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Apprivoiser la « bête »! Voilà ce que Monsieur m’a offert. Une surprise… je ne m’y attendais vraiment pas.
Après une chaude fessée au rythme effréné, j’attendais là la suite de ses malices, dans la position que Monsieur affectionne tant. J’attendais donc, les yeux fermés, haletante, entendant ses pas mener vers ce que je crois être son sac. Que faisait-il? Quelle serait sa prochaine inspiration?
Ce n’est qu’en écoutant le silence rompu par un sifflement dans l’air que je comprenais ce qui allait se produire. Surprise j’étais et pourtant, je reconnaissais bien là mon Maitre. Cette façon qu’Il a de conjurer le sort.
Il est vrai que mon esprit gardait encore une marque vive d’une mauvaise expérience vécue il y a longtemps avec la mauvaise personne.
Craignant donc la puissance et l’ardeur de ce qu’il maniait, j’offris à Monsieur tout de même ma chair. Mon coeur s’emballait. Je retenais mon souffle, espérant être à la hauteur de ce combat que je m’apprêtais à livrer.
J’entendais le tourbillon dans l’air, je sentais le vent autour de moi, et… ouf… une première morsure, puis une seconde aussitôt.
Oh quelle sensation étrange! Telle une enchaînée habituée à son sort, ma croupe allait pourtant pour la première fois à la rencontre de cette langue chaude… cette langue de feu. Une langue sensuelle… très différente de celle gravée dans ma mémoire.
Les morsures se poursuivirent une à une, je me sentais animée par une musique… celle de ma voix intérieure qui chantait : « encore, Monsieur… encore, je vous prie! »
Que c’était bon!
Mon cul s’ouvrait à la rencontre de chacun des impacts et je sentais ma jouissance poindre à l’horizon. Chaque coup me rapprochait de ce geyser enfoui au creux de mes jambes. Et un autre… encore un autre… et puis… ahhhh!!! « Monsieur, puis-je jouir, Monsieur, s’il-vous-plait? »
Avec la permission de mon Maître, je me suis liquéfiée, j’étais bouleversée, pleine et vide à la fois… enveloppée d’une nouvelle chaleur.
Je venais de découvrir le pouvoir du fouet lorsque manié avec coquinerie et bienveillance. Je venais de découvrir une autre facette de moi… une autre facette de Monsieur. Nous venions de parcourir de nouveaux lieux.
Je reste encore pleine de cette aventure et en savoure encore tout son goût, ses arômes. Un parcours au fond de moi. Je ne m’y attendais pas et… Monsieur non plus, m’a-t-il appris, par la suite. Quel voyage!
Merci Monsieur!
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De bonnes vibes dans le dernier son de Doja Cat, Go To Town, dont le chic clip s’avère être un cocktail sucré de désirs sadomasochistes, perruques multicolores, girl power et petits chatons.
Avec Go To Town, Doja Cat se la joue Queen du R’n’B. Celle qu’on a connu so high dans son morceau éponyme explose ici les compteurs du fantasmatron. Dominatrix au minois de féline, playmate à l’affriolante nuisette, fashionista aux semelles compensées, diva de la nuit aux postiches super bright…C’est là le style de cette madonne qui s’imagine « bad bitch » (dixit les paroles) et qui, très attachée aux costumes, cumule quinze looks pour imposer le sien – unique en son genre. Ce qui en ressort ? Un délire sous weed à l’esthétique rose bonbon aussi glucosée que piquante, où l’on se délecte d’un gros gâteau crémeux tandis qu’un mec repose en cage.
La vingtenaire fan de Britney Spears se permet toutes ces excentricités qui font les beaux jours de la contre-culture web. Soit une propension au choc (des poses provoc’ à la Miley Cyrus), des boules à facettes inspirant la nostalgie, des paillettes, des petits chats tout mignons, mais aussi du bon gros fétichisme des familles – comme du Kink version Barbie. Le tout est décoché avec irrévérence et punch, dans un mood bad girl très M.I.A. sur les entournures. Miaou.
La période de Noël est habituellement plutôt creuse pour les reporters du porn. Les line-ups de sextoys sont faits depuis longtemps, les happenings, salons et annonces sont prévus pour la rentrée, etc. Bref c’est la dèche et il n’y a guère que Saint-Sernin qui ne chôme pas avec ses Quoi de neuf.
Autant dire que j’étais loin d’être en mode pro du porno en allant chez des amis pour cette soirée d’échange de cadeaux pré-Noël. Mais contre toute attente arriva entre mes mains la belle boite de Kamasutra, le dernier jeu de Bruno Faidutti, un des grands noms du jeu de société français. L’occasion d’en parler et de se rendre compte que le jeu est aussi quelque part un moyen de faire passer des messages…
Bienvenue sur le Tag. Pour commencer, peux-tu nous présenter Kamasutra ?
Rien de plus simple. La boîte contient un jeu de 54 cartes magnifiquement illustrées par mon talentueux ami et voisin David Cochard, ainsi qu’un petit stock de ballons de baudruche, et des règles en français, anglais et japonais. Sur les cartes figurent diverses positions amoureuses. Les joueurs constituent des équipes de deux joueurs et chaque équipe gonfle un ballon. Une carte tirée au hasard est présentée à tous les joueurs. Chaque équipe prend la position indiquée, en plaçant le ballon gonflé entre les partenaires, sur la zone de contact. Au signal, chaque équipe fait pression sur le ballon pour le faire éclater. Les premiers à y parvenir remportent la carte. Après un certain nombre de manches, l’équipe ayant le plus de cartes gagne la partie.
Simple et fun, j’aime. Mais comment as-tu eu une idée pareille ?
Je connais assez bien la Pologne où existe une amusante tradition lors des mariages. Lorsque les convives sont suffisamment imbibés d’alcool, ils font la chenille avec des ballons entre eux, qu’ils font exploser un à un. Cherchez un peu sur YouTube, vous trouverez des videos édifiantes. J’imagine que les Russes doivent faire des trucs du même style, mais je connais moins.
Par ailleurs, il y a quelques années, une mémorable partie de strip-Twister lors d’un week-end de jeux de société m’avait fait réaliser qu’il y avait bien peu de jeux d’action rigolos pour adultes.
Je me suis donc un peu renseigné pour voir ce qui existait. J’ai découvert de nombreux jeux de dés ou de cartes permettant de tirer au sort une position, mais aucun exploitant cette idée de ballons. Les jeux de cartes étaient en outre, pour la plupart, moches, voire de très mauvais goûts. Il y avait clairement sinon un besoin du moins un manque, et mon idée de jeu était bonne et peut-être même publiable.
Le passage de l’idée de base à la réalisation est-il différent pour un jeu un peu kinky et d’autres plus classiques, avec les phases de prototype et de playtests ?
Cela n’a pas été vraiment différent, ne serait-ce que parce que Kamasutra est au fond plus rigolo qu’érotique. Le développement a surtout consisté à sélectionner les positions qui vont bien, en passant quelques journées sur internet pour consulter des catalogues de positions – il y en a beaucoup – et à rechercher leurs noms les plus traditionnels en français et en anglais. On ne croirait pas, mais il y a un vrai travail de documentation derrière ce jeu ! Avec une amie japonaise, nous avons également trouvé leurs appellations nippones, ce qui m’a permis de découvrir l’étonnante tradition japonaise des 48 positions. Il existe en effet au Japon une liste assez ancienne, presque officielle, de quarante-huit positions aux noms très poétiques, comme la Floraison des pivoines, la Profanation de l’Autel des ancêtres, le Trésor du bateau pirate, la Rivière aux poissons, la Lune à la fenêtre. Je soupçonne même que les japonais n’ont pas le droit de faire des choses qui ne sont pas dans la liste.
Une fois sélectionnées une soixantaine de positions, il a fallu les essayer avec des amis. Nous avons dû éliminer les plus acrobatiques, ainsi que tout ce qui était oral, car la pression du ballon sur le visage est très désagréable. Il en est restée la cinquantaine qui se trouve dans la boîte.
Et là, c’est le drame. Tu te rends compte que malgré ton CV de pro du jeu de société, personne ne veut de Kamasutra.
J’ai traîné ce jeu pendant deux ans sur tous les salons spécialisés et, en effet, personne n’en a voulu. Il faisait rigoler les éditeurs, qui y ont tous joué pour le tester, avant de m’expliquer le plus sérieusement du monde qu’il ne correspondait pas à leur public cible ou à leur réseau de distribution. Quelles que soient ses qualités ludiques, personne n’en voulait dans son catalogue. Pourtant lors des week-ends jeux auxquels je participe, les joueurs en redemandaient et rigolaient comme des bossus. J’avais un bon concept que personne n’osait ou ne savait vendre.
Et donc ? Comment cela se fait-il que le jeu ait finalement été publié?
Je venais de toucher pas mal d’argent en renouvelant le contrat de Citadelles, mon jeu le plus connu. J’ai donc décidé de faire illustrer Kamasutra et de le publier gratuitement sur mon site web, histoire de finir le boulot, ou peut-être juste pour rire. J’ai donc engagé David qui avait travaillé sur plusieurs de mes autres jeux, pour dessiner toutes les positions. Ce n’est pas dans mes habitudes, mes prototypes étant habituellement peu ou pas illustrés. C’était aussi le moyen d’avoir un matériel plus joli et plus à mon goût pour jouer avec mes amis, que les jeux de cartes un peu vulgaires utilisés pour les premiers tests. David a d’abord pensé à dessiner des pandas, et l’idée m’a plu, mais leurs courtes pattes ne permettaient pas de représenter toutes les positions. Nous avons donc opté pour de bons vieux humains un peu poupins, plus mignons que sexys.
C’est après que le jeu a été mis en téléchargement sur mon site que j’ai été contacté par un petit éditeur américain dont j’ignorais l’existence, Vice Games, représenté par Matt Fantastic. Matt est pourtant assez aisé à repérer sur les salons de jeu de société, où il est généralement le seul grand barbu tatoué en costume de Blanche Neige. Adossé à Japanime games, un éditeur plus conséquent, Vice games publie des jeux un peu borderline, aux thématiques souvent sexuelles. Kamasutra est plus un jeu fun qu’un jeu érotique, mais il fallait sans doute un éditeur un peu spécialisé pour le publier. Ensuite, les premières ventes s’avérant encourageantes, et les premiers retours dans le monde du jeu plutôt positifs, ils ont eu pas mal de propositions de distribution en dehors des États-Unis.
De ce point de vue, Kamasutra est un peu l’antithèse de la plupart des rares jeux de société adultes, dans lesquels l’aspect ludique est souvent minimal, sans que l’aspect érotique soit pour autant toujours convaincant.
Matt Fantastic et Bruno Faidutti
Kamasutra n’est pas un « jeu de cul ». C’est juste un jeu d’ambiance pour rigoler entre adultes. C’est aussi l’occasion de mettre en avant une idée qui me tient à coeur. Celle que notre société prend le sexe bien trop au sérieux. Ce n’est même pas un problème de tabou, car on parle aujourd’hui de sexe sans trop de problèmes. C’est juste que l’on pense, je ne sais pas bien pourquoi, que la sexualité est quelque chose de fondamental, d’essentiel. Dans les années soixante et soixante-dix, la sexualité avait acquis une certaine légèreté, une certaine décontraction.
Aujourd’hui, elle semble devenue l’un des moteurs principaux d’une angoissante ivresse identitaire. Un homme qui préfère les hommes n’est ni plus ni moins différent de moi qu’un autre qui aime l’opéra. Je crois même que je le comprends plus facilement que celui qui aime l’opéra (rires). Et personne ne prétend que le fait d’aimer l’opéra constitue ton identité musicale alors que ton identité sexuelle semble être devenue terriblement importante pour tout le monde. On devrait pouvoir rire du sexe comme de n’importe quoi, ne pas prendre les préférences sexuelles plus au sérieux que les préférences alimentaires. Le fait qu’un auteur de jeu reconnu et installé comme moi publie un jeu sur le kamasutra, c’est donc aussi une manière de dire que je refuse de prendre la sexualité au sérieux, et que je revendique donc le droit d’en rigoler.
C’est aussi pourquoi, à ceux qui m’ont parfois reproché de n’avoir représenté dans ce jeu que des couples hétérosexuels, j’ai répondu que je m’en foutais un peu. Je considère que cela ne devrait pas être important, et la meilleure manière de le montrer est de faire comme si. Et puis, David aurait pris moins de plaisir à le dessiner, j’aurais pris moins de plaisir à le regarder, et c’est quand même un jeu que l’on a fait d’abord pour se faire plaisir, pour s’amuser.
Alors est ce que l’on peut espérer que comme les loups garous du camarade Hervé Marly, Kamasutra devienne un incontournable des soirées en groupe ? Voire des soirées libertines ?
Kamasutra est d’autant plus drôle que les joueurs sont nombreux et je ne demande rien de mieux que de le voir devenir un classique des débuts ou des fins de soirée. Je l’imagine quand même plus dans les soirées jeux ou les nouvel an un peu arrosés que dans les soirées libertines, mais il est vrai que je ne connais guère ces dernières.
Merci Bruno et bonne chance pour la suite.
Pour ceux et celles qui ont eu la chance de vivre l’expérience Chambre 206 au Grand Amour Hôtel, et pour tous les autres évidemment, l’édition 2018 du Salon du Livre organisera une table-ronde forcément riche de sens. De bonnes ondes sont au rendez-vous.
L’événement est à voir (et à écouter) le 16 mars prochain, de 15h30 à 16h45, au stand F14 du salon littéraire national, Porte de Versailles. Parler du principe d’audio érotisme, ou de livres-audio érotiques (rappelons que le débat est organisé par le service Audible), c’est interroger par-delà nos délires d’ASMR l’excitation par le son, les vertus de ce que l’on entend sur notre imagination, et donc sur nos désirs. Mais c’est aussi se demander dans quelle mesure cet érotisme audio incarne l’avenir de la littérature érotique, un langage codifié à bousculer.
Réponses seront soufflées par l’artiste électro Piu-Piu, co-productrice et directrice créative de l’Imaginary Club Expérience et du projet Chambre 206, Anne Hautecoeur, directrice des grivoises éditions La Musardine, mais aussi Stéphanie Estournet, fondatrice du collectif indépendant CtrlX (dont le site foisonne de lectures éroticos-pornos) et Betty, co-instigatrice du Verrou, l’un des meilleurs podcasts sensuels sur le marché. Toutes ces voix expertes seront présentes pour nous évoquer les possibles de la réalité augmentée sonore. De quoi se rappeler que le bon fap ne réside pas seulement dans le plaisir de l’œil.
Performer sa sexualité en tant que femme ? Dans le cadre de la semaine des Arts à Science Po Paris, l’association le Cabinet de Curiosité Féminine interroge et débat la manière dont le corps des femmes et leur sexualité sont mis en scène et instrumentalisés. Parler de sexualité, ça te dérange ? La Semaine des Arts et le Cabinet de curiosité féminine invitent les étudiantes…
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Par une nuit d’orage, dans sa cellule aux barreaux d’acier, une femme danse à s’en faire saigner les pieds. Inspiré par Kawabata, un film muet de 1926 est projeté à Lyon, dans le cadre d’un ciné-concert inédit : images au stroboscope et nappes de son hypnotiques.
Le film s’intitule Une page folle (狂った一頁, Kurutta Ippēji). «Considéré comme le ‘Chien Andalou japonais', Une Page Folle est un film qui revient de loin. D’abord parce qu’il a longtemps été considéré comme perdu, avant que son réalisateur n’en retrouve au début des années 70 une copie qu’il avait préalablement enterrée sous sa cabane de jardin au moment de la seconde guerre mondiale. Son scénario est l’oeuvre du Shinkankaku-ha (ou “école des nouvelles perceptions”), un collectif d’artistes d’avant-garde (dont faisait partie Yasunari Kawabata, jeune écrivain alors impublié), qui, sous l’influence du dadaïsme, du surréalisme et de la psychanalyse, cherchait à faire un sort au naturalisme ambiant.» En programme «off» du festival Hallucinations Collectives (27 mars - 2 avril), ce film «rare et visionnaire» sera projeté ce vendredi 16 mars, accompagné en live par le duo Berceau des Volontés sauvages, au cinéma Comoedia (Lyon).
Un film qui a passé 40 ans sous terre ?
Co-organisateur de l’événement, Fabien Thévenot, raconte : «Le film est visionnable sur Youtube (1). L’intérêt pour nous de le programmer c’est qu’il reste assez peu diffusé en salle, mais surtout, qu’il a récemment été restauré par Lobster Films en 4K : comme le film a passé 40 ans sous terre, le matériau d’origine a été considérablement dégradé, ce qui fait de cette version numérique restaurée la plus propre depuis que le film a été retrouvé.» Quarante ans sous terre ? Fabien répond : «La légende veut que le film ait été enterré par le réalisateur, Kinugasa, dans son jardin au moment de la seconde guerre mondiale et qu’il aurait été retrouvé par son auteur 40 ans plus tard. Ceci dit, Serge Blomberg de Lobster a dit lors de la présentation du film à L’Etrange Festival 2017 que c’est une légende urbaine. Et que le film n’aurait jamais vraiment disparu. Impossible d’en savoir plus.»
… Ou qui a été enterré dans du riz, au grenier ?
Une autre version circule, c’est celle écrite par le poète Michaël Moretti, sur son blog “Inculture” : «Une page folle a une histoire hallucinante, dit-il : le film a été perdu dans l’incendie des studios Shimogamo en 1950. Un tremblement de terre n’a pas arrangé l’affaire, la guerre non plus. […] En 1971, année bénie, Kinugasa trouve une copie dans un bac à riz dans son grenier.» La copie survivante est tellement abimée qu’il faut amputer le film de 500 mètres de pellicule, ce qui accentue d’autant son côté frénétique : les lacunes sont si nombreuses que l’histoire en devient elle-même folle. L’histoire ? Un batelier a tellement fait souffrir son épouse, l’abandonnant avec sa fille, qu’elle a sombré dans la démence. Plein de remords, il se fait embaucher dans l’asile où elle est soignée. Puis voilà qu’un jour, sa fille, devenue une superbe jeune femme, vient faire une visite…
Mélodrame ou film expérimental ?
«Nous savons qu’un tiers ou un quart du film a été perdu», raconte Fabien Thévenot. Par ailleurs, le film était à l’époque narré par un benshi, un acteur chargé de faire les voix, le bruitage et de raconter l’histoire. «Sans les explications du benshi et avec la bobine manquante, cela rend le film parfois un peu dur à comprendre. Ce qui me laisse à penser que le film tel que diffusé dans les années 20 devait sembler sensiblement moins expérimental aux spectateurs.» Dans les années 20, en l’occurence, le film fait un flop. Il a coûté 20 000 yens alors que le budget moyen des films à l’époque tourne autour de 12 000 yens. Il est d’ailleurs tourné aux frais du réalisateur lui-même : pour son plus grand malheur, Kinugasa investit ses économies dans le tournage. Hélas. Trop avant-gardiste, Une page folle ne parvient pas à séduire les foules.
Le film-phare des années… folles
Presque un siècle plus tard, on le regarde d’un oeil troublé. D’abord parce qu’il s’agit d’une rareté sur le plan du montage : glissant de la psychose à la réalité, le film fait perdre les repères. Les scènes sont-elles réelles ou imaginées ? Les critiques comparent ce film aux oeuvres d’Abel Gance ou Murnau. Ensuite parce qu’il s’agit d’une oeuvre à multiples mains, impliquant des noms fameux : Kinugasa – réalisateur d’une version peu connue des Sept samouraïs en 1937 et de Porte de l’Enfer (Grand prix du Festival de Cannes, 1954) – collabore avec de grands acteurs (Masao Inoue –qui tient le rôle principal, sans se faire payer– est une des plus célèbres stars de l’époque), mais surtout une flopée d’écrivains (Yokomitsu, Kawabata Yasunari, Kataoka Teppei, Kishida Kunio, Iketani Shinzaburo) qui tous participent à ce qu’ils considèrent comme un véritable défi : réaliser le premier film impressionniste de l’histoire du cinéma japonais, un film dans lequel la lumière (et les impressions qu’elle provoque sur la rétine) constitue le personnage central.
Les acteurs peignent le décor
Curieusement, ce film impressionniste, censé accorder tant d’importance à la lumière, n’est tourné qu’avec… huit systèmes d’éclairage seulement. C’était le 35e film de Kinugasa. Il fut tourné en un mois, dans des conditions difficiles, au studio Shochiku Shimogamo à Kyôto. «Toute l’équipe, acteurs compris, aidèrent à la peinture des décors, poussèrent les chariots et fabriquaient les accessoires. Kinugasa avait seulement huit petites lumières pour travailler ; il a peint les murs avec son argent et a acheté des éclairages supplémentaires. Comme il ne pouvait payer l’hébergement, l’équipe dormait sur place !» Afin que ce film reçoive les honneurs qu’il mérite, deux musiciens – Joost Van der Weerd et Alban Jamin – l’accompagneront ce 16 mars au fil d’improvisations construites sur des enregistrements de voix (2) mélangées à du drone, des plages saturées produites par d’anciens instruments de musique électronique et du theremin. Ce ciné-concert est leur premier véritable travail présenté en public. Ils préparent deux disques pour 2019.
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A VOIR : ciné-concert Une page folle, de Teinosuke Kinugasa, 1926, 69 mn. Film muet accompagné en live par le duo Berceau des Volontés Sauvages (Neo-kraut & Drones - Lyon). Rendez-vous le vendredi 16 mars à 21h15 au cinéma Comoedia : 13 avenue Berthelot, 69007 Lyon. Informations et réservations ici.
FESTIVAL : Hallucinations Collectives (27 mars - 2 avril)
A LIRE : la traduction d’Une page folle se trouve dans les Œuvres complètes de Kawabata, plus précisément dans Romans et nouvelles de Yasunari Kawabata, coll. La Pochothèque, éd. Le Livre de Poche, 1623 p., 26,30 €.
NOTES
(1) «La version sur Youtube fait quelques minutes de plus, mais il s’agit d’une histoire de vitesse de défilement des images plus que de scènes supplémentaires d’une version à une autre.» (Fabien Thévenot)
(2) La voix est celle d’une japonaise qui lit des extraits du scénario signé par Kawabata.
POUR EN SAVOIR PLUS :
Concernant le score (la partition écrite pour un film muet), Fabien Thévenot explique : «Je ne crois pas que le film ait été diffusé à l’époque avec un score défini, il existe à droite à gauche plusieurs versions, celle que Lobster a restauré possède une piste son très contemporaine composée par The Alloy Orchestra (2016).»
François Henry ajoute : «Flicker Alley vend un Blu Ray on demand du film réalisé à partir d’une copie 16mm, sans doute pas la version restaurée en 4K récemment par Lobster. Mais à cette occasion, on trouve sur leur site un texte d’Aaron Gerow sur le film libre d’accès.
Aaron Gerow a d’ailleurs écrit un livre sur le film, paru en 2009, A Page of Madness: Cinema and Modernity in 1920s Japan, apparemment encore disponible à la vente.
Le professeur Jerry Carlson anime une discussion sur Une page de folie avec le psychanalyste Harvey Roy Greenberg et l’historien du cinéma Joseph Anderson ici :
Enfin, un travail sur Bungei Jidai (hasard ou non, ça date de la même période que le bouquin de Gerow)»
Remerciements à Michaël Moretti, Joost van der Werd, Fabien Thévenot et François Henry.
Quand on pense érotisme, on pense d’abord ouvrage de littérature, dessins ou encore support vidéo, mais cette année la tendance pourrait bien être à l’audio érotique ! Rendez-vous au Salon du Livre 2018 pour en apprendre plus à ce sujet et venir échanger lors d’une Table Ronde qui se tiendra le 16 mars de 15h30 à 16h45 au stand F14.
Organisée par Audible, le service de ventes de livres audio d’Amazon, cette Table Ronde sera l’occasion d’échanger autour de la puissance érotique de l’audio, de son effet sur le désir, l’excitation, les fantasmes… Qu’est-ce que cela change à notre rapport à l’imagination et au corps d’écouter de l’érotisme ?… Lire la suite
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