Pilosité et odeurs corporelles vivent une période difficile de répression frénétique.
Tout est bon pour gommer nos odeurs, véritable part d’animalité que nous dévoilons chaque jour malgré nous à nos congénères avec plus ou moins de joie. Ainsi les douches interminables, les déodorants toxiques, les mauvais parfums donnent l’illusion à leurs utilisateurs de sentir bon.
Pourtant, il suffit d’un effort physique, d’un endroit très chaud en club ou sur une plage des Antilles, de vacances en trekking sans moyen de se laver pendant plusieurs jours ou même d’une simple journée de travail pour faire ressurgir nos satanées odeurs.
Oui, mais n’y aurait-il pas un lien entre le plaisir que nous avons à pratiquer ces activités et la liberté que nous donnons, enfin, dans ces moments, à la circulation de nos effluves corporelles?
Pourquoi est-ce comme par hasard dans ces moments que nous nous sentons le plus désirant(e) et le plus désirable, prêt(e) à tout pour rencontrer un partenaire?
DES ODEURS SPECIFIQUES POUR CHAQUE INDIVIDU ET CHAQUE ESPECE
Il faut tout d’abord rappeler que les odeurs sont spécifiques à chaque espèce du monde animal et à chaque individu. Elles évoluent à tout âge de la vie et sont liées à de nombreuses composantes : à la génétique, aux bactéries de la peau appelées microflore, à notre état de santé, à nos hormones (notamment sexuelles), à notre environnement, à notre alimentation, à nos émotions (stress ou bien-être), et enfin à notre hygiène corporelle.
En ce qui concerne la sexualité, c’est au moment de l’adolescence que les glandes sébacées et apocrines situées au niveau des organes sexuels et des aisselles s’activent et modifient l’odeur corporelle préparant ainsi le jeune homme ou la jeune femme à la sexualité et à la reproduction. La pilosité humaine se développerait également dans ces zones et participerait à la diffusion des fameuses phéromones.
ODEURS, DESIR SEXUEL ET ETAT AMOUREUX
Je suis intimement persuadée et ne pense pas être la seule à le penser que l’odeur d’une personne est un des facteur le plus important dans le fait que nous en tombions amoureux(se).
Respirer l’être aimé est l’un des plaisirs le plus agréable que nous puissions connaître au cours de la relation et, dans l’intimité, il est souvent courant de dire à la personne que nous aimons qu’elle sent bon. L’odeur des cheveux, du sexe et des aisselles participe à notre désir et sont de puissants stimulateurs sexuels.
De même lors d’une séparation, le manque de l’odeur de l’autre accentue la cruauté de cette sensation extrêmement douloureuse.
Cependant certaines questions restent pour moi en suspens. Si, comme les journaux l’indiquent souvent, le désir sexuel est motivé par des odeurs liées aux hormones de la reproduction, comment se fait-il que nous puissions être attirés par des partenaires du même sexe? Le désir de perpétuation de l’espèce est-il réellement le seul moteur de l’attirance entre deux personnes? J’ai parfois l’impression que des explications un peu trop simplistes sont données pour rassurer sur ce qui dérange, cette part d’animalité que nous ne pouvons contrôler.
D’UN EXTREME A L’AUTRE
Le monde des odeurs effraie. Le livre « Le parfum » de Patrick Süskind est un exemple de la peur qu’engendre l’exaltation de ce sens. Car Grenouille, le personnage principal du livre à qui il a été attribué le don d’être « nez », c’est-à-dire de percevoir très finement les odeurs, est un antihéros, né dans la pauvreté absolue et assassin de surcroît. Il est malmené tout au long du livre car son don le pousse à pénétrer directement l’intimité des gens, leur vérité.
Dans ce sens, cacher ses odeurs correspondrait à cacher ce que nous sommes vraiment dans une société où le paraître joue une grande importance où l’art de la conversation et de l’apparence sont au cœur de l’intégration sociale.
Cette explication remise dans le contexte actuel peut ainsi nous révéler à quel point nous évoluons dans une société extrême où nos instincts naturels et notre part d’animalité doivent sans arrêt être refoulés.
A société extrême, réactions extrêmes. J’évoquerai pour terminer les pratiques fétichistes qui visent à respirer des odeurs sexuelles sur des sous-vêtements ou simplement des tee-shirts portés pendant plusieurs heures qui montrent une recherche de compensation individuelle à une forme non avouée d’oppression sociale.