Oui le sexe est une affaire de rythme, de tempo, d’accélérations et de moments de repos. Pas l’acte sexuel en lui-même (même si aussi bien sûr), mais surtout la découverte, l’appréhension, l’apprentissage, ce chemin, propre à chacun, qui nous mène vers une sexualité épanouie. Car, contrairement à l’idée que l’on s’en fait souvent, alors que nos hormones se bousculent et frémissent pour un rien ou en lisant des magazines féminins qui surfent sur des clichés surannés, le sexe n’est pas toujours aussi facile à dire qu’à faire (et ce n’est déjà pas simple à dire …).
Les femmes ont une chance inouïe – qui fait également leur frustration, leur difficulté, leur honte parfois, leur culpabilité souvent – c’est que leur sexe est caché. Les hommes ne peuvent pas ignorer le leur : il est là, pendant ou dressé, visible, accessible et réactif. Du coup, ils croient longtemps ne pas avoir besoin de penser leur sexualité, d’y réfléchir, de l’inventer, d’aller vers elle. Les femmes, quant à elles, peuvent parfaitement oublier leur sexe. Et elles sont nombreuses à le faire, laissant de côté leurs désirs, allant parfois jusqu’à ignorer même qu’elles en ont, remplissant un devoir conjugal agréable, mais se consacrant surtout à la construction de leur famille, de leur vie professionnelle, de leur image sociale. Je ne parle pas de femmes qui auraient subi des traumatismes importants et qui fuiraient leur sexualité par réflexe de protection. Ni de femmes enfermées dans des éducations religio-bourgeoises. Je parle de femmes qui simplement oublient de s’investir d’elle-même, de prendre possession de leur être dans son entièreté. De femmes qui pensent que ce désir qu’elles ont ressenti au début, lorsqu’elles sont tombées amoureuses et puis ce plaisir agréable, parfois étonnant que leur a procuré quelques nuits d’amour folles, jusqu’à ce peu d’envie et cette absence de fantasme qui est leur quotidien, est tout à fait normal. Que c’est ça une sexualité adulte et épanouie.
Nécessité est mère de créativité
Or pour se connaître, les femmes doivent se découvrir. Pour se comprendre, elles doivent s’explorer. Pour inventer leur sexualité, les femmes doivent aller à la rencontre de leur sexe. Il est en elles et, si ce n’est une humidification bienvenue pour permettre le rapport sexuel, il ne réclame rien tant qu’on ne le sollicite pas. C’est un handicap comme au golf : ça complique les choses, mais c’est parce qu’on est meilleur, qu’on est capable de réaliser des exploits ! Car dès que les femmes prennent conscience de cette réalité, elles deviennent maîtresses de leur corps et de leur sexualité alors que les hommes peuvent les subir encore longtemps. Mais quelle route sinueuse, parfois longue et potentiellement semée d’embûches, je vous l’accorde ! Sans parler des nombreux rebondissements…
S’il y a une chose que j’ai comprise, c’est que parler de sexe et de sexualité, revient à parler de féminité. Car on n’est pas femme seulement parce qu’on est de sexe féminin ou parce qu’on est mère ou parce qu’on porte des bijoux. On devient vraiment femme quand on arrête de jouer à la dadame ou à la petite salope, à la working girl ou à la super maman. Il est nécessaire de nous affranchir de nos images d’Epinal, carcans sociaux qui, tels des tuteurs, nous aident à grandir, mais nous empêchent de nous exprimer pleinement à l’âge adulte, pour devenir la femme que nous sommes : un mélange complexe, unique et explosif. Dans son interview pour le CCF, Erika Lust raconte comment elle s’est intéressée à la pornographie :
« Lorsque j’étudiais le féminisme à l’Université j’ai lu le livre “Le Noyau dur” par Linda Williams. Elle y expliquait comment le porno et l’art érotique pourraient rendre les femmes plus puissantes au niveau personnel et dans un sens plus grand. »
Il me semble évident que la pleine possession de son pouvoir érotique, de sa capacité sexuelle, de ses désirs rend déjà les femmes plus fortes et plus puissantes. Devenir femme comprend la dimension sexuelle, non pas comme un paramètre lambda au même titre qu’un autre, mais comme un élément central. Car la sexualité est le mode d’expression de notre corps (muscles, hormones, terminaisons nerveuses,…), mais aussi de notre intelligence, de nos fantasmes, de nos projections, de nos frustrations, de notre amour, etc. C’est peut-être le mode d’expression le plus complet que nous connaissions. Alors, même si la route semble longue et le fleuve pas toujours tranquille, exprimons-nous, mesdames !
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