Pourquoi le concept me plaît autant qu’il me hérisse ? Magazine lifestyle créé en 2011 au Danemark par Nathan Williams et son épouse Katie Searle-Williams, Kinfolk est une revue qui met en scène une niche de jeunes adultes à la vie bien rangée, proprement vêtus de tabliers japonais pour les femmes et de chemises en chambray pour leurs acolytes masculins (boutonnés jusqu’au cou).
Bien nés bien coiffés, avec des gueules de végétariens, mais ayant en fait un profil sous-jacent plus viandard qu’une famille de Ch’tis jetée dans un KFC un samedi après-midi.
Il y est question de cuisine (mais pas de n’importe laquelle : les salades photographiées sont faites avec des pousses d’Okinawa dont la floraison n’a lieu qu’une fois dans l’année, à titre d’exemple), de suggestions de lieux ultra secrets (tenus par l’un des leurs) pour « bruncher » en groupe, d’organisation de repas « festifs » entre « Kinfolk people », cela va de soi.
Le Kinfolk people n’est pas à confondre avec un « hipster ». Il n’est pas hype mais aseptisé, et aspire à une certaine retenue n’ayant rien à avoir avec de la timidité ; malgré le calme criant dans lequel il baigne.
J’y détecte plus une nonchalance arrogante destinée à enrager les nerveux et les envieux qui les reluquent. Ce public d’érudits qui souhaiteraient être à leur place, assis sur une Hans Wegner sirotant un mojito au citron caviar l’air de rien, comme dans un banal Starbucks, près d’une cheminée.
Après avoir visionné en boucle les différents bouquins et m’être goinfrée de foule d’images de ces personnages ayant le don de rester lisses en toutes circonstances (même avec un bras blindé de tatouages et une bête de barbe), j’admets au début avoir bien aimé le concept.
Au point d’avoir même eu, dans des moments de déprime aiguë, le désir de me retrouver actrice de l’un de leurs repas. Souriant à une planche en bois « Craster » de charcuterie ibérique, affublée d’un chignon faussement déglingue. Entourée de crétins intellos dont l’unique problème dans la vie est juste d’être né avec un cul bordé de nouilles.
Finalement, je ne sais pas mettre le doigt sur ce qu’il y a de plus agaçant chez eux. Est-ce leur absence d’humour ? Leur côté bourgeois rustiques de Saint Germain en Laye suintants ? Le fait que soient exclus les visuels de gros(sses), de beaufs, de pouffes, de communistes, de punks, de noirs, de moches, enfin de tout ce qui ne leur ressemble pas et qui ne porte pas du lin lavé en somme… Envie subite d’entartage surprise via Snapchat ! Quelqu’un-e pour m’accompagner ?
En conclusion, je sens que je vais aller monter mon propre bouquin de cuisine et de « lifestyle » (bien que je méprise ce terme pour sa niaiserie). Ne possédant pas encore de loft sur le Canal Saint Martin, je me vengerai via Airbnb, et moi aussi je deviendrai célèbre en montrant des gens en train de bouffer ensemble.
Sauf que les miens seront en train de se fendre la poire et viendront de tout horizon social. Quelques blagues salaces type Fluide Glacial agrémentereront le papier et j’embaucherai Martin Parr comme photographe. Seuls les coinços seront refoulés au casting.
Le livre ne sera pas disponible sur Amazon mais uniquement au Conran Shop et chez Colette.
Kinfolk, pour conclure, c’est pas mal quand même, mais juste pour l’inspiration des recettes et du dressage de table. Comprendra qui pourra.
Belliqueusement vôtre,
Alba.
The post Kinfolk, tout un concept ! appeared first on Ladies Room.