Il y a des titres qui vous marquent plus que d’autres. Ceux qui vous tirent des larmes de crocodile quand la mélancolie vous guette, ceux qui vous font tomber en amour pour ce crush qui occupe toutes vos pensées, ceux qui vous font groover sous la douche les lundis matins, et ceux qui vous mettent en un mood sale, qui vous poussent à dégrafer vos boutons un à un et à abandonner ce travail urgent que vous devez impérativement terminer. Ceux-là, je les mets dans ma playlist « emoji flamme » (pas besoin d’en dire plus…) Et parmi mes morceaux phares figure en reine Joanna, étoile montante de la scène RnB française qui a su se frayer un chemin dans les charts et dans mon cœur. Aujourd’hui elle sort son nouveau titre « Sur ton corps » dont le dernier clip avec un featuring de LeoLulu vous intéressera sûrement.
Joanna, la queen du genre
On n’en manque pas, de ces bi-curieuses qui se frottent en discothèque, s’embrassent par défi ou ivresse. Les coming-out de stars hollywoodiennes pleuvent, mais les représentations bisexuelles dans la scène musicale me semblent très pauvres. Un jour, je suis tombée sur le clip « Séduction » de Joanna, puis je suis tombée amoureuse. « Viens me rejoindre dans la salle de bain, coller ta langue entre mes seins » autant vous dire que mon sang n’a fait qu’un tour… J’ai poncé le morceau jusqu’à overdose complète. J’aime la manière dont elle chante ce qui l’émeut, l’enflamme, la galvanise. Son ton est poétique, décomplexé. Éclectique, elle flirt entre pop, r’n’b et instru electro-trap. Son amour du cinéma et de la mode se ressentent dans chacun de ses clips. Toujours artsy, jamais redondante, elle illustre ses métaphores érotiques de mille manières : tantôt pastels, brumeuses, kitsch et gourmandes, tantôt féeriques, picturales et dystopiques.
Pour ma part, son titre « Démons » en feat. avec Laylow fut le coup de grâce total. Musicalement comme visuellement. Une version de Thelma & Louise 2.0 qui place le niveau très haut. On est pas loin d’un chef d’œuvre à la Larry Clark ou Luc Besson – la misogynie et la beaufitude en moins. Vous l’aurez compris, Joanna est là où on ne l’attend pas. Elle a toujours un train d’avance. La preuve avec « Sur ton corps », nouveau titre sensuel dont le clip met en scène le couple LeoLulu. Deux versions existent : une érotique, suggérée, pour les réseaux, et une version full porno disponible sur PornHub. Une collaboration qui va en surprendre plus d’un·e, mais qui a du sens. Joanna fait partie de cette génération d’artistes en quête d’expériences et d’émancipation : le sexe ne devrait plus être tabou. Entre nous, ça fait du bien de voir une meuf aussi talentueuse aborder le sujet avec tant de liberté !
LeoLulu, les boss du game
Si tu lis assidûment Le Tag Parfait ou que tu ne vis pas dans une grotte, alors tu connais forcément LeoLulu. Pour les boomers [aouch, ndlr] ou ceux qui ne sont pas calés porno, je vais faire un petit topo, no stress. Depuis quelques années, la scène pornographique européenne a vu naître une multitude de couples, majoritairement hétéro, chauds bouillants à l’idée de se lancer dans le cinéma pour adultes home-made. Un porno plus intimiste, auto-géré mais qui n’a d’amateur que le nom. Parmi ces couples, LeoLulu règnent en maîtres. Petit à petit, ils ont fait leurs preuves, et ont considérablement killé le game, comme disent les jeunes. Que l’on soit fan ou non, il y a eu un avant et un après LeoLulu. Même le géant PornHub s’est incliné en leur donnant le rôle phare dans sa vidéo buzz « The Dirtiest Porn Ever » ayant pour but de sensibiliser son public à la cause écologique. Depuis leur arrivée sur le terrain, ce sont eux qui raflent tous les PornHub Awards : une entrée fulgurante et qui persiste !
LeoLulu c’est comme un rêve californien au mood Cocorico : cheveux longs ondulés blondis par le soleil, la peau bronzée et satinée, des corps parfaitement sculptés. Ils portent peu de vêtements comme si chez eux c’était l’été à l’année, leurs visages sont peu visibles mais toujours enjoués, souriants et épanouis. Leur désir d’anonymat a également contribué à créer l’aura mystique de ces Daft Punk du sexe. Contenu sexy et lifestyle, merch : ils sont efficaces sur les réseaux et n’ont rien à envier aux influenceurs traditionnels.
Musique et porno : une longue histoire
Cette surprenante collaboration entre Joanna et LeoLulu fait déjà couler beaucoup d’encre. Pourtant, ce n’est pas la première fois que les clips musicaux mettent à l’honneur des stars du X. On se souvient tous avec émotion de l’apparition de Nikita Belluci dans le clip « Selfie » de Vald en 2015, et plus récemment dans celui d’Angèle pour « Balance ton quoi ». Toutefois, l’association porno-rap reste un bon vieux classique. Que ce soit dans les clips ou les textes, c’est le contenu « porno de papa » ou des géants du mainstream qui sont constamment mis en avant. Le porno, et plus particulièrement le sexe, y sont généralement abordés sous le même prisme, ce qui transmet une vision plutôt réductrice du cinéma pour adultes. Exemple type avec Julien Doré faisant un clin d’œil (au timing plutôt malheureux) à Jacquie & Michel, dans son titre « La Fièvre ». Le level de référence est au plus bas… Ce qui n’était clairement pas le cas de Demon, dont la collaboration avec la magnifique Draghixa dans « You Are My High » ne fut ni plus ni moins qu’un coup de génie jamais égalé. Trop souvent ghettoïsé, le porno repousse et floute les limites qui le séparent du reste du monde. J’ai bon espoir de le voir s’affranchir de la sale réputation qui lui colle à la peau. C’est pour cela que je compte sur des artistes tels que Joanna, issu·e·s de la nouvelle génération pour dépoussiérer l’opinion publique sur la pornographie et fermer le clapet à ces vieux réacs et puritain·e·s que sont les prohibitionnistes.
Sur ton corps : des anges et des fesses
Bon, on est quand même là pour parler du clip. Mention spéciale pour le STRASS (Syndicat du Travail Sexuel) dès le début de la vidéo ! L’ambiance se dessine dès les premières secondes : tons chauds et draps de satin à perte de vue, des plumes, deux corps nus, les célèbres fesses de Leo. Ça promet. On surplombe ces deux petits angelots prêts à rendre leur vie paradisiaque un peu plus caliente. Viennent ensuite une succession d’images plus suggestives les unes que les autres, le tout calé sur un rythme endiablé, enchaînant les plans caméra au poing un poil vacillants et furtifs, intimistes, à vif. Le refrain arrive et pose un nouveau décor. Des vagues, des fleurs en pleine éclosion, vues célestes, et plans microscopiques en tout genre sont projetés en arrière-plan.
Ce qui capte mon attention c’est ce magnifique jeu d’ombres alternant danse, fellation et baisers baveux : brillante manière de détourner l’obstacle de l’anonymat tout en proposant des plans variés et affriolants. Mais mon passage préféré, c’est celui de la fin. La photographie s’attarde un peu plus sur les petits détails qui font toute la différence à mes yeux. Tu sais… Une main qui griffe et agrippe un bout de peau, une morsure compulsive, un coup de langue accroché à son filet de bave. Ou encore un torse bombé par la respiration haletante, la peau marquée par les frissons, la sueur qui perle gentiment aux creux des reins, un sourire qui s’esquisse quand c’est vraiment trop bon. Une séquence aux airs de « Love » (Gaspar Noé) qui m’a donné chaud en plein hiver. Je vous laisse en juger par vous-mêmes. Moi je m’en vais prendre une douche froide…
Pour voir le clip de Joanna « Sur ton corps » c’est par ici : version sage ou version NSFW.