Comment se passe un plan à trois ? Y a-t-il des règles à suivre pour pratiquer le BDSM ? Le collectif berlinois Sex School répond aux questions relatives aux sexualités dans une websérie aux allures de porno éducatif où des travailleurs·euses du sexe jouent le rôle de professeur d’une matière encore inconnue.
L’épisode pilote, de près d’une demi-heure, évoque le mythique plan à trois, éminent fantasme pour un grand nombre d’entre nous. Au fil d’un échange de près de dix minutes, le quatuor de professeurs qui compose l’équipe pédagogique de la Sex School, discute la pratique et en décortique les étapes.
Chaque participant au débat apporte sa vision de la chose et différents sujets sont abordés : les limites, les risques, le respect ou l’hygiène – même si « ce n’est pas la chose la plus érotique » admet Parker Marx, performer et enseignant au sein du collectif.
De la théorie à la pratique
L’acteur est justement prétendu pour jouer dans la scène du plan à trois. Car, et on nous l’a trop souvent répété à l’école, après la théorie, vient la pratique. C’est maintenant l’heure de l’exercice. Parker, accompagné de Lina et Sadie vont se retrouver dans un lit pour un moment intime. Le cours est lancé, la démonstration peut commencer.
Durant une demi-heure de plaisir riche en orgasmes, ce tutoriel explicite – qu’on qualifiera de porno – est assorti d’informations qui apparaissent sur l’écran. Elles sont destinées à guider le spectateur venu à la conquête de conseils pratiques : “soyez attentif”, “soyez créatif”, “faites une pause”, etc. Le clap de fin est donné sur des embrassades où le trio savoure l’extase d’une partie de jambes en l’air qui, en plus de se vouloir éducative, a semblé agréable pour chacun.
Cours de cul
« Beaucoup de personnes sont curieuses de savoir » comment fonctionne un plan à trois admet Poppy Sanchez, réalisatrice de la web-série avec Max Kutschenreuter, assistant réalisateur. Le programme éducatif de la Sex School permet de s’informer sur les pratiques BDSM, l’éjaculation, le porno et même l’art d’embrasser. À chaque sujet son cours particulier. Et à la Sex School, « on commence par les bases », ajoute Poppy.
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Consent isn’t just about sex. It’s also about physical and emotional boundaries. Consent is far more than a ‘no, means no’. • Find out more about the very first thing we should all have learned about sex, since our early years. A non-explicit episode delivered by @sadie_lune directed by @poppy__sanchez and made with plenty of love and enthusiasm from the usual Sex School team . • Our main account @sexschoolhub is still not back. Please help us report it and spread the word that in the meantime we’ll be posting from @xo__hub . • Check our beta website from the link in Bio! • Photo: @natalia.zajacikova #consent #sexeducation #sadielune #poppysanchez #letstalkaboutsex
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Le concept est né en 2017. Anarella Martinez Madrid, fondatrice de la Sex School, et Poppy sont alors colocataires. Ensemble, elles discutent des ‘dates’ qu’elles vivent et de leurs différentes relations. Rien de plus banal entre colocs. Au fil des échanges, elles font le constat que, même adulte, un manque cruel d’éducation sexuelle existe. Pour Poppy, cela va de « la logistique : comment s’y prendre pendant le sexe » à « l’éducation sociale : comment aborder quelqu’un, parler de consentement, embrasser ». L’idée de créer un porno éducatif où des travailleurs du sexe deviendront acteurs-professeurs émerge. La Sex School est née, avec un objectif : offrir des cours d’éducation sexuelle. Les tutoriels disponibles en ligne promettent « l’expérience complète du sexe telle qu’elle se passe dans la vie réelle ».
Les prof titulaires de la Sex School
Une expérience voulue ‘réelle’ qui passe donc par le porno. Même si – et Max en convient – « le porno, c’est surtout un fantasme. Il ne représente pas le sexe de la vraie vie, qui est le plus souvent soit maladroit, tantôt rapide ou affectueux. » La Sex School réinvente donc, pour aborder le sexe de manière éducative, le porno. Un plan à trois sur PornHub se termine rarement par une séance de bisous. Le porno, c’est donc « un médium intelligent à utiliser, un format familier, pas ennuyeux et divertissant », confesse Poppy. Et la preuve en est qu’on peut aussi l’utiliser pour éduquer. Pour Max, le manque d’éducation sexuelle provient du fait qu’il y a une aversion, voire un malaise, à aborder le sujet de la sexualité dans une conversation. « À la Sex School, nous n’avons pas peur d’avoir ces conversation considérées comme gênantes », souligne Max.
Bishop et Lina (Photo : Natália Zajačiková)
De travailleur du sexe à professeurs
Un sexe décortiqué que le collectif compte explorer avec le soutien des internautes. En effet, la Sex School se veut collaborative et prévient les visiteurs de son site internet : « Si vous pensez qu’il y a quelque chose d’important que nous devrions couvrir, dites-le-nous et nous allons le tourner. »
Durant le tournage justement, la Sex School peut compter sur un quatuor de porn stars – Lina Bembe, Bishop Black, Parker Marx et Sadie Lune – connus entre autres pour leurs collaborations dans des productions d’Erika Lust. « Les éducateurs de la Sex School sont invités à participer à l’écriture du projet. Avec le scénariste, ils vont diriger le contenu à écrire », explique Max.
SADIELUNE_1920x1080
MEET Sadie Lune!Artist, Sex Worker, parent and one of the most beloved figures in Berlin’s sex-positive community, Sadie has worked for over 20 years with topics such as intimacy, gender, sexuality, sex work, queer love, BDSM, fertility, radical parenting, polyamory and so on. Sadie is often invited to facilitate workshops, public speaking and coaching sessions about sexuality, BDSM and Sex Workers rights, where her powerful presence stems from a place of compassion, humor and inclusion. #Proudsexschoolteam
Publiée par Sex School sur Lundi 27 mai 2019
La Sex School compte aussi sur des professeurs « invités », sortes d’éducateurs vacataires, experts d’un sujet en particulier. L’équipe du collectif Berlinois se compose aussi de plusieurs coachs en sexe et d’une artiste maquilleuse. Au total, ils sont une vingtaine à allier leurs expertises et connaissances pour porter ensemble ce projet.
Due to endless censorship drama, our website is currently down. We’re working nonstop to be back online in the coming days. Please bear with us! We’re not going anywhere! #letstalkaboutsex #sexschool #sexeducation #sesta #fosta
Photo: Natália Zajačik pic.twitter.com/6rFVcQc4Io
— Sex School (@SexSchoolHub) September 25, 2019
Si pour l’instant le concept est novateur et prometteur, tout n’est pas tout rose dans les classes de la Sex School. En raison de la censure permanente imposée par les géants de la Silicon Valley qui contrôlent les réseaux sociaux, le compte Instagram du projet s’est déjà retrouvé bloqué à plusieurs reprises – dernièrement en août et début septembre. C’est ensuite le site internet qui a subi le même sort. Un outil pourtant indispensable au bon développement de ce projet ambitieux. Allez ! Il est l’heure de retourner sur les bancs de l’école.
Pratique
L’inscription à la newsletter donne accès à la vidéo pilote du projet (présentée ci-dessus). La première saison est disponible sur le site web du projet pour 54,99 €. La deuxième saison, prévue pour 2020, est quant à elle en préparation.