Biiiiip
Vous avez bien joint la boîte vocale de Louis Berthier. Veuillez me laisser un message.
Biiiiip
Tu ne sais pas la différence entre diérèse et synérèse et tes poèmes sont à chier. Voilà, c’est dit. Et je ne suis pas la seule à le penser, d’ailleurs.
Ta sœur m’avait bien mise en garde au sujet de ton narcissisme mâtiné de machisme qui découle de ton œdipe non résolu. C’est pas facile de couper les ponts avec maman chérie, à ce que je vois. J’avoue ne l’avoir pas écoutée, parce que tu étais si fascinant et que j’ai toujours pensé que sous l’étrange se cache toujours une sagesse blessée. Sans compter que je te prenais pour un poète, un vrai, pur jus – ou du moins quelque chose qui s’y rapproche, une créature exotique publiée par des REVUES SUBVENTIONNÉES, ce qui ne veut rien dire, finalement, n’importe quel idiot peut être frappé par la foudre après tout. Bref, je me sentais en compagnie d’un génie, alors que tu n’étais qu’un pauvre type incapable de payer son loyer.
Oh, pendant que j’y pense. Tu sais, les vers où tu compares le ciel à un linge sale qui sert à essuyer la terre polluée? Tu as volé ça à Denis Vanier, espèce de faux jeton! Mais je te pardonne, parce que toute ton œuvre est du sous-Vanier insipide, alors quand on tombe sur une pépite authentique du modèle inavoué, on en devient presque reconnaissante.
Adieu, sous-merde! Inutile de me raccompagner, je connais le chemin!
Clic!
Biiiiip
Vous avez bien joint la boîte vocale de Louis Berthier. Veuillez me laisser un message.
Biiiiip
Contrairement à toi, je vaux quelque chose, moi! Je suis un être humain, bordel! Je refuse d’être ignorée!
Clic!
Biiiiip
Vous avez bien joint la boîte vocale de Louis Berthier. Veuillez me laisser un message.
Biiiiip
Ou effacée!
Clic!
Biiiiip
Vous avez bien joint la boîte vocale de Louis Berthier. Veuillez me laisser un message.
Biiiiip
Mon clito vorace refuse d’être domestiqué !
Clic!
Biiiiip
Salutre. Anne Archet à l’appareil. Expliquez-moi l’unicité de votre moi souverain. Si vous êtes suffisamment intéressant, j’irai peut-être jusqu’à retourner votre appel. Tentez votre chance on ne sait jamais.
Biiiiip
Anne, écoute, c’est Louis. Je sais que tu es là. Si tu n’étais pas si peureuse, si tu avais un millième du courage physique que tu te targues d’avoir, tu décrocherais le combiné. Avoue que j’ai raison. Anne… Anne… ma choupinette en sucre d’orge… je crois que je meurs.
J’ai écouté tes messages, tu n’es pas un être humain. Tu es une succube, une lamie à tentacules qui a empoisonné mon âme pour la faire sienne. Anne, je te veux. Tu ne peux pas savoir comment je te désire. Ce que je veux, c’est… comment dire… Je pense que ce que je veux vraiment, c’est… je veux dire, c’est de te…
Biiiiip
Salutre. Anne Archet à l’appareil. Expliquez-moi l’unicité de votre moi souverain. Si vous êtes suffisamment intéressant, j’irai peut-être jusqu’à retourner votre appel. Tentez votre chance on ne sait jamais.
Biiiiip
Anne!
Je veux lécher ma crème
Sur ta gaufre bleue
Rouler ma langue en sandwich
Dans ton petit pain fourré
Pourquoi es-tu si méchante?
Je veux être la cheville carrée
Dans le trou rond de ton cœur
Sucer ton grain de sucre
Pour le faire fondre en sirop
Sucer ta plaie toute la nuit
Pour en extraire le poison
Te remettre enfin à ta place
Pendant que je t’enfile comme un gant
Collée à mon visage comme un
Jambon portefeuille en masque à gaz.
Clic!
Biiiiip
Vous avez bien joint la boîte vocale de Louis Berthier. Veuillez me laisser un message.
Biiiiip
Tu veux fourrer
Ta petite saucisse pas cuite
Dans mon derrière, mon cher?
Me mettre ce petit lombric
Que tu oses appeler Moby Dick?
Tu penses avoir assez de jus
Pour barater ma crème en beurre ?
Chéri, chéri, pauvre chéri…
Tu peux bien aller te polir le chinois
Avec une poignée de thumb tacks
À la r’voyure, taré!
Clic!
Biiiiip
Ouin, c’est Anne Archet. Vous pouvez me laisser un message si vous n’êtes pas Louis Berthier qui, comme vous le savez déjà, est un gratte-papier sans talent dont le stylo est plus long et large que sa triste bistouquette. Croyez-moi sur parole, mon arrière-train a eu à subir les assauts maladroits de ces deux outils.
Biiiiip
Même le clair de lune
Cherche les vagues glacées du large
Qui reviennent toujours à toi
Clic!
Biiiiip
Vous avez bien joint la boîte vocale de Louis Berthier. Veuillez me laisser un message.
Biiiiip
Tu peux bien te prendre pour Éluard
Jamais tu n’approcheras ton braquemart
De ma moule marinière
Biiiiip
C’est le répondeur d’Anne Archet. Vous pouvez me laisser un message si vous n’êtes pas Louis Berthier qui pleure comme un bébé après avoir joui. Bouhouhou! Snif snif snif! Maman! J’ai fait du gluant sale! Bouhouhou! Pardon Maman! Ahreuu! Ahreuu!
Biiiiip
De baisers, je te bâillonne, ma chère.
Si tu cesses enfin tes billevesées
Je lécherai ta moule marinière
J’avoue avoir été celui, hier
Qui des condoms dans son lit a laissé
De baisers, je te bâillonne, ma chère.
Cesse de me faire tant de misères
Laisse tes cuisses un peu se desserrer
Je lécherai ta moule marinière
Oui, j’ai dû me rabattre sur ta mère
Mais c’est à toi toujours que j’ai pensé
De baisers, je te bâillonne, ma chère.
Enfin, si ta verve primesautière
Gentiment tu finis par refouler
Je lécherai ta moule marinière
Et puis, ta maman ne vaut rien au lit
Elle est froide et moche, alors je te dis :
De baisers, je te bâillonne, ma chère
Je lécherai ta moule marinière
Clic!
Biiiiip
Vous avez bien joint la boîte vocale de Louis Berthier. Veuillez me laisser un message.
Biiiiip
Bordel à queues, Louis, promets-moi de ne plus jamais refaire ça. Promets-moi de ne même plus y penser.
Et je ne parle pas seulement de baiser ma mère dès que j’ai le dos tourné, je parle surtout de cette villanelle horrible. C’est un vrai crime contre l’humanité! Je crois qu’elle a fait fondre l’hémisphère droit de mon cerveau, y’a du liquide grisâtre qui coule de mon oreille. Je te juge que je souffre; je vais en subir les séquelles pendant longtemps. Promets-moi que tu ne vendras jamais ce truc à la CIA, ils seraient assez cons pour s’en servir comme outil de torture à Guantanamo. Même les odes des Vogons sont moins douloureuses que ton truc. Tu me confortes dans mon athéisme : Dieu n’aurait jamais permis une telle abomination.
Ok, je te vois à onze heures. La deuxième cabine des toilettes des femmes du café. Je te conseille fortement de mettre des genouillères, salopard.
Clic!