Cela fait bien longtemps que je n’ai rien écrit ici, faute de temps. Je revois encore un amant me dire, lorsque j’étais toute jeune salariée, pas encore en CDI : «
Souviens-toi que l’entreprise est la plus ingrate des maîtresses, ne lui cède jamais tes nuits : elle ne les mérite pas, elle ne te rendra rien en retour. Quand tu auras mon âge, tu comprendras l’absurdité d’une vie consacrée jour et nuit à servir une entreprise… Toute ta vie, tu devras défendre tes nuits : fais-en ton territoire sacré, ne laisse jamais le moindre tracas professionnel y pénétrer, te priver de nuits d’amour ou te faire perdre le sommeil. ». Il en savait quelque chose : il était le DG (le « grand chef à plumes », comme il disait lui-même) de l’usine qui m’employait alors en contrat d’apprentissage, et passait beaucoup de ses nuits chez moi, dans mon appartement d’alors, 40 m2 rue de Sèvres, à me faire l’amour et à me
raconter les tourments de sa vie de dirigeant (notamment ses rapports exécrables avec son actionnaire – une plus grosse usine, dirigée par D.). Il faut croire que je n’ai rien retenu de cette jolie leçon - formulée sur l'oreiller à la jeune femme que j'étais alors - vu ce que je fais de mes nuits ces derniers temps : « manger du dossier » jusqu’à pas d’heure…
Bref, par manque de temps je reporte à plus tard les comptes rendus de soirée que j’ai en retard (soirée « LTB » mémorable, largement de quoi faire mentir tous ceux qui se lamentent sur l’idée (fausse) que les libertins parisiens ne sauraient plus organiser de grandes fêtes secrètes, oniriques, élitistes et ultra sensuelles : je la décrirais
asap– j’en ai des souvenirs incroyables plein la tête).
En attendant, je pensais remplir mon blog sans trop me fatiguer ;-)
Raconter par exemple ce que j’ai lu depuis quelques semaines.
Autant de livres (des très bons et des mauvais) qui me font m’interroger : a-t-on vraiment tous des vies de merde comme ça ? Le couple n’est-il toujours qu’une vaste comédie répugnante, hypocrite et bourgeoise ? Est-ce si compliqué d’avoir un amant/une maîtresse, de vivre une parenthèse enchantée et de n’en garder que le bonheur, sans amertume ? Où sont les femmes libres, libérées, heureuses, légères, qui profitent des hommes et de l’amour sans calcul d’une part, sans s'infliger d’atroces tourments psychologiques d’autre part ?
Bref, voici tous les archétypes de femmes (et leur rapport au sexe) croisés dans mes dernières lectures (par ordre décroissant de l'intérêt que je prête au livre - et avec un lien sur l'image pour + d'infos) :
1/ l’idéaliste tellement bien baisée par son amant qu’elle ne veut surtout pas que ça recommence ( ???)Citation clé :
« cette journée du 9 mars est un cercle enchanté, nous resterons tous deux à l’intérieur, intacts, inaltérables, idéalisés par le fait même qu’on ne se sera vus qu’une seule fois » mais aussi «
…retrouver son amant dans une chambre, hors du monde, sans que personne n’en sache rien, c’est tellement poétique »
L’amour et les forêts, Eric Reinhardt, Gallimard (le livre est bien ? absolument génial - bouleversant)
2/ Madame Tout le monde : un mari, un seul amant dans sa vie, et « un effroyable sentiment de frustration » à l’heure de mourirCitation clé : «
ces coïts [conjugaux] te donnèrent bientôt le sentiment ; après avoir préparé le repas, débarrassé la table, rangé la cuisine et couché les enfants ; vu que tu n’y trouvais pas de libération, ni n’en recevais de merci ; le sentiment de faire un deuxième service. » mais aussi
« Sa jouissance arrêtait ton plaisir. Tu te collais ensuite contre lui, très chatte, mais il te disait d’un air content : « Je suis vidé. » Si tu cherchais à le faire recommencer, il répondait qu’il était épuisé ce soir, mais que la prochaine fois… Tu n’étais pas dupe. »
La condition pavillonnaire, Sophie Divry. Noir sur Blanc(le livre est bien ? captivant, génial, hypnothique…)
3/ la fausse coincée qui se saoule en secret de sexe glauque, dans les interstices de sa vie d’épouse et mère parfaiteIci, une héroïne qui pense au sexe conjugal
« comme à un sacrifice auquel il faut consentir », mais qui se fait aussi fister dans une ruelle sur un capot de poubelle par un inconnu, ou se laisse sodomiser sans capote par un collègue ivre. Citation clé :
« Elle n’a jamais retrouvé, ni dans les bras des hommes, ni dans les promenades qu’elle a faites des années plus tard sur ce même boulevard [à Pigalle], ce sentiment magique de toucher du doigt le vil et l’obscène, la perversion bourgeoise et la misère humaine.»Dans le Jardin de l’ogre, Leïla Silmani, Gallimard (le livre est bien ? vraiment pas mal, même si la fin m’a glacé le sang)
4/ la rangée des voitures, très heureuse de n’être plus baisée qu’une à deux fois par mois Citation clé :
« ça m’arrange bien d’en avoir fini avec la séduction. » mais aussi
« L’homme que j’aime me dit toujours Allons dans la clairière de l’être pour dire Allons au lit. » Mon âge, Fabienne Jacob, Gallimard(le livre est bien ? bof, très ennuyeux…)
5/ le no-sex land de l’ex-maîtresse chronique convertie aux cuisines IkéaC’est une autobiographie. L’auteur raconte son passage du statut d’ex-maîtresse malheureuse chronique, n’attendant de ses amants que leur rupture conjugale qui ne venait jamais, au statut d’épouse, et sa nouvelle vie faite de samedis après midi au rayon cuisines d’Ikéa.Citation clé :
« Avant de rencontrer Jacques, j’ai souvent tenu le rôle de la maîtresse. (…) Les hommes mariés – si certaines ont encore des illusions, elles feraient mieux de laisser tomber avant qu’il ne soit trop tard – ne quittent jamais leurs femmes. (…) Ils sont tellement égoïstes »Tout ce que je sais de l’amour, Michela Marzano, Stock.(le livre est bien ? non. On croirait un mag féminin dégoulinant de phrases bien-pensantes sur l’amour. Très ennuyeux.)
6/ la grosse salope manipulatrice qui pratique la « baise utile »Pour finir, l’héroïne qui veut se faire faire un gosse parce qu’elle a 30 ans et qu’il est l’heure de «
se reproduire » - je cite. Mais pas de bol, son petit mec vient de se faire virer : quelle est la pire plaie : ne pas avoir de gosse, contrairement aux copines, ou en faire un avec un chômeur ?Citation clé :
« Et je t’emmerde. Toi et tes aspirations de pouffe de trente ans qui pense qu’à son utérus. Je vous emmerde. »Il bouge encore, Jennifer Murzeau, Robert Laffont(le livre est bien ? je l’ai trouvé hyper caricatural au point d’en être vraiment pénible – même si bien écrit. Je ne l'ai pas fini)