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Entre le 18ème et le 19ème siècle, la plupart des baleiniers américains prenaient la mer depuis Nantucket. Cette petite île de l’Atlantique nord a connu la richesse grâce à ces courageux pêcheurs. Au début des années 1800, 15 000 baleines étaient tuées annuellement; un litre de leur huile, utilisée en premier lieu pour l’éclairage, valait alors une cinquantaine de dollars.
Bien sûr, la richesse n’était pas si facilement accessible pour les marins. En plus d’être risquées, les expéditions étaient longues, jusqu’à huit ans. La solitude des femmes de Nantucket est devenue légendaire. Les historiens rapportent que pour combler leur absence et assurer la fidélité de leur épouse, les loups de mer de l’île leur offraient des godemichés appelés « He’s-at-home ». Une tradition sur laquelle le journaliste Ben Shattuck a décidé d’enquêter pour le magazine The Common.
Le jouet oublié
Les ouvrages consultés par Ben Shattuck témoignent de l’existence de ces jouets dans des termes chastes : un « cylindre vague », une « forme obscure ». Par curiosité pour ces objets fantômatiques, le journaliste s’est mis à leur recherche. La tâche s’est vite corsée. Le New Bedford Whaling Museum, riche d’une collection de 750 000 pièces liées à la chasse à la baleine, n’en possède aucun. Pas de trace des He’s-at-home du côté du Mystic Seaport non plus ; fâcheux, car il s’agit du plus grand musée maritime du monde.
Pourtant, les He’s-at-home existent bel et bien. Sur les conseils d’un employé de la bibliothèque scientifique de Nantucket, Ben Shattuck a fini par en retrouver un. Connie Congdon, 80 ans, a découvert qu’elle était la propriétaire d’un des ces godemichés légendaires à la fin des années 70, en faisant refaire sa cheminée. L’objet était caché dans une boîte dissimulée à l’intérieur du conduit.
Dernier fragment
Avec ses treize centimètres sur trois, son teint pâlot et son gland violacé, l’engin de plâtre n’en impose pas vraiment. Reste que les lettres retrouvées à ses côtés, datées de la dernière décennie du 19ème siècle, attestent de son authenticité. Mais comment expliquer la solitude de ce spécimen ? Malgré ses recherches, Ben Shattuck n’a croisé aucun autre He’s-at-home. De quoi amener le journaliste a formuler trois hypothèses sur l’histoire de ces sex toys.
Un : l’exemplaire découvert par Connie Congdon est le dernier vestige d’une histoire très vite enterrée du fait de son caractère embarrassant. Deux : ce godemiché centenaire n’était qu’une blague. Trois : en récupérant ce He’s-at-home en 1979, l’octogénaire a transformé à ce qui n’était jusqu’ici qu’une rumeur en fait. Qu’est-il vraiment advenu des jouets pour femme de marin esseulée de Nantucket ? Ont-ils été détruits ? On ne le saura sans doute jamais. Ceux qui savent ont disparu il y a déjà bien longtemps.
On peine à imaginer que toute cette histoire ne soit qu’une légende calcifiée en faits par le temps qui passe. Pour Ben Shattuck, l’existence des He’s-at-home a été occultée par la répression systématique de la sexualité féminine dans l’histoire. Encore aujourd’hui, le pénis de plâtre de Connie Congdon met mal à l’aise sur la petite île de l’Atlantique. « Il y a quelques temps, je l’ai montré à mes invités pendant un dîner, raconte la retraitée. Les seules qui n’ont pas été choquées ont été moi et une autre vieille personne. Les gens n’aiment pas en entendre parler. Pourtant, c’est la vie ».
Au cabinet de curiosité féminine, on informe particulièrement sur ce qui a trait à la sexualité des femmes mais on aime aussi s’intéresser à celle des hommes, nos partenaires dans la vie, en amour, en amitié et pour le plaisir… Mrs Rose nous présente Movember, une initiative destinée à sensibiliser sur la santé masculine. Après le mois d’octobre...
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Si toutes les femmes sont « fontaines », ça ne veut pas dire que toutes prennent du plaisir dans l’éjaculation féminine, soyons clair ! Messieurs, s’il...
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Cette intervention de prévention et de citoyenneté associe la représentation théâtrale participative, le débat et l'information par les intervenants du Mouvement du Nid. Elle vise l'échange de façon ludique et dynamique sans exclure l'improvisation sur les questions d'égalité femmes-hommes, de sexisme, l'impact du sexisme dans les relations, la violence sexuelle, l'achat d'un acte sexuel, la réalité et le quotidien de la prostitution…
Le théâtre réactif alterne des scènes où le public peut être acteur et des scènes où il est spectateur. La cohérence des différentes parties est rendue grâce aux différents genres artistiques : le drame, la poésie et l'humour…
Une partie-conclusion rassemble tous les personnages et les intervenantEs.
Une comédienne meneuse de jeu régule et favorise la réflexion et les échanges entre les jeunes et les intervenantEs du Mouvement du Nid avec l'objectif de les rendre acteur et actrice, de provoquer le débat et de déclencher des interrogations en agissant directement sur les scènes.
La Compagnie « Les Bradés », qui pratique régulièrement le théâtre d'improvisation, pourra adapter le spectacle en fonction de la structure, du public et du contexte de l'établissement au sein duquel il se déroule.
POUR QUEL PUBLIC ?Théâtre réactif conçu pour les élèves de seconde, première et terminale.
INTERET PEDAGOGIQUECet outil de prévention vise à
sensibiliser et prévenir les conduites sexistes, le risque prostitutionnel, et promouvoir l'égalité filles-garçons ;
interroger sur les pratiques de violences que les jeunes peuvent subir ou constater dans la société ;
favoriser l'implication des jeunes pour trouver des solutions ;
amener à réagir sur des situations de violences psychologiques ou physiques ;
faire évoluer les comportements au sein comme au dehors de la structure scolaire et dans l'environnement quotidien ;
développer une prise de conscience de l'impact néfaste de certaines situations inégalitaires et des avantages collectifs et individuels d'une société plus égalitaire entre les femmes et les hommes.
Pour fêter le lancement de sa nouvelle compilation Liste noir #2 : Darker It Gets, Clearer We See, bientôt disponible en physique du côté de chez Colette, le label marseillais La dame Noir vous invite aux Bains Douches parisiens le vendredi 6 novembre prochain. De 23 heures à 5 heures du matin, Did Virgo, Relatif Yann, Phred Noir et Valentin Joliff se relaieront en cabine pour un vol de nuit dans les courants du Disco Noir, leur spécialité.
Pas besoin de raquer pour prendre part à l’aventure, l’entrée de la soirée sera libre mais si vous voulez flamber et vous retrouver sur la guest list (l’entrée est un peu difficile aux Bains), envoyez-nous simplement un mail sur concours@letagparfait.com
Avant, pour moi, Klaire Fait Grr, c’était la fille qui faisait parler les chats sur son blog et c’est tout. Et bon, perso si je veux des chats qui parlent, j’ai qu’à aller sur Youtube. Mais ses chats à elle ont d’autres hobbies que se planquer dans des tiroirs : ils m’expliquent l’Histoire, dénoncent des faits de société, ou offrent une information que je qualifierais d’alternative.
Total, le blog de Klaire me fait :
- Beaucoup rire,
- Réfléchir
- Couiner parce que quand-même, c’est des chatons mignons qui disent des trucs.
Puis j’ai découvert Dans Ton Flux, son programme court en partenariat avec France 4 et Rue 89. Puis ses chroniques pour NEON. Et que son humour, avec ou sans moustache, ça marche. Je l’ai donc sollicitée pour lui poser quelques questions.
Klaire Fait Grr, raconte-moi un peu ton parcours : comment es-tu arrivée à tes vidéos ? Et cette formidable transition entre tes illustrations (très très drôles) et tes « DTF » (très très drôles aussi, même si pas drôles pareil…) a-t-elle été facile ?
Eh ben, je tiens un blog depuis 8 ans, sur lequel j’ai petit à petit trouvé mon truc : des notes sur des sujets plutôt sérieux, mais illustrées de façon décalée. Enfin « trouvé », c’est faux d’ailleurs… Le format, c’est une perpétuelle transition, j’aime bien essayer d’en tester de nouveaux.
Fondamentalement, la plupart du temps, j’ai surtout envie de dire ou de démontrer un truc. C’est ça qui m’importe : la destination. Le format texte, illustré ou vidéo, le ton humoristique c’est juste le moyen de transport. Or certes, le moyen de transport, ça compte – tu as plus de chance d’embarquer les gens en licorne arc-en-ciel qu’en trottinette cassée et mon but c’est d’emmener le plus de gens possible avec moi – mais ça reste un moyen.
Tout ça pour dire que passer à la vidéo était assez naturel, du point de vue de l’écriture, parce que j’utilise finalement le même stratagème : parler d’un truc important sans en avoir l’air. On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre, il paraît. D’un point de vue technique en revanche, je ne peux pas faire les vidéos toute seule. Je travaille avec une boîte de production audiovisuelle qui transforme mon scénar en video, c’est de la magie. (Et pas mal de boulot.)
Tu te définirais comme une auteure ? Une journaliste ? Ou comme une nana drôle qui se sert de l’humour pour dénoncer certains phénomènes ?
Comme je fais des trucs assez divers, j’ai beaucoup de mal à définir mon job. Je ne suis pas journaliste en tout cas, même si ce que je fais touche parfois à ça, je suis davantage dans le ressenti que dans l’objectivité. Je me sens auteure quand j’écris des livres, chroniqueuse quand j’écris des chroniques, mais la plupart du temps « nana qui dit des trucs », quoi. Bon, c’est compliqué à faire rentrer dans les cases de la CAF, j’avoue.
Finalement, Klaire fait “Grr” c’est Klaire qui grogne ?
Oui… Bon, cela dit si je devais choisir un pseudo aujourd’hui, je prendrais autre chose. (Un truc hyper classieux tel que Ursula Licorne ou Lili Dark Moon tu vois…) (Non). Mais au final, c’est assez cohérent, effectivement la plupart du temps quand je prends la parole sur les internets c’est pour râler. Donc ça se tient.
Quelles sont les causes qui te tiennent le plus à cœur ? Es-tu engagée dans une cause en particulier ? Ou au contraire te positionnes-tu en observatrice du monde dans lequel nous vivons ?
Je ne suis pas engagée dans une cause en particulier, non, même si comme tout le monde certaines me touchent davantage.
Je réalise aussi que certaines causes que je croyais « gagnées » sont loin de l’être. Que l’accès à l’IVG puisse encore être remis en question en Europe me fait halluciner. Que rire de Dieu et ses potes puisse signer ton arrêt de mort en 2015 me rend dingue. Je ne pensais pas que ces combats devaient être ceux de ma génération. Comme quoi, rien n’est jamais acquis.
Klaire, tu m’as fait trembler de suspense pendant DEUX LONGUES SEMAINES parce que tu avais une double actualité à annoncer, je t’écoute…
Je sors deux trucs très bientôt : un livre d’humour qui s’appelle Le Journal Intime de Dieu qui sort le 11 novembre (Editions Jungle).
En gros, c’est Dieu qui raconte ses amours, ses emmerdes, ses embrouilles avec son fils Jésus, ses galères pour monter une arche de Noé en kit de chez Casto et ses coups de déprime quand les hommes continuent de s’entretuer en son nom alors qu’il voudrait juste prendre sa retraite pépouze.
Et l’autre truc, c’est un petit cahier pour tous les blasés de Noël qui en ont marre de recevoir les catalogues de jouets début octobre, d’exploser la facture EDF de la ville à coups de déco moche et de boire du mousseux tiède pour supporter les dîners de famille… Ça s’appelle Le Cahier d’Inactivités de Noël et comme son nom ne l’indique pas, c’est un cahier d’activités avec des jeux, labyrinthes, coloriages, enquêtes, boules à découper etc… Pour tous ceux qui en ont un peu ras-le-pompon des fêtes.
Klaire fait Grr, vous régale toutes les semaines avec Dans Ton Flux, disponible sur la chaine Youtube dédiée et dans le magazine Neon. Découvrez ses deux prochains ouvrages, Le Cahier d’Inactivités de Noël et Le Journal Intime de Dieu qui sortent respectivement les 4 et 11 novembre !
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Au XIVe siècle, un obscur fonctionnaire tombe gravement malade puis – miraculeusement guéri – se met à dessiner des cartes marines d’une stupéfiante exactitude dans lesquelles se cachent des monstres, des nus et des viols…
Le 31 mars 1334 Opicino de Canistris (1296-1355) – employé comme scribe à la Cour papale d’Avignon – est victime de ce qu’il décrit comme une maladie subite, sans cause, qui le laisse «presque mort» pendant trois semaines. Son état est si désespéré qu’on lui administre l’extrême-onction. Pourtant, il ne meurt pas. A son réveil, frappé d’amnésie, il se souvient seulement d’avoir vu un jour après les vêpres «un vase dans les nuages».
Suite à sa maladie, il perd l’usage de son bras droit. Rupture d’anévrisme ? Le 15 août, il rencontre «en rêve la vierge Marie tenant son enfant». Cette vision marque le début d’une étonnante guérison : son bras droit ne lui obéit plus et se met à dessiner des «images sans aide humaine», avec une vigueur inconnue jusqu’ici. Ce bras, devenu «plus fort qu’auparavant» trace des diagrammes qu’Opicino nomme des «œuvres spirituelles». Elles sont maintenant révélées au public dans un ouvrage tout juste publié aux éditions Zones Sensibles sous le titre Dialectique du Monstre.
Œuvres spirituelles ou démoniaques ?
En 1335, Opicino se met à dessiner des cartes géographiques desquelles émergent, – si on les regarde en négatif ou à l’envers –, des formes encastrées les unes dans les autres… Il en fait jusqu’à trente versions différentes. Elles sont toutes d’une rigoureuse et remarquable précision (1). Mais dans les contours des étendues marines les figures hybrides s’intriquent au fil d’agressions en perpétuel mouvement. L’Europe est tantôt homme, tantôt femme. «Elle porte dans son ventre sanguinolent, en Lombardie», un fœtus qui «semble sur le point de naître par césarienne dans le golfe de Gênes». L’Afrique du nord est un moine. L’océan, un barbu à pattes de bouc, dont le sexe en érection éjacule sur le littoral d’Alicante. «Le poing d’un bras remontant l’Adriatique agresse les parties génitales de la femme dans la lagune vénitienne.» Ces images obsessionnelles, assorties de diagrammes complexes, recouvertes de textes en latin mêlant souvenirs d’enfance et citations de la Bible, sont réalisées dans le plus grand secret.
Un secret qui tombe dans six siècles d’oubli
Opicino écrit sur l’une d’elles : «Jusqu’à présent, cette œuvre n’a été révélée à personne, si ce n’est à certains qui ne pouvaient comprendre, tandis que je gardais le silence.» Lorsqu’il meurt, toujours muet, ses cartes sont conservées au Palais d’Avignon sous des amas de manuscrits jugés sans importance. La seule indication que l’on possède de leur existence figure dans un inventaire de la Bibliothèque apostolique du Vatican, datant de 1594, qui décrit «un livre plein de figures difficilement compréhensibles […] avec de nombreux mystères». Le «livre» est découvert cinq siècles plus tard, suscitant d’innombrables controverses : s’agit-il de l’œuvre d’un fou ou d’un mystique ?
Opicino : aliéné mental ou visionnaire ?
Carl C. Jung – dans une lettre de 1936 – suggère qu’Opicino souffrait d’une schizophrénie peu ordinaire, citant Shakespeare («Il y a de la méthode dans la folie») pour désigner ce cartographe dément qu’il compare à Hamlet. En 1952, un autre médecin de l’âme – auteur de l’ouvrage Psychanalyse de l’art – classe Opicinus dans la lignée des artistes psychotiques et, sur la base de traductions erronées, lui invente des traumatismes infantiles. C’est finalement un historien (Sylvain Piron) qui traite tout en nuances le dossier avec l’aide d’un spécialiste des psychoses (Philippe Nuss). La traduction du manuscrit, entièrement retravaillée, fait entendre la voix d’un homme dont «la souffrance psychique ne fait du moins aucun doute». L’ouvrage – illustré de 40 étonnantes reproductions – replace son œuvre dans le contexte précis du XIVe siècle et laisse l’énigme ouverte.
Pourquoi vouloir à tout prix poser un diagnostic ?
«L’activité graphique d’Opicino se déploie dans un dialogue avec l’au-delà», explique Sylvain Piron qui insiste sur le fait que, dès 12 ans, l’artiste développe un don inouï : doté d’une «conscience géographique aiguë», le petit Opicino «indique du doigt les directions» de telle ou telle ville d’Italie sans jamais se tromper. «A chacun de ses déplacements, il enregistre les mesures des trajets, comptés en pas, en milles ou en journées de marche ; il observe la différence des mesures anciennes et modernes, compare la longueur des lieues italiennes, provençales et dauphinoises. […] Son habileté à dresser un plan zénithal de sa ville natale est plus saisissante encore. La comparaison avec une photographie aérienne du centre-ville révèle une coïncidence presque parfaite avec son tracé des rues et des murailles, y compris dans l’inclinaison de 15° par rapport à l’axe est-ouest.» Opicino voit tout comme en «vue satellite».
Comment lire ses cartes ?
Outils de déplacement non pas physique mais mental, ces cartes ouvrent le monde «à toutes les trajectoires et projections possibles.» Les villes qu’Opicino relie entre elles prennent place dans un rébus d’inspiration divine qu’il s’amuse parfois à résoudre en jeux de mots ésotériques… Il voit sa «ligne de rédemption» passer par «l’immolation» (Imola) de «tous les biens» (Bologne), par «mutation» (Modène) du «régime» (Reggio) du «bouclier» (Parme), jusqu’au «décret» (Plaisance) de Dieu.» Il fait de son nom même – Canistris (déclinaison du mot latin canistra «panier tissé», «corbeille») la «racine» d’un osier qu’il faut tisser par cercles concentriques afin d’en faire le vase d’une âme enfin purifiée… Ses cartes tournent en spirale, comme des prières, incessamment répétées en direction de la vierge. C’est lui qu’il voit sur les genoux de la Madonne. C’est son visage en oraison qu’il reproduit sur le pourtour des plans tracés à l’aide de compas, accompagnés de sa confession. Il souffre et il a peur. Sa peur s’inscrit, sous la forme de monstres, au détour de chaque frontière : le monde terrestre, voué au mal, n’est qu’un fouillis de corps violentés.
Cartographie de l’inconscient ?
Pour l’historien Sylvain Piron, il y a une forme de catharsis dans cette violence qu’Opicino s’impose. Lorsqu’il dévoile «ses fantasmes les plus crus», ne tente-t-il pas de les mettre à mort ? «Je me suis souvenu d’une déclaration fulgurante d’Antonin Artaud, vers le début du premier cahier tenu à Rodez : «Je n’accepte pas l’inconscient. Je n’en veux absolument pas en moi». L’affirmation vertigineuse résonne comme une déclaration de guerre. Elle décrit le principe d’un mouvement d’expression illimitée qui caractérise effectivement ses cahiers : l’enjeu de ce travail d’écriture était bien de tout exposer, sans rien garder caché. Toutes proportions gardées, encore une fois, c’est une démarche similaire qu’engage Opicino dans ses propres papiers et cahiers, en allant bien au-delà de ce qu’exigerait la plus rigoureuse des confessions».
Citant d’autres aphorismes qui font écho aux œuvres d’Opicino «avec une terrible acuité», Sylvain Piron note que «la confession radicale» confronte toujours l’humain à ses démons : «C’est à force de descendre dans les enfers de la douleur que je finirai par les abolir», disait Artaud. Le premier découvreur d’Opicino, l’historien de l’art Aby Warburg (qui sombra lui-même dans la folie avant d’en sortir comme par miracle) le disait ainsi : Per monstra, ad astra. «Par les monstres, jusqu’aux étoiles».
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A LIRE : Dialectique du Monstre, de Sylvain Piron, avec une postface de Philippe Nuss. Aux éditions Zones Sensibles
ACTUALITE DU LIVRE (opicino world tour)
19 novembre 2015 : Présentation de Dialectique du monstre par son auteur, en compagnie de l’éditeur, à la librairie Ptyx, Bruxelles, à partir de 18h30
17 décembre 2015 : Rencontre avec l’auteur de Dialectique du monstre, à la librairie Mollat, Bordeaux, à 18h
NOTES
(1) Elles sont tracées «en fonction d’un axe longitudinal dont le point central fixé au sud de la botte italienne». Tirant au compas deux cercles tangents (qu’il découpe en seize sections correspondant aux principales directions d’une rose des vents), Opicino trace le réseau de ces lignes qu’on appelle «lignes de rhumbs» dans le vocabulaire nautique. Sur ce marteloir (de l’italien mar teloio, «toile de la mer»), Opicino trace ensuite le contour des côtes – à main levée – depuis la mer d’Azov jusqu’à la côte marocaine, en y incluant parfois la Scandinavie. Puis, il place les villes et les rivières avec une exactitude étonnante.
Beaucoup ont tendance à voir les féministes comme un groupe monolithique, dont les membres seraient interchangeables. Le féminisme est, plus que jamais, riche de personnalités très diverses.
J'ai donc décidé d'interviewer des femmes féministes ; j'en connais certaines, beaucoup me sont inconnues. Je suis parfois d'accord avec elles, parfois non. Mon féminisme ressemble parfois au leur, parfois non.
Toutes sont féministes et toutes connaissent des parcours féministes très différents. Ces interviews sont simplement là pour montrer la richesse et la variété des féminismes.
Interview de Nela.
Bonjour, peux-tu te présenter ?
Bonjour! Je m'appelle Nela, j'ai 24 ans, je suis commence un internat en anesthésie-réanimation dans un mois. Je suis en couple sans enfants, et je viens de commencer il y a peu de temps un tumblr féministe : Je suis une publication sexiste.
Depuis quand es-tu féministe et quel a été le déclic s'il y en a eu un ?
Je pense que c'est un ensemble de petits déclics qui se sont opérés en moi depuis mon adolescence. Mes parents ne sont pas particulièrement féministes, mais ils m'ont éduqué de façon très ouverte et cultivée, ils ont attaché beaucoup d'importance à ça. J'avais quelques barbies et des jouets assignés aux filles, mais aussi des legos, des jeux éducatifs et un train électrique. Je me rappellerai toujours du jour où mon grand-père ingénieur m'a montré plusieurs de ses médailles gagnées au boulot, et qu'il m'a dit qu'un jour j'aurai les mêmes.
Je suis donc partie dans mon adolescence avec une certaine assurance. Et j'ai commencé à percevoir certaines choses dans les rapports envers les femmes que je trouvais injustes. Il faut savoir que je viens de Pologne où le sexisme est beaucoup plus ancré dans la société, et où entend beaucoup plus de choses contre l'IVG (puisque c'est interdit), sur la sacralisation de la maternité féminine, le rôle protecteur de l'homme et toutes ces bêtises. Du coup, il y a eu un effet de contraste important qui m'a fait comprendre que rien n'était naturel et que tout était question d'éducation.
Il y a un exemple qui m'a beaucoup marqué en Pologne justement peut-être un peu le déclic si il y en a eu un: j'étais au mariage d'une cousine éloignée dont le mari prenait le nom parce qu'il s'appelait "Nu" en polonais. Je précise qu'à l'époque j'en avais rien à faire de tout ça, mais quand j'ai entendu ça, je me suis dit, "oui ça semble logique, le type a un nom difficile à porter, c'est tout à fait compréhensible". Et puis tout les hommes des trucs du style: "Moi je pourrais pas, ce serait déshonorant". Et c'est là que je me suis dit: Ils parlent du nom de leur femme qu'ils sont censés aimer là, d'un être humain qui leur est égal, et pourtant ils trouvent ça déshonorant de porter leurs noms alors que pour les femmes c'est normal de porter le nom de leur mari depuis des générations. Il y a un problème quelque part. Maintenant, ça fait 8 ans qu'ils sont mariés et vous pensez qu'ils s'en sont remis? Ben toujours pas. Il y a toujours un Tonton Roger pour rappeler que "il a pris le nom de sa femme, hahaha, ce pauvre soumis"
Enfin, j'ai commencé à lire les sites féministes comme Vie de Meuf, et j'ai recommencé à me dire à plein de reprises "Ah ben, là aussi il y a un problème". J'ai commencé à comprendre que des choses qui semblaient normales à tout le monde ne l'étaient pas.
C'est ainsi que je suis devenue féministe.
On entend souvent dire qu'il y a beaucoup de sexisme dans le milieu médical ; que peux-tu dire là dessus ?
Oui, c'est vrai.
Il y a déjà le sexisme classique du "Je comprends pas pourquoi les femmes choisissent des spés comme chirurgie et anesth-réa elles vont avoir des enfants plus tard" ou "Bon c'est bien si vous êtes médecins les filles, mais vous aurez des enfants donc chef de service c'est peut-être pas pour vous". C'est assez fréquent. Je me souviens d'un chef qui nous a dit avec un grand sourire qu'on viserait pas de carrière hospitalo-universitaire, parce qu'il y a les enfants et qu'il faut partir deux mois à l'étranger et qu'entre-temps notre ami/mari risquerait de nous tromper. Bref l'éternel sexisme du "une femme peut réussir sa vie, mais pas trop non plus, elle a des gosses", qu'on doit retrouver dans beaucoup de milieux...
Et puis il y a un sexisme plus spécifique que j'attribuerais à la mauvaise excuse du "On est médecins, on a un rapport détaché au corps humain, donc on peut se permettre de tout faire ou tout dire". Du coup, si on aime pas qu'un chirurgien nous fasse une remarque déplacée sur notre physique on est féministe hystérique ou coincée. Si on aime pas une paillarde ou une tradition de bizutage débile, on est coincées. Si on aime pas les dessins de levrettes à l'internat, on est coincées. Il y a pas mal de gens qui perpétuent tout ça au nom de la tradition carabine, et comme personne n'ose les contredire et que beaucoup (notamment de filles) sont d'accord avec eux ils sont persuadés que tout le monde pense comme eux. Sauf que non, j'ai discuté avec pas mal de gens qui n'aiment pas tout ça. J'ai eu des réactions d'étonnement quand j'ai dit que j'étais mal à l'aise de dormir dans la chambre de garde de gynéco, remplies de dessins obscènes. Moi personnellement, je trouve que ce sont des dessins qu'on m'impose en tant qu'étudiante/interne, parce qu'à moins de changer de job, je suis obligée de les supporter.
As-tu vu passer les articles sur les violences sexistes médicales et obstétricales ; qu'en as tu pensé ?
J'ai jamais vu de touchers vaginaux sans consentement ou des trucs comme ça, je dis pas que ça n'existe pas, j'en ai pas vu, mais je trouve ce que je lis révoltant.
Lors de mes 10 semaines, en gynéco ça s'était bien passé, tout le monde était plutôt cool avec les patientes, à part un sage-femme qui a dit à une femme qui voulait une stérilisation définitive à 38 ans après 3 gosses "Non, ça va pas être possible, après vous allez rencontrer un autre homme et tomber amoureuse". C'est aussi illégal qu'infantilisant. Après tout ce que je lis sur #Payetonutérus ne m'étonne pas plus que ça, c'est souvent ce qu'on entend en off. C'est lié à ce que je disais dans la question précédente. Certains médecins ont tellement désacralisé le corps humain qu'ils en oublient que les autres ont de la pudeur. Ca me choque beaucoup. Je suis aussi patiente et il y a des choses que je ne supporterai pas entendre. Il faut que cela cesse.
Tu disais que l'IVG est interdit en Pologne ; as-tu connaissance de femmes autour de toi qui ont avorté ? Parle-t-on de l'IVG ou est-ce un sujet tabou ?
Pas en Pologne, non. J'en connais peut-être mais comme c'est clandestin, elles le crient pas sur les toits. J'y vais une fois par an quelques semaines faire quelques visites familiales, j'ai pas forcement les temps d'établir des liens de confiance suffisamment forts pour savoir ce genre de choses.
A chaque fois que je vais en Pologne, j'ai l'impression d'être dans une autre galaxie en ce qui concerne l'IVG; dans les séries et les émissions là où l'avortement est déculpabilisé en France, là-bas c'est une cascade d'arguments anti-choix classiques (tu ruinerais ton psychisme à vie...) C'est toujours difficile pour moi d'écouter ça. Ce qui n'empêche pas que beaucoup de gens ne partagent pas cet avis. Beaucoup commencent à en avoir assez des diktats de l'église catholique locale, et certains m'ont confié être pour l'IVG. D'autres en revanche, sont toujours très réacs. Dans l'ensemble, ça reste assez tabou comme beaucoup de choses liées au féminisme. J'ai beaucoup d'admiration pour les militant(e)s féministes, LGBT, pro-laïcité de là-bas qui sont encore plus stigmatisé(e)s qu'ici et qui doivent se sentir bien seules. J'assume bien mon féminisme en France maintenant, mais là-bas ça reste compliqué. Les préjugés sont plus tenaces.
J'ai parfois l'impression que le corps médical sera extrêmement difficile à faire évoluer en termes de respect des droits du patient et plus spécifiquement des femmes ? Qu'en penses-tu ?
Je pense qu'on parle d'une partie du corps médical. En 6 ans d'études j'ai vu de tout des respectueux, des bons, des mauvais, des je m'enfoutistes, des odieux. J'ai pas dit que tout le monde se comportait mal, je tiens à cette précision, beaucoup de praticiens se retrouveront jamais sur #Payetonuterus. Ceci étant dit, je pense que le corps médical ne se remet pas assez en question et est très récalcitrant à la critique. Et je m'inclus dedans des fois. On se fait régulièrement traiter de nantis malgré la charge colossale de travail qu'on a dans nos études et nos horaires de dingues, quand on se fait insulter ou agresser aux urgences, quand on fait des généralités qui sont perçues comme injustes par beaucoup. Ce qui se passe c'est qu'à force de réfuter toutes les critiques, on réfute aussi celles où nous sommes (du moins pour une partie d'entre nous) critiquables. Beaucoup ont tendance à prendre toute critique pour une agression.
De plus comme je la disais, les médecins ont souvent un sens de la pudeur moins important que celui du reste de la population, ce qu'ils peuvent oublier dans les rapports avec le patient. C'est paradoxal parce que c'est à de respecter ça le plus.
Et puis un médecin sexiste est un médecin comme un autre, beaucoup de choses sont banalisées et les mentalités changent lentement. Ce qui est particulièrement gênant dans un domaine qui touche autant l'intimité.
Tu parles de paillarde ou de dessins de levrette, peux-tu nous en dire plus et nous dire à quoi ils se réfèrent et pourquoi autant y sont attachés ?
Je parle de chansons paillardes chantées lors d'événements carabins qui consistent à 85% à parler d'alcool et de sexualité féminine de manière obscène. En ce qui concerne les dessins de levrette, c'est qu'un exemple parmi d'autres de dessins à contenu porno qu'on trouve dans les internats de médecine et les chambres de garde, qui personnellement me saoulent. Des fois, on fait passer beaucoup de manque de respect pour de la liberté sexuelle.
Pourquoi ils sont attachés à tout ça? Aucune idée, faudrait leur demander, c'est quelque chose qui me dépasse.
Tu viens de lancer le blog Je suis une publication sexiste ; dans quel but l'as-tu lancé ?
J'ai eu envie de faire ce blog après avoir lu 50 nuances de Grey et un article sur lequel je suis tombée par hasard intitulé "15 raisons inavouables pour lesquelles les femmes acceptent de coucher." que j'ai trouvés effroyables d'un point de vue de stéréotypes sexistes. J'avais rédigé deux billets humoristiques sur Facebook sur chacun d'entre eux, et j'ai eu de bons retours. Je me suis rendue compte que ça me plaisait et que je le faisais plutôt bien, donc j'ai décidé de faire un blog de coups de gueule humoristiques contre ce genre de choses qui ne manquent pas. J'ai envie de casser l'image de la féministe pas drôle qu'ont les gens à tort (en fait, les féministes ont beaucoup d'humour, c'est juste qu'elles se moquent des sexistes, pas des femmes), de faire quelque chose de sympa et d'accessible à quelqu'un qui n'y connaît rien tout en insérant des pistes de réflexions et de la pédagogie de temps en temps.
Beaucoup de gens te diraient que ces publications, ces publicités sont parfaitement anecdotiques et "qu'il y a des combats plus importants à mener" que peux-tu répondre à cela ?
Que tout est lié. Moins les femmes sont abreuvées d'articles sans intérêts, moins elles éprouvent le besoin de rentrer dans des stéréotypes souvent réducteurs, moins elles sont assimilées à des objets, plus elles ouvrent leurs champs des possibles et plus elles sont fortes et confiantes, et à même d'acquérir plus de droits et d'égalité et à se défendre. Les femmes ne réussissent pas moins parce qu'elles sont moins performantes ou qu'elles font des gosses, elles réussissent moins parce qu'elles subissent une pression importante et parce qu'on rabaisse leur confiance en elle.
Quand RTL crée un site pour les adolescentes et les jeunes femmes qui n'a que 4 rubriques (mode-beauté, psycho-sexo, confessions, lifestyle) et qui regorge d'articles stupides, il réduit le champ de vision des jeunes femmes en construction, alors qu'une jeune femme de 18 ans a bien d'autres préoccupations que de savoir pourquoi elle doit pas mettre des jeans troués ou quelle femme de footballeur elle serait. Il y a des milliers de choses qui peuvent intéresser une jeune femme à condition qu'on lui dise que c'est pour elle.
Quand les magazines en tout genre trouvent normal que le Prince Charles décide que les gardes du corps de Kate Middleton soient des femmes parce que le pauvre homme malheureux a été traumatisé par la liaison de Lady Di avec son garde du corps, on fait passer le message que c'est normal qu'on surveille les femmes.
Quand on ose parler de la féminité d'une canette d'Orangina qui serait plus belle, plus fine plus élégante., on ne valorise pas les femmes. On assimile des objets à des femmes. Ce qui est plus ou moins pareil que d'assimiler des femmes à des objets. Et le féminisme au fond ça veut juste dire que les femmes sont des être humains à part entière.
On écrit des articles pour dire que les femmes couchent par vanité, superstition ou reconnaissance, alors que les hommes ne couchent que par envie. Et on perpétue le fait que les hommes sont des bêtes en rut, et que les femmes des créatures chiantes et compliquées, et qui coucheront avec vous si vous payez un resto assez cher ou que vous leur faites de la peine, parce qu'elles seraient pas sympa de vous refuser quoi que ce soit.
ELLE qui se dit féministe ose se demander si la fellation est le ciment du couple, et nous fait comprendre que c'est un du de la femme pour l'homme. Super, l'idée de consentement.
La preuve c'est qu'un bouquin aussi pathétique et mal écrit comme 50 nuances de Grey a un succès phénoménal auprès des femmes, alors qu'il ne fait que romantiser les relations abusives et le harcèlement. Le gars trace le téléphone de la fille dans le "bouquin" ce qui est même pas légal et l'héroïne trouve ça mignon et les lectrices avec elle. Uniquement parce que le type est beau et riche. Mais comme toute femme est tombée 100 fois sur un test débile similaire à celui sur les femmes de footballeurs (qui sont riches) ou un article minable où on lui dit : "Et puis bon, on ne va pas mentir, toute femme est sensible à l'effort qu'une personne s'est donnée pour elle. Ou à l'argent", beaucoup ne verront même plus le problème.
On retrouve beaucoup cette idée de soumission et de dépendance de la femme envers l'homme au final dans la presse féminine, et à travers ça on ne peut que rabaisser l'importance de leur vie professionnelle, que les induire en position de dépendance et de vulnérabilité dans le couple.
On rabaisse constamment la femme sous toutes ses formes sous couvert d'humour ou d'articles légers, alors qu'on devrait leur dire "Vous êtes des êtres humains qui peuvent tout faire et on vous DOIT un respect non négociable".
Du coup je prends tous ces articles, je les décortique, les critique, les ridiculise et m'en sert aussi de base pour faire un peu de pédagogie et faire passer le message féministe avec le talents que je pense posséder, à savoir le sarcasme et l'ironie.
Je rajouterais que la situation des femmes en France est bien sûr bien meilleure que dans d'autres pays, mais je suis convaincue qu'une égalité femmes-hommes fortement avancée et prise au sérieux dans les pays développés et modernes ne peut que pousser les autres à accorder aux femmes leurs droits fondamentaux, surtout dans un monde hyper-connecté qui avance à toute vitesse.
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