Monsieur Valmont et sa pouliche, été 2013. Photo : d…
Entrevue par écrit de Yan Voodoo avec Monsieur Valmont, publiée dans FetLife le 3 août 2020. Le texte fut remanié par Monsieur Valmont pour le format blogue… :- )
Dans le milieu BDSM, il y a des gens qui s’expriment et partagent leurs passions de diverses façons, dans les médias sociaux tels que Facebook et FetLife, de même qu’à travers des blogues. On y retrouve des expériences personnelles, des philosophies, des techniques et une mine d’or d’autres renseignements! J’ai donc voulu en savoir plus auprès d’un blogueur de ma communauté BDSM, pour lequel j’ai un grand respect, Monsieur Valmont. Voici donc mon entretien avec un blogueur BDSM.
Bonjour Monsieur Valmont, ça fait longtemps que vous faites du BDSM? Quel est votre rôle?
Bonjour Yan, les pratiques BDSM pimentent ma vie intime depuis 1996. J’ai été initié par ma conjointe de l’époque. Elle avait déjà quelques expériences de ligotage, de même que des fantasmes de contraintes sévères. Elle a ouvert une porte en moi qui ne s’est jamais refermée. Depuis ce temps, hormis une courte période après une séparation en 2004, j’ai toujours conjugué relation de couple et relation de pouvoir érotique avec mes compagnes du moment, dans le rôle du Maître.
Ça remonte à loin, dites donc!
Une philosophie BDSM
Suivez-vous les courants d’une philosophie BDSM particulière?
Je ne sais pas si on peut parler de philosophie, mais mon BDSM est fortement influencé par un opuscule intitulé Les Amis de Germanicus publié en 2003. Beaucoup de gens font de l’urticaire à la seule mention de ce livre. Mais quand on fait abstraction de son côté pontifiant, les histoires d’écoles et tout ça, on trouve dans cet écrit une pensée originale, forte et utile sur la réalité de l’échange de pouvoir érotique.
Je vais arrêter ici, je pourrais en parler pendant des heures…
Je me sens également très en phase avec l’approche « no-excuse » d’un groupe new-yorkais appelé The Estate (qui ne semble plus actif). C’est là que j’ai appris le vrai sens du mot protocole, trop souvent confondu avec l’étiquette. Je retiens l’importance des ingrédients que sont la structure et la constance dans la réussite d’une relation de pouvoir saine et satisfaisante dans la durée.
Enfin, je me découvre depuis quelques années une parenté d’esprit avec un bakushi renommé, Yukimura Haruki (décédé en 2016), par l’entremise de ses élèves et amis qui perpétuent ses enseignements. Y-sensei, comme ils l’appellent, intègre dans son art deux éléments qui font partie de ma pratique BDSM : l’élément communication, la parole, lequel n’est pas sans me rappeler la façon dont je m’adresse à la soumise avant et pendant la séance, et l’élément connexion.
Êtes-vous présentement en relation D/s?
Oui, j’ai à ma disposition une belle esclave d’amour, nommée alezane, depuis bientôt quatre ans. Nous vivons une relation BDSM en continu dans un contexte polyamoureux, étant donné qu’elle est en couple.
Tenir un blogue BDSM
Vous avez un blogue BDSM?
J’en ai administré plusieurs au fil du temps, des blogues privés pour gérer mes relations avec mes soumises, et des blogues publics. Le plus connu, celui qui a survécu, demeure cercle O. Je m’en sers pour explorer l’échange de pouvoir érotique.
J’ai besoin de comprendre ce que je fais, bien que je n’ai aucun appétit pour le pourquoi. De me faire demander pourquoi j’aime restreindre une soumise, c’est comme me demander pourquoi j’aime le yogourt au moka… Je sais pas trop ce que ça me donnerait de le savoir. Non, je suis plutôt dans le comment… ^^
On pourrait dire que cercle O se trouve à mi-chemin entre le travail journalistique (une de mes anciennes vies), la chronique, le journal de bord, l’auto-fiction et l’autobiographie.
Quel blogue intéressant! Depuis combien de temps tenez-vous cercle O et d’où l’idée vous est-elle venue?
cercle O fut d’abord un site de ressources principalement en français sur les pratiques BDSM. Il est devenu un blogue qui fêtera ses vingt ans en 2021. Il faut nous rappeler qu’il y avait très peu de contenus à saveur BDSM en français, au tournant des années 2000, et les réseaux sociaux n’existaient pas.
Ce qui était au départ une boutade lancée à ma soumise de l’époque, est devenu un site ayant attiré plus de 400 000 visiteurs et engendré plus de 1,8 million de pages vues depuis. Tout ça sans vraiment d’images croustillantes. Je n’ai commencé à insérer des images dans les articles de façon systématique que récemment.
C’est un succès impressionnant!
Une inspiration
cercle O m’a beaucoup aidé quand j’ai découvert cet univers, vous devez avoir inspiré bon nombre d’autres adeptes au fil du temps?
Il semble que oui. Bon an, mal an, tous les mois, 20 % des visiteurs reviennent plus d’une fois sur le site. Ce qui m’a toujours fait croire que ça répond à un besoin de connaître, savoir, découvrir, mieux comprendre des pensées et des pratiques sexuelles difficiles à gérer, au-delà des opinions et des goûts. Et en français.
Là-dessus, le Livre d’or de cercle O est certainement l’un des articles du blogue qui me tient le plus à coeur. Les gens me font savoir leur soulagement de trouver en ligne une représentation des pratiques BDSM qui soit autre chose que les images disgracieuses que l’on voit un peu partout… Leur réconfort est mon salaire.
Je pense aussi à des rencontres fortuites en public faites au fil des ans. J’ai reçu de la gratitude venant de personnes que je ne connaissais pas. J’ai compris que mon blogue leur avait fait du bien.
En effet, ce sont là de belles preuves!
Le blogue cercle O en 2013.
Lancer un blogue
Quel conseil auriez-vous à offrir à quelqu’un qui voudrait se partir un blogue BDSM?
D’attacher sa tuque? (rire)
Partir un blogue, c’est très facile. Les outils sont fabuleux, si on compare à ce qui se faisait au tournant des années 2000 quand j’ai lancé cercle O.
Le tenir à jour et l’alimenter, c’est moins évident. Il y a beaucoup sites « me too », c’est-à-dire des sites qui disent à peu près tous la même chose et de la même manière, et qui tombent au bout d’un moment. J’en ai vu passer des blogues et des sites en vingt ans. Évidemment, les gens les délaissent pour toutes sortes de bonnes et mauvaises raisons. Aussi, beaucoup préfèrent désormais passer par FetLife ou Facebook, et ne pas se casser la tête avec une plateforme (c’est quand même du travail, la mise à jour technique, la mise en page, etc.).
Or, si FetLife tombe demain matin, et ça pourrait très bien arriver (comme c’est arrivé à Collarme et quelques autres), on a l’air fou et on perd à l’instant tout ce qu’on y a fait. Quant à Facebook, je leur fais ZÉRO confiance. Il y a plusieurs années, au mépris de toute logique et respect, ce site avait rendu public tous les groupes auxquels les gens étaient inscrits. Allo la confidentialité!
Vous avez bien raison, un blogue est une valeur plus sûre alors.
Mentorat, formation
Faites-vous aussi du mentorat? Des ateliers de formation?
Au fil des ans, à quelques reprises, j’ai mentoré des personnes dominantes et soumises, d’ici et d’ailleurs. C’est une drôle de patente, le mentorat BDSM. Je n’accepte pas toutes les demandes qui me sont faites. On voit souvent des gens qui viennent au BDSM sans trop savoir ce qu’ils viennent y faire…
J’offre aussi depuis l’automne dernier un atelier privé spécifiquement dédié aux couples qui ont besoin de voir plus clair avant de sauter, et qui n’ont aucune envie d’aller dans les munches et ateliers publics. Il faut croire que mon intuition de départ était bonne parce que la demande est là.
Les pratiques BDSM
Possédez-vous un donjon ou salle de jeux à la maison?
Non.
À quelles pratiques BDSM vous adonnez-vous?
Quelle question! Vous avez quelques heures?
Haha tant que ça?! Quel sont vos jouets préférés?
La parole… Mes mains… mes ongles… parfois le pied (je suis droitier). La corde et le fouet sont mes meilleurs amis. Et les amis de ma soumise.
Ha, les bons comptes font les bons amis! Allez-vous parfois dans des donjons ou événements BDSM publics?
Rarement. Quand je sors, c’est pour répondre généralement à un canevas de scénario. Je dis ça en souriant parce que j’aime beaucoup l’improvisation mixte ayant pour titre « C’est dans quelques heures que… »
Je sors peu parce que j’ai ce besoin d’entendre ma soumise lorsque je suis en interaction avec elle, et vice-versa. Dans un lieu où la musique est forte et/ou rempli de monde, c’est plutôt difficile. Et puis surtout, je ne sors jamais pour faire du social. N’étant pas latex, ni cuir, etc., je n’ai pas ce besoin de sortir pour vivre mon BDSM.
Avez-vous déjà fabriqué des articles BDSM?
Non… à part de transformer mes tuteurs de bambou du jardin en cannes vibrantes et chaudes…
Bambou!
Autres activités en ligne
Avez-vous aussi un groupe dans FetLife?
J’anime le groupe cercle O depuis 2009 et modère le groupe BDSM Montréal français depuis 2016. Depuis quelques semaines, j’ai pris les rênes du groupe Coin lecture BDSM qui a besoin d’amour et d’eau fraîche.
Avez-vous un site web, page de profil ou autre pour vous rejoindre ou vous lire?
Le meilleur moyen de me lire demeure cercle O. J’y concentre l’essentiel de mes activités. De là, je fais des liens vers mes autres présences ici et là dans les internets. Pour me joindre, mon profil Fetlife fait aussi la job.
Et bien, c’est ce qui conclut cet entretien. Merci, Monsieur Valmont, de nous avoir fait découvrir un peu plus sur vous et cercle O. Ce fut un honneur de vous avoir en entrevue! Au plaisir de vous revoir un jour.
Je vous en prie. À bientôt.
Voilà ce qui conclut cet entretien avec un blogueur BDSM. J’aimerais spécialement remercier Monsieur Valmont pour sa collaboration. Nous avons pu en découvrir un peu plus sur lui, ses services de mentorat ainsi que cercle O, un blogue fort intéressant dans lequel j’ai plongé dès mes débuts dans ce milieu!
© Yan Voodoo & Monsieur Valmont
L’article Interview avec un blogueur BDSM est publié dans le site cercle O - L'échange de pouvoir érotique.