Il y a quelques temps encore, les initiales «A&F» s’affichaient fièrement, en grosses lettres, sur le torse de tout gay américain qui se respecte. Mais Abercrombie & Fitch semble avoir entamé une descente aux enfers, victime des obsessions esthétiques de sa direction et d’une série de contre-coups de pub. Le label (qui pèse pas moins de 3 milliards de dollars) voit la valeur de ses actions plonger en Bourse, après des mois de baisse des ventes. Plusieurs magasins ont mis la clé sous la porte, dont l’unique et éphémère enseigne de Suisse, à Zurich.
Rondes et pauvres s’abstenir
Pour le quotidien français «Les Echos», la marque paie une série de scandales allant de la suppression des assortiments XL et XXL dans les collections femmes (messages aux rondes: vous n’êtes pas les bienvenues dans les magasins) au licenciement de collaborateurs ne correspondant pas aux canons esthétiques de la marque – récemment une employée voilée. En outre, les publicités à grands renforts de minets impeccablement musclés (blancs de préférence) semblent avoir lassé une partie de la clientèle. D’autant que le patron, le fantasque Mike Jeffries, a multiplié les déclarations fracassantes aux relents de body fascism. «Dans chaque école il y a les gamins cool et populaires, et ceux qui ne le sont pas vraiment. Nous, on vise les gamins cool», avait déjà affirmé le businessman en 2006. Depuis lors, le «bad buzz» n’a fait que s’amplifier. Jeffries avait ensuite balancé qu’il fallait «plutôt brûler» ses fringues «que les donner aux pauvres».
En mai dernier, un étudiant a pris le contre-pied de cette déclaration, et a filmé une distribution de vêtements griffés «A&F» à des SDF. Bien que sévèrement critiquée comme une instrumentalisation des populations marginalisée, l’opération «Fitch the Homeless» a fait le tour du web.