L’homosexualité et la religion sont souvent perçues comme
deux oppositions inconciliables, suscitant des tiraillements complexes chez certaines personnes LGBT+ se reconnaissant dans une ou plusieurs identités culturelles et religieuses. Nous sommes allé·es à la rencontre de trois associations qui militent pour ces personnes, défendent leurs droits et luttent contre les discriminations qu’elles subissent.
Beit Haverim accueille les LGBT+ de culture et religion juive
Créée en 1977 pour accueillir et défendre les personnes LGBT+ juives, Beit Haverim est composée principalement de bénévoles et de volontaires basé·es à Paris. C’est Alain Beit le président de l’association qui nous a parlé de ses activités et ses objectifs. L’association propose à ses membres de maintenir un lien avec le judaïsme à travers diverses activités : « Les personnes viennent chercher un endroit où elles ne sont pas jugées, elles veulent maintenir un lien avec la tradition. Nous leur proposons des cours d’hébreu, des repas de fête et une vie collective », précise-t-il. Mais « la conciliation entre la religion et l’homosexualité demeure encore difficile chez certaines familles bien qu’une avancée dans son acceptation soit notable ces dernières années », dit-il. En effet, des mariages homosexuels sont de plus en plus visibles et les couples renouent avec les valeurs judaïstes dans un désir de transmission. Mais ces avancées ne cachent malheureusement pas l’homophobie subie par une partie de la communauté juive, et l’antisémitisme d’une partie de la communauté LGBT+.
Shams ouvre ses portes aux LGBT+ du Maghreb et du Moyen-Orient
Les personnes LGBT+ provenant du Maghreb et du Moyen Orient se retrouvent souvent à l’intersection de plusieurs problématiques et discriminations dont l’homophobie, la transphobie et l’islamophobie. Nous avons interrogé Yacine Djebelnouar, le président de l’association Shams France qui accueille toute personne provenant du Maghreb ou du Moyen Orient, religieuse ou pas. D’après lui : « les questions du coming-out et de la conciliation entre la foi et la sexualité sont encore du domaine des tabous car l’homosexualité est toujours perçue comme n’étant pas en adéquation avec ces cultures ». Une contradiction qui découle souvent d’une conception sociale de l’homosexualité comme antagoniste à la religion. Les difficultés se traduisent sur le plan familial par le rejet et l’exclusion. Dans les administrations, cela se traduit par le refus du mariage homosexuel car bien que ce dernier soit autorisé en France depuis la loi de 2013, il exclut les personnes provenant de 11 pays dépourvus de cette loi. Une discrimination qui les engage dans des démarches administratives pour faire valoir ce droit. Confrontées à toutes ces problématiques, les personnes viennent souvent chercher l’aide et le refuge auprès de l’association.
David et Jonathan, l’association LGBT+ chrétienne
Ce travail autour de la double identité religieuse et LGBT+ est assuré aussi par l’association David et Jonathan fondée en 1972. Rencontré au Centre LGBTI de Lyon, François, membre de la collégiale et ancien co-président national de l’association, nous a fait part des problématiques qu’ils et elles rencontrent: « c’est principalement la question de la compatibilité entre la foi et l’homosexualité qui les amène chez nous». Car bien que l’association soit détachée de tout mouvement d’Église, nombreux et nombreuses sont ses adhérent?es engagé?es dans des paroisses et qui font face à des discriminations. Établir un dialogue avec l’Église est donc l’une des activités que l’association mène « notamment sur des questions autour de l’accompagnement spirituel, l’égalité des droits, le mariage civil et l’homoparentalité », précise-t-il. L’association propose aussi d’accompagner les personnes dans leur conciliation en leur proposant des groupes de spiritualité, des recherches et des lectures de textes bibliques.
Ces associations représentent l’étendue des identités et des récits de la communauté LGBT+. Elles militent pour garantir l’égalité entre tous les individus, quelle que soit leur vie sexuelle ou affective et leur identité de genre. Par ailleurs, des églises, mosquées et synagogues inclusives accueillent les personnes LGBT+ provenant des trois religions monothéistes. Des travaux sont en cours pour interpréter les discours religieux homophobes en revoyant l’interprétation des textes. Une Pride pour les LGBT+ musulmans était prévue à Londres par l’association Imane mais a été annulée à cause de la crise sanitaire. Un mouvement homosexuel au sein de l’Église catholique nommé le DUEC propose des lieux de réflexion et de prière. Ceci montre bien une réappropriation du discours religieux par la communauté queer qui jusqu’à présent le subissait. Si aujourd’hui l’homophobie existe bien dans l’interprétation du discours religieux, il faut aussi reconnaître l’existence de croyant?es LGBT+ et l’importance de repenser l’opposition entre la religion et l’homosexualité pour ouvrir la voie à la conciliation.
Contacts
Beit Haverim : https://beit-haverim.com
Shams France : https://shams-france.org
David et Jonathan : https://www.davidetjonathan.com
© illustration Isabelle Valera
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