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Maria, 33 ans, pantalon rouge pétant, mèches blondes dans ses cheveux volumineux, déboule souriante et enjouée. «Salut, je suis lesbienne!», nous lance-telle. Tant d’apparente légèreté surprend dans un pays qui, en 2013, votait une loi condamnant à mort des homosexuels. L’Ouganda entrait ainsi dans le cercle – heureusement – très fermé des 11 pays comme l’Arabie Saoudite, le Pakistan ou le Yémen qui ont opté pour la peine de mort.
Mais aujourd’hui est une journée particulière pour cette ingénieure en freelance, qui a fondé la Youth Rock Foundation, une ONG qui œuvre à défendre les droits des LGBT. La journée internationale de lutte contre le sida, le 1er décembre, a été le prétexte pour organiser un événement gay friendly à Mulago, le plus grand hôpital de la capitale Kampala, qui s’étale sur plusieurs hectares. Dans la section des maladies infectieuses, une tente a été montée, des repas chauds seront distribués au cours de cette journée, qui s’articule autour de la prévention mais aussi de moments moins informels de rencontres, et même, à la fin, de danses traditionnelles ougandaises. Un espace de relative liberté qui remonte le moral des dizaines de participants, très majoritairement homosexuels: ici, dans l’enceinte de l’hôpital, ils se sentent acceptés, sans être jugés.
Maria s’est engagée assez tôt comme bénévole dans la lutte pour le droits des lesbiennes, car «les gens ont les mêmes clichés sur les hommes ou sur les femmes. Et sur les transgenres, les gens se demandent vraiment quelle est leur identité de genre? Homme, femme? Nous, on essaie de faire accepter chacun tel qu’il est», explique-t-elle en accueillant les nouveaux arrivants et en gérant la logistique de la journée. En Ouganda, surtout depuis 2004, quelques associations dans la même veine que la Rock Youth Foundation ont vu le jour, mais aucune, officiellement, n’est une organisation LGBT. Il s’agit ici de promouvoir les traitements anti-sida, là de faire de la prévention pour une santé sexuelle sécurisée ou de favoriser une formation professionnelle: le gouvernement, dans sa chasse aux gays, ne tolérerait pas d’ONG LGBT. Spécificité ougandaise: là où souvent les ONG gays, lesbiennes ou trans ne travaillent pas ensemble, dans ce pays, elles ont décidé de s’unir afin d’éviter le phénomène contre-productif de «compétition».
Un combat au quotidien
Les problématiques touchant les minorités sexuelles sont nombreuses: rejet des familles, exclusion sociale et médicale en cas de IST, ségrégation professionnelle, lynchage, agressions… voire meurtres. Maria, en couple depuis 3 ans avec sa copine, est la première consciente de tout cela. Elle a vécu le pire. «Avec ma copine, nous voulions nous fiancer, symboliquement bien sûr, puisque c’est interdit. Quand l’oncle de ma copine a appris la nouvelle, il l’a séquestrée pendant 3 jours, sans nourriture et sans eau. Elle était attachée. Il m’appelait pour me menacer de mort. Une fois, ma sœur a décroché et lui a dit: attention, c’est toi qui séquestres quelqu’un, là, nous aussi on peut te dénoncer à la police!», se souvient-elle. Maria a dû aller secourir sa bien-aimée, en pleine nuit, dissimulée sous un hijab et ensemble, elles ont réussi à fuir. Qui sait ce qui serait arrivé à sa copine? Son oncle prévoyait de la faire passer la nuit, dans une chambre, nue, avec deux hommes… Car le «viol correctif» existe bel et bien en Ouganda. Aujourd’hui, Maria en parle avec distance, mais sa relation amoureuse reste un combat au quotidien.
Un peu comme pour Princess Rihanna. Invitée de la journée, la jeune Ougandaise, née homme, a commencé à se faire appeler ainsi il y a 6 ans. Devenue miss Pride 2009 en Ouganda, grand motif de fierté à ses yeux, elle a souhaité devenir un visage de la communauté LGBT. «En tant que princesse, je dois donner des conseils, et éduquer les gens partout en Ouganda», lâche-t-elle, entre deux danses. Aujourd’hui, fière de ce qu’elle est, elle n’envisage pas d’opération du sexe. Sans aucune preuve de son homosexualité, Princess Rihanna a été emprisonnée à plusieurs reprises, dont une fois, plus de 7 mois. «On a été dénoncés, battus, envoyés en prison». Elle vit actuellement avec son petit ami, ce qui n’est pas toujours facile. «On vit avec le risque d’être agressé, bien sûr. On doit rester discrets», explique-t-elle.
Durcissement de l’homophobie
Si l’homosexualité est punissable depuis l’époque coloniale britannique, par l’article 145 adopté en 1950 pour dénoncer «toute relation charnelle contre nature», la situation s’est comme tendue depuis environ trente ans. L’arrivée des églises évangéliques américaines devient un phénomène inquiétant. Dans les sermons des pasteurs, les discours homophobes ne sont pas rares. Le pasteur Scott Lively, fondateur du groupe Abiding Truth Ministeries, a même été jugé aux Etats-Unis pour ses diatribes diffamatoires et haineuses à l’encontre des homosexuels, associant sans scrupules homosexualité et pédophilie ou épidémies, ou avançant que les gays avaient un plan pour détruire le modèle ougandais traditionnel. En 2011, le militant David Kato, père du mouvement LGBT en Ouganda, est assassiné. Ses proches sont persuadés que sa mort est due à son engagement politique, les menaces et harcèlements étant devenus plus fréquents à l’approche du jour fatidique.
2013 sera l’année du paroxysme: non seulement des journaux comme le Red Pepper, tabloïd de la pire espèce, publie des unes putassières, relayant une idéologie du complot gay partout, mais, plus grave, il ose aussi publier les portraits d’Ougandais supposément gays. Dans un contexte déjà tendu, c’est un véritable appel à la haine et aux agressions qui est lancé. En février 2014, 200 photos sont publiées. L’indignation est internationale.
Mais ce n’est pas tout. Du côté politique, la même année, le président Yoweri Museveni promulgue une loi anti-gay au caractère répressif jamais atteint encore. Il a même été glissé que c’est l’un des proches du pasteur intégriste américain qui aurait proposé la loi Kill the Gays Bill… Avant la peine de mort, l’homosexualité était condamnée jusqu’à 7 ans de prison. Mais la nouvelle loi, en plus de condamner à mort, pousse également à dénoncer ses voisins soupçonnés d’être homosexuels. «Il y a eu des tensions horribles dans les voisinages», se souvient Ambrose, un militant homosexuel de l’association Kuchu Times, plate-forme web de la communauté. «A cette période, beaucoup de gays ont demandé l’asile politique à l’étranger ou vivaient ici avec la peur au ventre», se rappelle encore Princess Rihanna.
«La plupart des attaques homophobes sont influencées par certains médias.»
Sur les motifs du président, les analyses des différents activistes sont concordantes: le président a opté pour cette loi en vue des prochaines présidentielles. En février 2016, en effet, aura lieu le scrutin qui verra le président Museveni, âgé de 84 ans et au pouvoir depuis 30 ans sans interruption, remettre son mandat en jeu… En route pour un énième mandat? Pour Ruth, militante de Kuchu Times, embraser le sujet de l’homosexualité est une «façon de contrôler des communautés désespérées: ils passent tout leur temps à l’église. On leur donne quelque chose pour les détourner de leurs vrais problèmes.» La loi de condamnation à mort a été retoquée par la Cour Constitutionnelle, mais seulement sur un motif juridique. Pas sur le contenu. D’autres députés reviennent régulièrement à la charge pour reproposer de nouveaux projets de lois. «Cette fois, on connaît mieux nos droits et on ne se laissera pas faire», lâche Princess Rihanna, déterminée.
La résistance s’organise
Mais si la société accepte encore mal les homosexuels, lesbiennes ou transsexuels, certaines voix dissidentes se font entendre. Si Ruth déclare «être en froid avec ceux qui ne m’acceptent pas telle que je suis», Maria peut compter sur le soutien indéfectible de sa sœur, Barbara. «Il ne m’est jamais venu à l’esprit de ne pas soutenir ma sœur», lâche-t-elle dans un souffle. Même son de cloche du côté de Steven, un autre membre fondateur de la Youth Rock Foundation, dont le frère a découvert son homosexualité sans jugement et en lui assurant son soutien éternel.
Du point de vue officiel, si certains pasteurs s’enflamment avec des discours homophobes, comme Martin Ssempa, grand pourfendeur de l’homosexualité, qui a demandé à faire appel de la décision de la Cour d’appel, d’autres ont adopté le chemin de la paix. Le pasteur Senyonjo, 84 ans, vieil homme à l’allure bonhomme et tout en rondeur, apparaît dans sa petite maison coquette de la banlieue de Kampala. En 2001, par l’intermédiaire d’un travailleur social, il rencontre 4 jeunes hommes homosexuels, rejetés par leur famille, qui «pensaient que Dieu ne les aimait pas et qu’ils étaient une abomination». Devant tant de désespoir, le pasteur prend leur défense, se fâche avec les membres de son église: «Pour moi, il était impossible de les condamner et j’ai plaidé pour qu’ils soient acceptés», raconte-t-il. Pour ce pasteur, il est clair que lors des études de théologie, les futurs pasteurs devraient apprendre à parler de sexualité, de mariage. «Quand ces homosexuels se marient, ils ne sont pas heureux. Mais quand ils s’acceptent, ils sont heureux et créatifs», analyse celui qui aime à parler de l’«agapè» grecque, cette forme d’amour inconditionnel qu’avait développée Platon. «Exclure des personnes, c’est ça, l’amour?» demande-t-il, rhétoriquement.
Ancré dans la société, il estime que les Ougandais se tendent sur le sujet de l’homosexualité, car c’est envisager que la sexualité n’est pas seulement destinée à la procréation. Rares sont les pasteurs à parler de plaisir sexuel, de créativité dans l’acte sexuel, et pourtant c’est ce que fait le pasteur Senyonjo, ouvert et plein de vitalité. Son engagement lui a créé bien des ennemis, au sein de l’Eglise. A l’enterrement de l’activiste David Kato, c’est lui qui rend l’office… Aujourd’hui, il n’a plus d’Eglise officielle et doit garder le silence quand il va prier dans celle d’un confrère. Dans un autre secteur, le magazine Bombastic, fait lui aussi office de précurseur audacieux du changement. En 2014, Kasha Jacqueline Nabagesera, 35 ans, une militante engagée dans la cause LGBT, lance le premier magazine qui s’adresse à la communauté, mais surtout à tous ceux qui ne connaissent des gays que ce qu’en disent les médias ougandais, à leur défaveur. Sa volonté? «Donner une voix aux sans voix».
Ruth et Ambrose dans les locaux de Kuchu Times. Photo: Eugénie Baccot
Au fil des pages, de vrais témoignages, où des homos, lesbiennes et trans peuvent s’exprimer, avec leurs mots, simples et touchants. Ruth, 33 ans, l’une des membres de l’association, a débuté son engagement après avoir découvert une vidéo où Kasha s’exprimait. Transcendée, elle a commencé à travailler à ses côtés dans son association. A ses yeux, il est clair que «la plupart des attaques homophobes sont influencées par certains médias». Le premier numéro, datant de décembre 2014, a été publié à 15’000 exemplaires, en autofinancement. Un beau défi, surtout face à un ministre de l’Ethique qui a menacé d’arrêter Kasha pour «promotion de l’homosexualité», rappelle Ruth, et qui était persuadé qu’en «distribuant les magazines, on faisait du recrutement d’homosexuels!» Objectif pour la seconde édition, actuellement en préparation: 50’000 numéros, qui seront financés grâce à une campagne active de crowdfunding, venant du monde entier.
La couverture pourrait bien représenter une femme noire qui tient la main d’un transgenre… Une provocation que le Bombastic peut se permettre, plus que jamais. «Avec la perspective des présidentielles, aucun politicien en Ouganda n’a envie d’attirer des images négatives sur le pays», estime Ruth. Les candidats n’évoquent même pas le sujet. Comme si l’ignorer rasait les homosexuels de la carte: raté.
«Tout récemment, j’ai reçu des menaces de mort, qui disaient qu’on allait brûler l’association et nous tuer. C’était une liste ciblée de noms d’homosexuels par des gens qui étaient bien renseignés.» Dans le bureau de son association Facsdis, situé à Port-au-Prince, Marjory Lafontant lâche une bombe, mais avec un ton étonnamment distancié. Celui d’une militante bien trop habituée à subir ce genre de maux. Lesbienne, pire, lesbienne qui s’assume et qui prend ouvertement la parole dans les médias haïtiens, Marjory est devenue une cible pour les homophobes.
La quarantaine, Marjory, aux longs cheveux ramassés en dreadlocks, connaît bien la stigmatisation liée aux minorités sexuelles. «Quand j’ai fait mon coming out, j’ai perdu presque tous mes amis. Je n’en ai plus aujourd’hui», explique-t-elle tristement. Elle subit des insultes quotidiennement dans la rue. Son fils – qu’elle a eu biologiquement avec un homme dont elle a perdu trace – a été battu pour être l’enfant d’une lesbienne. Depuis, il étudie aux Etats-Unis. Cela lui brise le cœur, mais elle préfère de loin le savoir en sécurité. Voilà le quotidien pour bon nombre d’homosexuels, dans ce petit pays des Caraïbes, traversé depuis plus de deux cents ans par une histoire mouvementée, et parfois tragique.
12 janvier 2010
S’il existe un événement qui fait consensus parmi la communauté LGBT, c’est le tremblement de terre de janvier 2010: tout a empiré après. Ce jour-là, non seulement 250’000 Haïtiens ont péri et le pays a été laissé exsangue et traumatisé, mais les masques sont également tombés. «Dans les camps de déplacés, on a vu qui dormait avec sa copine dans les tentes. Ça a donné des problèmes terribles», se souvient Marjory. Les agressions se sont multipliées. Les allégations voulant que les «homosexuels avaient déclenché la colère de Dieu et que le séisme était de leur faute» ont plongé les homosexuels dans des conditions encore plus précaires. «Alors que la situation était à l’urgence, certains ont refusé de donner à manger aux lesbiennes», détaille-t-elle. Marjory évoque même les «viols correctifs» dont ont été victimes certaines d’entre elles. «Les hommes voulaient leur rappeler qu’elles ont besoin d’un sexe masculin», analyse la militante. Horrifiée, elle décide de créer une association: ce sera Facsdis, qui contribue à l’égalité des droits et sensibilise à la cause homosexuelle, sur le plan social et médical. Depuis 5 ans, elle a fait des émules. De quelques membres fondateurs au départ, les voilà plus de 800 aujourd’hui.
Même son de cloche du côté de l’association Kouraj (courage en créole). Car du courage, il en faut pour être ouvertement homosexuel dans la société haïtienne. Fondée par Charlot Jeudy, elle est la première association de défense des droits LGBT dans le pays. L’expression, d’ailleurs, ne convient pas à Charlot. Il lui préfère de loin «la communauté M». Ce M, c’est la lettre qui désigne les Masisi pour les gays, Madivin pour les lesbiennes, Makomer pour les trans et Mix pour les bi. Il estime que ces termes, proprement haïtiens, sont plus adaptés pour s’adresser à un public national.
Tout comme Marjory, Charlot Jeudy estime que le tremblement de terre a été un catalyseur de l’homophobie. «Avec l’arrivée massive des Occidentaux, on a eu les évangélistes américains qui ont dit que l’homosexualité était un péché, que nous étions le diable.» Leur perception dans les yeux de la population empire. Farouchement attaché à son pays, c’est ici, directement sur le terrain, que Charlot a décidé d’agir. «Je ne suis pas en transit», assène-t-il, faisant référence à cette diaspora haïtienne, nombreuse à être partie aux Etats-Unis, au Canada ou en Europe pour des questions politiques ou économiques. «Avec une première association Zamis-Zamis, on organisait une fête entre nous chaque année, et c’était le seul moment où l’on se sentait soi-même», explique Charlot. Une ambiance festive pour sortir des difficultés du quotidien. Avec les tensions dues aux conséquences du séisme, il relance donc l’association, mais cette fois, pour lutter contre toutes les formes de discriminations. «Je suis un homosexuel revendiqué depuis toujours, explique le jeune homme, au visage jovial.
Issu de Martissant, un quartier chaud de Port-au-Prince, Charlot est un personnage touchant qui s’emporte volontiers quand il évoque la cause et ses injustices. «Dans ce quartier où l’on manquait d’eau, où les gangs et la violence armée était quotidienne, je me suis toujours engagé dans le social pour essayer d’assainir le quartier ou obtenir de l’électricité», raconte-t-il. Sa famille n’a jamais posé de questions sur son orientation sexuelle, mais il se souvient d’une anecdote en terminale. «Je voulais devenir délégué de classe, j’ai postulé, je correspondais à tous les critères. Mais les autres élèves m’ont laissé entendre que j’étais trop efféminé pour assumer cette tâche et les représenter.» D’autres souvenirs, comme ce petit garçon qui refuse de s’asseoir à côté de lui à l’école ou les remarques blessantes de son meilleur ami quand il a appris son homosexualité, viennent émailler la bonne humeur du jeune homme. Marjory se souvient elle aussi de son enfance, où naturellement, et sans se l’expliquer encore, elle se sentait plus à l’aise en jeans et basket, sortant ainsi des cadres stricts du genre en Haïti.
Le silence des autorités
Le siège de l’association Facsdis est très discret. Volontairement. Une équipe de sécurité privée campe sur les lieux afin d’assurer la protection des membres. Dans ces murs, le vendredi, les femmes homosexuelles, bisexuelles ou transsexuelles peuvent venir bénéficier d’une écoute, de conseils, et surtout de l’expérience de l’association. «Etre une femme lesbienne dans la société haïtienne est très difficile. Souvent, elles sont obligées d’avoir un homme dans leur vie. Nous sommes un pays pauvre, et il faut assurer sa dînette», analyse-t-elle. D’où la nécessité de gagner en autonomie, grâce à des formations professionnelles, qui ont permis à plusieurs membres de devenir esthéticiennes, mécaniciennes ou de travailler dans la bureautique. «Elles peuvent ainsi subvenir à leurs besoins», se réjouit Marjory. Les membres de Kouraj reçoivent eux aussi très vite des menaces. Leur premier local est attaqué le 21 novembre 2013: trois hommes armés ont saccagé le bureau et bastonné ceux qui étaient présents. Ils sont de nouveaux attaqués en 2014. Désormais, le nouveau local est discret, et son adresse, divulguée avec parcimonie. «Les menaces? C’est tous les jours, sur Twitter, Facebook», ne s’étonne même plus Charlot.
Johnny, 26 ans, un ancien membre de Kouraj qui a aussi créé sa structure, l’Association Jeune Combattant contre Discrimination et Stigmatisation (AJCCDS) affirme avoir été battu et violé pour être homosexuel. L’attitude des policiers? L’indifférence. «Quand je suis allé porter plainte, les policiers m’ont rétorqué que je n’avais pas droit à la parole», explique-t-il. Johnny, dont l’association défend également les enfants des rues et les travailleurs du sexe, économiste de formation, déplore aussi être victime de stigmatisation dans le monde professionnel. «Depuis que j’ai fait mon coming out, personne n’a voulu m’embaucher». Triste constat d’une société qui fait la sourde oreille. L’attitude de la justice? Marjory se rappelle avec émotion une amie à elle, originaire du Cap Haïtien, au Nord du pays. Cette dernière a été battue, à mort, par son mari, au moment où il a découvert son orientation sexuelle… Quand Marjory s’est présentée partie civile pour demander justice, le juge a déclaré: «Mais vous êtes ce genre de personne qui défendez les homosexuels? Vous êtes une délinquante, une vagabonde, Madame!». Des propos qui ont indigné la militante, mais qui constituent son meilleur moteur pour continuer le combat. Certains la surnomment «la courageuse». A raison.
Mais enfin, pourquoi l’homosexualité déclenche-telle un tel déferlement de haine? «Parce qu’ici, en Haïti, être homosexuel est vu comme une perversion, et de plus, cela va à l’encontre des principes de la famille», analyse Charlot Jeudy. «Mais c’est aussi un société très hypocrite. D’après le rapport EMMUS (Enquête Mortalité, Morbidité, et Utilisation des Services, ndlr), seuls 18% des Haïtiens se marient»! Marjory évoque de son côté le nombre important de doubles-vies qui sont menées, par respect des conventions. Le sujet, dans la société civile comme en politique, reste un tabou. La preuve: lors du premier tour des présidentielles le 25 octobre dernier, aucun des 54 candidats n’a évoqué le sujet. Et Steven Benoit, le seul qui avait évoqué le mariage homosexuel, a grillé toutes ses maigres chances d’accéder au pouvoir en promouvant un projet trop moderne pour les mentalités du pays. Il a d’ailleurs dû nier lui-même être homosexuel et est même revenu sur ses positions. Il n’y a qu’à se rappeler les manifestations lancées au moment de la légalisation du mariage homosexuel en France, en 2013, pays frère et en même temps ennemi par une histoire commune déchirante, pour prendre la mesure des réactions de la population, qui s’était mise à défiler non pas contre le mariage gay, mais «contre l’homosexualité» elle-même.
Loi du silence
Stephenson, 28 ans, est un grand garçon, longiligne et affable. Membre fondateur de Kouraj, il est passé par des phases de découragement très dures. Il a même envisagé se suicider devant l’impasse. «Mais le jour où je pensais le faire, le tremblement de terre s’est produit. J’ai été sain et sauf, et je me suis dit: Dieu à l’œil sur moi, ce n’est pas mon heure.» Cela lui a donné la force d’engager la lutte «pour que d’autres jeunes n’aient pas à connaître ce que j’avais connu».
Le jeune homme, également hougan, c’est-à-dire, prêtre vaudou, reconnaît que les vaudouisants sont plus ouverts que les chrétiens, surtout les évangéliques. «Lors des cérémonies, l’on accepte tout le monde, indépendamment de son orientation sexuelle, de son attitude, de son habillement. On dit aussi que les loas (les esprits vaudous, ndla) sont à l’origine de cette orientation sexuelle», détaille-t-il. Mais sans aucun jugement. Une expérience qui va à l’encontre de celle de Charlot qui se souvient, personnellement, avoir cherché à lutter contre cette pulsion, cette attraction pour les hommes. «J’allais à l’église, je priais pour ne plus ressentir cela.» Puis, après de longues années, il s’est enfin accepté comme il est. Le vaudou permet cela bien plus qu’une quelconque forme de christianisme.
Mais les poches de liberté sont rares en Haïti. Le seul bar gay friendly de Port-au-Prince a changé de propriétaire, et la politique de la maison avec. Pour se rencontrer, il y a bien quelques hôtels, reconnaît Stephenson, où les couples gays peuvent se retrouver, mais ils sont glauques; sinon, «il faut se retrouver le soir venu, dans des ruelles», confirme Johnny. Tout sauf des conditions propices à du safe sexe, que ce soit en termes de santé sexuelle (la prévalence du sida chez les MSM est proche de 19%, contre 2,2% pour la population générale), ou de sécurité tout court. «Les gays n’ont pas de préservatifs, n’osent pas demander autour d’eux de peur du jugement», précise Johnny. Quant aux réseaux sociaux, s’ils ont pu changer la donne des rencontres dans les pays où Internet est la règle, ici en Haïti, «rares sont ceux qui ont accès à Badoo ou Facebook», déplore Stephenson. Même si Marjory se demande bien «où cette lutte va-t-elle mener», aujourd’hui, Johnny entend envoyer ses membres prendre des conseils d’associations LGBT à l’étranger, pour voir ce qui fonctionne dans d’autres pays. Charlot et Marjory sont décidés à se battre jusqu’à leur dernier souffle pour plus de justice. Le fils de Marjory souhaite aujourd’hui embrasser des études de droits pour défendre les minorités sexuelles. «Il me dit: je suis fier de toi, je t’accepte et je t’aime comme tu es», déclare-t-elle avec émotion. Le combat continue, la relève est assurée.
Merveille, 24 ans, ne passe pas inaperçu quand il déambule dans les rues poussiéreuses et bruyantes de Kinshasa. Démarche chaloupée, rouge à lèvres rose fluo et boucles d’oreilles en strass, le jeune homme, qui se rêve en femme depuis tout petit et espère avoir l’opportunité de se faire opérer un jour en Europe, là où c’est possible, assume remarques et quolibets sur son passage. Les insultes, il y est habitué, et son apparence féminine, il la revendique. Fait rare en République Démocratique du Congo, il est même passé à la télévision pour parler ouvertement de sa vie personnelle. Mais pour un Merveille visible, combien de Congolais obligés de cacher leur orientation sexuelle? Car dans le plus grand pays d’Afrique sub-saharienne, les minorités sexuelles ont encore un énorme chemin à parcourir pour une égalité de droits avec les hétérosexuels. L’homophobie, si elle ne prend pas la forme d’attaques physiques aussi violentes qu’en Ouganda – qui ont atteint leur paroxysme avec des meurtres clairement revendiqués comme homophobes – est pourtant rampante dans la société congolaise, et les préjugés, nombreux.
Merveille dans le salon de coiffure où il travaille.
«Nous sommes africains: un pénis va forcément avec un vagin. Pas avec un anus. Notre culture prime sur la conception de la sexualité», rappelle Rich*, 24 ans, beau jeune homme étudiant en médecine, qui ne mâche pas ses mots sur la question de l’homosexualité. Dans son pays, son orientation sexuelle est un combat. «Beaucoup croient qu’il s’agit de sorcellerie, associent l’homosexualité à l’occultisme, à une maladie mentale, à la bestialité. Certains affirment même que les Blancs ont importé cette pratique», indique Justice Walu*, un quarantenaire homosexuel, très engagé sur la scène de la défense des droits LGBT.Et l’atmosphère politique n’est guère à l’apaisement. En 2013, une proposition de loi visant à pénaliser l’homosexualité a été proposée à l’Assemblée du Peuple par le député Steve Mbikayi. La proposition de loi comprenait 37 articles et prévoyait une peine de 3 à 5 ans de prison pour les homosexuels et de 3 à 12 ans pour les transgenres. En 2010, déjà, une proposition de loi avait été effectuée… mais n’avait pas réussi à passer. La question est, d’un point de vue politique, très délicate. Justice Walu s’inquiète du flou législatif. «Certes, les lois n’ont pas été adoptées, mais la Constitution ne défend pas non plus les minorités. Entre les deux, toutes les interprétations sont possibles…» Et souvent ce sont les pires qui priment.
Docteur Hilaire montre des médicaments traitant le VIH.
Les différentes églises chrétiennes n’y sont pas non plus pour rien. Dans un pays extrêmement religieux, voire fanatique pour certaines congrégations comme les Eglises du Réveil, violemment prosélytes, les discours tenus par les religieux font froid dans le dos. «L’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme», a dit le Christ, ont rappelé récemment les pasteurs Ndibu et Dinanga, qui officient dans la commune de Ngaliema, limitrophe de Kinshasa. Lors d’un prêche adressé à la jeunesse, ils ont réaffirmé que «la RDC a ses traditions auxquelles on ne peut déroger sous peine d’être déconsidérés.» Les deux pasteurs d’ailleurs n’hésitant pas à comparer pédophilie et homosexualité, comme le font souvent les plus réfractaires à la cause gay. La «menace» du mariage gay en France, adopté en 2013, a aussi été l’occasion de désigner l’homosexualité comme un «mal» occidental. Quant au pasteur Théodore Mugalu, il affirme dans ses prêches télévisuels que les homosexuels iront carrément «brûler dans les flammes de l’enfer», arrachant un rire franc au Dr Hilaire Mwoblie, un chirurgien engagé dans la lutte anti-sida, béat devant tant de bêtise.Rich évoque un ami homosexuel, qui s’était confié à lui à propos de son orientation sexuelle. «Il a décidé qu’il devait entrer dans le droit chemin, et aujourd’hui, il veut devenir pasteur et part en croisade contre ces jeunes troublés par leur identité sexuelle, avançant qu’on peut ‹ guérir › de son homosexualité.» Rich s’inquiète de cet exemple. «Il ne changera pas. J’aimerais tellement que ces jeunes s’acceptent et se sentent juste bien dans leur peau», lâche-t-il, amer. Son projet ultime? Trouver des fonds et créer un refuge pour les jeunes homosexuels jetés à la rue, ceux qu’il croise trop souvent par le biais de son association, brisés.
Risques quotidiens
Car la peur de la stigmatisation est quotidienne. L’anonymat a été une condition requise pour presque tous les interlocuteurs de ce reportage. La peur du rejet en première justification. Et celle de «salir» l’honneur de la famille. Justice Walu, se sait homosexuel depuis très jeune, mais s’est d’abord voilé la face. «J’avais une grande peur d’être découvert», reconnaît-il. Devant l’évidence, il a refusé toute relation jusqu’à l’université, optant pour une chasteté contrainte. Aujourd’hui, son compagnon, qui a succombé aux sirènes de la tradition et des pressions familiales, vit au Canada. Marié. Justice Walu ne le voit que rarement et souffre énormément de cette situation.
«Dans la lumière, il y a cette épouse, et moi, son vrai amour, je vis dans l’ombre. Je dois m’en contenter», lâche-t-il, amer. Si Justice Walu a décidé de lancer un blog pour parler de ce sujet jusqu’alors si peu documenté, il refuse néanmoins le coming-out officiel. «Mon père a exercé des fonctions importantes, a été enterré avec les honneurs militaires, je ne peux pas associer mes activités militantes à son nom», tranche-t-il. Sa mère, s’en doute certainement. «J’ai pourtant essayé de me ‘convertir’ à l’hétérosexualité, mais sans succès», reconnaît-il. Ce qui le sauve? Paradoxalement, une mauvaise nouvelle. «Depuis que j’ai une grave maladie de cœur, plus personne dans ma famille ne me demande des nouvelles d’un éventuel prochain mariage. C’est un mal pour un bien.»
Trop de clichés
Les femmes aussi souffrent de maux similaires aux homosexuels masculins, «sans compter qu’elles doivent aussi faire face au statut de la femme en Afrique», lâche Fanny*, la trentaine, grand sourire et jolies tresses encadrant son visage. Engagée dans une association féministe, cette lesbienne trentenaire de Kinshasa dénonce, entre autres, les discriminations dont sont victimes les femmes. A ses yeux, «se marier, tu le dois à ta famille, à la communauté. On s’attend à ce que la femme fasse des enfants, et qu’elle soit entretenue par un homme de la famille: le père, l’oncle, le mari. Décider de se pas se marier, c’est donc, pour les femmes comme moi, tirer un trait sur une source de soutien économique.» Dans sa famille, sa mère, une femme diplômée et résolument ouverte, accepte son homosexualité à demi-mots mais ne peut s’empêcher quelques remarques. Comme, par exemple, sur son fils de 4 ans, procréé naturellement avec son meilleur ami. «Dans quelques années, il va poser des questions, que vas-tu lui dire?», l’interroge sa mère.
Maguy, 38 ans, est aussi issue d’une famille de notables. «J’ai subi deux ans de placard quand mon patron a découvert que j’étais lesbienne. Mes collègues mettaient en garde mes collègues féminines en disant que j’allais les séduire, que j’étais une sorcière. Je n’avais plus de bureau, je travaillais dans le couloir! La situation a changé quand un nouveau patron est arrivé, un bisexuel qui a compris ma situation et m’a fait réintégrer un cabinet.» Maguy ne s’en remet toujours pas. Sa vie personnelle est également compliquée. «Je suis en couple avec une femme, qui vient d’accoucher. Je lui ai demandé de garder cet enfant, issu d’une relation parallèle, pour qu’il soit le nôtre. Je me suis débrouillée pour reconnaître l’enfant en affirmant que Maguy était un nom masculin, aussi. Je l’aide financièrement, et on se voit, mais de plus en plus rarement. J’ai peur qu’un jour elle ne me laisse plus voir ma fille», s’inquiète-t-elle. Car si les familles homoparentales existent bel et bien, c’est officieusement. Sans aucun statut. Aux risques et périls du parent non biologique.
«Beaucoup n’ont d’autre choix que de se lancer dans la prostitution pour gagner leur pain»
Le rejet va parfois encore plus loin qu’une stigmatisation professionnelle. Certaines femmes subissent des viols «correctifs». Fanny raconte des histoires affreuses de lesbiennes droguées et violées, pour les remettre dans le «droit chemin» de l’hétérosexualité. Heureusement en RDC, ces faits graves sont rares. Beaucoup plus souvent, en revanche, les jeunes homosexuels sont mis à la porte de leur foyer. «Souvent ils se regroupent entre eux, loin de leurs familles, en communautés», détaille le Dr Hilaire Mwoblie. Et là, «beaucoup n’ont d’autre choix que de se lancer dans la prostitution pour gagner leur pain, explique Pascale Barnich-Mwunga, coordinatrice générales de Médecins du Monde à Kinshasa. Ils risquent alors de contracter IST et sida.»
Comme le rappelle le Dr Hilaire Mbwolie, «la prévalence du sida chez les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes est de 31 % en RDC, contre 1,2 % pour la population totale, ce qui est considérable.» Avec une équipe de bénévoles, il a pu monter une clinique mobile, qui a commencé ses tours de ronde il y a un an, avec laquelle il arpente les «points chauds» de la capitale, la nuit, pour favoriser la prévention, les tests sanguins. «Le soir venu, les gens se sentent plus à l’aise, ont moins peur de se faire reconnaître en réalisant les tests pour se faire dépister», explique-t-il, dans son bureau rempli d’antirétroviraux qu’il fournit aux malades. Inquiet, il évoque aussi les médecins qui «jugent, critiquent, voire refusent de soigner des fissures anales, à partir du moment où les patients sont identifiés comme homosexuels.» Son expérience en hôpital lui a montré l’homophobie rampante du corps médical. Conséquence: beaucoup de gays s’auto-censurent, et manquent de soins. Son plaidoyer auprès des autorités est clair : «Si nous ne faisons rien pour endiguer l’évolution du sida chez les homosexuels, nous ne pourrons pas rattraper les choses.»
Dans les rues de Kinshasa. ycz, freelance photographer distributed by Zeppelin Network.
Il semble heureusement que la situation s’améliore: les populations vulnérables (homosexuels, travailleurs du sexe, drogués…) viennent d’être prises en compte par les autorités congolaises comme populations cibles de la lutte contre le sida. Les fonds des Nations Unies vont donc arriver. «La RDC occupe de plus une place stratégique au coeur de l’Afrique et aurait une possibilité d’influencer une politique de droits humains et de santé publique», se plait à penser le docteur.
Petits arrangements
Dans cette vie cachée, il reste quelques îlots de légèreté. Comme la création d’un langage particulier, le «kipopo», qui permet de se repérer et de se comprendre entre gays. Justice Walu donne en exemple quelques expressions. «Etre à 12 heures, signifie être excité, un marcheur est un gay, le mur de Berlin désigne des personnes hostiles. Quand nous sommes en bande et que quelqu’un déboule, on lance «mur de Berlin» et on change de sujet. » Justice Walu évoque aussi, avec un rire coquin, les expressions plus sexuelles. «Pour désigner un rapport sexuel passionné, on lance «Les amis, si vous aviez vu le site du crash, il y a eu 500 morts!» Mais si on évoque un «petit planeur», ça signifie un moment nul à chier», s’amuse-t-il. Ce vocabulaire est une spécificité congolaise. «Un hétéro ne comprendra pas!»
Si le kipopo est parlé dans la communauté pour faciliter la reconnaissance, certains parcs de Kinshasa se transforment la nuit tombée en espaces de rencontres. Il existe aussi quelques bars où l’on s’affiche plus facilement avec d’autres hommes. Mais ces lieux restent très rares. Maguy, qui en a assez de se cacher et de subir la pression familiale, songe à une solution pour s’arranger avec le quotidien: le mariage de convenance. «Je suis prête à y avoir recours, affirme-t-elle. J’aimerais trouver un homme homosexuel, qui lui aussi chercherait un peu de répit. On habiterait dans la même maison, mais on aurait chacun notre chambre, on ne coucherait pas ensemble. » Ici en RDC, il n’est pas rare de voir des hommes mariés fréquenter d’autres hommes, comme le rappelle Justice Walu, qui connaît plusieurs couples dans ce cas.
Une soirée organisée pour la journée mondiale de lutte contre l’homophobie.
Le 17 mai dernier, la communauté LGBT de Kinshasa s’apprêtait à célébrer pour la seconde fois la journée mondiale contre l’homophobie. Dans un bar discret loué pour l’occasion dans un quartier calme de Kinshasa, des dizaines de membres des associations LGBT congolaises se sont réunis le soir venu. «Dommage, certains n’osent pas participer, de peur d’être encore associés à un tel événement, explique Justice Walu. Ils estiment que le lieu n’est pas assez caché.» Preuve, s’il en fallait, que l’homosexualité reste un chemin de croix en RDC. En première partie de soirée, un film brésilien sur la relation très forte entre deux demi-frères qui vire à l’histoire d’amour une fois adultes, permettait d’aborder le débat sur la différence depuis l’enfance, puis c’est dans une ambiance bon enfant que les jeunes Congolais se sont lâchés sur la piste de danse. Lancés dans des chorégraphies d’enfer, ils ont fait honneur à la réputation festive de «Kin», envers et contre tous.Là, dans l’obscurité de la salle de danse, entre deux bières Primus (la bière congolaise, ndlr) et plaisanteries entre amis, ces jeunes homosexuels congolais sont juste eux-mêmes, libres dans leur orientation sexuelle, leur gestuelle, leur habillement, sans peur d’être jugés. Ils n’attendent que la lumière.
* Les prénoms ont été modifiés.