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Venez célébrer avec les militantEs du Mouvement du Nid du Bas-Rhin et Rosen Hicher le 69ème anniversaire de la fermeture des maisons closes, à partir de 11h00 au club de la presse, place Kléber ! Nous vous présenterons les rendez-vous que nous organisons pour l'occasion du 13 au 17 avril 2015.
13 avril 1946 - 13 avril 2015 : 69ème anniversaire de la fermeture des maisons closes.
Infos pratiquesConférence de presse mardi 14 avril 2015 à 11h au Club de la Presse
10 place Kléber à Strasbourg
Rosen Hicher racontera sa marche de près de 800 km - en 2014 - entre Saintes et Paris contre l'esclavage sexuel (la prostitution). Elle a parcouru toutes les villes dans lesquelles elle a été prostituée pendant 22 ans pour sensibiliser les éluEs et sénateurs/trices sur la proposition de loi visant à lutter contre le système prostitutionnel. Elle milite activement pour la pénalisation des "clients". Elle sera en Alsace du 13 au 17 avril 2015.
Le Mouvement du Nid – Strasbourg présentera les rendez-vous organisés à cette occasion. Cette conférence de presse sera suivie à 12h30 d'une rencontre avec les EluEs AlsacienNEs signataires de la tribune abolitionniste.
Contact et inscription : Isabelle Collot / Mouvement du Nid alsace-67@mouvementdunid.org - 06.71.82.81.48
À lire sur ce site :
Le 12 octobre, marchons avec Rosen pour l'abolition de l'esclavage sexuel !
Rosen : un marathon pour l'abolition
Vu sur Fantasmes et Miroirs, Collectif
Six nouvelles dans ce recueil Fantasmes et Miroirs. Je n’évoquerai pas mon propre texte, Si semblables, car j‘en ai déjà dit quelques mots ICI. Passons aux cinq autres nouvelles. Et tout d’abord, une appréciation globale sur celles-ci : je les ai trouvées bonnes. L’ensemble du recueil est même de très bonne facture. Elle (nouvelle narcissique) de […]
Cet article provient de Littérature érotique
Osez 20 histoires de sexe à plusieurs… Promesse tenue : voilà un recueil où les étreintes s’enchaînent, débordent, où les possibilités se multiplient. La plupart du temps, c’est très joyeux, festif, ça fait envie. Parfois, ça vire un peu trop au porno sans scénario. En tout cas, c’est une lecture troublante. Pour ce recueil, j’ai … Lire la suite →
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Access France – Act Up-Paris – Act Up Sud-Ouest – Aides – Strass
Le projet de loi sur le renseignement met en place une surveillance généralisée de l’ensemble des citoyen-nes. Il étend les motifs d’écoute et de surveillance à des textes qui peuvent s’appliquer aux combats des associations de lutte contre le sida et les hépatites virales. Il doit être retiré.
Critique des politiques économiques et scientifiques françaises = terrorisme ?
Le projet et les amendements adoptés en commission des lois autorisent les écoutes pour le recueil de renseignements relatifs, entre autres, aux intérêts économiques et scientifiques de la France.
Or, les luttes des malades ont souvent été opposées à ces mêmes intérêts. C’est bien au nom des intérêts économiques et scientifiques de la France que des socialistes et des responsables administratifs ont repoussé, au milieu des années 80, les mesures indispensables à assurer la sécurité transfusionnelle, se rendant responsables du scandale du sang contaminé. Combien de scandales sanitaires, comme celui de Servier, auraient pu être évités, s’ils n’avaient pas été couverts au nom de prétextes assimilables à la défense des intérêts économiques et scientifiques de la France ?
Nos combats nous amènent à remettre en cause le système économique et scientifique français : prix du médicament, instances opaques, carences de la pharmacovigilance, démantèlement de la Sécurité sociale, baisse des subventions pour des actions qui sauvent des vies, abandon des malades des pays pauvres, etc. Quelle garantie avons-nous qu’un prétexte aussi flou – que la commission des lois s’est empressée d’élargir – ne transforme pas le plaidoyer de nos associations en une menace pour les intérêts économiques et scientifiques de la France ? Rien dans les décennies passées en matière de vigilance, de respect des lanceur-ses d’alerte, de réactivité, de lutte contre les conflits d’intérêt, ne saurait nous rassurer en la matière.
Désobéissance civile et manifestation = terrorisme ?
Le projet prévoit aussi de légaliser les écoutes pour « prévenir les actions collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique. »
De nombreuses voix (syndicats, associations de défense des droits humain, syndicats, magistrat, y compris de la lutte anti-terroriste) ont dénoncé l’amalgame probable de cet article avec les protestations du mouvement social. C’est notamment vrai pour nos combats, qui ont toujours eu besoin d’actions de désobéissance civile qui pourraient relever d’une interprétation élargie de cet article de loi : distribution de seringues à une époque où c’était interdit, accueil d’usagErEs de drogues avant l’institution de la réduction des risques, mise de côté des lois répressives pour accueillir sans-papiers, travailleuses du sexe, usgErEs de drogues, entrave à l’expulsion d’étrangErEs malades dans des pays où on ne pourra les soigner, manifestations non autorisées pour dénoncer de graves blocages institutionnels, etc.
Ces actions ont fait avancer la lutte contre le sida et les hépatites. Désobéir à la loi est une nécessité quand la loi, et la société, excluent et marginalisent des populations entières en les rendant plus vulnérables à l’épidémie. Les militant-es qui ont mené ces actions de désobéissance civile ont toujours assumé les conséquences de leurs actes face à la justice. L’histoire de la lutte contre le VIH et les hépatites leur a donné raison. Faudrait-il dès lors nous considérer comme potentiels terroristes et nous mettre sur écoute ?
Alors même que des actions similaires restent nécessaires pour alerter politique et responsables administratifs des graves lacunes de notre système de santé, doit-on s’attendre à être traité-es en terroristes ?
En répondant à des actes de terreur par des mesures de peur et de suspicion, la majorité donne aux terroristes ce qu’ils et elles veulent : moins de démocratie, le soupçon généralisé, des scissions supplémentaires au sein de la société. Ce faisant, elle menace nos combats, nos actions.
Nous appelons au retrait de ce projet de loi. Nous incitons nos militantEs, adhérentEs, sympathisantEs, à participer à la campagne organisée par la Quadrature du Net et à contacter leur député-e pour dénoncer ce texte.
Cet article PROJET DE LOI SUR LE RENSEIGNEMENT : UNE LOI ANTIDÉMOCRATIQUE, DANGEREUSE POUR NOS COMBATS est apparu en premier sur Strass Syndicat du travail sexuel.
http://www.letemps.ch/Page/Uuid/d9761c1e-e130-11e4-aa18-ff4de01147fa/Le_mariage_pour_tous_en_Suisse_un_pas_important_vers_l%C3%A9galit%C3%A9_des_droits|Dans une tribune, le conseiller national socialiste valaisan, défend l’idée de laisser aux couples homosexuels la possibilité de se marier. «Cela réglerait surtout un grave problème actuel: le partenariat enregistré étant réservé aux homosexuels, il a inévitablement un effet discriminatoire. Son inscription dans des formulaires officiels – de l’Etat ou de l’hôpital, mais également en voyage ou dans un CV – indique ainsi immédiatement l’orientation sexuelle de l’individu. Il s’agit d’une intrusion dans la sphère privée, avec des risques de discrimination évidents. Ce n’est pas acceptable.» Pour le jeune élu socialiste, cette réforme participe d’une lutte en faveur de l’égalité des droits, au même titre que la répression anti-homophobie, qu’il défend dans une initiative actuellement débattue au Parlement.
Brodant sur le lien entre «menstruel» et «monstrueux», le film Alien Tampon parle avant tout d’une peur, largement partagée en Occident : la peur de la «génitrice». Nous en avons si peur que nous préférons déléguer ce rôle à des femmes venant de pays moins développés, sur qui nous comptons pour «pondre» les enfants à notre place…
Le film Alien Tampon – pour l’instant à l’état de projet – raconte l’histoire d’une étudiante qui a eu le malheur d’enfiler un tampon infecté de sang vert extra-terrestre. La voilà transformée en monstre. La terre est en danger car elle infecte à son tour toutes les personnes qu’elle rencontre.
En février 2015, la bande-annonce est lancée sur Internet. But : convaincre les investisseurs de miser sur un éventuel long-métrage. Le projet, chapeauté par le réalisateur Jan Zenkner, ne ressemble pour l’instant qu’à une parodie de film de zombie délirant. «Menstrueux !», entonnent en chœur les amateurs de série Z, qui se régalent d’avance et pour cause : la bande-annonce mélange belles blondes à gros flingues et détournements bizarres de tampons gluants. Stupide, potache et de mauvais goût, le projet de film Alien Tampon suscite un vif intérêt sur les réseaux sociaux. Pourquoi ? Parce qu’il flirte avec des fantasmes qui touchent les fibres sensibles de notre imaginaire, tissant avec d’innombrables autres œuvres – romans et films – la trame d’une hantise collective : la hantise de la maternité, associée à une forme de dégénérescence contagieuse.
Il n’est en effet pas innocent que la femme, dans de nombreux récits de science-fiction américains ou européens, soit considérée comme le vecteur principal d’épidémies frappant l’humanité. Comme par hasard, la maladie – très proche d’une MST – fait régresser les humains à un stade primitif. Ceux qui sont infectés par le «virus alien» mutent en créatures décérébrées, comparables aux fourmis rouges. Les voilà qui pullulent, guidés par une forme d’instinct collectif qui les pousse à se sacrifier au seul profit de leur groupe. L’être qui les dirige, comme par hasard, prend les traits d’une reine pondeuse. Dans Alien Tampon, il s’agit d’une fille devenue femme, c’est-à-dire fertile. «Voilà pourquoi faut pas énerver une femme quand elle a ses règles», s’amuse une commentatrice, soulignant avec justesse l’équation posée dans le film entre les cycles menstruels et la menace d’un désordre. Quand une femme devient potentiellement une reproductrice, c’est le début des ennuis.
La figure maternelle est-elle donc si monstrueuse dans notre société ? Oui, répond Marika Moisseeff, ethnologue, psychiatre et chercheuse au CNRS, pour qui la science-fiction apparaît comme une véritable mythologie contemporaine. Depuis le début des années 2000, Marika Moisseeff démonte les ressorts de films grand public – Starship Troopers, Alien, Xtro, La mutante – dont elle révèle les significations secrètes. Ces films ne sont pas que de simples produits d’une industrie du divertissement, dit-elle. Ils sont l’équivalent des mythes gréco-romains, des récits amérindiens, des contes africains ou des traditions orales aborigènes… Ce sont des dispositifs conçus pour transmettre un savoir concernant la réalité, une vision du monde. Mais à la différence des discours scientifiques, philosophiques ou théologiques, qui entendent délivrer une vérité absolue ou trouver LA solution d’un problème, le discours mythologique brode à l’infini sur une trame, sans jamais imposer de réponse claire ni définitive à nos questions (1). Chaque mythe possède plusieurs versions et s’enrichit d’adaptations nouvelles qui renvoient indéfiniment cette réponse à plus tard, confrontant l’auditeur-spectateur à l’insondable mystère des choses.
Concernant le rapport de la femme avec les aliens, à quelle vérité cachée nous renvoie un film comme Alien Tampon ? Dans un texte intitulé «La Procréation dans les mythes contemporains», Marika Moisseeff explique : dans notre imaginaire occidental moderne, il est mal-vu d’enfanter. Plus une espèce est «évoluée» (avancée sur le plan technologique), moins elle procrée et plus elle devient dépendante d’espèces moins évoluées pour se reproduire. Elle délègue cette fonction à des machines ou à des créatures inférieures. Avant de devenir réalité, la PMA, l’IVG et le clonage étaient des topos récurrents de la science-fiction. De plus en plus nombreuses sont les femmes qui, à l’instar de Marcela Iacub (2), se montrent favorables à l’idée que le fœtus soit délocalisé hors du corps de la mère. On appelle cela l’ectogenèse. La plupart des futurologues prévoient d’ailleurs qu’il sera possible, d’ici quelques décennies, de confier le «fardeau» de la gestation à des utérus artificiels. Les biotechnologies, disent-ils, délivreront les femmes de ce qu’ils appellent une «charge» : l’accouchement. Pour ces adeptes du «progrès», il semble injuste que les femmes restent inféodées aux nécessités de la reproduction biologique. La femme aussi, tout comme l’homme, devrait avoir le droit de faire un enfant sans nécessairement le porter dans son ventre. Marcela Iacub va plus loin : elle accuse les hommes de vouloir maintenir les femmes sous leur joug, en les reléguant au rôle de génitrices, en les maintenant dans l’obligation d’assumer le devoir de survie biologique. Son discours est séduisant, car il repose sur une vision largement partagée aujourd’hui de la maternité. Tomber enceinte, c’est un peu comme devenir une grosse vache.
Mais d’où vient cette vision si négative de la maternité ? Pourquoi associe-t-on l’image d’une mère à celle d’une créature momentanément dépossédée d’elle-même et rendue stupide, faible, dépendante ? C’est ici que Marika Moisseeff attaque. Pour elle, tout cela relève d’une construction culturelle de la différence homme-femme. Il faudrait se défaire de ce schéma pour se libérer, suggère-t-elle. Prisonniers d’une vision binaire des rapports mâle-femelle (culture-nature, intelligence-affect), nous vivons dans la hantise du «biologique». Et cette hantise nous mène droit dans le mur. La solution, ce n’est pas de créer des utérus artificiels. La solution, c’est d’en finir avec cette hantise de la maternité, assimilée à une forme de maladie affectant les fonctions intellectuelles et l’autonomie des femmes. Pour détruire ce schéma, il faudrait d’abord prendre conscience qu’il domine notre pensée. Marika Moisseeff le prouve. Dans notre imaginaire, dit-elle, porter un enfant pendant neuf mois, puis accoucher, sont des «activités peu propices à l’accession aux cimes de la spiritualité auxquelles l’évolution a porté l’humanité» (3). Son ironie est mordante. Elle cite, à l’appui, de très nombreux exemples de cette pensée morbide qui mine notre société.
«Fin 1999, un hebdomadaire français proposait d’établir une liste de faits qui caractériseraient l’humanité de l’an 2000 au regard de celle de l’an 2100 et quelque. Nous retiendrons celui-ci : “En l’an 2000, les gens étaient enfantés à l’intérieur de leur mère, comme les animaux“. La grossesse, l’enfantement naturel, la nécessité d’être englobé dans un corps de femme avant de naître, relèguerait donc l’humanité au rang de l’animalité. Ce constat pourrait ne relever que de l’anecdote s’il ne constituait une constante dans les récits et les films de science-fiction qui ont pour thème la procréation. Le premier du genre est Le Meilleur des mondes (Huxley 1932). Les enfants y sont fabriqués en flacon et élevés dans des centres spécialisés tandis que la viviparité, terme scientifique utilisé à dessein par Huxley pour signifier l’horrible obligation animale d’en passer par un ventre féminin pour naître, y est perçue comme une infâme chose du passé, ne subsistant plus qu’à l’état de survivance honteuse dans quelques réserves de sauvages. L’apogée de la civilisation correspond dans cette utopie à l’avènement de la stérilisation généralisée. Celle-ci s’accompagne de la disparition de la famille, du mariage, de toutes formes de relation de parenté qui sont devenus autant d’obscénités. De fait, dans ce mythe d’anticipation, la pornographie est rattachée, non au sexe, mais à l’enfantement».
Dans son roman Aldous Huxley dénonçait déjà, de façon prémonitoire, la logique propre à notre société, tendue vers toujours plus de factice «liberté». En Occident, nous avons d’abord inventé la pilule puis chanté «les vertus de l’amour et de la volupté sexuelle libérée du joug reproducteur» (4), ainsi que le formule Marika Moisseeff. Ce faisant, nous avons associé d’une part le sexe aux nobles sentiments (ce qui est abusif) et d’autre part la maternité aux basses besognes (ce qui est très regrettable). La part du travail reproductif assumé par les femmes est devenu synonyme de déchéance. Pire : de menace. La figure de la génitrice a progressivement été associée aux «dangers de l’involution», c’est-à-dire du retour en arrière de l’humanité. Faut-il s’en étonner ? Nous avons fini par penser que «faire des enfants» était le propre des êtres inférieurs, tout juste capables de se reproduire, comme des bêtes, à la chaîne. Dans les films de propagande, ainsi que le souligne Marika Moisseeff, «les méchants sont montrés comme totalement soumis aux lois de la sélection naturelle réduite à la loi du plus fort, à savoir celui qui réussira à produire le plus grand nombre d’individus de son espèce. Le savoir populaire associe l’archaïsme d’une espèce, d’une culture, d’un genre, à sa propension à accorder la suprématie aux activités reproductrices : la quantité d’énergie consacrée à la reproduction est supposée inversement proportionnelle à celle dédiée au développement de la connaissance et à sa transmission, c’est-à-dire au développement de la culture proprement dite» (5). Où nous mène cette vision du monde ?
Très logiquement à l’immigration. Nous vivons dans une société schizophrénique, guidée par une logique totalement contradictoire qui nous pousse, irrésistiblement, à prôner l’ouverture des frontières à des populations que nous dénigrons. Ces populations – qui se reproduisent beaucoup plus vite que nous – sont constituées de femmes jugées inférieures, des «ventres», tout juste capables de produire des enfants que, en toute logique, nous considérons comme des monstres. Nous faisons entrer des populations dites «étrangères» chez nous, afin qu’elles participent, soi-disant, à notre «croissance économique» et, dans le même mouvement, nous produisons des films de science-fiction qui parlent d’invasions extra-terrestres. En anglais «étranger» se dit alien. Nous reportons sur l’autre (l’étranger) la responsabilité d’assurer le renouvellement des générations et, dans le même temps, nous l’accusons de nous infecter et de nous faire régresser. Nous dénigrons la figure de la mère, nous bestialisons les génitrices et, dans le même temps, nous allons inséminer des femmes pauvres dans d’autres pays. Au final, qui sont les monstres ? Qui sont les envahisseurs ? La question est ouverte. Question que tous nos films de science-fiction ne cessent de nous poser. Rappelez-vous dans Starship troopers à quoi ressemblent les uniformes des armées humaines qui luttent soi-disant pour que triomphe l’intelligence. Des uniformes allemands de la seconde guerre mondiale.
A LIRE : «La Procréation dans les mythes contemporains», de Marika Moisseeff. Texte paru dans Anthropologie et sociétés : Le mythe aujourd’hui, numéro 2, en 2005 (vol. 29, p. 69-94)
«Les lolitas ou l’histoire d’une altérité structurelle», de Marika Moisseeff. Publié dans la revue Adolescence, numéro 49, en 2004 (p. 605-618).
NOTES
(1) «En maintenant le fossé abyssal entre connaissance et vérité, la mythologie est le moteur de remises en question perpétuelles : elle apporte moins de réponses ou de solutions qu’elle n’incite à les chercher en prenant la forme d’une vérité cachée» (Source : «La Procréation dans les mythes contemporains», de Marika Moisseeff).
(2) A la question posée par le journaliste du site Les Mutants : «Quand on étudie l’histoire des biotechnologies, on constate que l’ectogénèse a intéressé très tôt les chercheurs : Julian Huxley et Hermann Müller en parlaient déjà dès les années 1920. Or cette piste de recherche est restée largement inexplorée, y compris dans l’expérimentation animale. Ce désintérêt relatif doit-il, selon vous, être associé à l’obligation implicite pour la femme de remplir ses devoirs «naturels» de maternité ? Ne peut-on le rapprocher de la répugnance vis-à-vis de la pratique des» mères porteuses «, notamment dans certains pays (dont la France) qui l’interdisent formellement ?, Marcella Iacub répond :
«On pense qu’on ne peut pas aimer un enfant qui n’est pas passé par un corps, c’est faire peu de cas de la paternité ! L’ectogénése fait de la gestation une technique, de même que la gestation pour autrui. On pourrait au contraire enfin débarrasser les femmes de cette charge. D’autres problèmes comme l’avortement seraient dédramatisés car il est toujours plus facile d’avorter une machine qu’une femme. Cela instituerait aussi un rapport symétrique à l’enfant entre l’homme et la femme… Au-delà de contraintes techniques, car l’ectogénése est en effet très complexe à mettre en place, il y va plutôt d’une répugnance d’ordre symbolique : un enfant né de la sorte ne serait pas humain, il y a aussi l’impact du Meilleur des Mondes, l’idée que la technique nous dépossède au moment où l’on s’en sert, etc. Mais j’espère qu’il y a des personnes qui pensent autrement…». (Source : entretien avec Marcella Iacub, intitulé»L’Empire du ventre«)
(3) (4) et (5) Source : «Les lolitas ou l’histoire d’une altérité structurelle», de Marika Moisseeff.
Brodant sur le lien entre «menstruel» et «monstrueux», le film Alien Tampon parle avant tout d’une peur, largement partagée en Occident : la peur de la «génitrice». Nous en avons si peur que nous préférons déléguer ce rôle à des femmes venant de pays moins développés, sur qui nous comptons pour «pondre» les enfants à notre place…
Le film Alien Tampon – pour l’instant à l’état de projet – raconte l’histoire d’une étudiante qui a eu le malheur d’enfiler un tampon infecté de sang vert extra-terrestre. La voilà transformée en monstre. La terre est en danger car elle infecte à son tour toutes les personnes qu’elle rencontre.
En février 2015, la bande-annonce est lancée sur Internet. But : convaincre les investisseurs de miser sur un éventuel long-métrage. Le projet, chapeauté par le réalisateur Jan Zenkner, ne ressemble pour l’instant qu’à une parodie de film de zombie délirant. «Menstrueux !», entonnent en chœur les amateurs de série Z, qui se régalent d’avance et pour cause : la bande-annonce mélange belles blondes à gros flingues et détournements bizarres de tampons gluants. Stupide, potache et de mauvais goût, le projet de film Alien Tampon suscite un vif intérêt sur les réseaux sociaux. Pourquoi ? Parce qu’il flirte avec des fantasmes qui touchent les fibres sensibles de notre imaginaire, tissant avec d’innombrables autres œuvres – romans et films – la trame d’une hantise collective : la hantise de la maternité, associée à une forme de dégénérescence contagieuse.
Il n’est en effet pas innocent que la femme, dans de nombreux récits de science-fiction américains ou européens, soit considérée comme le vecteur principal d’épidémies frappant l’humanité. Comme par hasard, la maladie – très proche d’une MST – fait régresser les humains à un stade primitif. Ceux qui sont infectés par le «virus alien» mutent en créatures décérébrées, comparables aux fourmis rouges. Les voilà qui pullulent, guidés par une forme d’instinct collectif qui les pousse à se sacrifier au seul profit de leur groupe. L’être qui les dirige, comme par hasard, prend les traits d’une reine pondeuse. Dans Alien Tampon, il s’agit d’une fille devenue femme, c’est-à-dire fertile. «Voilà pourquoi faut pas énerver une femme quand elle a ses règles», s’amuse une commentatrice, soulignant avec justesse l’équation posée dans le film entre les cycles menstruels et la menace d’un désordre. Quand une femme devient potentiellement une reproductrice, c’est le début des ennuis.
La figure maternelle est-elle donc si monstrueuse dans notre société ? Oui, répond Marika Moisseeff, ethnologue, psychiatre et chercheuse au CNRS, pour qui la science-fiction apparaît comme une véritable mythologie contemporaine. Depuis le début des années 2000, Marika Moisseeff démonte les ressorts de films grand public – Starship Troopers, Alien, Xtro, La mutante – dont elle révèle les significations secrètes. Ces films ne sont pas que de simples produits d’une industrie du divertissement, dit-elle. Ils sont l’équivalent des mythes gréco-romains, des récits amérindiens, des contes africains ou des traditions orales aborigènes… Ce sont des dispositifs conçus pour transmettre un savoir concernant la réalité, une vision du monde. Mais à la différence des discours scientifiques, philosophiques ou théologiques, qui entendent délivrer une vérité absolue ou trouver LA solution d’un problème, le discours mythologique brode à l’infini sur une trame, sans jamais imposer de réponse claire ni définitive à nos questions (1). Chaque mythe possède plusieurs versions et s’enrichit d’adaptations nouvelles qui renvoient indéfiniment cette réponse à plus tard, confrontant l’auditeur-spectateur à l’insondable mystère des choses.
Concernant le rapport de la femme avec les aliens, à quelle vérité cachée nous renvoie un film comme Alien Tampon ? Dans un texte intitulé «La Procréation dans les mythes contemporains», Marika Moisseeff explique : dans notre imaginaire occidental moderne, il est mal-vu d’enfanter. Plus une espèce est «évoluée» (avancée sur le plan technologique), moins elle procrée et plus elle devient dépendante d’espèces moins évoluées pour se reproduire. Elle délègue cette fonction à des machines ou à des créatures inférieures. Avant de devenir réalité, la PMA, l’IVG et le clonage étaient des topos récurrents de la science-fiction. De plus en plus nombreuses sont les femmes qui, à l’instar de Marcela Iacub (2), se montrent favorables à l’idée que le fœtus soit délocalisé hors du corps de la mère. On appelle cela l’ectogenèse. La plupart des futurologues prévoient d’ailleurs qu’il sera possible, d’ici quelques décennies, de confier le «fardeau» de la gestation à des utérus artificiels. Les biotechnologies, disent-ils, délivreront les femmes de ce qu’ils appellent une «charge» : l’accouchement. Pour ces adeptes du «progrès», il semble injuste que les femmes restent inféodées aux nécessités de la reproduction biologique. La femme aussi, tout comme l’homme, devrait avoir le droit de faire un enfant sans nécessairement le porter dans son ventre. Marcela Iacub va plus loin : elle accuse les hommes de vouloir maintenir les femmes sous leur joug, en les reléguant au rôle de génitrices, en les maintenant dans l’obligation d’assumer le devoir de survie biologique. Son discours est séduisant, car il repose sur une vision largement partagée aujourd’hui de la maternité. Tomber enceinte, c’est un peu comme devenir une grosse vache.
Mais d’où vient cette vision si négative de la maternité ? Pourquoi associe-t-on l’image d’une mère à celle d’une créature momentanément dépossédée d’elle-même et rendue stupide, faible, dépendante ? C’est ici que Marika Moisseeff attaque. Pour elle, tout cela relève d’une construction culturelle de la différence homme-femme. Il faudrait se défaire de ce schéma pour se libérer, suggère-t-elle. Prisonniers d’une vision binaire des rapports mâle-femelle (culture-nature, intelligence-affect), nous vivons dans la hantise du «biologique». Et cette hantise nous mène droit dans le mur. La solution, ce n’est pas de créer des utérus artificiels. La solution, c’est d’en finir avec cette hantise de la maternité, assimilée à une forme de maladie affectant les fonctions intellectuelles et l’autonomie des femmes. Pour détruire ce schéma, il faudrait d’abord prendre conscience qu’il domine notre pensée. Marika Moisseeff le prouve. Dans notre imaginaire, dit-elle, porter un enfant pendant neuf mois, puis accoucher, sont des «activités peu propices à l’accession aux cimes de la spiritualité auxquelles l’évolution a porté l’humanité» (3). Son ironie est mordante. Elle cite, à l’appui, de très nombreux exemples de cette pensée morbide qui mine notre société.
«Fin 1999, un hebdomadaire français proposait d’établir une liste de faits qui caractériseraient l’humanité de l’an 2000 au regard de celle de l’an 2100 et quelque. Nous retiendrons celui-ci : “En l’an 2000, les gens étaient enfantés à l’intérieur de leur mère, comme les animaux“. La grossesse, l’enfantement naturel, la nécessité d’être englobé dans un corps de femme avant de naître, relèguerait donc l’humanité au rang de l’animalité. Ce constat pourrait ne relever que de l’anecdote s’il ne constituait une constante dans les récits et les films de science-fiction qui ont pour thème la procréation. Le premier du genre est Le Meilleur des mondes (Huxley 1932). Les enfants y sont fabriqués en flacon et élevés dans des centres spécialisés tandis que la viviparité, terme scientifique utilisé à dessein par Huxley pour signifier l’horrible obligation animale d’en passer par un ventre féminin pour naître, y est perçue comme une infâme chose du passé, ne subsistant plus qu’à l’état de survivance honteuse dans quelques réserves de sauvages. L’apogée de la civilisation correspond dans cette utopie à l’avènement de la stérilisation généralisée. Celle-ci s’accompagne de la disparition de la famille, du mariage, de toutes formes de relation de parenté qui sont devenus autant d’obscénités. De fait, dans ce mythe d’anticipation, la pornographie est rattachée, non au sexe, mais à l’enfantement».
Dans son roman Aldous Huxley dénonçait déjà, de façon prémonitoire, la logique propre à notre société, tendue vers toujours plus de factice «liberté». En Occident, nous avons d’abord inventé la pilule puis chanté «les vertus de l’amour et de la volupté sexuelle libérée du joug reproducteur» (4), ainsi que le formule Marika Moisseeff. Ce faisant, nous avons associé d’une part le sexe aux nobles sentiments (ce qui est abusif) et d’autre part la maternité aux basses besognes (ce qui est très regrettable). La part du travail reproductif assumé par les femmes est devenu synonyme de déchéance. Pire : de menace. La figure de la génitrice a progressivement été associée aux «dangers de l’involution», c’est-à-dire du retour en arrière de l’humanité. Faut-il s’en étonner ? Nous avons fini par penser que «faire des enfants» était le propre des êtres inférieurs, tout juste capables de se reproduire, comme des bêtes, à la chaîne. Dans les films de propagande, ainsi que le souligne Marika Moisseeff, «les méchants sont montrés comme totalement soumis aux lois de la sélection naturelle réduite à la loi du plus fort, à savoir celui qui réussira à produire le plus grand nombre d’individus de son espèce. Le savoir populaire associe l’archaïsme d’une espèce, d’une culture, d’un genre, à sa propension à accorder la suprématie aux activités reproductrices : la quantité d’énergie consacrée à la reproduction est supposée inversement proportionnelle à celle dédiée au développement de la connaissance et à sa transmission, c’est-à-dire au développement de la culture proprement dite» (5). Où nous mène cette vision du monde ?
Très logiquement à l’immigration. Nous vivons dans une société schizophrénique, guidée par une logique totalement contradictoire qui nous pousse, irrésistiblement, à prôner l’ouverture des frontières à des populations que nous dénigrons. Ces populations – qui se reproduisent beaucoup plus vite que nous – sont constituées de femmes jugées inférieures, des «ventres», tout juste capables de produire des enfants que, en toute logique, nous considérons comme des monstres. Nous faisons entrer des populations dites «étrangères» chez nous, afin qu’elles participent, soi-disant, à notre «croissance économique» et, dans le même mouvement, nous produisons des films de science-fiction qui parlent d’invasions extra-terrestres. En anglais «étranger» se dit alien. Nous reportons sur l’autre (l’étranger) la responsabilité d’assurer le renouvellement des générations et, dans le même temps, nous l’accusons de nous infecter et de nous faire régresser. Nous dénigrons la figure de la mère, nous bestialisons les génitrices et, dans le même temps, nous allons inséminer des femmes pauvres dans d’autres pays. Au final, qui sont les monstres ? Qui sont les envahisseurs ? La question est ouverte. Question que tous nos films de science-fiction ne cessent de nous poser. Rappelez-vous dans Starship troopers à quoi ressemblent les uniformes des armées humaines qui luttent soi-disant pour que triomphe l’intelligence. Des uniformes allemands de la seconde guerre mondiale.
A LIRE : «La Procréation dans les mythes contemporains», de Marika Moisseeff. Texte paru dans Anthropologie et sociétés : Le mythe aujourd’hui, numéro 2, en 2005 (vol. 29, p. 69-94)
«Les lolitas ou l’histoire d’une altérité structurelle», de Marika Moisseeff. Publié dans la revue Adolescence, numéro 49, en 2004 (p. 605-618).
NOTES
(1) «En maintenant le fossé abyssal entre connaissance et vérité, la mythologie est le moteur de remises en question perpétuelles : elle apporte moins de réponses ou de solutions qu’elle n’incite à les chercher en prenant la forme d’une vérité cachée» (Source : «La Procréation dans les mythes contemporains», de Marika Moisseeff).
(2) A la question posée par le journaliste du site Les Mutants : «Quand on étudie l’histoire des biotechnologies, on constate que l’ectogénèse a intéressé très tôt les chercheurs : Julian Huxley et Hermann Müller en parlaient déjà dès les années 1920. Or cette piste de recherche est restée largement inexplorée, y compris dans l’expérimentation animale. Ce désintérêt relatif doit-il, selon vous, être associé à l’obligation implicite pour la femme de remplir ses devoirs «naturels» de maternité ? Ne peut-on le rapprocher de la répugnance vis-à-vis de la pratique des» mères porteuses «, notamment dans certains pays (dont la France) qui l’interdisent formellement ?, Marcella Iacub répond :
«On pense qu’on ne peut pas aimer un enfant qui n’est pas passé par un corps, c’est faire peu de cas de la paternité ! L’ectogénése fait de la gestation une technique, de même que la gestation pour autrui. On pourrait au contraire enfin débarrasser les femmes de cette charge. D’autres problèmes comme l’avortement seraient dédramatisés car il est toujours plus facile d’avorter une machine qu’une femme. Cela instituerait aussi un rapport symétrique à l’enfant entre l’homme et la femme… Au-delà de contraintes techniques, car l’ectogénése est en effet très complexe à mettre en place, il y va plutôt d’une répugnance d’ordre symbolique : un enfant né de la sorte ne serait pas humain, il y a aussi l’impact du Meilleur des Mondes, l’idée que la technique nous dépossède au moment où l’on s’en sert, etc. Mais j’espère qu’il y a des personnes qui pensent autrement…». (Source : entretien avec Marcella Iacub, intitulé»L’Empire du ventre«)
(3) (4) et (5) Source : «Les lolitas ou l’histoire d’une altérité structurelle», de Marika Moisseeff.