ressemble s’assemble? – flickr/RIza Nugraha
Internet, cette grande machine de mise en relation des individus du monde entier, peut nous permettre de rencontrer des gens de tous horizons. Mais l’entre-soi y reste la règle, et c’est aussi le cas sur les sites de rencontres. La sociologue Marie Bergström a consacré sa thèse aux rencontres en ligne : « Au bonheur des rencontres : Sexualité, classe et rapports de genre dans la production et l’usage des sites de rencontres en France ». Après nous avoir expliqué comment les rencontres en ligne devenaient rapidement sexuelles, elle nous décrit ces mécanismes qui nous font rejeter les profils trop éloignés de nos standards.
Est-ce qu’internet permet de réduire l’homogamie (trouver un conjoint au sein de son propre groupe social), d’aller chercher des partenaires qui sont en dehors de nos cercles habituels ?
L’originalité de ces sites est de faciliter les rencontres au-delà de nos cercles habituels : les rencontres en ligne se déroulent en dehors, et à l’insu, du cercle de sociabilité. On aurait pu penser que Facebook allait tuer les sites de rencontres, mais Facebook ne permet pas d’aller chercher en-dehors de ses cercles, ni d’éviter le regard des pairs. Par exemple les jeunes femmes, dont la sexualité fait toujours l’objet d’un contrôle important par l’entourage, vont plus aisément vivre des relations, notamment occasionnelles, avec des partenaires qui sont extérieurs à leurs réseaux sociaux.
Pour autant les sites de rencontres ne réduisent pas sensiblement l’homogamie car, comme lors des rencontres offline, il y a toujours une sélection sociale des partenaires. On se retrouve souvent avec des personnes qui ont les mêmes goûts et sont issu du même milieu social.
Comment se passe cette sélection sociale?
Elle a lieu en trois phases : l’évaluation du profil, l’échange écrit, puis finalement la rencontre physique.
Lors de l’évaluation du profil, il y a des pratiques très différentes. Les personnes diplômées tendent à donner beaucoup d’attention à l’annonce écrite, à la fois sur ce qui est dit, sur le niveau en orthographe qui est très discriminant. La photo compte aussi, mais le texte est très important. Chez les personnes moins scolairement dotées, un texte détaillé va paraître prétentieux et on va miser davantage sur l’image. Donc, il y a des usages sociaux différents des profils qui contribuent à l’homogamie.
Pendant l’échange écrit, d’autres mécanismes sont en action. On va essayer de créer une interaction par le verbe, en trouvant des sujets de conversation (musique, activités, pratiques culturelles). L’affinité des goûts participe ici au processus d’homogamie. En plus de ça, il y a des codes de la séduction qui sont socialement discriminants. Dans les milieux à plus faible capital économique et culturel, on va beaucoup plus vite raconter sa propre histoire affective et se faire des compliments directs, ce qui sera perçu comme déplacé chez les personnes dotés en capitaux pour qui la séduction est un jeu d’ambigüité : on ne peut pas y être explicite, il faut faire comprendre son intérêt sans le dire. La séduction est un jeu à la fois genré et très social.
Hommes et femmes sont donc censés se comporter différemment ?
Oui, les rencontres en ligne suivent des scripts qu’on trouve ailleurs et qui sont très genrés. Un de ces scripts c’est la réserve féminine. C’est aux hommes de prendre l’initiative et aux femmes de temporiser les interactions. Selon le rituel de la séduction hétérosexuelle, les femmes doivent ainsi mettre des « barrières » et c’est aux hommes de les faire tomber. Si une femme déroge à ce script, si elle prend l’initiative ou si elle se montre ouverte à une rencontre sexuelle, elle risque sa « réputation sexuelle ». Mais cela créé aussi des attentes chez les hommes : une femme qui se montre disponible risque d’être perçue comme inconditionnellement disponible, les hommes vont attendre d’elle qu’elle ne dise jamais non. Elle peut donc perdre le contrôle des interactions et pour l’éviter, elle se retrouve dans la nécessité d’afficher une image retenue et « respectable ».
Qui plus est, souvent les hommes ne vont pas répondre favorablement à une situation qui les prive de la performance d’avoir à séduire. En résumé, ce n’est « pas marrant si c’est trop facile ». Aussi, dans les situations ou les femmes passent outre la réserve qu’on attend d’elles, les hommes ne donnent souvent pas suite car cela sort du script qu’ils connaissent. Ils ne savent pas comment gérer la situation et prennent peur. Dans le script habituel, c’est la réserve féminine qui crée la tension sexuelle, donc si les femmes dérogent à ce scénario, les hommes ont du mal à jouer le jeu de la séduction.
Un petit texte tout doux pour rappeler qu’aimer est le plus beau cadeau que l’on puisse offrir. S’approprier une fête mercantile comme la Saint-Valentin pourquoi pas, en être esclave non. L’amour se conjugue dans le temps. Il se tisse à coup de petites attentions. Peu importe la date. Mais cette construction se fait au jour…
Cet article L’amour, le temps, les saveurs … est apparu en premier sur NXPL.
There were so many ways the mainstream-breakthrough BDSM romance novel could’ve gone.
But instead of, say, one of the stunning contemporary novels being crafted by indies (Dark Secret Love by Alison Tyler, Slow Surrender by Cecilia Tan, Carrie’s Story by Molly Weatherfield), we got 50 Shades.
It’s not a BDSM novel. It’s ‘The Ultimate Guide’ to revoking all the hard work sex-positive sex educators have done over the past 30 years to create a culture of informed consent around kink and keep people from sticking household objects up their asses. It’s not a romance. It’s a book about a rapey douchebag with borderline personality disorder who obsesses over an invertebrate whose insecurity should win her a Darwin Award. Instead of reading Fetish Sex, people are reading 50 Shades and sticking dangerous things up their butts. Instead of a sexy, relevant, redeeming film version of the book directed by Erika Lust or Anna at FrolicMe, we got another reminder that Hollywood and the mass book market for sexual content hasn’t quite grasped this whole internet fad.
I kept using my safeword, but the movie wouldn't stop.
— Mike Stabile (@mikestabile) February 14, 2015
Anyway…
Indie, woman-run porn site FrolicMe sent me these super-hot photos saying they’re “from a film we produced called Sir. It had a very strong moody feel and oozes control, devotion and possession. The story for this film was written by a Sub herself.” I think they’re a great example of what 50 Shades fans deserve. Thank you to FrolicMe for the exclusive pics!
Content copyright © 2015 Violet Blue ® (R) permitted for use on tinynibbles.com only.C’était un jeudi après-midi comme les autres. Comme à mon habitude, je me beurrais nonchalamment le muffin en regardant de la pr0rn mongole sur YourtePorn quand Anne, ma charmante (et homonyme) éditrice au Remue-ménage m’a contactée sur Fessebouc avec un message qui a immédiatement titillé mon intérêt – comme si j’étais quelqu’un qui avait besoin d’être titillée, hein.
«Y’a une demande un peu particulière qui vient d’arriver… qui ferait de toi une véritable star interplanétaire.»
Je n’ai pas vraiment envie d’être une star sur la Terre, mais comment résister à la perspective d’en devenir une sur Uranus? J’ai donc répondu :
«Le pape veut que je chante Une colombe au Stade ?»
Et bien non, c’était beaucoup, beaucoup plus étrange que cela – et pas mal moins glamour, aussi. La personne responsable du cahier Livres du journal Le Devoir que je ne nommerai pas (appelons-la Catherine) me sollicitait, via mon éditrice, pour que je lui écrive un texte de la Saint-Valentin qui «idéalement ferait faire une crise cardiaque aux lecteurs du journal, mais sans les faire crever.»
Peut-être que vous êtes un lecteur ou une lectrice du Devoir et que, par conséquent, vous savez exactement quel est le niveau de tolérance à la ribauderie de cette crowd. Moi, par contre, je suis si blasée que contempler un chanoine se faire joyeusement trousser à répétition par une troupe de boyscouts me fait au mieux réprimer poliment un bâillement. Dans ces conditions, comment éviter que l’infarctus ne soit létal ? Il fallait que je teste la longueur de ma laisse. J’ai donc envoyé un Nimelle à la personne dont je tairai le nom (appelons-la Catherine) en lui disant : « Pour choquer le lectorat du Devoir, je pense qu’il faudrait que j’écrive une nouvelle BDSM gay mettant en scène René Lévesque et Claude Ryan », dans l’idée qu’elle pousse les hauts cris et me dise exactement ce que je peux et ne peux pas faire. Or, à peine quelques minutes plus tard, voici ce qu’elle m’a répondu :
«Je serais game, pour Ryan & compagnie. Et puis c’est le jour de sortie du film Fifty Shades of Grey. Il y aura assez de bluettes dans l’air, ne faites pas trop joli par pitié !»
Comme dirait Philippe Couillard, je venais de recevoir un mandat clair pour y aller à la hache.
La tentation fut forte de décrire comment Ryan aurait pu faire usage de la main de Dieu dans le fondement coquet et nicotiné de Lévesque, mais je ne suis pas femme à cracher sur les monuments sacrés de la nation – en tout cas, pas devant un public qui ne connaît pas mes manies de crottée anarchiste. Je me suis donc appliquée à rédiger un récit juste assez polisson pour effrayer les âmes sensibles, tout en restant dans les limites consensuelles de la bienséance post-révolution sexuelle. Pour dire les choses platement, je me suis fiée à ce que les Éditions TVA étaient capables de tolérer, à l’époque où elles daignaient encore me commander des petites histoires pour leur magazine de soft-porn. Pas descriptions trop détaillées. Les fluides corporels en quantité minimale. Pas de joual pour décrire les organes génitaux (je sais, ça sonne «complexe du colonisé», mais je vous jure que c’est un critère incontournable).
Lorsque la gentille responsable du cahier Livres que je ne nommerai pas (appelons-la Catherine) a reçu le texte, elle a eu l’air assez contente du résultat, bien qu’elle m’ait confiée que la scène de fist fuck et celle du camelot baiseur du Devoir dépasserait probablement les bornes. Après consultation avec ses patrons, le verdict fut tout autre : «Trop porno.» m’a-t-elle écrit, en ajoutant «Je sais, je sais, la limite entre le porno et l’érotique est floue, mais on me rétorque qu’on est un journal grand public.»
Alors là, moi, je me suis vraiment mise à rigoler. Parce que :
La journaliste que je ne nommerai pas (appelons-la Catherine), triste et déconfite, n’osait pas me demander de réécrire. Je la comprends : quelqu’un d’autre que moi (genre Sœur Marie-Paule Ross) l’aurait immédiatement envoyée se faire voir – ou pire, l’enjoindre de déguster un plat préparé par Christian Bégin. Or, je ne suis pas une artiste, une écrivaine ou – Satan m’en garde – une poétesse, moi. La littérâââture, je m’en branle. Elle n’a rien de sacré pour moi; en fait, absolument rien n’est sacré pour moi. Javelliser une nouvelle érotique pour ne pas faire bobo aux queneuils des lecteurs du Devoir, why not? L’occasion était trop belle pour publier la version originale de mon côté et inviter mes lectrices et lecteurs adorés de jouer au jeu des vingt différences. Et rire un peu, tant qu’à y être, de cette pauvre, pauvre élite intellectuelle québécoise, qui est si mal en point que je me sens mal d’y prendre autant de plaisir.
Comprenez-moi bien : si j’écris ce texte, ce n’est ni pour m’indigner de la censure, ni pour jouer les victimes, ni pour attirer la pitié, ni pour crier «Je suis Charlie» en brandissant dans mes mains ensanglantées le cadavre de mes libertés bafouées. Si vous croyez (sans rire) qu’il existe vraiment ici un droit à la libre expression naturel et inaliénable, je suis vraiment triste pour vous et votre douce naïveté. Tant qu’il y aura des propriétaires, les idées ne seront que des marchandises comme les autres et ce sont ceux qui les vendent – et qui ont les moyens de les acheter – qui auront toujours le dernier mot. Non, qu’on me refuse un texte rédigé exactement comme on me l’a commandé me semble «normal» dans le contexte social qui est celui dans lequel je suis condamnée à vivre. Ça fait partie de la proverbiale game. Et puis, franchement, je ne suis quand même pas une blogueuse saoudienne qui reçoit mille coups de fouet par tranches de cinquante coups hebdomadaires; ça, c’est plutôt ce que je pratique comme loisir dans l’intimité de mon foyer.
Si j’écris ce texte, c’est pour vous rappeler une banalité de base que moi-même j’avais depuis longtemps oubliée, isolée que j’étais dans ma bulle de radicalisme (et dans mon demi-sous-sol) : les mots de la sexualité, encore en 2015, restent puissants. Malgré tout ce qu’on en dit, malgré cette culture soi-disant hypersexuée, malgré la pr0n accessible gratos à toute heure du jour et de la nuit, malgré qu’ils existent dans la langue française depuis des siècles, malgré qu’ils soient restés les mêmes depuis des siècles, malgré qu’on les répète depuis des siècles et malgré que nous les ayons tous et toutes entendus mille fois depuis la cour d’école jusqu’à l’hospice, la puissance incroyable des mots cochons ne s’est pas encore émoussée. Ils brûlent encore la rétine et transpercent encore les tympans. Ils ont encore le pouvoir de remuer les sangs et de mettre le rouge au front.
Et ça, je dois vous avouer que ça me procure un indicible bonheur.