Berlin, Madrid, Amsterdam, Vienne: ces capitales ont toutes choisi d’adhérer au réseau Rainbow Cities. Né aux Pays-Bas en 2008, le projet a été initié à l’international en 2010 pour regrouper les fonctionnaires de villes qui comptent au moins un employé préposé aux questions LGBTI. «Le public-cible, ce sont les administrations et les politiques locales. Il ne s’agit pas de faire de la publicité vers l’extérieur», explique Guillaume Mandicourt, chargé de projets LGBTIQ pour Genève. Le mémorandum qu’elles signent engage les cités à présenter leur politique lors d’une réunion qui se tient chaque année dans un lieu différent.
Le dire par des actes
A part Mexico qui l’a rejoint cette année, le réseau Rainbow Cities est exclusivement européen. En Suisse, Genève et Zurich sont devenues membres en 2015. «Nous voulions donner un signe fort. Zurich est ouverte au monde et nous le disons aussi par des actes», précise Anja Derungs, chef du Bureau de l’égalité des chances de la ville. Zurich a très bonne réputation en terme d’ouverture LGBTIQ, mais Anja Derungs tient à préciser: «en termes de politique locale, nous partageons nombre des défis que rencontrent les autres membres du réseau». Celui, par exemple, d’aider les personnes issues de minorités à sortir de leur invisibilité. «Il y a aussi les discriminations au travail qui perdurent de manière inacceptable, les agressions dans la rue, l’acceptation des personnes gays par leur famille…». Pour y faire face, elle mise sur l’engagement individuel et l’ouverture à des idées nouvelles.
Mais le succès de ces démarches dépend aussi de la transversalité de la réflexion, selon la conseillère administrative en charge des finances pour la ville de Genève Sandrine Salerno. Elle évoque des collaborations entre les services culturel et de sport ou les initiatives menées auprès des services de la petite enfance pour mieux faire accepter les familles monoparentales. «Nous mettons en place des projets qui pourraient avoir un effet catalyseur en essayant d’être cohérents. La première étape de notre intégration au réseau Rainbow Cities, c’est de construire un référentiel propre à Genève. On peut ensuite échanger avec les autres villes pour élaborer une réflexion collective», note la magistrate et ancienne maire de Genève.
Pour cette troisième rencontre entre Rainbow Cities, un thème d’une actualité brûlante a été choisi: la manière dont sont traités les réfugiés LGBTIQ, une idée proposée par la ville de Genève.«En Suisse, la question des réfugiés est traitée dans la difficulté. C’est un sujet qui suscite nombre d’initiatives politiques de la part de l’UDC. Ce contexte ne nous épargne pas une réflexion sur la prise en charge des personnes LGBTIQ, notamment sur le plan de leur sécurité», note Sandrine Salerno.
Villes pionnières
Il n’est cependant pas toujours facile de mener des projets sans les prérogatives politiques pour le faire. «En Suisse, c’est aux niveaux cantonal et fédéral que tout se joue. Des villes-capitales comme Berlin ont nettement plus de latitude que Genève», relève Guillaume Mandicourt. Et puis, à chaque soubresaut budgétaire, «le fait de se saisir de thématiques de société est remis en question. Pourtant, en parler est incontournable pour le développement de la modernité», note Sandrine Salerno. La magistrate vante l’importance de réseaux tels que le Rainbow Cities. «Les villes jouent un rôle essentiel: ce sont des pionnières, des laboratoires d’expériences».
Un vécu que la réunion de Genève a largement contribué à partager et à valoriser. «Lors de la rencontre, nous avons réfléchi à la formation du personnel qui encadre les réfugiés LGBTIQ, avec une question centrale: faut-il les sortir des centres d’accueil ou faire en sorte qu’ils y restent? Il n’y a pas de réponse définitive à cette question, il faut agir au cas par cas», raconte Guillaume Mandicourt. Le chargé de projets se dit impressionné par «l’implication des différents niveaux de décision» lors de la réunion Rainbow Cities de Genève, qui a vu des représentants des organisations internationales se rendre «au cœur même de la société civile» par leur présence aux débats organisés par l’Université. Un engagement qui devrait se prolonger lors de la prochaine rencontre des Rainbow Cities, du 4 au 6 août à Amsterdam.