Dans sa version votée le 13 juillet à l’Assemblée nationale, l’article 18 quater qui vise à fixer un cadre légal aux démarches pour effectuer un changement d’état civil, divisait déjà les associations trans: insuffisant pour certaines, un premier pas nécessaire pour d’autres. De retour au Sénat cette semaine, l’article – qui fait partie du projet de loi Justice du XXIe siècle – a été cette fois très clairement modifié.
Plusieurs points sont même particulièrement inquiétants, puisque la principale avancée de ce texte résidait dans la démédicalisation du processus de changement d’état civil: en effet, les personnes n’allaient plus être contraintes de présenter des attestations d’ordre médical pour l’obtenir. Or, la nouvelle version montre que les amendements adoptés vident le texte de cette dimension: «La réalité de la situation mentionnée à l’article 61-5 est médicalement constatée» peut-on lire dans la version du projet de loi adopté cette semaine:
C’est notamment au sénateur centriste Yves Détraigne, rapporteur du texte au Sénat, que l’on doit cette modification. Il affirme s’être inspiré d’un arrêt de la cour de cassation de 1992 pour présenter un amendement établissant que la personne requérante présente bien des documents d’ordre médical «dans un souci d’objectivation de la procédure, et pour s’assurer que la demande de changement de sexe à l’état civil ne repose pas sur un trouble temporaire». Déjà lors de la commission mixte parlementaire, il avait montré sa désapprobation face à la démédicalisation du changement d’état civil.
Le texte était déjà loin de faire consensus parmi les associations, puisque qu’il ne prévoyait pas d’établir une démarche de changement d’état civil libre et gratuit en mairie, comme elles le demandent. Alors que les sénateurs/trices montrent une très nette volonté de médicaliser le processus, l’article 18 quater s’annonce encore plus préoccupant pour les personnes concernées. En fixant explicitement dans la loi que les personnes doivent fournir des avis médicaux auprès d’un juge pour obtenir leur changement d’état civil, la France n’ira certainement pas dans le sens de Malte, de l’Irlande ou de la Norvège… mais ferait bien un pas en arrière sur le terrain des droits humains.
Cette nouvelle version sera discutée à compter du 27 septembre au Sénat.