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Avec Choucroute maudite, Rita Falk nous entraîne dans une enquête menée par le commissaire Franz Eberhofer, viré de Munich pour des raisons disciplinaires. Revenu s’installer dans son village natal où il squatte une ancienne écurie presque transformée en appartement, Eberhofer se la coule douce. Entre les repas copieux que sa mémé sourde comme un pot l’oblige à terminer, les promenades chronométrées avec son chien Louis II, les patrouilles qui se terminent devant une bière chez son ami Wolfi ou son pote Simmmerl, le commissaire mène une vie monotone qui lui convient. Jusqu’à ce que les membres de la famille Neuhofer meurent les uns après les autres.
Choucroute maudite est un roman policier désopilant. Rita Falk n’a pas son pareil pour décrire avec humour les relations humaines, notamment celles qu’entretient son personnage principal avec les membres de sa famille ou avec la femme dont il tombe amoureux.
Derrick est mort, vive le commissaire Ebehrofer ! Vive Rita Falk et sa comédie policière bavaroise, kitsch et inimitable !
Rita Falk est née dans le village d’Oberammergau, en Bavière, et vit aujourd’hui à Munich, mariée à un officier de police. Sa série des Commissaire Eberhofer a créé la surprise avec un succès populaire inédit et des ventes de 400 000 exemplaires.
La série bestseller en Allemagne est adaptée en téléfilm.
Extrait
Bon, aujourd’hui je vais chez Simmerl (le mardi, c’est le jour où on tue le cochon, donc : boudin et saucisse de foie). Et là, je tombe encore sur ce bonnet de fourrure, devant la porte. Juste devant la porte d’entrée de la boucherie-charcuterie, il y a ce bonnet. Je ne sais pas si je vous en ai déjà parlé. Non, sans doute pas. Donc, on était mercredi (ou jeudi, peu importe). En tout cas, je faisais ma promenade avec Louis II, comme d’habitude. Il nous a fallu un tour de 1-17, mais ça n’a aucune importance ici. En fait, Louis II trottait tranquillement devant moi comme d’habitude et, d’un seul coup, il a senti un truc. Il m’a devancé, a ramassé quelque chose au sol et l’a gentiment déposé aux pieds de son maître. C’était le bonnet de fourrure dont je vous parlais. Un bonnet plutôt kitsch, avec des rubans roses et des strass, à mes pieds. Louis II remuait de la queue, tout heureux. D’un coup, une femme haletante a surgi de la neige et j’ai cru bien sûr que le bonnet lui appartenait et qu’elle était rudement contente qu’on l’ait trouvé. Mais ça ne s’est pas tout à fait passé comme ça. Parce que, et d’une, elle n’était pas contente, et de deux, ce n’était pas un bonnet : en regardant de plus près, j’ai supposé que c’était un chien, ou plutôt un petit chien, avec un collier à paillettes. Quoi qu’il en soit, quand la femme a repris son souffle, elle m’a engueulé et demandé pourquoi je ne maîtrisais pas mieux mon énorme monstre. Elle devait parler de Louis II. Ensuite, elle m’a hurlé dessus en demandant si j’avais une idée de ce qu’un (la race du chien ici n’a aucune importance) machin pareil pouvait bien coûter et si je savais combien ils étaient fragiles.
Aucune idée.
Le bonnet était toujours par terre et ne bronchait pas. Si je ne connaissais pas si bien Louis II, j’aurais pu douter que le bonnet ait survécu. Alors la femme a pris dans ses bras la bestiole inerte, a nettoyé les feuilles mortes collées à ses pattes et a tourné les talons, très en colère. Je me suis d’ailleurs demandé comment une créature aussi délicate pouvait claquer des talons de la sorte… Mais bon.
Comme je l’ai précisé, cet incident nous avait mis en retard de huit minutes sur notre meilleur temps et c’était vraiment fâcheux.
En fait, je n’avais jamais vu cette femme auparavant. D’abord, j’ai pensé que c’était une de ces touristes d’un jour qui veulent sortir de la ville, montrer la campagne à leur clebs et lui apprendre qu’on peut pisser sur autre chose que des réverbères. Mais il y a de grandes chances pour que son séjour dure plus longtemps que ça, étant donné que le bonnet est aujourd’hui encore devant la porte de la boucherie-charcuterie.
Choucroute maudite, Rital Falk, Mirobole éditions 256 pages 19,50 €
Traduit de l’allemand par Brigitte Lethrosne et Nicole Patilloux
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Dans Colza mécanique, nous retrouvons l’ironie bon enfant de Karin Brunk Holmqvist. Ici, l’écrivain met en scène deux frères qui habitent dans une maison à la lisière de la campagne suédoise. Henning et Albert ont respectivement 68 et 73 ans. Ces deux vieux garçons vivent dans un grand dénuement, ne se déplacent qu’en bicyclette, bicyclettes qu’ils rafistolent régulièrement comme ils réparent de bric et de broc leur petite maison ou leur cabane à outils. Leur quotidien est rythmé par la météo et rempli de rituels qui leur viennent pour beaucoup de leur mère.
Leur paisible routine est brisée lorsque la maison d’à-côté, la maison où ils ont grandi, va être transformée en centre de désintoxication pour femmes. En chiquant, les deux vieux observent les travaux depuis le champ de colza voisin. C’est alors que les médias lance une rumeur folle : ce champ serait un lieu de débarquement extraterrestre. Henning et Albert se retrouve au centre de la révolution villageoise.
Colza mécanique est un roman ironique, pince-sans-rire et tendre. De quoi réjouir votre été !
Karin Brunk Holmqvist est l’un des auteurs les plus populaires de Suède. Personnalité atypique, elle a publié dix romans vendus à plus d’un million d’exemplaire dont l’ébouriffant succès de librairie Aphrodite et vieilles dentelles (Mirobole 2016), vendu à plus de 100 000 exemplaires.
Extrait (p.7 à 9)
Le bataillon de pies s’éleva avec lourdeur du champ labouré, puis s’en alla à tire-d’aile et à grand renfort de jacassements vers le grand orme au bout du chemin. L’air s’emplit de halètements et de bruits de ferraille. En amont du sentier fangeux, Albert Andersson s’échinait sur son vieux vélo Monark. A chaque coup de pédale, la chaîne frottait sur le garde-boue et couvrait presque le son de sa respiration poussive. Albert savait précisément combien de temps le boyau tiendrait avant de se dégonfler et il s’agissait de ne pas lambiner pour éviter que les jantes ne s’enfoncent dans la gadoue. L’expérience lui avait appris qu’un gonflage lui permettait de faire des rapides emplettes à l’épicerie avant d’effectuer un rapide détour par le cimetière et de revenir à la maison. Il avait essayé de réparer la chambre à air plusieurs fois, mais elle ne restait jamais hermétique. Bon d’accord, il n’avait pas utilisé de vraies rustines, mais il avait découpé un morceau d’un vieux tuyau en caoutchouc, l’avait enduit de colle, puis l’avait placé sur le trou. Malgré ça l’air s’échappait pour se mêler à celui de l’Österlen, qui, en ce début d’été, était saturé de toutes sortes de senteurs.
Quand Albert passa devant l’arbre, les oiseaux s’envolèrent de nouveau, ils s’immobilisèrent un instant, comme pour décider dans quelle direction aller, avant de disparaître silencieusement. Leur bec ressemblait à la pointe d’un compas qui fendait littéralement la brise fraîche du matin. A l’extrémité du champ boueux s’ouvrait une cour de ferme au moins tout aussi boueuse. L’averse de la nuit avait rempli les profondes ornières et, sous la gouttière, le tonneau de bois lasuré en marron menaçait de déborder d’eau de pluie. Albert traversa la zone sans chercher à éviter les grandes flaques, mais en les franchissant au contraire avec détermination et en faisant gicler d’impressionnantes gerbes d’eau. Oui, il se dirigea vers le cabanon délabré comme une torpille. Sur le porte-bagages, il avait fixé en guise de coffre une vieille caisse en bois dont il avait soigneusement isolé le fond d’un sac en toile de jute. Un vieux tapis de lirette suspendu faisait office de porte à l’entrée de la remise. Le toit du bâtiment ressemblait à un ouvrage de patchwork tant on avait employé de matériaux différents pour couvrir la construction. Une fois qu’il eut garé la bicyclette, Albert traversa de nouveau l’étendue vaseuse d’un pas tout aussi résolu. Il portait une bonbonne de pétrole dans une main et un sachet en kraft marron dans l’autre. Mue par l’instinct de survie, la chatte sur le perron s’esquiva d’un bond et, avant d’ouvrir la porte, Albert cracha sa chique dans une vieille marmite en fonte à côté des marches. On voyait que ce récipient était destiné à accueillir le tabac expurgé de nicotine, car le vent soufflait parfois si fort que les crachats manquaient leur cible, ce dont témoignaient les taches brunes que le mur chaulé.
— HENNING, je suis rentré !
— Tu as rapporté du pétrole ?
Albert entra dans la minuscule cuisine sans retirer ses gros godillots de travail, ce qui ne semblait pas d’une nécessité criante vu l’état du sol.
— Tu as rapporté du pétrole ?
Albert posa bruyamment la bonbonne sur la table afin que son frère comprenne qu’il avait effectué l’achat prévu.
Henning était étendu sur une banquette fatiguée, un journal sur la tête et une tapette à mouches à ses côtés. Il jeta le quotidien par terre et se leva. Il adressa à son frangin un grand sourire. Plusieurs de ses dents manquaient, les chicots restants étaient marron.
— C’est bien que tu aies acheté du pétrole, Albert.
— Il va encore pleuvoir cette nuit, dit Albert, comme s’il n’avait pas entendu.
— Encore une chance qu’ils aient rentré le foin au domaine de Nygårda.
Gardant le silence, Albert s’avança vers un petit fourneau à bois sur lequel une vieille cafetière bosselée restait au chaud. Il se servit du breuvage dans une tasse émaillée au fond beige et à la partie supérieure vert kaki. Le revêtement s’était détaché à plusieurs endroits et le mug avait pris une coloration brunâtre.
— Ils rentrent toujours leur foin à temps ; on dirait que les dieux sont de leur côté.
La conversation tenait en peu de mots. La chaleur du fourneau et l’humidité extérieure rendaient l’air poisseux. L’une des fenêtres était cassée, mais on avait rafistolé la vitre brisée à l’adhésif. Au pied de la banquette s’entassait une pile de journaux jaunis. Le coussin avait conservé l’empreinte de la tête de Henning, entourée d’une auréole que leurs cheveux gras avaient déposée au fil des ans. A une époque, la taie avait dû être vieux rose, mais désormais, elle ressemblait à un morceau de tissu beige avec un grand rond marron au milieu.
— La METEO ! lança Albert.
Il n’en fallait pas plus pour que son frère comprenne. Même si le temps de leurs activités tributaires du climat était révolu, pour rien au monde ils n’auraient manqué le bulletin météo. Quand ils parlaient entre eux, les autres avaient parfois l’impression qu’il s’agissait d’une forme de sténographie. De fait, leurs échanges se limitaient à des mots isolés, incompréhensibles pour les non-initiés, mais qu’Albert et Henning avaient appris à interpréter au fil des ans.
Colza mécanique, Karin Brunk Holmqvist, Mirobole éditions 256 pages 19,50 €
Traduit du suédois par Carine Bruy
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