Je voudrais revenir sur cet article d’une féministe radicale car les réactions, aussi épidermiques que le texte qui est une mauvaise lecture de Dworkin à mon avis, commencent à m’échauffer. Au passage si l’auteure passe par là, il conviendrait de te mettre à jour sur le problème des IST, tu véhicules de fausses informations.
Si vous avez des commentaires agressifs, sexistes envers ce texte, abstenez-vous, je censurerai.
La « révolution sexuelle » empêche les femmes de dire non, mais ne leur donne pas les moyens de dire oui. La définition de la sexualité n’a pas changé : la sexualité, c’est l’acte sexuel, et l’acte sexuel, c’est le coït hétérosexuel avec éjaculation de l’homme dans la femme, c’est-à-dire, de toutes les postures sexuelles, la plus fécondante — un héritage des premiers chrétiens qui n’est toujours pas mis en cause.
Christine Delphy.
Essayons donc sans nous énerver de questionner 5 minutes la sexualité hétérosexuelle dans un couple cisgenre. Comprenons déjà
Nous ne pouvons pas, en tant que féministes, continuer à étudier le privé et le politique sans nous attacher à déconstruire nos propres habitudes et à questionner nos conditionnements. Nous en sommes encore au stade où la moindre discussion sur l’épilation ou le maquillage aboutit, y compris chez des féministes à des réflexions aussi poussées que « ah mais je le fais pour moi » qui donnent envie de s’avaler un litre de fond de teint. Rappelons que des millions de femmes dans le monde ont toute eu l’idée trrès originale et au même moment de s’épiler les mêmes zones du corps, de se mettre de la crème marron sur le visage et des couleurs sur les paupières et la bouche ; avant de parler de « choix personnels » peut-être convient-il de comprendre qu’il s’agit ici d’injonctions sociales. Pire, certaines tendent à justifier à peu près tout et n’importe quoi « Si je m’épile c’est pour dire fuck au patriarcat« .
Personne ne tend à interdire le maquillage ou l’épilation ou que sais-je. Comprendre les enjeux, et les injonctions de cette beauté fatale est néanmoins nécessaire.
Et donc forcément au sein de ces questionnements, vient nécessairement celui autour de la sexualité hétérosexuelle. On ne peut penser qu’on fait ce qu’on veut dans son lit, libre de toutes injonctions sociales, conditionnements et autres impératifs sexistes . Tous nos actes – et cela vaut pour la sexualité – sont liés à notre culture.
« La question de ce qui se passe « dans le privé » – euphémisme pour tout ce qui concerne la sexualité des hommes3 – cette question-là est balayée sous le tapis. Les féministes elles-mêmes l’abordent peu. Certes elles dénoncent les violences, le viol et la prostitution, mais gardent encore souvent comme une île, isolée et préservée de ces continents noirs, la sexualité « ordinaire ». » (…) de la façon dont dans cette culture la sexualité est inextricablement emmêlée avec la domination.
Delphy.
1. Le problème du privilège masculin :
Qu’il le veuille ou non (j’insiste là dessus), un homme a des privilèges dus à sa classe (j’en ai en tant que blanche, hétérosexuelle, cisgenre etc). Quelques exemples :
- vous allez acheter un PC avec votre mec, vous demandez des spécs techniques et le vendeur s’adresse à lui en vous ignorant.
- vous allez manger chez mamie qui vous demande de débarrasser tout en disant à votre mec de se reposer.
- si vous postulez au même job qu’un mec, il y a des chances qu’il soit mieux payé.
- on attendra de vous que vous vous arrêtiez si votre gamin est malade, pas votre mec.
Et tout cela, qu’il le veuille ou non, il en bénéficie. Il peut lutter contre, il peut trouver cela injuste mais il en bénéficie quand même. Et ce privilège là ne s’annule pas quand il rentre chez lui. J’entends déjà les « et ben deviens lesbienne » donc je devance en précisant que cela n’est pas le sujet. En clair le système patriarcal et hétérosexiste nous enjoint à coucher et aimer un membre d’une classe oppressive (brr cette phrase fait peur, elle est misandre Valérie non un peu ?) ; est ce que oui ou non on peut se questionner là dessus sans voir débouler des hordes des mecs qui vont m’expliquer qu’ils n’ont aucun privilège et des hordes des femmes m’expliquer qu’elles adoooorent la pénétration ? (piste ; cela n’est toujours pas le sujet).
2. La sexualité féminine :
Les rapports Hite ont révélé une idée assez désespérante de la sexualité féminine ; 64% des femmes anglaises considèrent que leur partenaire est indifférent à leurs envies. Seulement 44% ont des orgames réguliers avec leur partenaire contre 95% lorsqu’elles se masturbent.
Dans la sexualité hétérosexuelle, tout ce qui n’est pas de l’ordre du coït proprement dit est appelé « préliminaires » comme si un acte sexuel n’était forcément complet, entier, adulte (merci Freud) par la pénétration.
Rappelons une chose ; le seul orgasme possible EST CLITORIDIEN. Le vagin est très peu innervé pour des raisons logiques (vous avez envie de mourir de douleur à l’accouchement ?) et l’orgasme que vous pourrez ressentir à la pénétration provient du clitoris ; je vous renvoie à cette image pour mieux comprendre.
Lorsqu’on interroge les femmes sur leur sexualité, on se rend compte que le chemin a été compliqué ; je ne dis pas qu’il ne l’est pas pour les hommes mais les injonctions sont différentes.
- « et pourquoi je jouis en 1 minute seule et en 20 mn avec lui, rien »
- « mon dieu, je ne jouis pas, je dois le faire chier »
- « il me pénètre ca me fait autant d’effet que faire ma liste de courses. Bon je vais simuler. Et faire ma liste de courses ».
- « il veut me faire remonter mon uterus dans la gorge là ? »
- « après mes règles la pénétration me fait mal ; je lui dis ? »
Et donc si on a la chance, un jour (et non cela n’est pas le cas de toutes les femmes) de découvrir l’orgasme avec le/les mecs qu’on aime/désire ; on se pose, on est contente et on ne veut surtout plus en parler. On pose le féminisme à l’entrée du pieu et on profite. Logique.
Sauf que. Quand on sait qu’un orgasme NE PEUT PAS VENIR d’une simple pénétration vaginale puisqu’il passera, forcément, par une stimulation clitoridienne (et vous relisez donc les articles donnés au dessus pour mieux comprendre), pourquoi continue-t-on à présenter cet organe là comme obligatoire à une sexualité achevée ? Pourquoi ne présente-t-on aucune mode de sexualité alternative ?
3. La balance risques/avantages :
L’immense majorité des femmes qui a des rapports coïtaux hétéréosexuels court un risque de grossesse :
- « putain on a assez pincé le bout de la capote ? »
- « vas y retire toi je dois regarder c’est bizarre là »
- « c’est percé je te dis c’est percé »
- « bon j’ai pris ma pilule ou pas, moi »
- « j’ai 3 heures de retard dans ma prise de pilule, c’est bon ou pas ».
- « bon ben pilule du lendemain demain hein.. super »
La grossesse reste à l’esprit de beaucoup de femmes lorsqu’elles ont des rapports sexuels et elles « font avec ». Un enfant se fait à deux mais dans les faits la charge des gamins (peur de tomber enceinte donc prise de contraceptifs, grossesse non voulue donc IVG, élevage et éducation des gamins) est aux mains des femmes ce qui a en plus des conséquences sur leur vie professionnelle. La révolution sexuelle des années 70 avec l’autorisation de la contraception et de l’IVG a avant tout profité aux hommes qui ont pu coucher sans risquer de pénibles procès en paternité alors qu’on a du se taper la contraception (et ses corollaires ; allez lire les effets secondaires de toutes les méthodes contraceptives) ou les joies d’un avortement. Et tout cela pourquoi ? Parce que la pénétration reste le passage obligé de toute sexualité. Pour autant, une femme ne bénéfice toujours pas de la révolution sexuelle, puisque si elle baise, elle est une pute (et elle en est également une si elle est violée, voir les récentes affaires telles Steubenville) et si elle ne baise pas, une mal baisée. D’injonctions contradictoires en injonctions contradictoires, on écarte les jambes en se persuadant, entre deux films pornos, que se faire pilonner pendant 20 mn DOIT faire parvenir à un orgasme.
Le vagin est un trou qui est à pénétrer ; pourquoi, comment on ne sait pas. Les hommes hétérosexuels ont également des orifices mais ils sont scellés a priori.
Alors avant de hurler sur un texte qui n’en demande pas tant, peut-être convient-il de se demander s’il n’y a RIEN à repenser dans la sexualité hétérosexuelle, si la pénétration doit systématiquement être envisagée comme fin de tout rapport sexuel.
A lire :
Les trois étapes d’un couple hétérosexuel moderne et respectable
Libération surveillée
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