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Chaque jour, dans les journaux d’actualités, sonne le glas du capitalisme industriel. Tandis que les usines ferment à tour de bras dans les pays occidentaux où le coût de la main-d’œuvre ne permet aux entreprises que la seule production de biens à forte valeur ajoutée, nous trouvons aujourd’hui, dans le porno, l’exemple parfait d’une économie en mouvement, glissant d’un fordisme de masse à un genre de toyotisme semi-professionnel où les leviers de décision appartiennent au consommateur.
Customs4U lance une plateforme de vidéos qui plante un peu plus profondément le clou des difficultés vécues par les studios de production historiques. À l’instar de Clips4Sale, l’internaute choisit son porno dans un environnement plus dynamique et moins années 2000. Concrètement, il s’agit de commander le porno que l’on désire : pratique, habillement, durée, actrice (naturellement) et délai de livraison. La chaîne de production attend le signal du client pour se mettre en branle.
À première vue, cette customisation du fap fait rêver, finies les négociations avec ta nana pour qu’elle t’envoie un peu mieux qu’un décolleté par MMS pendant les heures de travail. Avec Customs4U, tu as une actrice qui va bosser juste pour toi et accomplir tes fantasmes les plus vicieux, une bien douce mélopée que nous chante Tim Stokely, le boss du matos. Malheureusement, tous les délires ne sont pas encore possibles, chaque actrice a listé ses pratiques et elles se cantonnent à des fétichismes dont les amateurs de Clips4Sale s’empiffrent déjà jusqu’à vomir. Des exemples ? D’accord.
Gemma Hiles, blonde, boobs en plastique et fort jolie, dispose d’un éventail de compétences très intéressant et représentatif. Elle humilie de multiples façons, que ce soit en piétinant, en t’allumant puis en se refusant ou en se moquant de ton petit pénis. Elle satisfait également les fétichistes de pied, de jeans, de superhéroïnes, de ventre (coucou le joli bidou), de hauts talons, etc. La liste est fournie, mais il manque tout de même la présence masculine qui comblerait les envies légitimes de sodomie ou d’éjaculation faciale d’internautes dans leur bon droit.
Gemma me plaît, une fille aussi bien foutue qui s’exhiberait juste pour moi, l’idée m’excite. Intrigué par la domination financière, je clique sur cette pratique, mes faps durant longtemps, je sélectionne une vidéo de 30 minutes (les « 15 secondes Instagram » ne ferait pas l’affaire), le tout en HD, en attendant la 4K. Un cadre description permet de préciser la teneur de son fantasme et de ses espoirs, mais je le remplirai plus tard. Mazette ! La facture s’élève à 549,10 dollars américains. Je modifie la durée à 10 minutes, passe en définition standard et le montant baisse : 223,92 dollars. J’interpelle Gonzo pour lui parler de cette note de frais à venir, il s’écroule sur la moquette du bureau.
Les tarifs varient selon la fille, elle applique ses propres barèmes en fonction des pratiques et aussi du temps de livraison. Avec Indica Greenly, je pourrais avoir une domination financière de 10 minutes en HD, livrée en 24 heures, pour 47,25 $. De plus, elle exerce le boy/girl que Gemma a oublié. Pour le reste des actrices, entre les Goddess machin, les Princess bidule et les Mistress truc, les candidates à vos fantasmes sont très attirantes pour la plupart. Customs4U annonce 350 modèles à ce jour, parmi lesquelles une seule vraiment connue : Eva Angelina.
Les lois de l’offre et de la demande sont implacables. L’industrie du porno mute et ces sites, où le consommateur influe directement sur la production, signalent un changement d’ère. La production de masse s’étiole tandis que les marchés parallèles se développent. Il y a les sexcameuses en circuit court, un seul intermédiaire entre l’actrice et le fappeur ; désormais, le porno doit compter sur les boutiques de customisation, les échoppes de la request.
[Edit] Customs4U va être le sponsor média de la prochaine AVN Adult Entertainment Expo. AVN nous manipule un peu en sortant un article sur le site de request la veille de l’annonce de ce partenariat. Mais bon, au moins ce type de porno est reconnu par le milieu.
Les scène de sexe dans « La Vie d’Adèle » ont fait beaucoup parler d’elles. On les a dites ridicules, pas réalistes, chirurgicales. Sur Rue89 même, Isabelle B. Price, une blogueuse lesbienne, disait son sentiment :
« La première fois qu’Adèle et Emma font l’amour, on ne s’attendait pas forcément à ce qu’elles revisitent l’intégralité du “ Kâmasûtra ” lesbien. Pour une première fois, c’était un peu excessif. Où est donc la marge de progression, le doute, l’embarras ? »
Dans cette vidéo, Yeni Sleidi une journaliste de Posture Mag, un magazine queer d’art new...
Je ne m'étais pas intéressée au porno de près depuis très longtemps ; 5 ou 6 ans ce qui au niveau de web constitue un temps extrêmement long. J'en étais restée à un truc certes marketé, avec des segments définis selon les fantasmes des uns et des autres mais rien de plus. En gros tu avais une dizaine de catégories qui allaient de "Sodomie", à "extrême" en pensant par "à plusieurs" et cela s'arrêtait là.
(pour précision, une partie des liens que je donne est pornographique )
Première constatation, désormais quel que soit ton fantasme tu peux le trouver sur le net. En clair si ton kiff est de voir couler du sperme sur le gros orteil tu trouveras des dizaines de videos sur le sujet et mieux, un mot aura été créé pour qualifier ton fantasme.
Cela me donne l'impression que la sexualité devient avant tout une activité masturbatoire et un peu solitaire. cela semble nous dire que tout doit être réalisé, tout doit être accompli sinon il y aura une frustration (laquelle on ne sait pas bien). Il y a peu de chance si vous avez des fantasmes extrêmement précis, que votre/vos partenaire-s les aient au même moment et pendant le même temps ; la sexualité est, me semble-t-il, un échange (durable ou non là n'est pas la question) où on fait plaisir à l'autre qui nous fait plaisir. Il me semble qu'on cherche ici avant tout à se faire plaisir. J'avoue que je ne sais pas bien qu'en penser.
Deuxième chose, on ne s'emmerde plus à regarder des films, mais une saynète de quelques minutes. Bon pourquoi pas, c'est dans la lignée du gonzo sauf que ca semble nous dire que le sexe est une activité totalement à part du reste. Dans la vraie vie, on bosse, puis on baise, puis on sort boire un verre (par exemple ). Dans le porno mainstream, il n'y a pas d'avant, ni d'après et à peine un pendant.
Venons au coeur du sujet qui m'a été inspiré par l'excellent billet de daria.
Je ne considère pas, comme certaines féministes, que le porno est en soi un problème. (je suis pire :p )
Je considère que la sexualité en patriarcat est de base tellement problématique, tellement traversée par des rapports de domination sociales, raciales, sexistes etc etc que le porno qui n'en est que le reflet, est forcément problématique sauf evidemment s'il est fait par des féministes.
Dans l'immense majorité des pornos mainstream (comme dans la sexualité on est d'accord), l'excitation et la jouissance passent par la salissure de l'autre et spécialement des femmes.
Ainsi dans le site Jacquie et Michel cité par Daria (mais vous retrouverez ceci partout ailleurs), salir les femmes et les considérer comme dégradées (et se considérer comme telle) est un passage obligé.
Il faut comprendre une chose ; il y a encore cette forte dichotomie mère/putain qui persiste même en 2013.
Une femme qu'on représente dans le porno comme aimant sucer, change donc de statut. De femme lambda, elle devient "cette grosse chienne" "cette salope" qui est le statut acceptable et tolérable pour une femme aimant le sexe.
Enfin admettons, que les femmes sont un peu comme du PQ, elels se dégradent très vite.
Un mec peut bien baiser 50 femmes, en sodomiser 3 et en lécher 15, il reste un homme. J'entends par là qu'un homme n'est pas souillé ou dégradé par ce qu'il peut faire. A peine une femme a approché un index d'un pénis, qu'elle est à demie souillée (et croyez moi ca n'est pas TRES pratique). Les femmes semblent être très facilement salies dans le patriarcat (en revanche celui qui les salit ne l'est jamais miraculeusement).
Le porno - et la sexualité en général - m'ont donc toujours semblé très puritains dans la mesure où le sexe est très souvent considéré comme sale, comme une activité comme à part.
Abordons ensuite la question qui fâche ; la question des pratiques.
Sur la majorité des sites mainstream, vous aurez des femmes pénétrées. très peu d'hommes qui le seront.
Vous aurez des femmes avec 5 mecs dessus, des femmes sur qui on urine, des femmes qu'on fiste, des femmes qu'on attache, des femmes à qui on enfonce des bites dans la bouche à en vomir etc.
Peut-on encore questionner cela sans se voir traité de puritaine ? J'en doute très fortement.
Il est bien clair que nos fantasmes n'ont rien d'individuel et se créent toujours par rapport à une norme sexiste, raciste etc. Quand il y a une rubrique "black" ou "interracial" sur un site, ca n'est pas anodin et cela renvoie clairement à l'animalité supposée des noir-e-s. Donc passer par l'humiliation des femmes, pour jouir (tant du côté masculin que féminin) n'est pas très surprenant.
Je me pose néanmoins la question de ce que cela renvoie au moment où le porno devient un loisir comme un autre (et pourquoi pas là n'est pas le problème) ; qu'est ce que cela ancre dans nos têtes ? Est ce qu'on doit aussi réformer notre sexualité et nos fantasmes (et donc potentiellement s'emmerder au lit ? Vous me direz que c'est déjà le cas de beaucoup de femmes).
Cette scène-là me semble particulièrement intéressante. Je ne sais si elle est caractéristique du porno queer mais elle montre des gens qui ont l'air contents d'être ensemble, contents de faire du sexe, contents de partager quelque chose. L'essentiel du porno ne me semble pas répondre à cela : vous y verrez beaucoup de gens qui semblent se masturber dans le corps de l'autre, beaucoup de gens qui semblent furieux d'être là, beaucoup de gens dont la capote a poussé comme par magie sur la queue.
La sexualité est très peu souvent, dans le porno ou ailleurs, présenté comme quelque chose de cool et de joyeux. Peut-elle l'être quand elle est, comme je le disais, toute entière traversée par de forts rapports de pouvoir ? Je n'en sais rien mais il conviendrait peut-être de penser un porno qui irait davantage dans ce sens. Mais comme le porno n'est que le reflet de notre société, de nos fantasmes, il ne pourra semble-t-il évoluer massivement qu'avec des changements sociaux importants.
Travail sur la porn valley par Susannah Breslin
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