Entre Meufs, c’est la nouvelle websérie de Léa Bordier, l’instigatrice de Cher Corps. Et comme d’habitude avec la jeune vidéaste, le résultat s’avère aussi bienveillant et drôle que féministe.
Le principe est simple comme bonjour : des femmes de tout horizon – vingt-cinq ans en moyenne – reviennent face-caméra sur leur rapport à l’hygiène intime, aux sentiments, aux menstrues, à la jalousie mais aussi aux poils et (vous vous en doutiez) au porno. Inès, 22 ans, y confesse son intérêt pour les vidéos de couples amateurs : « c’est plus naturel […] je trouve ça cool car ils te partagent leur intimité. Tu te sens comme dans un « vrai » rapport ». Difficile de la contredire quand l’on tapote du pied en attendant la prochaine vidéo de Pépite Crapule. Chloé, 29 ans, se remémore les polissonneries tardives et ronflantes de RTL9, mais aussi son initiation peu enthousiasmante au X hardcore – une scène de gangbang. « Les trucs à l’eau de rose m’intéressent pas forcément » modère quant à elle Jihad, 28 ans. A ses yeux, le porn n’est pas morne mais manque cruellement d’un « point de vue féminin », essentiel pour « pouvoir [se] projeter » et épicer l’ensemble d’une once de transgression.
Au gré des témoignages s’immiscent sur le bout de la langue des complexes que l’on a pas l’habitude d’entendre. Camille, 29 ans, nous explique par exemple que la masturbation en solo, « ça [la] fait chier ». Chloé y déconseille sourire à l’appui de « se nettoyer la chatte avec des produits chimiques ». Se pose dès lors le dilemme : « l’on a jamais appris à sentir une chatte : qu’est-ce que doit sentir une chatte ? ». Puis il y a Flore, 24 ans, qui exprime sans détour cette crainte d’ado de devoir choisir son camp entre « la pute » et « la prude ». Comme si l’on devait être soit l’un, soit l’autre. Le syndrome « maman ou putain » la suit depuis l’enfance. A ce sujet, Inès rappelle que les prémices de la masturbation féminine peuvent tout à fait se ressentir très tôt. Dès l’âge de cinq ou six ans. Et que cela ne doit pas forcément être le plus grand tabou du monde.
Si Entre Meufs n’est pas une création YouTube mais une production France TV, l’on y retrouve pourtant ce qui fait le sel de Cher Corps. Des voix générationnelles qui s’énoncent sans chichis et propagent, chacune à leur manière, une vision singulière des sexualités : curieuse et décomplexée, pudique et insolente, toujours libre et body-positive. Et ce sans injonction à une quelconque « normalité » ou « féminité ». A voir la spontanéité de ces vingtenaires, l’on se dit qu’elles ont tout pour inspirer les jeunes filles en quête d’identification, de pédagogie et de sororité rassurante. Bref, c’est frais, intelligent et beau à regarder. Autant vous dire qu’on est loin de Radio Sexe.