Après avoir refusé de communiquer autour de la proposition du ministère de l’Intérieur de repousser la date de la Marche des fiertés, puis de commenter la proposition de parcours révélée hier, l’Inter-LGBT a dévoilé ce matin le parcours que devront finalement suivre les chars des associations et les participant.e.s à la Marche des fiertés samedi 2 juillet. Clémence Zamora-Cruz, co-porte-parole de l’interassociative qui organise chaque année la marche, a commenté et justifié cette décision qui est loin de faire l’unanimité, notamment parmi les associations qui marcheront le jour J.
LE POIDS DES «CONTRAINTES SÉCURITAIRES»
«Nous sommes dans une situation compliquée», explique à Yagg Clémence Zamora-Cruz. «Beaucoup de questions se sont posées, d’abord par rapport à l’état d’urgence, ensuite et plus récemment, en raison de l’attaque d’Orlando. La Préfecture de police s’est demandée si nous étions une cible potentielle. Nous le sommes… mais pas plus qu’avant. Suite au parcours publié hier dans la presse (de place du Châtelet à place de la Bastille, ndlr), nous avons pu continuer à travailler pour obtenir le parcours annoncé aujourd’hui, dont nous sommes partiellement satisfait.e.s», reconnaît-elle.
«Nous en prenons acte, même si nous sommes révolté.e.s et avons l’impression que l’Euro 2016 entre en ligne de compte dans cette décision.»
«Mais nous allons marcher quoi qu’il arrive pour porter nos revendications. Il aurait été inconcevable de ne pas marcher cette année, alors que nous portons comme mot d’ordre les revendications des personnes trans.» La co-porte-parole espère d’ailleurs que la polémique née hier à l’annonce d’un parcours largement raccourci ne les invisibilisera pas. «De l’extérieur, on peut avoir l’impression qu’il suffit à l’Inter-LGBT de dessiner un parcours sur Google Maps, mais il faut prendre en compte les permis, les autorisations, tous les paramètres techniques et sécuritaires. Car nous avions des contraintes sécuritaires très fortes.»
DERRIÈRE LE NOUVEAU PARCOURS, UNE MANŒUVRE POLITIQUE?
Clémence Zamora-Cruz concède avoir l’impression de ne pas être entendue ni écoutée par le pouvoir politique en place. «Les forces de l’ordre sont mobilisées sans problèmes dans les fans zones. Le football passerait-il avant les droits humains? s’agace-t-elle. Donc oui, nous sommes très remonté.e.s, mais depuis longtemps, ce n’est pas nouveau. La modification du parcours ne fait qu’en rajouter.»
Des associations de l’Inter-LGBT ont laissé entendre que ce nouveau coup dur pour la Marche des fiertés fait partie d’une tactique politique du gouvernement pour affaiblir la voix des associations LGBT, alors que l’amendement sur le changement d’état civil est actuellement discuté dans le cadre du projet de loi Justice du 21e siècle et est très critiqué par ces mêmes associations, et que le bilan du quinquennat de François Hollande sur les questions LGBT est particulièrement décrié. Ces accusations se justifient-elles pour Clémence Zamora-Cruz? «On peut se poser la question», estime la militante.
«Est-ce que le gouvernement est en train de tenter de réduire au silence la mobilisation autour des droits des trans alors qu’il y a une discussion sur le changement d’état civil au Parlement? On a le droit de le penser, mais l’aspect sécuritaire est réel dans l’organisation de la Marche des fiertés cette année, donc ça ne peut pas être aussi tranché.»
«De réelles difficultés sont apparues quant au parcours. Cherche-t-on à nous faire taire? On peut le voir comme ça, mais ça ne peut pas être ça à 100%.»