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En cas d'ouverture de la PMA aux couples lesbiens, les deux femmes devraient être reconnues comme mères grâce à une déclaration commune anticipée rédigée avant la naissance de l'enfant, préconise le Conseil d'Etat.
Cette proposition figure dans un rapport sur les aspects juridiques de la prochaine révision de la loi de bioéthique, commandé par le Premier ministre Edouard Philippe.
Cette solution conduirait, «pour la première fois en droit français, à dissocier radicalement les fondements biologique et juridique de la filiation d'origine, en prévoyant une double filiation maternelle», écrit la plus haute juridiction administrative.
Mercredi 11 Juillet 2018En cas d'ouverture de la PMA aux couples lesbiens, les deux femmes devraient être reconnues comme mères grâce à une déclaration commune anticipée rédigée avant la naissance de l'enfant, préconise le Conseil d'Etat.
Cette proposition figure dans un rapport sur les aspects juridiques de la prochaine révision de la loi de bioéthique, commandé par le Premier ministre Edouard Philippe.
Cette solution conduirait, «pour la première fois en droit français, à dissocier radicalement les fondements biologique et juridique de la filiation d'origine, en prévoyant une double filiation maternelle», écrit la plus haute juridiction administrative.
Mercredi 11 Juillet 2018La corrida obéit-elle à l’équivalent d’un script sexuel ? Dans un article lumineux sur la mise à mort du toro, le sociologue Philippe Combessie, relève des éléments troublants : le spectacle de la corrida dévoile en filigrane l’évolution de notre société.
Le matador : un «violeur de tabou» ? Pour l’anthropologue Julian Pitt-Rivers, tel est le tueur de toro, dans la mesure où (dit-il) l’estocade par une épée d’acier peut être comparée à la pénétration sexuelle d’un «vagin ensanglanté» (par les menstrues). Le spectacle taurin montre donc un «héros » qui commet «l’acte contre nature» (1). Son analyse n’est pas sans rappeler celle de la psychanalyste Marie-Frédérique Bacqué, qui assimile les spectateurs de corrida à des enfants qui, entrouvrant une porte interdite, surprennent leurs parents en train de faire l’amour (2). Dans un volume de la revue SociologieS, tout entier consacré aux rapports souvent troubles entre Thanatos et Eros, le sociologue Philippe Combessie –surtout connu pour ses travaux sur la prison et sur la sexualité– propose une analyse des évolutions parallèles, depuis quelques décennies, entre la corrida espagnole et la sexualité.
Code des mouchoirs pour les toros
Tout d’abord, explique-t-il, on ne peut pas comprendre la corrida sans en connaître les règles. Les voici : élevé en plein champ, le toro bravo (sauvage) «ne doit jamais rencontrer d’homme à pied» : c’est qu’il n’est pas question de combattre un animal domestique, ou, pire, dressé comme un fauve de cirque. «Trois situations se présentent. 1 – Si [le taureau] se montre inapte au combat, blessé par exemple lors du transport […] voire dénué de tout instinct de charge qui fait, dit-on, la caractéristique de son espèce, l’autorité qui préside la corrida sort un mouchoir vert : l’animal est exclu du ruedo (la piste) puis abattu, dans l’ombre des coulisses, comme on le fait dans tous les abattoirs. 2 – S’il se montre au contraire combatif, il est, à l’issue d’un combat destiné, disent les amateurs, à lui permettre d’exprimer sa “bravoure”, mis à mort par l’épée. Après qu’un attelage de mules […] a tiré son cadavre hors du ruedo, sa carcasse est découpée à destination des restaurants de la ville. 3 – Si le toro fait preuve d’une détermination exceptionnelle dans sa façon de charger, un mouchoir bleu apparaît au balcon présidentiel après la mise à mort, lui octroyant un tour de piste post mortem. Le public se lève et applaudit la dépouille promenée à pas lent, pendant que la musique de l’orchestre accompagne son dernier voyage.»
Qu’il ne se laisse pas abattre !
La dramaturgie sanglante de la corrida repose donc sur une ambiguïté : bien qu’il soit condamné à mort et que sa fin soit «inéluctable», il importe que le toro lutte contre la fatalité et qu’il soit mortellement dangereux. «Malgré le caractère foncièrement inégal du combat, les risques qu’encourent les hommes n’ont pas été amoindris, au contraire», rappelle Philippe Combessie, soulignant la différence avec les spectacles de cirque, par exemple, où des règles de sécurité toujours plus strictes imposent que «les humains soient protégés». À rebours de cette tendance générale, l’univers de la corrida met en exergue la prise de risque : la règlementation impose un contrôle de chaque bête, pour vérifier qu’elle est indemne de toute manipulation. «En 2013, 14 agents de police espagnols ont été formés à l’imagerie médicale pour vérifier l’intégrité des cornes», rappelle le sociologue. Le spectacle doit donc, avant tout, être celui «de l’effroi humain devant le caractère à la fois inéluctable et imprévisible de la mort».
Le script sexuel de la corrida
Une corrida compte en tout six lidias (combats). Leur caractère répétitif permet progressivement d’en saisir les nuances. C’est ce que découvre, par exemple, Simone de Beauvoir : en 1960, dans son livre La force de l’âge, elle explique : «Ce qui me plut, la première fois, ce fut surtout la fête qui se déployait sur les gradins [...] Mais, comme la plupart des spectateurs novices, je trouvai [...] que le torero avait la partie trop facile. Je ne compris absolument pas ce qui justifiait les applaudissements.» A force d’y retourner, chaque dimanche, son jugement s’affine : «Je compris que le taureau était bien loin de donner infailliblement dans le leurre : pris entre les caprices de la bête et l’exigeante attente des spectateurs, le torero risquait sa peau ; ce danger était la matière première de son travail : il le suscitait, il le dosait avec plus ou moins de courage et d’intelligence ; en même temps, il l’esquivait avec un art plus ou moins sûr. Chaque combat était une création. Peu à peu, je démêlai ce qui en faisait le sens, et parfois la beauté. (3)»
Une esthétique queer ? un script trans’ ?
Les toreros «portent des bas, une culotte et une veste brodées, derrière la tête un chignon postiche et par-dessus une toque noire en astrakan frisé» ; le costume n’a guère évolué depuis plusieurs siècles, contrairement à la mode ! Une aficionada interviewée (4) par Philippe Combessie trouve aujourd’hui «dans l’ensemble du spectacle, une esthétique du queer». Le sociologue analyse pour sa part le déroulement de chaque combat comme un «script trans, lorsque le matador qui depuis le début endossait, tant avec sa cape de soie rose qu’avec sa muleta de serge rouge, un rôle archétypal féminin de séduction puis d’esquive, se découvre, à la fin du troisième tiers, doté d’une lame de 80 centimètres qui va pénétrer, jusqu’à la garde, le corps du taureau, animal qui se trouve alors “féminisé” nous dit Julian Pitt-Rivers, qui va même jusqu’à préciser : “La lame d’acier, plus fine encore qu’une verge de bovin, le pénètre à l’endroit prévu, ce vagin dont l’a doté le picador, sur le mons veneris de sa crête”».
«Dans les arènes comme dans un lit ?»
Si le costume n’a pratiquement pas changé, le déroulement de chaque lidia a, en revanche «évolué depuis le XIXe siècle» : le troisième tiers, qui comprend la mise à mort, autrefois très bref, dure maintenant jusqu’à dix minutes. Cet allongement est progressivement apparu au début du XXe siècle, au moment même –précise le sociologue– où commence à se développer le «flirt amoureux» (lire à ce sujet un éclairant article d’Olivier Sabarot). Quel lien entre le flirt et la mise à mort ? Il faut savoir que, pour tuer, le matador doit s’armer d’une épée. Problème : elle est lourde. «Devoir tenir aussi longtemps à la main une épée d’acier s’est révélé, sur le plan pratique, un handicap ; aussi, à partir de 1960, de plus en plus de matadors fournissaient un certificat médical (indiquant une faiblesse au poignet) pour qu’il leur soit permis de n’utiliser qu’une épée en fer blanc, dite estoque simulado. Tant et si bien qu’en 1992, un Real decreto stipule que tous les matadors, même sans certificat médical, peuvent démarrer ce 3e tiers avec une arme fictive, légère, et ne l’échanger contre une épée d’acier qu’au tout dernier moment.» Reculant le moment fatal, les toreros peuvent donc allonger le temps des préliminaires à la pénétration finale, qui se trouve même, depuis les années 1990, assez strictement déconnectée de la phase qui a précédé… Faut-il y voir une coïncidence ? «C’est à l’époque où l’usage du préservatif est intégré dans le répertoire sexuel courant, introduisant une séparation entre les caresses préliminaires et le moment où le couple envisage la pénétration sexuelle que l’on voit pareille interruption juste avant la pénétration de l’épée».
Ceux qui renouent «avec la vérité de la mort»
Soulignant la similitude, Philippe Combessie décrit ce moment –«la minute de vérité»– comme une forme de basculement «redoublé par le fait que l’orchestre cesse de jouer» : brusquement, dit-il, «les gradins se font silencieux. C’est que va être mis à mort un toro qui vient de faire montre de ce que les aficionados appellent “bravoure”, “noblesse”… façons d’attribuer à un animal des qualités humaines.» Comme par un fait exprès, lorsque le matador plonge entre les cornes du taureau pour faire pénétrer la lame d’acier dans la poitrine de l’animal, on voit de plus en plus souvent le torero attendre. Il n’abrège pas sa mort. Dans les années 1910, le torero se dépêchait d’achever l’animal, à l’aide d’un «verduguillo : une espèce de poignard au manche très allongé qui, visant la nuque, est destiné à provoquer une mort immédiate.» Depuis une vingtaine d’années, le mode opératoire évolue : le matador «tend à laisser l’animal prendre conscience qu’il est mortellement atteint». L’animal alors lutte alors pour rester debout le plus longtemps possible et l’on assiste alors à un clivage dans les gradins, entre les spectateurs qui s’émeuvent de la souffrance animale – conformément à l’évolution de la société à cet égard –, et ceux qui, au contraire, «accompagnent l’agonie d’applaudissements lents», comme si, s’identifiant à la bête, ils saluaient sa volonté de faire face à la mort qui arrive (6).
Morituri te salutant
Pour le sociologue, l’attitude des afficionados qui saluent l’agonie est significative du changement qui affecte notre rapport à la mort : n’est-il pas singulier, note-t-il, que «les médecins d’aujourd’hui [soient] invités à dire la vérité d’un éventuel diagnostic fatal, quand il était suggéré à leurs prédécesseurs de mentir, à tout le moins par omission» ? En Occident, la plupart des patients exigent la «vérité» concernant leur maladie. Nous voulons savoir. Raison pour laquelle, maintenant, le toro bravo est invité à faire la preuve de ce que les adeptes interprètent comme du «stoïcisme, […] même à l’instant le plus fatidique». Ce que Philippe Combessie dessine donc –à travers cette description d’une pratique qui peut sembler gratuitement cruelle– c’est moins l’évolution de la corrida que celle de nos propres attentes. Nous aspirons à voir un animal «faire face». Il est d’ailleurs élevé spécifiquement dans cet objectif. Mais, dans le même temps, nous aspirons aussi à voir le matador risquer sa vie. «Comme les catholiques ont régulièrement besoin de miracles, les aficionados ont régulièrement besoin de voir que les matadors meurent aussi», raconte Philippe Combessie, qui cite les propos étonnants de l’un d’entre eux : «en 1982, alors qu’aucun matador n’était mort de ses blessures depuis 1975, J. Posada déclarait : “Il faudrait qu’un taureau tue un matador, une vedette. C’est nécessaire malheureusement.”» Neuf ans plus tard, deux toreros ayant été tués, il avait confirmé son point de vue. Les humains doivent mourir aussi, sinon le spectacle n’aurait aucun sens.
Comme un orgasme simultané
Philippe Combessie note que « l’une des figures idéelles de la corrida serait celle d’une mort simultanée du toro bravo et du matador – comme a pu le devenir l’orgasme partagé en matière de sexualité. Plus d’un tiers des matadors tués par un taureau l’ont été lors de la mise à mort. Être tué par son partenaire au moment même où on le tue pourrait constituer l’asymptote de la tauromachie espagnole à pied. C’est du moins la thèse du film Matador de Pedro Almodóvar (1986) ; c’est également le choix de scénario du plus récent Blancanieves de Pablo Berger (2013). » La mort et la sexualité semblent indissociables dans l’imaginaire humain – ne dit-on pas parfois de l’orgasme qu’il s’agit d’une « petite mort » ?
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A LIRE : «¿Viva la muerte? Thanatos mis en scène à l’ombre d’Éros : analyse d’une catharsis à double imbrication», de Philippe Combessie, SociologieS, Dossier Eros et Thanatos, mis en ligne le 13 novembre 2017.
NOTES
(1) Julian Pitt-Rivers, « Le sacrifice du taureau », Le Temps de la réflexion, T. IV, Paris, Éditions Gallimard, 1983.
(2) Marie-Frédérique Bacqué, « La corrida entre pulsion de vie et pulsion de mort », dans Porcher Jocelyne & Carlos Pereira (dir.), Toréer, sans la mort ? Versailles, Éditions Quae, pp. 63-71.
(3) Simone de Beauvoir, La force de l’âge, Paris, Éditions Gallimard, 1960.
(4) Olivier Sabarot, « Séduire : agresser ou charmer ? Un aperçu historique », Ethnologie française, vol. 43, n°3, 2013.
(5) Une étudiante en science politique, 24 ans.
(6) Cette évolution et ce clivage avaient déjà été repérés par le philosophe Francis Wolff, Philippe Combessie en propose une analyse sociologique, qui reprend une des distinctions opérées par Simone de Beauvoir. Référence : Francis Wolff, Philosophie de la corrida, Paris, Fayard, 2007.
Sia, soumise accomplie, rêvait d’abnégation. Elle voulait ressentir l’essence même de ce mot qui représentait à ses yeux le don le plus ultime qu’une soumise puisse faire à son maître : renoncer à tout ce dont il déciderait de la priver pour l’amener à la perfection dans la soumission.
Guidée par son maître dans un huis clos intense, Sia repoussera sans cesse ses limites pour tenter de lui démontrer sa volonté et ses capacités à se soumettre, s’abandonnant parfois jusqu’à oublier la réalité. Mais ne risque-t-il pas la pousser trop loin ? Ne se perdra-t-elle pas dans son cheminement vers l’abnégation ?
Une chose est sûre, elle ne sortira pas indemne de sa quête d’absolu.
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