Comment définir l'orgasme ? L'étymologie renvoie à l'image d'un fruit gonflé de suc. Les liquides cherchent à sortir. Au XXe siècle, étrangement, plus personne ne s'entend sur la définition de ce mot débordant.
Le mot orgasme vient du grec orgaô («enfler», «mûrir») qui s’écrit ὀργάω et que Liddel-Scott définit ainsi : «Etre sur le point de porter [un fruit], être mûr pour quelque chose […] s’enfler de désir, être en chaleur, être sexuellement excité.» Bailly : «Avoir l’humeur ou le sang en mouvement, bouillonner de désirs ou d’ardeurs, […], être en rut, en chaleur, […], être gonflé de sève, être fécond, fertile, […], être possédé d’une passion violente.» Chantraine : «Etre plein de suc ou «de sève» dit d’une terre fertile, de plantes qui bourgeonnent, de fruits qui mûrissent, etc., en parlant d’hommes ou d’animaux «être rempli d’ardeur» notamment de désir amoureux.»
Au XVIe siècle, l’orgasme est synonyme d’«agitation intérieure» ou d’effervescence : Un écrivain, Lacurne, cité par le Littré, écrit dans un traité sur la Maladie d’amour : «Le génie de la nature commande aux pères de garder soigneusement leurs filles de la conversation des courtisans, pour autant qu’il se fait un merveilleux orgasme par tout le corps en cet âge.»
Au XIXe siècle, le terme devient médical et désigne l’étape finale de l’union sexuelle (réussie). Mais a définition de l’orgasme reste «incertaine», comme le souligne Wikipedia qui mentionne : «La revue scientifique Clinical Psychology Review recense ainsi 26 acceptions différentes, dont aucune n’est consensuelle.» Les voici. Laquelle préférez-vous ?
Ellis (1938) : Relâchement de forces nerveuses (détumescence).
Alfred Kinsey (1948, 1953) : Décharge explosive de la tension neuro-musculaire au sommet de la réponse sexuelle.
Terman (1951) : Sommet de sensation intense suivi par un sentiment de paix et de soulagement.
Campbell et Petersen : (1953) : Réaction neuro-hormonale des organes musculaires lisses et contraction des muscles éjaculateurs homologues.
Wallin (1960), Wallin et Clark (1963) : Sommet de sensation intense suivi par un sentiment de soulagement et de détente.
Masters et Johnson (1966) : Libération de la vasoconstriction et myotonie de la stimulation sexuelle.
Glenn et Kaplan (1968) : Contractions spasmodiques déclenchées au plus haut niveau de tension.
Sherfey (1972) : Décharge réflexe de vasocongestion musculaire génito-pelvique.
Singer (1973) : Libération de la tension à son point culminant.
Reich (1973) : Capacité de se laisser subjuguer par un flot d’énergie biologique ; capacité à décharger cette putain d’excitation sexuelle [sic] par le moyen de convulsions du corps involontaires et agréables.
Kaplan (1974) : Sensation réflexe – Réponse motrice incluant des contractions génito-pelviques.
Kline-Graber et Graber (1975) : Sensation réflexe – Réponse motrice à la stimulation sexuelle.
Fox (1976) : Changements au niveau de la pression sanguine, de la respiration, du rythme cardiaque, de la tension musculaire, accompagnés de contractions génitopelviques et de vocalisation.
Hite (1976, 1981) : Sensation intense, soudaine, précédant immédiatement des contractions génito-pelviques.
Bentler et Peeler (1979) : Expérience complexe constituée d’éléments émotionnels/mentaux/physique.
Mould (1980) : Contractions cloniques réflexes des groupes de muscles pelviques-abdominaux.
Davidson et Davidson (1980) : Etat altéré de la conscience.
Reubens (1982) : Action réflexe involontaire accompagnée de contractions.
Newman et al. (1982) : expression sensorielle de l’émission-éjaculation.
Raboch et Barta (1983) : Sensation subjective d’avoir atteint un sommet distinctement perceptible au cours d’une relation sexuelle.
Alzate et London (1984) : Perception subjective d’un moment d’intensité maximum dans un ensemble de sensations incroyablement agréables provoquées par la stimulation sexuelle.
Alzate (1985a) : Phénomène psychique ; sensation (décharge neuronale cérébrale) provoquée par l’effet accumulé sur certaines parties du cerveau de stimuli émis depuis les zones périphériques érogènes.
Tuckwell (1989) : Evénement agréable associé à l’éjaculation.
Bancroft (1989) : Expérience complexe de changements observés au niveau génital, au niveau du tonus des muscles du squelette et des mouvements semi-involontaires, au niveau de la respiration et du rythme cardiovasculaire, accompagné d’expérience sensorielle somatique et d’un état de conscience altéré.
Schiavi et Segraves (1995) : Acmé du plaisir sexuel accompagné de contractions rythmiques des organes périnéaux et reproducteurs et cardiovasculaires.
Illustration: La Petite Mort, photos de Santillo, textes de Dian Hanson, Taschen, 29,99 euros.