En avançant vers lui je ne m’attendais pas à vivre ce qui va suivre.
Je connaissais son existence mais de loin, du coin de l’œil.
Je pensais qu’il n’était pas là pour moi mais pour les autres, les autres que moi, les faibles, ceux qui se font avoir et qui sont aspirés sans même s’en rendre compte, les insouciants, les naïfs, les rêveurs, les innocents.
Je pensais être assez forte et maligne pour le contourner, pour l’éviter toute ma vie. Hélas pour moi, comme les autres que moi, ceux que j’avais trop vite jugés faibles, je suis aussi tombée dans le piège. Ce tourbillon était là pour moi, il fut créé spécialement pour moi. Et au lieu de continuer mon chemin, je décidai de m’en approcher et de le tester.
Avec une certaine arrogance et croyant défier les lois de la physique, je levai mon pied comme pour le narguer puis je l’avançai vers lui pour voir se qu’il me ferait. Je connaissais son existence, bon nombre sont tombés dans son sillage mais j’étais persuadée que ce ne serait pas mon cas. Erreur fatale car à partir de cet instant je réalisai la bêtise de mon geste.
Plus moyen de retourner en arrière, je ne pouvais plus récupérer mon pied.
Usant de la force de ma cuisse en flexion avec tout le poids de mon corps sur celle-ci pour faire contre-poids, je luttais inexorablement contre lui, je ne voulais pas qu’il me prenne, je regrettais tellement ma folie passagère mais je n’arrivais pas à me sortir de cette situation. Ma cuisse tremblait, je ne pouvais plus résister, j’avais tellement mal partout que je finis par lâcher et par perdre l’équilibre, le sol se déroba sous mes pieds et je tombais dans ses entrailles.
Le souffle coupé, le tournis, la force du mouvement m’empêchant de lutter, malgré ma ténacité et mon envie de m’en sortir, j’acceptais mon sort et je me laissai happer par ce monstre sans nom.
Dans ce lieu en perpétuel mouvement circulaire, le temps n’avait plus sa place, une minute représentait l’éternité et mon corps gardait les traces des stigmates. Les émotions se réveillèrent et s’installèrent avec véracité dans ma chair. Je commençai à être en colère.
J’avais beau crier ma peine de toute mes forces mais la pression des tours déformait ma voix, déformait mon visage, le son était comme confiné, il ne trouvait nul écho pour exister.Je fus à bout, laissant mon corps suivre le mouvement sans aucune résistance, voyant que ma colère ne servait plus à rien à part m’épuiser, je laissai alors la tristesse m’envahir soudainement et me percuter en plein cœur.
« Je suis foutue, je me suis fais avoir toute seule. »
Je savais que je jouais un jeu dangereux et comme à mon habitude, je n’écoutai pas mon instinct, je préférai essayer, allant jusqu’à me mettre en danger.
Je fus la seule responsable de ma chute et je ne pus en vouloir qu’à moi-même. Dans ma descente aux enfers, je découvris que j’étais comme tout le monde avec mes forces et mes faiblesses, malheureusement il était trop tard pour me repentir. Voici mes dernière pensées avant de sombrer dans le tourbillon infernal de l’existence humaine.
Et puis… plus rien.
Une brise légère caressa mon visage, j’avais du mal à ouvrir les yeux, la lumière était top vive et perçante, je finis par les ouvrir et je découvris l’endroit où je me trouvais : dans un pré, allongée sur un plaid multicolore. Je ne comprenais pas, je ne reconnaissais pas les lieux, je me souvenais très bien du tourbillon et de ma fin inévitable dans ce monde et puis plus rien, le noir, le néant. La sensation furtive d’avoir rêvé avec cette forte conviction que tout était bien réel. Je m’assis pour reprendre mes esprits.
C’est alors qu’une voix douce et lointaine comme transportée par le vent me délivra un message: Une seconde chance, dit-il, dit-elle, je ne savais pas.
Je me retournai, personne, seulement moi, le ciel bleu, le soleil brillant et ce léger vent : la nature, seulement elle et moi en alliance avec elle.
Le bonheur s’empara de moi car je réalisais la chance que j’avais d’être de nouveau ici et je respirai profondément pour garder bien au chaud, au plus profond de moi ces trois mots puissants.
Maintenant une seule et unique chose à faire : ne jamais oublier, surtout ne jamais oublier.
(cc) Olivier Noirhomme
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