« Il aura fallu que des sexologues m’invitent à parler de sexualité pour que je me penche sur le sujet philosophiquement. C’est paradoxal, car le sexe occupe dans ma vie, comme dans celle de n’importe qui, une place importante.
« Or, étonnamment, les philosophes en parlent peu, ou alors avec réticence. Sans doute parce qu’ils ont pris le parti de la raison, alors que le sexe est la partie la moins raisonnable de notre existence. Il est pourtant, comme le disait Montaigne, le plaisir le plus fort.
« Mon idée est que le sexe est foncièrement amoral : c’est pour ça qu’il nous trouble tant.
« Que nous dit en effet la morale ? Qu’il faut traiter l’autre comme une personne, prendre acte de sa dignité, bref, comme dit Kant, le traiter comme une fin et non comme un moyen.
« Sauf que, sexuellement, traiter l’autre (ou s’offrir à lui) comme un moyen de jouissance, profaner en quelque chose sa dignité, lui manquer de respect, ce n’est peut-être pas moral, mais qu’est-ce que c’est bon! »
André Comte-Sponville au magazine Philosophie
L’article Le sexe est foncièrement amoral est publié dans le site cercle O - L'échange de pouvoir érotique.