Alors que la quinzaine de la visibilité intersexe a débuté à Lyon le 26 octobre, il faut noter un arrêt fondamental pour le droit des personnes intersexes, rendu la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) le 19 mai dernier.
Dans cette affaire, dirigée contre la France (M. contre France), Mö se plaint que la justice française ait refusé de faire aboutir sa plainte pour « violences ayant entraînées une mutilation ou une infirmité permanente sur mineur de 15 ans ou personne vulnérable » , dénonçant ainsi son assignation forcée au sexe féminin, subie dès son plus jeune âge, avec des opérations chirurgicales lourdes alors même que Mö n’avait aucun problème de santé.
La CEDH a jugé la plainte irrecevable, indiquant que Mö n’avait pas épuisé toutes les voies de recours nationales (une condition obligatoire pour se tourner vers la CEDH). La Cour aurait pu s’arrêter là, mais ce n’est pas le cas. Elle prend l’initiative de préciser que l’absence d’intention de nuire des médecins n’exclut pas que des violences aient été commises: ‘“un acte de nature médicale, réalisé sans nécessité thérapeutique et sans le consentement éclairé de la personne qui en est l’objet, est susceptible de constituer un mauvais traitement” . Ainsi la Cour pose pour la première fois que les mutilations médicales d’enfants intersexes contreviennent à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme disposant que “nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants”.
Bien qu’il soit extrêmement décevant que le recours ait été jugé irrecevable par la Cour, le positionnement de la CEDH est tout à fait encourageant pour l’avenir. Et ce d’autant plus que la nouvelle loi de bioéthique, et en particulier son article 30 relatif à la prise en charge des “enfants présentant une variation du développement génital”, n’interdit pas ces mutilations alors qu’elles sont dénoncées par l’ONU depuis 2016 et qu’une résolution pour les bannir a été adoptée par le Parlement européen en 2019.
La loi doit être complétée par un arrêté “fixant les règles de bonnes pratiques de prise en charge”. Espérons que le positionnement de la CEDH, qui sonne comme un avertissement, inspirera les rédacteur·rices de cet arrêté et les encouragera à dissuader le corps médical de pratiquer à l’avenir des mutilations sans aucun intérêt thérapeutique.
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